Des Choses à lire
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Je te prie de trouver entre mes mots le meilleur de mon âme.

Georges Brassens, Lettre à Toussenot

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La date/heure actuelle est Ven 19 Avr - 13:32

323 résultats trouvés pour historique

Philippe Jaenada

La serpe

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 11 Philip10
Prix Femina 2017

En octobre 1941, dans un  château proche de Périgueux, en zone libre, sont sauvagement - très sauvagement -  assassinés à coups de serpe un homme, sa sœur et leur bonne. Tous les soupçons se tournent bien vite vers Henri, le fils et unique héritier, tout le désigne, l'enquête ne se fatigue guère. Il arrive au procès quasi déjà condamné, mais son habile avocat retourne en un rien de temps les jurés. Il est acquitté, jamais on ne saura si c’est bien lui, et si non, qui a fait le coup.
Le fameux Henri est un type pas banal, à la psychologie des plus complexes, (c'est lui qui finira par écrire le roman Le salaire de la peur, sous le pseudonyme de Georges Arnaud, dont Clouzot tirera un film à succès) qui évolue dans le monde pas banal de l'occupation allemande.
Il s'agit d'un de ces faits divers sordides, tout à la fois retenus et enterrés par l'histoire (qui cette période a d'autres chats à fouetter), un truc  à la Chabrol qui en dit long sur la vie dans nos provinces, les haines ordinaires entre maîtres et valets, les jugements péremptoires. Et aussi sur la justice, bien sûr.

Philippe Jaenada, devenu maître es faits divers après un certain  nombre d'opus auto-fictionnels, prend sa voiture de location et se rend sur place mener sa petite enquête, arpente les lieux, interroge, dépouille des archives énormes. Et certes, il ne va pas trouver la clé, mais il va décrypter les mécanismes, montrer à quel point l’instruction a été bâclée, voire pervertie, emboîtant le pas à la cabale, non pas sur un petit point par-ci par-là, mais sur toute la ligne de A à Z, en passant par chacune des 26 lettres de l'alphabet.

C'est un travail de titan, une compulsion d'archives impressionnante,  et un résultat pour le moins spectaculaire, assorti d'un effort de réflexion et d'objectivité critique. Il n'en demeure pas moins qu'un esprit un peu plus synthétique (15 pages sur l'ouverture/fermeture d'une fenêtre du château...???!!!..) aurait permis d'éviter au lecteur, ou à la lectrice, de soupirer devant l'accumulation de détails pointilleux quoique signifiants, et de se dire que quelque pages de moins.. peut-être... ça n'aurait pas été plus mal...

Au delà de cette mise à  plat du fait divers à l'origine d'un décryptage sociétal, il y a Philippe Jaenada et sa façon de faire, de s'impliquer dans le récit, de tourner autour de lui même, tantôt dans le narcissisme, tantôt dans l'autodérision, de raconter ce qu'il observe, ou imagine , ou ce qu'il se remémore (de personnel ou de plus général), de glisser une  blagounette, (que cela ait un rapport ou non avec notre choucroute sanguinolente, pourvu que cela lui  plaise), par le biais d'une passion de la digression justifiée ou non, et des parenthèses imbriquées. C'est souvent drôle, parfois tendre, mais aussi racoleur (Les cinquante premières pages, de vanne en fanfaronnades sont exaspérantes au possible). Cela nous dresse cependant un portrait plutôt sympathique de l'auteur, tout aussi emprunté dans ses basket que nous le serions dans une telle situation, pas du tout Monsieur je sais tout, émerveillé et horrifié tout à la fois de ses découvertes.

L'assemblage, mélange du fait divers et  de Jaenada dans le miroir,
ne donne pas de la Grande Littérature, encore moins un roman, contrairement à ce qui est marqué sur la page de garde, mais un drôle de (gros) truc hybride, moitié enquête sociologique à tonalité judiciaire, moitié récit narcissico-poétique, qui n'en est pas moins passionnant (le plus souvent ) et attachant quand il n'exaspère pas.

mots-clés : #biographie #documentaire #historique
par topocl
le Ven 15 Déc - 17:23
 
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Sujet: Philippe Jaenada
Réponses: 21
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Patrick Deville

Vais-je me réconcilier avec Patrick Deville?

Taba-Taba

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 11 Images52

Qu'est ce qui a fait Patrick Deville, ce petit garçon, cette "crevette", qui a vécu ses premières années derrière les murs du Lazaret de Mindin, en face de St Nazaire, cet hôpital psychiatrique où son père anime une troupe de théatre, éprouvant une étrange fascination-amitié pour un pensionnaire, "solitaire ténébreux", scandant sa solitude de l'obscure litanie taba-taba-taba/taba-taba-taba, alexandrin parfait adressé à l'adversité?

Est-ce sa famille dont il déroule un historique tout à la fois romanesque et scrupuleux, grâce aux 3 m3 des archives de cinq générations, léguées par la tante Monne, rescapées de combien de pertes et de hasards ? Journaux d'époque, correspondances, photographies, journaux intimes, répertoires, factures, courriers administratifs lui permettent, une année durant, d'organiser un grand jeu de piste à travers la France, au volant de sa Passat : il n’est pas du genre à se contenter de la paperasse, Deville, il veut retrouver les lieux, il veut voir, il veut sentir, il veut rêver. Il veut imaginer ces fantômes d'ancêtres se glissant dans les rues, pêchant dans les ruisseaux, échappant aux obus, se cachant au maquis...

Est-ce notre histoire française, ses guerres sans cesses enchaînées, ces der-des ders préparant la suivante,  dont le traumatisme se transmet au-delà des mots, trouvant son apogée dans les actes terroristes qui frappent nos territoires paysagers et intimes?

Est-ce l'histoire mondiale, de conquêtes en colonies, à la rencontre desquelles il s'envole en alternance avec son périple des campagnes et villes françaises (Wikipedia nous l'expliquant puisqu'il est directeur littéraire de la Maison des écrivains étrangers et des traducteurs de Saint-Nazaire, )?

C'est bien sûr tout cela qui l'a fait, fruit de tant de hasards qu'il aurait tout aussi bien pu ne jamais être là. C'est ce qui a fait cet esprit curieux, passionné, érudit, avide de détails inutiles qu'il rend indispensables, d'histoires et de souvenirs, de lectures et de voyages, organisés dans des digressions, des associations temporelles ou spatiales, livrés au lecteur dans un feu d’artifice  foisonnant : émotions,  noms célèbres ou inconnus,  citations, lieux, événements historiques ou intimes étroitement mêlés. Dans la luxuriance et l'emportement, rares sont les instants où l'on frôle la noyade face à ce déferlement.

Le récit emporte brillamment la gageure d'une ambition folle qui cherche à l'exhaustivité : décrire un homme, c'est décrire le monde. Et cet homme, amalgame de tant de choses, de tant de gens, de tant de lieux, de tant de siècles, cet homme lucide se veut optimiste quand le monde part en vrille: et alors, ce monde ne le fait-il pas depuis des siècles et des siècles? C'est par un charme fou, un humour malin, une fantaisie jamais épuisée, un sens du romanesque captivant, une attention à l'autre et un amour partagé que Patrick Deville donne sens à tant de sacrifices  dans les diverses boucheries des siècles passés.

Ici, la littérature,  modelant habilement réalité et fiction entremêlées (il parle de roman sans fiction), répond à nos interrogations essentielles, en quelque sorte. Arrivée éblouie au terme de ce roman universel et intime, je ne sais plus au final si la question est : qu’est ce qui a fait Patrick Deville, ou : qu'est ce qui fait le monde.


mots-clés : #autobiographie #famille #guerre #historique #terrorisme
par topocl
le Mer 6 Déc - 16:22
 
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Sujet: Patrick Deville
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Henri Vincenot

