Poésie
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Re: Poésie
«Nos yeux s'ouvrent»
Nos yeux s'ouvrent aujourd'hui
sur ce qui est nécessaire à l'éclair
pour traverser la nuit
nous nous sommes trop longtemps attardés
à l'éclair même
l'arbre qui dort rêve à ses racines
la mémoire chante sur la plage noircie.
1968
Roland Giguère, Forêt vierge folle
Jack-Hubert Bukowski- Messages : 2490
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Re: Poésie
Ne pouvait que me plaire, JHB !
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« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
Tristram- Messages : 15597
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Re: Poésie
L’amant le plus précieux
Que cette terre doit porter
Avance aux côtés d’un furieux
Qui tient la vie pour un décret
Et martèle la noblesse des âmes au maillet.
Apprenons à nous supporter
Et souvenons-nous que nous sommes taillés
Dans une étoffe unique,
Faisons de notre sac d’embrouilles
Une pelote de primevères pour faire la nique
Au soleil et à la lune.
John Cowper Powys
Que cette terre doit porter
Avance aux côtés d’un furieux
Qui tient la vie pour un décret
Et martèle la noblesse des âmes au maillet.
Apprenons à nous supporter
Et souvenons-nous que nous sommes taillés
Dans une étoffe unique,
Faisons de notre sac d’embrouilles
Une pelote de primevères pour faire la nique
Au soleil et à la lune.
John Cowper Powys
bix_229- Messages : 15439
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Re: Poésie
_ Le Liseur
Son regard était tendu
comme un fil au-dessus du vide
comme un fil au-dessus du vide
ses yeux avançaient sur les pages
comme les pas du funambule
comme les pas du funambule
les phrases étaient autant de fils
qu’il aurait traversés
qu’il aurait traversés
les mots pesaient sur la phrase
comme la barre sur les bras du funambule
comme la barre sur les bras du funambule
le silence qu’il faisait en lisant
allait crever.
allait crever.
On aurait dit
que cet homme qui lisait
venait d’apprendre à lire.
que cet homme qui lisait
venait d’apprendre à lire.
Lisbonne, avril 2003
Yvon Le Men
bix_229- Messages : 15439
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Re: Poésie
À l’extrême fin quand la flamme s’éteindra en fumant
dans le parfum de cire et de lavande sèche
quand la frange de lumière du jour sera effacée
et que le carré du ciel dans la fenêtre ouverte
sera à peine plus clair que la chambre vide
il faudra savoir sortir de la pièce sans parler
sans poser même une question sur l’heure et le message
avec moins de paroles encore que la nuit de printemps
Juste le bourdonnement soyeux d’une phalène inquiète
un buisson froissé par une bête en chasse
l’appel lointain d’une chevêche dans les chênes
très haut le caquetis d’un vol de migrateurs
et le silence noir piqueté de bruits infimes
Claude Roy, Les rencontres des jours 1992-1993, Gallimard, 1995, p. 172.
In Poezibao, Almanach perpétuel.
bix_229- Messages : 15439
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Re: Poésie
Dernier madrigal
Quand je mourrai, ce soir peut-être,
Je n’ai pas de jour préféré,
Si je voulais, je suis le maître,
Mais... ce serait mal me connaître,
N’importe, enfin, quand je mourrai.
Mes chers amis, qu’on me promette
De laisser le bois... au lapin,
Et, s’il vous plaît, qu’on ne me mette
Pas, comme une simple allumette,
Dans une boîte de sapin ;
Ni, comme un hareng, dans sa tonne ;
Ne me couchez pas tout du long,
Pour le coup de fusil qui tonne,
Dans la bière qu’on capitonne
Sous sa couverture de plomb.
Car, je ne veux rien, je vous jure ;
Pas de cercueil ; quant au tombeau,
J’y ferais mauvaise figure,
Je suis peu fait pour la sculpture,
Je le refuse, fût-il beau.
Mon vœu jusque-là ne se hausse ;
Ça me laisserait des remords,
Je vous dis (ma voix n’est pas fausse) :
Je ne veux pas même la fosse,
Où sont les lions et les morts.
Je ne suis ni puissant ni riche,
Je ne suis rien, que le toutou,
Que le toutou de ma Niniche ;
Je ne suis que le vieux caniche
De tous les gens de n’importe où.