Le pape des escargots

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 11 51ipsh10

.
Sans la chaine de lecture de cette fin d'année , il est fort probable qu'il aurait accumulé des années de poussière à venir encore car il ne m'a jamais tenté .
Et au final , grâce à cet engagement j'en ressors plutôt contente .
Même si point trop n'en faut , au risque d'indigestion .
A travers un personnage haut en couleurs comme on le devine aisément avec le titre , Vincenot , avec son talent de conteur inimitable , nous balade dans les Hauts lieux de Bourgogne , dans la verte campagne , dans les cathédrales et les églises romanes , dans le parler du cru qui râpe aux encoignures , qui chante dans l'outrance d'une voix d'ivrogne-prophète-Gazette druidique syncrétique , poête troubadour , prophète en son pays , fou du roi mais pas de la reine ( misogynie atavique oblige ), hors du temps et de la raison des temps modernes , visionnaire , "entourloupeur" parce c'est plus marrant , érudit d'un mélange bizarrement digéré d'une science venue du fond des âges , de celle qui ne s'acquiert pas dans les livres mais se transmet dans un cercle fermé , mythomane une chouille ou plus  , manchot quand ça lui chante (souvent , ça protège de la pioche ) , lyrique plus qu'il n'en faut , sorcier -joueur- hâbleur -mendiant -troubadour .
Alors non ce n'est pas juste une histoire de terroir .
Non plus un conte initiatique .Ni une fable pour faire rêver rêver au coin du feu .
C'est une potée Bourguignonne , qui tient au corps , en apparence foutraque , mais puissamment enracinée dans divers savoirs , loin de notre inculture numérique , surgie de ces sources cachées que seuls les initiés peuvent interpréter .
Amateurs d'architecture et de sculpture , précipitez-vous , c'est le fil directeur de cette fable trublionne .
Et puis quand même les miracles Lève toi et marche sont au rendez-vous , qu'on en appelle à Dieu ou à Diable ou à La Vouivre , il serait dommage de passer son chemin !
J'essaierai de vous recopier des extraits , c'est décoiffant .

mots-clés : #historique #initiatique #nature #spiritualité
par églantine
le Mer 6 Déc - 13:02
 
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Sujet: Henri Vincenot
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Kaouther Adimi

Nos richesses

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Alger, 1935, Edmond Charlot ouvre à l'âge de 20 ans une librairie-bibliothèque nommée Les Vraies Richesses, en hommage à un texte de Giono. Il s'improvise éditeur, côtoie Camus et autres noms devenus célèbre. Généreux, enthousiaste, passionné, c'est une figure emblématique de l'édition et des milieux littéraires.

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 11 Charlo10

Autour de cette partie biographique, Kaouther Adimi  intercale  des faits plus généraux en rapport avec l’histoire et l'indépendance de l'Algérie,  et une troisième histoire se passant en 2017, totalement fictive, d'un jeune homme sans culture livresque qui est chargé de vider la librairie, vendue à un marchand de beignets.

L'ingrédient est riche, donc, trop riche sans doute, chaque thématique n'est qu'effleurée. L' écriture est si factuelle qu'elle peine à partager la beauté de son personnage et  l'émotion de cette histoire. Elle se contente de mettre en appétit , et à grand regret, on arrive à lire sans passion cette histoire si alléchante.
Dommage...




mots-clés : #biographie #historique
par topocl
le Sam 25 Nov - 17:31
 
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Sujet: Kaouther Adimi
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Eric Vuillard

L'ordre du jour

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J'ai été globalement déçue. J'ai un peu tourné autour de ce commentaire car je vais à l'encontre de ce qu'on lit ou entend absolument partout sur ce livre (indépendamment du Prix Goncourt), et que justement cet enthousiasme a aggravé mes réserves.

Voilà donc l’Anschluss version Vuillard, dans un récit dense et choral.

Ca démarre très bien, avec , en premier chapitre, 24 ténors de l'industrie allemande réunis par Göring et Hitler en 33 et qui casquent tous gentiment pour financer la campagne électorale d'Hitler. Belle écriture, travaillée, accompagnant le cérémonial, et on se dit que, oui, il va y avoir là éclairage singulier, on va découvrir...
Et puis Vuillard accumule une série de vignettes historiques qui composent un paysage de cet acte terrible et fondateur du conflit mondial: l'invasion de l'Autriche par Hitler, la reddition de Schuschnigg.

Seulement voilà, il n'y a vraiment pas grand chose à découvrir, historiquement parlant (si, quand même, la panne générale des panzers le jour de l’entrée en Autriche). Quand il dénonce, ouverture et fermeture du texte,  le fait que toute l'industrie allemande actuelle repose sur des entreprises qui ont soutenu le nazisme et employé ignominieusement des prisonniers des camps de concentration, il n'y a rien de bien nouveau.

Rien non plus dans le fait qu'Hitler était un type affreux, qui écrasait tout sur son passage au mépris de tout...  Il me semble que si on le redit aujourd'hui, il faut y apporter un point de vue, une étincelle personnelle qui  le rendrait fulgurant. Hors le point de vue de Vuillard est  très ironique, très supérieur vis-à-vis de ces politiques minables qui s’inclinent devant Hitler, une ironie parfois goguenarde qui laisse sous-entendre que c'était facile. Il veut donner l'impression que tout cela n'était qu'un gros nœud de ficelles qui ne demandaient qu'à être démêlé.

Il cache ce point de vue sous un récit qui s'annonce comme objectif mais où il sème des détails fictifs qui tirent au grotesque et au médiocre, des interprétations psychologiques où j'ai trouvé qu'il outrepassait ses droits; et ce d’autant plus que le livre  s'annonce comme un récit et non comme un roman. Il écrit l'histoire à la lueur de notre regard confortable du XXIème siècle, alors qu'elle s’est déroulée au XXème siècle, dans l'instantanéité (je ne cherche évidemment pas là à excuser quiconque de ces dirigeants laminés, ce n'étaient sûrement pas des anges non plus, c’est juste que je ne suis pas sûre que des anges, ou même Vuillard, auraient fait mieux).

Je passe sur la transcription du repas qui tire en longueur entre Ribbentrop et Chamberlain au cours duquel celui-ci reçoit l'avis de l'invasion allemande, où Vuillard en fait des tonnes, et qui est  entièrement pompée dans les mémoires de Churchill, Vuillard le dit lui-même. Je passe sur le chapitre à propos des uniformes nazis à Hollywood, qui aurait fait une excellente  nouvelle, mais qui dénote au sein de ce parcours, petite note d'érudition inutile.

Donc, j'ai trouvé là un livre de plus sur l'Anschluss, appuyé sur de nombreuses lectures et références (mais où est la bibliographie?), fort élégamment écrit, concis quoique assez exhaustif dans son genre, avec une façon de juger l’histoire assez banale, voire triviale, par un écrivain doué, mais qui ne craint  pas de se regarder écrire.


mots-clés : #deuxiemeguerre #historique
par topocl
le Ven 17 Nov - 18:30
 
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Sujet: Eric Vuillard
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Sylvain Pattieu

Et que celui qui a soif, vienne

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Trois navires fendent les eaux de l'Atlantique: un négrier qui livre sa "marchandise" arrachée aux côtes africaines, un galion français qui emmène une cargaison de femmes de petite vertu au bagne, un puissant navire richesses à revendre au prix fort aux antipodes. Seulement, voilà, on est aux temps où tout est aventure. Mutinerie, rébellion, attaque pirate, nos trois navires passent aux mains des pirates. Les puissants sont tués, punis ou chassés, les biens sont pillés, un nouvel équipage s'organise selon les allégeances de chacun. Une société qu'on qualifierait aujourd'hui de multiraciale, multiculturelle et multicultuelle s'organise, utopie vivante et farouche, jurant fidélité à la liberté, l'égalité, l'honneur. Le plaisir et la filouterie ne sont pas oubliés. L'amitié et l'amour en sont les fondations.
Évidemment marchands et armateurs n'ont pas dit leur dernier mot et c'est  l’occasion d'une lutte fratricide, un frère et une sœur ayant chacun choisi son camp.

Vous avez fait de la mer et la terre votre monde, votre lieu où circuler, vous l'avez parcouru. Inlassablement. Vous avez pris ce que d'autres ont volé. Vous l'avez partagé. Vous n'êtes pas restés enfermés. Vous n'êtes pas restés isolés. Vous avez levé les états de siège. Brisé les chaînes et les barrières. Mis les fouets hors d'état de nuire. Vous avez plus aimé vivre que la mort malgré le crâne sur votre drapeau. Vous n'avez pas respecté les frontières. Vous ne vous êtes pas laissé dire qui doit être d'un côté et qui de l'autre. Vous avez choisi votre place.
Vous avez propagé ce mot de
pirate. Il n'y a pas un lieu, pas un sur terre, où votre nom n'est parvenu, où votre nom n'a surgi. Dans le monde entier, pour des siècles.


C'est beau et palpitant, non comme un camion,  mais comme un galion battu  par les flots : comme un roman d'aventure qui fait chaud au cœur . On vibre, on prend fait et cause, on s'attache, on espère.

Sylvain Pattieu ne dirige pas un  master de création littéraire pour rien: il tire avec magie les ficelles complexes de cette histoire à trente têtes, sans que jamais on s'emmêle, le cœur battant pour chacun, ses combats, ses fantômes. La narration est brillante, enjouée, emportée. Le style du conteur est vraiment singulier,  faisant un sort très curieux, plein de noblesse, aux articles et à certaines virgules.


(j'ai moins aimé, comme son père,  les encarts qui parlent de l'histoire familiale de l'auteur, de la maladie de sa mère : je les ai trouvés soit trop rares et de ce fait disparates, soit inutiles dans cette histoire - inutiles pour le lecteur, je veux dire, mais certainement indispensables à l'auteur. C'est vite pardonné.).

L'histoire raconte la naissance de la mondialisation, et si l'on peut croire aujourd'hui qu’elle est devenue inéluctable, il s'avère qu'en ces temps reculés, le mal était déjà fait. Face à la puissance des nantis, l'enthousiasme des rebelles offre de beaux espoirs, mais cela ne suffit pas. On l'a compris depuis longtemps, mais cela fait de bien belles histoires.

mots-clés : #aventure #captivite #esclavage #historique
par topocl
le Jeu 9 Nov - 16:43
 
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Sujet: Sylvain Pattieu
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Kaouther Adimi

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 11 41k19q10

Nos richesses

L’histoire de ce livre est le récit de la librairie-maison d’édition “Vraies richesses” qu’Edmond Charlot à ouvert à Alger. Son combat pour promouvoir la littérature en temps de guerre. Pas de papier, pas d’encre…. Il en a connu du monde, ça a été l’aventure d’une bande de copains qui gravitaient autour de la librairie pour se faire éditer ou apporter leur soutien. Camus, Giono, Roblès, Bosco, Gide, Jules Roy, Temple, Mouloud Feraoun. Et puis, il y a la colonisation et l’insurrection en toile de fond, L’Algérie…..Bien écrit et instructif. Toute une époque!




mots-clés : #biographie #historique
par Pia
le Dim 29 Oct - 17:39
 
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Sujet: Kaouther Adimi
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George Orwell

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 11 51h01m10

Dans le ventre de la baleine et autres essais (1931-1943)

Littérature, parcours personnel, socialisme, engagement, Guerre d'Espagne, fascisme, Angleterre, patriotisme, politique tels sont les sujets abordés dans cette sélection de textes.

Rentre dedans sans se laisser aller au tape à l’œil facile, Orwell a l'air d'un homme en... révolte plutôt qu'en colère, une révolte constante qui ne doit surtout pas exclure le choix et l'engagement, y compris physique, y compris le choix du combat. Ce qui frappe dans son exercice de la critique, car c'est surtout de ça qu'il s'agit, c'est qu'il n'hésite pas plus à relever ce qui lui plait, par exemple chez un écrivain comme Dickens, qu'à nommer ce qui ne luit plait pas. De la même manière sur le versant politique il ne se présente jamais les mains vides, il a des idées et des solutions à essayer.

Avec la touche d'humour et d'ironie qui ne manque pas de faire mouche quand il le faut on tient donc une lecture diversifiée et vivifiante. Je reconnais avoir pataugé un brin dans certaines longues tirades sur l'Angleterre et le patriotisme mais c'est assez emblématique du bonhomme et complexifie sa figure d'homme de gauche contrariant pour tout le monde. Sa défiance envers les grands mouvements politiques ne s'arrête pas à la Guerre d'Espagne et on retombe plus tard sur un jeu de vocabulaire qui laisse penser que des décennies après les occasions ratées sont toujours là.

On peut apprécier qu'il apparaisse plus normal, quoique avec une pensée aussi active... que prophète et goûter ainsi un peu plus pleinement la lucidité qui guide sa démarche. La même lucidité qui motive l'urgence quand le monde s'emballe, abandonne l'Espagne et se précipite à reculons dans notre deuxième conflit mondial.

C'est fort intéressant pour qui est sensible à cet auteur et recoupe ce qu'on apprend de lui au travers de ces romans et récits.

Quelques lignes mal ordonnées (désolé ça mérite tellement mieux) avant de laisser place à des citations/extraits.

Et une pensée pour les lectures communes de Bédou et Shanidar sur la Guerre d'Espagne et les mouvements de pensée du siècle dernier !


Mots-clés : #creationartistique #deuxiemeguerre #essai #guerredespagne #historique #social
par animal
le Jeu 26 Oct - 22:24
 
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Sujet: George Orwell
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Alice Ferney

Les Bourgeois

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Henri et Mathilde Bourgeois sont nés à la fin du XIXème siècle, leurs dix enfants entre 1920 et 1940: Jules, Jean, Nicolas, André, Joseph, Louise, Jérôme , Claude, Guy et Marie. Leur descendance prolifique accompagne le XXème et le XXIème siècle.

Alice Ferney nous raconte à nouveau une famille éprise dont la tradition est le ciment. Les femmes y passent "sans transition du monde plein d'interdits des jeunes filles à celui plein d'obligations des épouses " et des mères, dans un épanouissement matrimonial pour nous ambigu. Les hommes, protecteurs,  sont voués à la force l'armée ou aux Grandes Ecoles. Une "famille nombreuse, hétérosexuelle et catholique",  "dernière floraison de la vieille société patriarcale et colonialiste", des gens "riches, privilégiés et éduqués".

C'est sans doute peu ou prou sa famille, à Alice Ferney, et si la narratrice, petite fille d'Henri et Mathilde, n'est jamais nommée, on se doute (ou on imagine?) qu'elle lui ressemble. Elle nous emmène dans cette ronde huperbolique des générations avec un réel sens du récit, une habileté narrative et un style tout à la fois sensible et puissant. On s'émerveille de n'être  jamais perdu,on sait étonnamment toujours qui est qui, on repère les personnalités et les parcours, on éprouve des sympathies et des antipathies (là où la narratrice n'offre que bienveillance), et des émotions. Des émotions, il y en a, dans cette farandole d’événements, naissances, mariages ou décès, joies et drames qui font et défont les vies des familles et de leurs membres, qui font que celles-ci se retrouvent et se reconnaissent, dans des maisons accueillantes, où les récits se perpétuent, et les photographies se conservent.

Cette famille se conçoit comme un mode de vie qui se transmet. Dans une économie de moyens, on jouit de son argent sans en faire un but, on se confie à Dieu comme seul maître, seul critère moral, ancrage puissant, définitif et singulier. On ne perd pas son temps à se lamenter et s'épancher, mais  on agit, selon des règles et une loyauté jamais remises en question. L'autorité du père semble librement consentie, comme si elle était fédératrice plutôt que tyrannique, parce que ça ne se discute pas, que la tradition est le maître mot.

La narratrice, femme mûre des années du terrorisme et de la procréation assistée, quoique fidèle à cette généalogie singulière, ne cesse de s'interroger : que voyaient-ils? que pensaient-ils?  que cachait cette réserve commandée?  rêvaient-ils, parfois? Quels espoirs, quelles vibrations, quelles rébellions étouffées?

Elle va rechercher l'émotion et l'intime derrière la carapace, les conventions, le puritanisme. Derrière l'arrogance, elle cherche l'humain avec   une sensibilité qui m' a souvent touchée. Elle évoque la vieillesse et  la mort, son approche comme son empreinte. Elle raconte  la fratrie dans  cette famille si nombreuse, cette hydre à dix têtes où s'entremêlent étrangement solitude et solidarité.

La narratrice se refuse à juger avec nos acquis, nos savoirs d'aujourd'hui, nos mentalités; elle regarde avec recul et  indulgence (coupables?) cet homme resté royaliste, antisémite , autoritaire,  cette femme oubliant ses aspirations pour intégrer la ligne de conduite familiale, ces couples sûrs de la répartition des tâches et des rôles entre les sexes. Ces Bourgeois, vaniteux mais généreux, intransigeants, redoutables, elle en fait des êtres de chairs et de sang, qui ont -ou n'ont pas - leurs doutes et leurs douleurs. Le lecteur, lui, n'ira pas jusqu'à pardonner  l'allégeance à Pétain et à l'Algérie française, mais il y trouvera une cohérence. Tout en appréciant son esprit de nuance et son besoin de comprendre, j'ai regretté la détermination d'Alice Ferney à édulcorer, qui fait tendre son propos vers l'hagiographie d'une époque et de mœurs révolus.