Je ne veux pas que l’on m’enferre
Ni qu’on m’enmarbre, non, je veux
Tout simplement que l’on m’enterre,
En faisant un trou... dans ma Mère,
C’est le plus ardent de mes vœux.
Moi, l’enterrement qui m’enlève,
C’est un enterrement d’un sou,
Je trouve ça chic ! Oui, mon rêve,
C’est de pourrir, comme une fève ;
Et maintenant, je vais dire où.
Eh ! pardieu ! c’est au cimetière
Près d’un ruisseau (prononcez l’Ar),
Du beau village de Pourrière
De qui j’implore une prière,
Oui, c’est bien à Pourrières, Var.
Croisez-moi les mains sous la tête,
Qu’on laisse mon œil gauche ouvert ;
Alors ma paix sera complète,
Vraiment je me fais une fête
D’être enfoui comme un pois vert.
Creusez-moi mon trou dans la terre,
Sous la bière, au fond du caveau,
Où tout à côté de son père,
Dort déjà ma petite mère,
Madame Augustine Nouveau.
Puis... comblez-moi de terre... fine,
Sur moi, replacez le cercueil ;
Que comme avant dorme Augustine !
Nous dormirons bien, j’imagine,
Fût-ce en ne dormant... que d’un œil.
Et... retournez-la sur le ventre,
Car, il ne faut oublier rien,
Pour qu’en son regard le mien entre,
Nous serons deux tigres dans l’antre
Mais deux tigres qui s’aiment bien.
Je serai donc avec les Femmes
Qui m’ont fait et qui m’ont reçu,
Bonnes et respectables Dames,
Dont l’une sans cœur et sans flammes
Pour le fruit qu’elles ont conçu.
Ah ! comme je vais bien m’étendre,
Avec ma mère sur mon nez.
Comme je vais pouvoir lui rendre
Les baisers qu’en mon âge tendre
Elle ne m’a jamais donnés.
Paix au caveau ! Murez la porte !
Je ressuscite, au dernier jour.
Entre mes bras je prends la Morte,
Je m’élève d’une aile forte,
Nous montons au ciel dans l’Amour.
Un point... important... qui m’importe,
Pour vous ça doit vous être égal,
Je ne veux pas que l’on m’emporte
Dans des habits d’aucune sorte,
Fût-ce un habit de carnaval.
Pas de suaire en toile bise...
Tiens ! c’est presque un vers de Gautier ;
Pas de linceul, pas de chemise ;
Puisqu’il faut que je vous le dise,
Nu, tout nu, mais nu tout entier.
Comme sans fourreau la rapière,
Comme sans gant du tout la main,
Nu comme un ver sous ma paupière,
Et qu’on ne grave sur leur pierre,
Qu’un nom, un mot, un seul, Germain.
Fou de corps, fou d’esprit, fou d’âme,
De cœur, si l’on veut de cerveau,
J’ai fait mon testament, Madame ;
Qu’il reste entre vos mains de femme,
Dûment signé : Germain Nouveau.
Je n’ai pas de jour préféré,
Si je voulais, je suis le maître,
Mais... ce serait mal me connaître,
N’importe, enfin, quand je mourrai.
Mes chers amis, qu’on me promette
De laisser le bois... au lapin,
Et, s’il vous plaît, qu’on ne me mette
Pas, comme une simple allumette,
Dans une boîte de sapin ;
Ni, comme un hareng, dans sa tonne ;
Ne me couchez pas tout du long,
Pour le coup de fusil qui tonne,
Dans la bière qu’on capitonne
Sous sa couverture de plomb.
Car, je ne veux rien, je vous jure ;
Pas de cercueil ; quant au tombeau,
J’y ferais mauvaise figure,
Je suis peu fait pour la sculpture,
Je le refuse, fût-il beau.
Mon vœu jusque-là ne se hausse ;
Ça me laisserait des remords,
Je vous dis (ma voix n’est pas fausse) :
Je ne veux pas même la fosse,
Où sont les lions et les morts.
Je ne suis ni puissant ni riche,
Je ne suis rien, que le toutou,
Que le toutou de ma Niniche ;
Je ne suis que le vieux caniche
De tous les gens de n’importe où.
Je ne veux pas que l’on m’enferre
Ni qu’on m’enmarbre, non, je veux
Tout simplement que l’on m’enterre,
En faisant un trou... dans ma Mère,
C’est le plus ardent de mes vœux.