Le récit s'inscrit d'autant plus facilement dans l'Histoire qu'après le père, soldat de 14, quatre des fils sont des militaires, et l'un résistant : 39-40, l'Indochine et l'Algérie. L’aspect purement historique est sans doute la grande faiblesse du livre: l'auteur considére pour acquis de nombreux faits qui me sont étrangers, mais surtout elle ne réussit pas à fondre Histoire et petite histoire, elle plaque ses données historiques  tambour battant, un peu  comme s'ils étaient sortis des manuels scolaires qu'Henri, tout au long de sa carrière d'éditeur , a contribué à éditer.(J'ai souvent sauté, je l'avoue)

L'élégance des veuves portait identiquement ces thèmes  de la transmission générationnelle et de la maternité bienheureuse. Alice Ferney, dans la concision qui était une forme d'humilité brillante, y réussissait une sorte de "petit roman parfait". Vingt deux ans après elle y revient avec une ampleur et une ambition qu'autorisent son parcours et son expertise d'écrivain(e) reconnue. Le pari du roman familiale tentaculaire est tenu avec autant de brio que de délicatesse. Elle ne réussit cependant pas pleinement  l'ambition d'un roman universel du XXème siècle français.


mots-clés : #famille #historique
par topocl
le Dim 22 Oct - 10:34
 
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Sujet: Alice Ferney
Réponses: 23
Vues: 1947

Alice Zeniter

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 11 51izds10

L'art de perdre

Je découvre cette auteure avec cette sortie toute récente. J'ai souhaité lire ce livre parce que j'ai lu qu'il se construisait sur les questions de l'immigration algérienne en France lors de la guerre d'indépendance. Je vis dans l'Hérault, une grande communauté de Harkis a dû s'installer ici à l'époque, j'avais donc entendu ce terme, il y avait eu aussi à l'époque de Frêche une cabale , si certains s'en souviennent sur ces questions communautaires etc.

J'ai voulu lire ce livre pour trouver une parole avertie et j'ai eue raison de le faire, j'ai beaucoup de joie à avoir lu une analyse romancée mais avertie, qui n'ait pas de caractère "ethnographique", ce livre raconte plusieurs générations prises dans la violence géopolitique malgré elles . J'ai reconnu dans la figure de la grand mère ou du grand père beaucoup de mes propres ascendants, l'auteur sait niveler les présupposés, et explose avec brio tout caractère culturel au profit des caractères universels, et c'est de cela que j'avais soif,
le style d'écriture est assez discret, fluide, sans fioriture, Alice Zeniter sait raconter, orchestrer, aussi. J'ai beaucoup appris. Le récit est mené sans prétention, avec un ton clair, assez à l'image de l'auteure elle même, que j'ai écouté en interview depuis, elle sait passer beaucoup de choses, n 'est pas dans la concession mais privilégie l'approche subtile,
encore une fois je reste très peinée de devoir comprendre que les guerres, sans cesse, et les dominations, entourent tant de destins individuels de leur immonde cruauté.

Je dirais enfin, sur le plan purement littéraire, que Zeniter se place dans la lignée des auteurs conteurs, elle ne travaille la matière des mots, je crois, qu'avec pour exigence d'être exacte, et sincère. ça pourra décevoir des lecteurs, pour ma part j'ai aimé qu'elle puisse transmettre sa vision de toute cette complexité sans effets de style trop pompiers.Je trouve déjà énorme qu'elle nous offre des moyens de comprendre et relier des facettes de réalité si brûlantes encore de gifles.


mots-clés : #guerre #historique #immigration
par Nadine
le Ven 13 Oct - 18:39
 
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Sujet: Alice Zeniter
Réponses: 35
Vues: 2928

Mikhaïl Boulgakov

Comment ne pas me joindre aux éloges pour „Le maître et Marguerite » ? L’auteur utilise largement les moyens de la satire, si repandus dans la littérature soviétique (et russe). C’est à se demander si ce n’est pas un moyen par excellence de parler de choses qu’on ne peut pas nommer ouvertement ?! Mais je vais me concentrer à présenter un peu plus:

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La garde blanche


CONTENU :
C’est l’histoire fortement imprégnée par des traits autobiographiques de trois frères et sœurs (Alexandre, Hélène, Nikolka) en Décembre 1918. En Russie c’est la guerre civile et des restes de troupes allemandes et d’autres forces tiennent des larges parties de l’Ukraine. Kiev rassemble des gens venus de partout et de toutes les origines : des banquiers, des aristocrates, des gens douteux fuyant les forces bolchéviques.  Sous l’assaut des troupes nationalistes de Petlioura les Allemands et leurs alliés, comme le « Hetman », prennent la fuite. Jusqu’à l’arrivée de l’Armée Rouge en Février 1919 s’écouleront seulement deux mois. L’histoire « personnelle » des trois figures principales est imbriquée dans la « grande Histoire » : Hélène va être abandonné par son mari « collaborateur et faisant confiance dans les Allemands. Alexandre (sous certains égards l’Alter Ego de Boulgakov) se met à disposition en sa qualité de médecin et sera blessé. Nikolka va s’engager dans les combats tandis que Hélène attend avec crainte à la maison.

IMPRESSIONS :
Des grandes confusions et mélanges, des combats sans fins, des changements de front marquaient la situation de ces années dans le pays de la révolution d’Octobre. Et on pressent fortement que les changements en Russie n’étaient pas le résultat d’un seul jour, mais que les conflits s’allongeaient, se compliquaient pendant des longues périodes (et au-delà par d’autres formes de résistance et de combats). Et quelques fois il y en avait bien plus que deux partis en questions, ainsi en Ukraine ! Je suis reconnaissant entre autre que ce livre fait connaître un peu de cette complexité des années révolutionnaires. Cela reste presque impensable, quel chaos ce pays a traversé…

Il me semble que ce livre n’est pas de la même veine si fortement satirique que d’autres livres de Boulgakov, même si aussi ici on trouvera l’une ou l’autre situation grotesque. Au centre de ce livre si marqué par les événements historiques est quand même l’individu, la personne, ces trois frères et sœurs Tourbine (nom de la famille maternelle de Boulgakov !) et leurs amis proches.  C’est comme si pour le lecteur attentif on lit que l’individu n’est pas aboli. Au milieu de ces turbulences politiques ils continuent à chercher pour ce qu’on pourrait appeler un peu pathétiquement « le sens et la vraie vie ». Et en fait : au tout début paraît cette grande question universelle et typiquement russe à la fois : « Comment vivre ? » Cela me semble une vraie perspective de lire ce roman avec la question comment on peut bien survivre de tels temps de conflits et de désespoir. Qu’est-ce qui pourra nous sauver ? Ici c’est certainement le rôle de chacun, la contribution de chacun : ils prennent part actif à l’histoire…

mots-clés : #autobiographie #famille #historique #premiereguerre #revolution
par tom léo
le Mer 13 Sep - 21:56
 
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Sujet: Mikhaïl Boulgakov
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Umberto Eco

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 11 41meii10

Le Nom de la Rose
Le Nom de la Rose se donne de bons arguments. Une enquête tout à fait prenante, haletante, au cœur d’un moyen-âge où la connaissance, comme l’humour, ne sont plus en odeur de sainteté. Une vaste bibliothèque, renfermant les trésors livresques des temps et des lieux les plus reculés, interdite d’accès ― ce qui révèle d’autant mieux son ampleur et son mystère ― nos deux personnages, un ex-inquisiteur et son secrétaire, qui en bravent l’accès et se perdent dans des labyrinthes obscurs. Une grande richesse, des livres secrets qui communiquent entre eux, tous contenus dans le dogmatisme inquiet d’un christianisme vindicatif et austère… Le Nom de la Rose ne transcende pas non plus son écrin : le roman d’aventure, on y reconnaît tout de même un amour palpable pour la connaissance.

Umberto Eco a écrit:― J'en ai une, mais confuse encore. J'ai l'impression, en lisant cette page, d'avoir lu certains de ces mots, et des phrases presque identiques, que j'ai vues ailleurs, me reviennent à l'esprit. Il me semble même que cette feuille parle de quelque chose dont on a déjà parlé ces jours-ci... Mais je ne me souviens pas de quoi. Il faut que j'y pense. Peut-être me faudra-t-il lire d'autres livres.
― Pourquoi donc ? Pour savoir ce que dit un livre vous devez en lire d'autres ?
― Parfois, oui. Souvent les livres parlent d'autres livres. Souvent un livre inoffensif est comme une graine, qui fleurira dans un livre dangereux, ou inversement, c'est le fruit doux d'une racine amère. Ne pourrais-tu pas, en lisant Albert, savoir ce qu'aurait pu dire Thomas ? Ou en lisant Thomas, savoir ce qu'avait dit Averroès ?
― C'est vrai », dis-je plein d'admiration. Jusqu'alors j'avais pensé que chaque livre parlait des choses humaines ou divines, qui se trouvent hors des livres. Or je m'apercevais qu'il n'est pas rare que les livres parlent de livres, autrement dit qu'ils parlent entre eux. A la lumière de cette réflexion, la bibliothèque m'apparut encore plus inquiétante. Elle était donc le lieu d'un long et séculaire murmure, d'un dialogue imperceptible entre parchemin et parchemin, une chose vivante, un réceptacle de puissances qu'un esprit humain ne pouvait dominer, trésor de secrets émanés de tant d'esprit, et survivant après la mort de ceux qui les avaient produits, ou s'en étaient fait les messagers.
― Mais alors, dis-je, à quoi sert de cacher les livres, si on peut remonter des visibles à ceux qu'on occulte ?
― A l'aune des siècles, cela ne sert à rien. A l'aune des années et des jours, cela sert à quelque chose. De fait, tu vois à quel point nous sommes désorientés.
― Et donc une bibliothèque n'est pas un instrument pour répandre la vérité, mais pour en retarder l'apparition ? demandais-je pris de stupeur.
― Pas toujours et pas nécessairement. Dans le cas présent, elle l'est."


Umberto Eco a écrit:Il y avait, dans un reliquaire tout d’aigue-marine, un clou de la croix. Il y avait dans une ampoule, posée sur un lit de petites roses fanées, une partie de la couronne d’épines, et dans une autre boîte, toujours sur un tapis de fleurs fanées, un lambeau jauni de la nappe de la dernière Cène. Et puis il y avait la bourse de Saint Matthieu, en mailles d’argent, et dans un cylindre, noué par un ruban violet élimé par le temps et scellé d’or, un os du bras de Sainte Anne. Je vis, merveille des merveilles, surmonté d’une cloche de verre et placé sur un coussin rouge festonné de perles, un fragment de la mangeoire de Bethléem, et un empan de la tunique purpurine de Saint Jean l’Evangéliste, deux des chaînes qui serrèrent les chevilles de l’apôtre Pierre à Rome, le crâne de saint Adalbert, l’épée de saint Etienne, un tibia de Sainte Marguerite, un doigt de Saint Vital, une côte de Sainte Sophie, le menton de Saint Eoban, la partie supérieure de l’omoplate de saint Jean Chrysostome, une dent de saint Jean-Baptiste, la verge de Moïse, un point de dentelle déchiré et minuscule de l’habit nuptial de la Vierge Marie.



mots-clés : #historique #moyenage #polar #religion
par Dreep
le Lun 11 Sep - 15:05
 
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Sujet: Umberto Eco
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Nicolas Leskov

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 11 51be5b10

L'ange scellé


Originale : Запечатленный ангел (Russe, 1872 ; publié 1873 dans le «Русский вестник»)

CONTENU :
Marc Alexandrov est membre d'un groupe de vieux-croyants et ensemble avec ses parents adoptifs et des membres masculins ils traversent le pays à la recherche de travail (montage, construction en bois...) Du bon travail et une prière commune et régulière marquent la vie de la petite communauté. C'est à cause des agissements de prétention et d'avidité que le groupe va être agressé par un fonctionnaire entreprenant et de quelques compagnons de celui-ci. Toutes leurs icônes, si importantes pour la liturgie et la prière personnelle, vont être confisquées. Cela est vécu comme un sacrilège et provoque un désarroi profond.

Marc et Levontij seront envoyé pour trouver un peintre d'icône qui, dans les règles de l'art, pourra exécuter , faire une copie conforme de l'icône spécialement précieuse : celle d'un ange miraculeux, mais à moitié détruite. Cette copie – ainsi le projet – pourrait être avec audace échangée contre celle confisquée...

Est-ce que le projet va réussir ? Vers où ira la communauté ?

REMARQUES :
Dans le premier de seize chapitres nous est présenté dans un style classique une situation de narration : la semaine après Noël, quelque part dans les vastes étendues près de la Volga. Il règne un froid coupant,une tempête de neige fait rage, et une multitude de gens et voyageurs ont trouvé un refuge provisoire chez un paysan, remplissant sa maison partout. Dans une situation de dialogue entre les présents l'un d'eux est amené de raconter de sa rencontre « avec un ange ». Ce qui sera le cas à partir du deuxième chapitre qui continue maintenant dans une narration dans la première personne et sera seulement brièvement interrompu des fois, puis à la fin définitivement pour revenir au narrateur omniscient.

La nouvelle est encadré dans un contexte historico-religieux qui peut nous paraître loin et étrange. Après des réformes dans l'église orthodoxe dans le XVII siècle il y avait eu une séparation de groupes en désaccord, et puis un schisme (voir plus ici : http://fr.wikipedia.org/wiki/Vieux_croyants ). Des tensions, voir des inimitiés marquaient parfois la relation entre ces deux groupes. Les vieux-croyants étaient connu (jusqu'à aujourd'hui partiellement) pour une vie communautaire forte, des fois même éloignée du monde (un peu me rappelant des Amish ou des Quakers « russes »). Un groupe pieux de ces vieux-croyants se trouve ici dans le centre d'intérêt. Leskov – on le sait pas seulement par ce récit – était très impressionné par leur style de vie si conséquent.

Ici, ils vivent comme simples artisans de construction ambulants, cherchant du travail à travers l'Empire et vivant au même moment intensément une vie de prière dans une grande piété. Cela peut nous être un peu lointain, mais sous la plume de Leskov, me semble-t-il, cela gagne en crédibilité. Et on aura peut-être pas besoin de soussigner à toutes les implications rituelles, certains préjugés ou présentations... , cela est soumis aussi à des changement d'époque. Et je me pose parfois avec amusement la question ce qu'on pensera alors de nous en quelques siècles, si on nous jugeait avec ce même mépris que nous utilisons des fois envers des expressions anciennes, approximatives, et dépendantes de leur époque aussi.

Mais là où ce récit si pieux revêt un caractère fortement intéressant et actuel c'est quand notre narrateur Marc met fortement en question la recherche exagéré du miracle, la superbe, l'avidité – et ceci pas juste « chez les autres » mais dans ses propres rangs. Car c'est là les dangers qui nous guettent : chez nous mêmes et notre inconséquence. Ainsi la lecture devient enrichissant et nous interrogeant spirituellement.

Entre les lignes nous apprenons beaucoup sur la piété populaire, les traditions de la culture de l'époque (il y en a encore des échos aujourd'hui, dans la Russie actuelle). Ainsi cela devient intéressant et digne de découverte pour tout un chacun intéressé par la Russie.

Je ne vais pas (voir contenu) parler de la fin de l'histoire, juste : elle ne semble pas avoir plu ultérieurement à Leskov car elle semble avoir unilatéralement jugée comme justes les uns, comme malfaiteurs les autres.

On trouvera à la lecture des petites perles comme : « Je me suis raidi dans mon opposition et parlait le plus grand non-sens... »....

Donc : à découvrir !


mots-clés : #historique #religion #spiritualité #traditions
par tom léo
le Dim 10 Sep - 9:06
 
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Sujet: Nicolas Leskov
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Saša Stanišić

Ce qui est amusant en plus c'est que le souvenir que j'en ai colle avec ce que j'en avais trouvé, en avant la récup' :

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 11 97822510

Le Soldat et le gramophone

C'est donc l'histoire, des souvenirs romancés ? d'un double de l'auteur, Aleksandar, à l'enfance qui suit la fin du communisme et la montée des tensions dans le pays, à l'adolescence marquée par la guerre civile et un départ pour l'Allemagne. Et un retour d'un jeune adulte, allemand ? dans sa ville natale au bord de la Drina.

Le début du bouquin m'a fait un peu peur car il y a une part belle de cucul poético-enfantin très marqué. ça ne disparait jamais complètement mais se mue en une vision plus pop avec l'âge. Toujours est-il que parallèlement à ça il se passe des choses et des choses qui deviennent rapidement dramatiques... tempérées par l'humour et la douceur nostalgique du retour vers l'enfance et les ainé(e)s de la famille. Beaucoup d'allers-retours parfois redondants, quelques facilités aussi probablement mais bien emmenées par le rythme et l'inquiétude entretenue, ce qui serait un suspens historique, mais aussi par la rupture perpétuelle de ton. Un grand drame devenu pas si grave tout en restant une terrible question, et on y verra volontiers la rupture et la communion hasardeuse de l'expatrié "gâté" face aux ruines de son pays (il y a une culpabilité) et à une phase essentielle de son existence mise par la force des choses et après coup entre parenthèses.

On lui en voudrait si chaque fois qu'il est trop léger un élément ou une rencontre ne venait ancrer ce qui ne va pas dans le sourd et palpable.

Pas désagréable d'un point de vue humain et documentaire (c'est moche d'employer ce mot là), mieux construit que ça en a l'air, ce qui affirme des qualités de conteur... tout de même un peu de frustration dans la légèreté des pirouettes et de la pas toujours probable poésie.