Moi, l’enterrement qui m’enlève,
C’est un enterrement d’un sou,
Je trouve ça chic ! Oui, mon rêve,
C’est de pourrir, comme une fève ;
Et maintenant, je vais dire où.
Eh ! pardieu ! c’est au cimetière
Près d’un ruisseau (prononcez l’Ar),
Du beau village de Pourrière
De qui j’implore une prière,
Oui, c’est bien à Pourrières, Var.
Croisez-moi les mains sous la tête,
Qu’on laisse mon œil gauche ouvert ;
Alors ma paix sera complète,
Vraiment je me fais une fête
D’être enfoui comme un pois vert.
Creusez-moi mon trou dans la terre,
Sous la bière, au fond du caveau,
Où tout à côté de son père,
Dort déjà ma petite mère,
Madame Augustine Nouveau.
Puis... comblez-moi de terre... fine,
Sur moi, replacez le cercueil ;
Que comme avant dorme Augustine !
Nous dormirons bien, j’imagine,
Fût-ce en ne dormant... que d’un œil.
Et... retournez-la sur le ventre,
Car, il ne faut oublier rien,
Pour qu’en son regard le mien entre,
Nous serons deux tigres dans l’antre
Mais deux tigres qui s’aiment bien.
Je serai donc avec les Femmes
Qui m’ont fait et qui m’ont reçu,
Bonnes et respectables Dames,
Dont l’une sans cœur et sans flammes
Pour le fruit qu’elles ont conçu.
Ah ! comme je vais bien m’étendre,
Avec ma mère sur mon nez.
Comme je vais pouvoir lui rendre
Les baisers qu’en mon âge tendre
Elle ne m’a jamais donnés.
Paix au caveau ! Murez la porte !
Je ressuscite, au dernier jour.
Entre mes bras je prends la Morte,
Je m’élève d’une aile forte,
Nous montons au ciel dans l’Amour.
Un point... important... qui m’importe,
Pour vous ça doit vous être égal,
Je ne veux pas que l’on m’emporte
Dans des habits d’aucune sorte,
Fût-ce un habit de carnaval.
Pas de suaire en toile bise...
Tiens ! c’est presque un vers de Gautier ;
Pas de linceul, pas de chemise ;
Puisqu’il faut que je vous le dise,
Nu, tout nu, mais nu tout entier.
Comme sans fourreau la rapière,
Comme sans gant du tout la main,
Nu comme un ver sous ma paupière,
Et qu’on ne grave sur leur pierre,
Qu’un nom, un mot, un seul, Germain.
Fou de corps, fou d’esprit, fou d’âme,
De cœur, si l’on veut de cerveau,
J’ai fait mon testament, Madame ;
Qu’il reste entre vos mains de femme,
Dûment signé : Germain Nouveau.
Germain Nouveau : Valentines
Dernière édition par bix_229 le Mer 17 Juil - 21:54, édité 1 fois
bix_229- Messages : 15439
Date d'inscription : 06/12/2016
Localisation : Lauragais
Re: Poésie
Dans la famille Brontë, je voudrais...le frère !
Patrick Branwell Brontë a moins eu accès à la notoriété, puis à la postérité, que ses sœurs Anne, Emily et Charlotte, bien que considéré comme le plus talentueux des quatre à l'adolescence et à la prime jeunesse adulte.
Il n'est toujours pas intégralement traduit en français.
Ci-dessous Thorpe Green, écrit le 30 mars1843 (à Thorpe Green, manoir où Anne Brontë servait comme gouvernante, et où Patrick allait s'engager comme tuteur d'un petit garçon prénommé Edmund).
Un poème plutôt court (Branwell Brontë peut s'avérer versificateur-fleuve), la traduction est maison et olé-olé, elle réclame donc la totalité de votre indulgence disponible !
C'est juste magnifique de sonorités, sur un thème romantique majuscule, le jeu des sons clairs et des sons sourds, par l'entremise d'un habile placement de diphtongues sur les voyelles, très associées à des "r" et des "s" offre un rendu, une tessiture exceptionnels.
Thorpe Green
Je m'assieds, ce soir, très loin,
De tout ce que je connais,
Et nul ressouvenir de ce jour en mon âme
De bonheur enfoui.
Attentions malvenues, peurs insensées,
Surviennent autour de ma chambre;
Je recherche des soleils révolus
Mais les nuages recouvrent mes ciels.