Merci à Bédoulène pour cette proposition dans le cadre de la chaîne de lecture, ce n'est pas un livre que j'aurai lu autrement il me semble, et ce n'est pas une lecture que je regrette loin s'en faut, honnête et qui se positionne aussi comme un fragment de miroir de génération, et à plusieurs points de vue.

mots-clés : #autobiographie #contemporain #guerre #historique
par animal
le Lun 4 Sep - 20:17
 
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Sujet: Saša Stanišić
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Patrik Ourednik

Europeana. Une brève histoire du XXe siècle

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 11 Europe10

Sorte d’essai, qui retrace donc brièvement histoire du XXe siècle occidental : évènements marquants (guerres, génocides), évolution et émergence de théories spirituelles (notamment les sectes des Témoins de Jéhovah à la Scientologie), philosophiques, scientifiques, psychologiques, artistiques, politiques et sociétales (racisme et eugénisme, propagande et information, émancipation croissante des femmes, des jeunes, puis prise en compte des droits des animaux), progrès (technologique, subtilement raillé : gaz de combat, etc.), montée de la consommation et de la communication, du confort et de l’hygiène après-guerres, avec importance grandissante de l’"accouplement"…

Plus tard les historiens ont classé les régimes politiques du vingtième siècle en trois catégories totalitaires et autoritaires et démocratiques. Les régimes totalitaires étaient le communisme et le nazisme et les régimes autoritaires les dictatures fascistes et fascisantes apparues après la Première Guerre Mondiale en Italie et en Espagne et au Portugal et en Bulgarie et en Grèce et en Pologne et en Roumanie et en Hongrie et en Estonie et en Lettonie etc. Les communistes disaient que le fascisme et le nazisme était la même chose mais la plupart des historiens ne partageaient pas cet avis et disaient que le fascisme était par nature universel et susceptible de s'implanter n'importe où en s'adaptant aussitôt aux conditions culturelles et historiques données tandis que le communisme et le nazisme étaient par essence inadaptables parce que la réalité des choses y était entièrement subordonnée à l'idéologie. Et que c’était justement en quoi ils étaient totalitaires. Et qu'au contraire le fascisme était adaptable et pouvait être de droite comme de gauche et destiné aux citoyens déjà âgés comme aux jeunes gens à tendance révolutionnaire et aux uns il promettait de rétablir l'ordre et aux autres d'instaurer un monde nouveau où tout resterait jeune à jamais. Le monde éternellement jeune était un objectif partagé par les communistes mais eux n’avaient pas l’intention de rétablir l’ordre pour les citoyens déjà âgés. Et les jeunes gens se tournaient vers l’avenir et le vent échevelait les épis et le soleil se levait à l’horizon.


Factuel mais sans classer et sans ordre chronologique, sans logique apparente mais citant chiffres et dates, sans juger ni distinguer de hiérarchie, d’un ton neutre, détaché et assez distant, didactique (mais empreint de fausse naïveté ?), monocorde (pas de virgules), l’auteur mêle la rengaine des horreurs et aberrations du siècle, suscitant des associations de faits et d’idées (rapprochement de la recherche de l’harmonie commune au fascisme et Nouvel âge, commun goût de la « franche camaraderie » chez les nazis, les racistes et les créationnistes, notion de travail fondamentale pour les fascistes comme pour les communistes).

Et en 1917 les communistes inventèrent les tribunaux révolutionnaires qui jugeaient les traîtres et les éléments subversifs et qui arrivaient à ordonner jusqu’à trois cent cinquante condamnations à mort en une demi-journée ce qui aurait été impossible à un tribunal pensant à l’ancienne.

On a dit du communisme qu’il avait causé la mort de quatre-vingt-dix à cent millions de personnes mais les anciens communistes disaient que c’était sans doute exagéré ou peut-être pas mais qu’en tout état de cause on ne pouvait présenter les choses ainsi parce que les communistes pensaient bien faire.

Et chaque année disparaissaient en moyenne une langue et 35000 hectares de forêt. […] Et en 1921 un anarchiste français lança un appel aux prolétaires espérantistes pour qu’ils quittent les structures espérantistes bourgeoises et se joignent à lui et trois cent soixante-dix millions de personnes de 180 pays avaient accès à l’Internet et pouvaient communiquer avec ceux qui partageaient des intérêts semblables et entrer en contact avec l’association des mères suisses qui donnait des conseils sur la façon de communiquer avec les adolescents ou avec des citoyens qui communiquaient spirituellement avec des extraterrestres et souhaitaient partager leur expérience avec d’autres citoyens ou encore les élèves de l’école élémentaire de Winnipeg qui avaient trouvé une belette morte pendant une excursion et avaient écrit une rédaction sur la vie des belettes.

Et dans les premiers mois de la guerre on distribuait aux prisonniers des camps de concentration des cartes postales avec un texte pré-imprimé à envoyer à leurs familles : L’HÉBERGEMENT EST DE QUALITÉ. NOUS TRAVAILLONS SUR PLACE. NOUS SOMMES TRAITÉS CORRECTEMENT ET ON S'OCCUPE BIEN DE NOUS. Et quand les familles recevaient la carte postale et qu'elles se languissaient de son expéditeur elles allaient se déclarer aux autorités allemandes et demandaient à rejoindre leur parent dans tel ou tel camp. Et un prisonnier grec à Buchenwald envoya une carte à son père à Naxos et trois mois plus tard son père le rejoignait et dès la descente du train le fils se jeta sur lui et l'étrangla avant que les Allemands n'aient le temps de le fusiller.


Un humour grinçant est perceptible (notamment dans les notes marginales, parodiques repères elliptiques qui renvoient au texte en reprenant des expressions dérisoires ou significatives comme autant de temps forts).

Voici un exemple significatif de la mise en page (on passe des kibboutzim à l’universalisme via la poupée Barbie psychanalysée) :  

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 11 Europe11

Des stigmatisations allusives se devinent dans le choix pertinent d’anecdotes où percent le poignant et l’absurde, avec quelques redites (la jeune violoniste juive ayant survécu au camp car préposée à jouer la Veuve joyeuse sur les quais de débarquement, le soldat italien si discipliné qu’il écrit « Je me sens de jour en jour plus positif », les prisonniers de guerre russes libérés pour être envoyés par leur pays dans des camps « pour manque d’engagement dans l’effort de guerre et tendance à l’individualisme »).
Clichés, stéréotypes et préjugés sont également cités sans commentaire.
Tout au long du siècle il y a balancement entre d’une part âge d’or et belle époque, humanisme moribond, « la défense des traditions et le retour à la nature », de l’autre âge nouveau, nouvel ordre, progrès général (apparition de langues "universelles") et avenir radieux.
Il y a interrogation récurrente sur la mémoire, monuments aux morts, Histoire falsifiée, achevée, ou avec un trou, etc., et il semble que se trouve là le "message" de Patrik Ourednik : derniers mots de l’opuscule :

Et en 1989 un politologue américain inventa une théorie de la fin de l'histoire selon laquelle l'histoire avait pris fin [...] et alors l’histoire n’avait plus de raison d’être. Mais beaucoup de gens ne connaissaient pas cette théorie et continuaient à faire de l'histoire comme si de rien n'était.



mots-clés : #historique
par Tristram
le Mer 30 Aoû - 2:29
 
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Joseph Kessel

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 11 Felixk10

Les mains du miracle

La drôle d'histoire d'un des moments les moins drôles de l'histoire avec quelques uns des moins drôles des personnages possibles. Felix Kersten a été le médecin "personnel" de Heinrich Himmler, ministre de l'intérieur il est aussi chef des SS et de la Gestapo et dirige pour ainsi dire les camps de concentration.

Felix Kersten de son côté a un parcours atypique. Né en Estonie, devenu Finlandais après la première guerre, mettant fin à un parcours hésitant il se tourne vers le massage traditionnel avant d'aller se perfectionner à Berlin où il vit de petits boulots en parallèle de son apprentissage. Il fera ensuite la rencontre du Dr Kô qui lui a appris au Tibet et lui transmettra son savoir et sa clientèle...

La renommée venue et aidant il est sollicité par des personnalités influentes avant de tomber sur Himmler, ce qui ne l'enchante guère mais.

Et l'essentiel du livre est dans ce qui suit. Dans les terribles années de la deuxième guerre mondiale, années de déportation et de génocide le livre déroule la relation entre le malade qui souffre de terribles crampes d'estomac et son médecin qui négocie inlassablement des anomalies dans l'implacable machinerie. Une relation de confiance ambiguë qui repose sur la douleur et sur la peur et débouche sur des faits incroyables, absolument surréalistes.

J'ai été un peu frustré par le style "documentaire" (c'est ce qui est indiqué sur la couverture de toute façon) et il y a un phénomène de répétition au fur et à mesure de cette relation mais c'est dingue. La toute petitesse d'hommes aux pouvoirs effrayants et tant d'impensable qui tient à si peu de choses. Kersten a sauvé des amis, des amis d'amis avant de réussir à sauver des milliers de vie. Le tout en étant paradoxalement au cœur du secret et à distance, favorisé par les avantages accordés par son patient dévoué.

A la fois concret et schématique, déroutant, étonnant, très étonnant quand on n'a pas prêté plus qu'une oreille distante à cette petite partie de l'histoire, c'est un peu rapide, brusque mais dingue. Et très factuel, donc le voyage dans l'envers de l'histoire est perturbant.

Perturbant aussi de penser que cela représente peu d'années mais que tant de choses, de drames et de renversement ont pu s'y dérouler.

On peut aussi râler à propos de l'insistance sur l'opposition physique entre le gros docteur débonnaire et son malade chétif se rêvant athlète et quelques autres chimères de l'imaginaire nazi, sur les femmes reléguées à la toile de fond utilitaire qui consiste au mieux à tenir la maison avec attention mais l'essentiel du livre se situe malgré tout ailleurs. Dans l'inimaginable du fait anormal, du grain de sable fruit de la patience et de l'obstination, une détermination improvisée et réinventée constamment pour sauver des vies et dépasser un mensonge permanent.

En forme de lecture ce n'est pas le gros pied mais c'est tellement gros, et grand, que ça serait dommage de se priver de 300 petites pages comme ça.

(Récup').

mots-clés : #campsconcentration #deuxiemeguerre #documentaire #historique
par animal
le Sam 19 Aoû - 13:37
 
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Sujet: Joseph Kessel
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Arthur Koestler

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 11 Ezra1010

La Tour d'Ezra


Je vais découper mon commentaire : première partie Les Colons de cette commune

Leur but : le Retour à la Terre, être paysan.  Année 1937

Présentation de quelque uns des colons qui formeront le noyau de la communauté qui érigera la commune selon le concept d’« un communisme rural » c’est-à-dire une propriété commune, celle-ci appartient à tous, chaque membre de la communauté travaille pour tous, tout est mis en commun il n’y a plus de propriété individuelle. Chacun apporte son savoir, son travail pour le bien de tous.  Pas d’argent en jeu, seule une cagnotte commune pour d’éventuels achats indispensables ou imprévus.

C’est le Fonds National qui les fournit pour les besoins incompressibles (tels les pioches, pelles bois, barbelés pour la construction), c’est par son intermédiaire qu’ils pourront vendre leur production. Les tractations auprès de la Banque nationale hébraïque sont ardues mais la commune s’expandra d’années en années et accueillera  de nouveaux colons jusqu’ au nombre décidé lors de la première installation.

Le lecteur suit le travail de construction de cette commune de la Tour d’Ezra, située sur une colline pierreuse, qu’il faudra dépierrer, il n’y a pas d’eau , des marais insalubres plus bas qu’il leur faudra assécher, des rebelles arabes dont il faudra se défendre avec le peu d’armes dont il disposent. La Tour dressée promènera son regard vigilant sur les collines alentour.

C’est le journal de Joseph l’un des colons (mi juif mi anglais) qui fera  vivre cette commune et ses habitants, renseignera sur  leurs rapports (dus notamment à la promiscuité, repas ensemble, partage des chambres, maison des enfants, la mise devant l’assemblée de problème personnel (sic)…) leurs opinions , leurs peines et leur rares moments de liberté et réjouissance.

Au début de la création de la commune tout évènement est fêté (avec leurs pauvres moyens) la naissance du premier  chevreau, la première récolte…… on mesure l’importance et les avancées.

Nous ne pouvons qu’admirer le courage, la force de ces colons à concrétiser  la promesse du Retour,  à faire surgir d’une colline pierreuse, d’un environnement hostile une véritable commune, des plantations, des troupeaux……..


MAIS,

Le Mukhtar du  plus proche village arabe se réveillera donc un matin et verra sa vue offensée par cette tour dressée, ces barbelés, ces bâtiments qui n’existaient pas à son coucher.

Deuxième partie :  la politique

C’est la Déclaration de Balfour en 1917* qui jette les bases d’un futur Etat d’Israël, déclaration qui sera confortée par la conférence de Paris (1919), préalable au traité de Sèvres (1920), confirmé par la conférence de San Remo (1920).


* "Par cette lettre, le Royaume-Uni se déclare en faveur de l'établissement en Palestine d'un foyer national juif. »

Malgré cette promesse les Britanniques n’interviendront pas ou que très rarement (quand ils en tireront un avantage) contre les terroristes arabes qui exercent leurs méfaits contre les colons.

Si la Haganah par la voix de ses chefs appellera toujours à l’apaisement, aux actions et manifestations de protestations pacifiques, contre les arabes ou contre le gouvernement Britannique, une partie des colons et membres de l’ administration juive adhèrera à l’armée sioniste l’Irgoun  - comme le dit Koestler dans l’une de ses autobiographies : maintenant « ils montraient les dents » -.

Pendant ce temps, les bateaux transportant les immigrants qui s’échappaient de l’Europe, des Nazis, étaient refoulés, ceux qui arrivaient sur le sol de la Palestine clandestinement étaient arrêtés et déportés.

L’exaspération se concrétisera quand sera connue la déclaration du 17 mai 1939 du gouvernement Britannique, connue sous le nom de « Papier Blanc » règlement définitif du problème Palestinien.

Succintement :

« Le gouvernement de Sa Majesté déclare aujourd’hui sans équivoque qu’il n’est nullement dans ses intentions de transformer la Palestine en un État juif ».

L’immigration juive est limitée à 75 000 personnes sur une durée de 5 ans

Restriction ou interdiction de la vente  des terres aux Juifs

Les demandes des arabes sont donc retenues par le gouvernement Britannique, mais ils « revendiquent la fin du mandat britannique sur la Palestine » ce qu’ils n’obtiendront pas (vaguement envisagé dans un délai de 10 ans).

A noter que cette déclaration fut critiquée vivement par W. Churchill (conservateur et Mr Herbert Morrison (labour).


L’Irgoun sera très active, posant des bombes contre le gouvernement Britannique et les arabes.

Le « Papier Blanc » ne sera jamais validé par la SDN (la 2ème guerre mondiale s’annonce) mais cependant  ses termes seront exécutés.

« Un document dénué de valeur légale devenant le guide légal du gouvernement, des tribunaux, de la police ; l’arbitraire devenant la loi suprême en Terre Sainte. »

Le livre se termine donc à  la date de 1939.

Il me semble utile d' ajouter que : L' indépendance a été proclamée le 14 mai 1948, après le vote du plan de partage de la Palestine mandataire le 29 novembre 1947 par l’Organisation des Nations unies (ONU) qui mit fin au mandat britannique et qui prévoyait la création d’un État juif et d’un État arabe.


Encore une fois l’écriture de Koestler m’a convaincue, par sa compréhension de la situation géopolitique et des Etres,  sa justesse de ton,  son humour,  ses descriptions saisissantes des lieux et des villes, dont il rappelle l'histoire.

J’ai retrouvé dans les personnages certains de ses sentiments quand il a fait lui-même l’expérience dans un  petit kibboutz alors qu’il adhérait à un parti sioniste, il rejoignit  Jabotinski (sioniste nationaliste) avec qui il gardera des relations toute sa vie et à qui le livre est dédié.

Koestler décrit certains us, notamment la cérémonie de réconciliation entre deux Mukhtars , quelques pratiques des prêtres orthodoxes.

Est rappelé aussi l’attitude du gouvernement Britannique par rapport aux Tchèques (conférence de Munich 29 septembre 1938 à laquelle participé d’ailleurs Daladier), à la reconnaissance du gouvernement de Franco.

Je crois que Koestler  a  trouvé les mots qui résument la situation entre les Arabes et les Juifs, situation qui perdure :

« En Palestine, une nation a solennellement promis à une seconde le territoire d’une troisième. »

Sans prendre partie pour l'un ou l'autre des protagonistes de ce roman  il me parait utile de confronter la situation geopolitique depuis 1937 à nos  jours afin d' en mesurer le dilemne.

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 11 1937_e10

Plan Peel 1937 et Woddehead 1938

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 11 Cartes10




mots-clés : #communautejuive #historique
par Bédoulène
le Lun 7 Aoû - 8:36
 
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Sujet: Arthur Koestler
Réponses: 18
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Gérard Noiriel

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 11 Massac10


Je ne connaissais pas du tout l'auteur et son parcours, c'est le titre et le lieu qui m'ont attiré sur cette lecture. Bien m'en a pris.


Le massacre des Italiens


L’ auteur a choisi de faire l’analyse socio-politique de ce drame. Il présente le lieu où il s’est déroulé : Aigues-Mortes dans les Bouches du Rhône,  l’histoire de cette ville médiévale, construction, économie, démographie (tour à tour prospère, puis en récession, stagnante.)