Oui-da, Mémoire, pourquoi donc ta voix
Ramène à ma vue le passé
Et tu n'offres pas de me réjouir
En pensées et perspectives nouvelles ?
Je te remercierai, Mémoire, aux heures
Où les affres seront miens-
Pour toi, comme soleils sous l'averse d'Avril
Lorsque les saynètes de l'ombre voudront briller.
Je te remercierai à l'approche du trépas
Quand s'éteindra ma vie d'homme faible,
Parce que tu ne renouvelleras pas mon souffle
Avec le doux vocable "Souviens-toi" !
Voici un portrait qu'il fit de ses trois sœurs:
Patrick Branwell Brontë a moins eu accès à la notoriété, puis à la postérité, que ses sœurs Anne, Emily et Charlotte, bien que considéré comme le plus talentueux des quatre à l'adolescence et à la prime jeunesse adulte.
Il n'est toujours pas intégralement traduit en français.
Ci-dessous Thorpe Green, écrit le 30 mars1843 (à Thorpe Green, manoir où Anne Brontë servait comme gouvernante, et où Patrick allait s'engager comme tuteur d'un petit garçon prénommé Edmund).
Un poème plutôt court (Branwell Brontë peut s'avérer versificateur-fleuve), la traduction est maison et olé-olé, elle réclame donc la totalité de votre indulgence disponible !
C'est juste magnifique de sonorités, sur un thème romantique majuscule, le jeu des sons clairs et des sons sourds, par l'entremise d'un habile placement de diphtongues sur les voyelles, très associées à des "r" et des "s" offre un rendu, une tessiture exceptionnels.
Thorpe Green a écrit:
I sit, this evening, far away,
From all I used to know,
And nought reminds my soul to-day
Of happy long ago.
Unwelcome cares, unthought-of fears,
Around my room arise;
I seek for suns of former years
But clouds o'ercast my skies.
Yes-Memory, wherefore does thy voice
Bring old times back to view,
As thou wouldst bid me not rejoice
In thoughts and prospects new?
I'll thank thee, Memory, in the hour
When troubled thoughts are mine-
For thou, like suns in April's shower,
On shadowy scenes wilt shine.
I'll thank thee when approaching death
Would quench life's feeble ember,
For thou wouldst even renew my breath
With thy sweet word 'Remember'!
Thorpe Green
Je m'assieds, ce soir, très loin,
De tout ce que je connais,
Et nul ressouvenir de ce jour en mon âme
De bonheur enfoui.
Attentions malvenues, peurs insensées,
Surviennent autour de ma chambre;
Je recherche des soleils révolus
Mais les nuages recouvrent mes ciels.
Oui-da, Mémoire, pourquoi donc ta voix
Ramène à ma vue le passé
Et tu n'offres pas de me réjouir
En pensées et perspectives nouvelles ?
Je te remercierai, Mémoire, aux heures
Où les affres seront miens-
Pour toi, comme soleils sous l'averse d'Avril
Lorsque les saynètes de l'ombre voudront briller.
Je te remercierai à l'approche du trépas
Quand s'éteindra ma vie d'homme faible,
Parce que tu ne renouvelleras pas mon souffle
Avec le doux vocable "Souviens-toi" !
Voici un portrait qu'il fit de ses trois sœurs:
Aventin- Messages : 1984
Date d'inscription : 10/12/2016
Re: Poésie
très beau le Madrigal Bix !
Aventin merci pour la traduction maison !
Aventin merci pour la traduction maison !
_________________
“Lire et aimer le roman d'un salaud n'est pas lui donner une quelconque absolution, partager ses convictions ou devenir son complice, c'est reconnaître son talent, pas sa moralité ou son idéal.”
― Le club des incorrigibles optimistes de Jean-Michel Guenassia
[/i]
"Il n'y a pas de mauvais livres. Ce qui est mauvais c'est de les craindre." L'homme de Kiev Malamud
Bédoulène- Messages : 21081
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 79
Localisation : En Provence
Re: Poésie
Je vais vous laisser sur ces vers de circonstance :
Maurice Scève, Délie. Objet de plus haute vertu
CDXXVII
Force me fut (si force se doit dire
De se laisser à ses désirs en proie)
De m'enflamber de ce deuil mêlé d'ire,
Qu'Amour au coeur passionné octroie,
Quand je me vis (non point que je le croie,
Et si le cuide) être d'elle banni.
Est-ce qu'ailleurs elle prétend? nenni :
Mais pour errer, comme malavisé.