Une ville isolée entourée de marais insalubres lesquels provoquent les fièvres, manque vital  d’eau, à l’époque. Donc un manque d’hygiène.

Ces marais salins sont avec les vignobles les deux économies actives de  la ville mais surtout  les prémices du capitalisme ; c’est la Compagnie des Salins du Midi qui exploite les marais, quant aux vignobles les propriétaires sont les notables de la ville.

Le travail des ouvriers dans les marais est  équivalent à celui d’un forçat : chaleur, sel qui imprègne tout, poids à manipuler, longue journée, mal nourris, mal logés, mal payés …………..

Cette photo illustre la difficulté de pousser les brouettes sur un passage étroit  qui s’élève au fur et à mesure que s’élève les pyramides de sel (c’est le levage)


Tag historique sur Des Choses à lire - Page 11 Brouet10

La CSM  trouve intérêt à mettre en concurrence les ouvriers Français et Italiens, plus rentables, un affrontement meurtrier* se déroula les 16 et 17 août 1893. L’ auteur  en dresse la chronologie. Les victimes en sont les Italiens (morts et de nombreux blessés). Massacre auquel ont participé les ouvriers , les trimards (vagabonds, sans emploi, nomades : les plus démunis) et une partie de la population Aigues-Mortaise.

L’auteur a fait des recherches sur le parcours des personnages représentant l’autorité (le Maire, le Préfet, le Procureur, les gendarmes, l’armée… )et la CSM, tous niant leur responsabilité.

Pour expliquer cette féroce attaque l’auteur analyse l’affaire Aigues-Mortes, à travers  la situation de la France et de l’Italie pays  tous deux touchés par la Dépression.

- Social (l’ affaire des Fourmies  en France par exemple)

- Politique  dans les deux pays également  (En France la thèse nationaliste  exacerbée par les lois de l’immigration  (Barrès, Drumont…..), la thèse libérale…)

- La justice (dont l’indépendance n’est pas avérée dans cette affaire ; pression des groupes nationalistes, le jury de la cour d'assises d'Angoulême où a eu lieu le procès acquittera tous les accusés malgré des preuves accablantes. Ce qui constitue un scandale judiciaire)

- Les relations diplomatiques (résultant  de l’ affaire de Tunis, la guerre de 1870 etc….)

Cependant « L'intérêt national » a incité les gouvernements français et italiens à « enterrer l'affaire ». C'est pourquoi, malgré son importance, cet événement a été ensuite occulté de la mémoire collective.

- L' importance de la Presse (nationale et locale) et son impact sur la population

Remarque :  Les discours les plus nationalistes étaient tenus par les radicaux qui défendaient en même temps les « droits de l'homme » ! (grand écart !)

Rappel et incidence de l’affaire Dreyfus.

Viennent ensuite l’analyse par les experts, psychologues, anthropologues, sociologues…..

La mémoire, l’ oubli,  la résurgence de l’affaire de longues années après

C’est au centenaire qu’est apposée une plaque commémorative sur la place d’Aigues-Mortes.



Une lecture très intéressante qui  fait le lien entre l’immigration de l’époque (les Italiens) et celle d’ aujourd’hui  (les maghrébins), le racisme qui ne se nommait pas en 1893, non plus que le « pogrom ».
Le chapitre  sur la   presse montre bien le pouvoir des » médias », à l’époque déjà avec des extraits judicieux des éditoriaux.

La conclusion de l’auteur  aurait presque suffit à  relater l’affaire, car bien argumentée.

Personnellement j’ignorais ce massacre,  qui s’est déroulé dans ma région, à  Aigue-Mortes , je n’avais pas le sentiment que l’immigration des Italiens avait été si dure, même si bien sur j’avais une connaissance du rejet et des noms péjoratifs qui leur étaient donnés.

Les immigrés sont exploités par les patrons et servent à ces derniers à exploiter  également les ouvriers Français. (me semble que c’est encore d’actualité).

Il y a certaine lecture qui vous rappelle que c’est bien votre pays qui a adopté des lois qui ne l’honoraient pas. Il faut rester vigilent car certaines idées délatrices sont encore bien  vivantes.

*Succinct résumé du massacre

Spoiler:





PS j’ai trouvé dans cette lecture un éclairage  quant aux propos de Bernanos  sur les Républiques et la démocratie(les cimetières sous la lune)


Arensor ce livre devrait t’intéresser,  et d'autres je pense


mots-clés : #social #historique #immigration
par Bédoulène
le Sam 29 Juil - 15:41
 
Rechercher dans: Écrivains européens francophones
Sujet: Gérard Noiriel
Réponses: 7
Vues: 786

Léon Tolstoï

Bavard le garçon ! Au vu de sa bibliographie ! Et quand on voit la longueur de ses romans ... Shocked
Mais embarquer avec Léon, c'est la quantité et la qualité ! voui, voui M'sieurs dames !

Je ne m'étais pas encore penché sur ses monuments, j'avais fureté dans ses contes, et j'avais été intrigué par ses positions. C'était le dernier des grands noms russes qui manquait à mes lectures, il était donc temps, en cet été 2017, que je me plongeasse dans le roman-fleuve La guerre et la paix !

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 11 41qxsj10

Sauf que, au dire de l'auteur ce n'est pas un roman. Ni un essai, ni un poème. En bref, un OVNI révolutionnaire. Quelques 200 ans après les évènements relatés dans ce texte, paru en feuilleton (pas les feux de l'amour, quoique ...), me voilà plongé dans les confrontations Napoléon / Empire Russe. A la découverte des préoccupations de l'aristocratie moscovite et pétersbourgeoise de l'époque.

Y a un truc qui me chiffonne, je ne parviens pas à savoir si ce texte est une attaque, une dénonciation, ou un témoignage d'une époque, qui est déjà loin derrière l'auteur, au moment de sa rédaction.

Bon, je n'ai pas encore fini ma lecture, je reviendrai vous donner mes impressions finales. J'en suis rendu dans la première partie du second volume. Jusque-là, je dirais que Tolstoï est vraiment différent des autres "grands". Plus clinique, un réel métronome. Moins d'emphase et de folie que chez Dosto ou Gogol. Même une absence. Pourtant, c'est plaisant, ce n'est pas terne. Je le rapprocherais d'un Balzac, ou d'un Zola.

J'aime bien le personnage de Pierre. Parfois benêt, grand naïf. Croyant sauver le monde en entrant chez les Francs-maçons ... Tag historique sur Des Choses à lire - Page 11 1390083676 Il a un petit côté Martin Eden, ce garçon !
Puis la Natacha, ce devait être quelque chose (sont tous en pâmoison …).


mots-clés : {#}historique{/#}
par Invité
le Mar 25 Juil - 18:04
 
Rechercher dans: Écrivains Russes
Sujet: Léon Tolstoï
Réponses: 34
Vues: 3810

Joseph Roth

Malgré un titre mal-traduit et mettant l'accent seulement sur Zweig (probablement plus connu en France), je veux recommander ce livre, même si apparemment certines éditions, une traduction soit très fautives?

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 11 514xpa10

Volker Weidermann - Ostende 1936 - Un été avec Stefan Zweig  


En fait, il s'agit d'un été à Ostende en 36 que des fuyants le régime nazi passent ensemble. Dans ce contexte on parle de leurs histoires, surtout de Zweig et justement Joseph Roth, ainsi que d'Irmgard Keun (la campagne de Roth!). Simplement admirable (dans la version allemande que j'ai lue):


Présentation de l'éditeur a écrit:Ostende, la station balnéaire huppée belge, le soleil, la mer, l'ambiance des cafés d'avant-guerre : pour les deux amis qui s'y retrouvent en cet été 1936, cela ressemble à de banales vacances où l'essentiel est de prendre du bon temps. Sauf que ces deux amis, ce sont Stefan Zweig, le richissime écrivain de bonne famille, et Joseph Roth, l'alcoolique miséreux mais génial, désormais indésirables dans une Allemagne nazie où leurs livres sont interdits. Les écrivains qui les rejoignent, dont Arthur Koestler, sont, comme eux, traqués, bannis, à mesure que la situation politique en Europe empire. Ostende 1936 est un « roman vrai » dans lequel Volker Weidermann raconte l'histoire envoutante d'un été pas comme les autres, à la veille des atrocités de la Seconde Guerre mondiale. Un été au cours duquel Zweig, Roth et bien d'autres se sont réunis pour célébrer la vie comme on ne le fait que par désespoir. Une fête d'adieu à la culture européenne.



mots-clés : #historique
par tom léo
le Dim 23 Juil - 8:54
 
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Sujet: Joseph Roth
Réponses: 31
Vues: 4005

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