Aussi comment serais-je à elle uni,
Qui suis en moi outrément divisé?
Maurice Scève, Délie. Objet de plus haute vertu
Jack-Hubert Bukowski- Messages : 2490
Date d'inscription : 04/12/2016
Age : 42
Localisation : Montréal
Re: Poésie
Le soleil, ce vieux sage, dissipe
les minuscules doutes d'ombre
qu'il n'avait pas encore
jusqu'à présent résolus. Ses mains
tremblent un peu, de même
tremblent les arbres et nous-mêmes,
alors que nous sentons que toute minute
qui passe arrachera brusquement
une bande d'ombre, et maintenant
la chute de la lumière sera bien droite,
maintenant éclatera le mince tremblement
de la flûte d'Isis, et nous verrons
absolument tout, et même au-delà des
espaces de clarté plus impénétrables que le verre.
Et, puisque tout sera si évident, nous dirons :
c'est toi qui l'as voulu, oui c'est toi qui
l'as cherché, toi qui n'as dormi cette nuit
que pour seulement te réveiller
et qui ne voulais pas croire que
la vie te deviendrait plus inconnue
que le sommeil lui-même.
(poème « Milieu de matinée »)
C’est à William Cliff que l’on doit la reconnaissance timide (en France) qui entoure l’œuvre de Ferrater. Récemment publié dans la coll. « Poésie » de Gallimard, souhaitons que le poète belge sache convaincre l’éditeur parisien du moment opportun d’une réédition de Ferrater, poète de l'expérience individuelle circadienne, transgressée, transfigurée :
Elle sourit chaque fois
qu’une nouvelle chose d’elle
mérite un tien amour.
Elle sourit quand tu sors d’elle
et qu’elle se referme intacte.
Elle sourit d’une tendresse
qui ne vous suppliera pas
(toi, et ton monde avide)
que vous lui en fassiez compliment ;
et c’est à peine que tu devines
combien elle s’absorbe. Encore
il faut se reprendre. Encore
il se remet à naître, son corps.
(poème « Kore
Médiapart
Gabriel Ferrater est grand poète catalan. A découvrir ! B
bix_229- Messages : 15439
Date d'inscription : 06/12/2016
Localisation : Lauragais
Re: Poésie
Un poète que j'apprécie énormément et c'est dit comme ça pour rester sobre dans les superlatifs, Philippe Jaccottet.
- Spoiler:
- Au reste son fil devrait bientôt s'ouvrir.
Faction du muet a écrit:Les pierres se serrèrent dans le rempart et les hommes vécurent de la mousse des pierres.
La pleine nuit portait fusil et les femmes n'accouchaient plus.
L'ignominie avait l'aspect d'un verre d'eau.
Je me suis uni au courage de quelques êtres, j'ai vécu violemment, sans vieillir, mon mystère au milieu d'eux, j'ai frissonné de l'existence de tous les autres, comme une
barque incontinente au-dessus des fonds cloisonnés.
Aventin- Messages : 1984
Date d'inscription : 10/12/2016
Re: Poésie
Juste pour signaler le régal que fut l'émission La grande table d'été, sur France Culture ce jour, avec une poétesse francophone de tout premier plan, Vénus Khoury-Ghata (oui-oui je sais: encore un fil qui manque, oui):
Pas encore disponible en podcast mais ça ne saurait tarder, surtout n'hésitez pas !
Pas encore disponible en podcast mais ça ne saurait tarder, surtout n'hésitez pas !
Aventin- Messages : 1984
Date d'inscription : 10/12/2016
Re: Poésie
D'ailleurs en fait pourquoi pas déguster tout de suite un tout petit échantillon de poésie de Vénus Khoury-Ghata ?
Bras tenus vers le haut a écrit:
Bras tendus vers le haut nous ramassions tous les rebuts du ciel
Nuages troués
Étoiles pétrifiées de la taille d’un caillou
Et parfois un ange élevé au grain que la mère plumait pour la fête
Les larmes de la mère n’étaient pas dues à la honte ni à la désapprobation des voisins
la mère pleurait le plein d’une bassine pour laver nos pieds prêts à s’échapper
nous étions plus grands que la maison
les cils des filles atteignaient la cime des arbres
les garçons partageaient la volubilité du lierre et sa capacité à enjamber la haie
Maudits les murs qui ne savent pas retenir les enfants
Aventin- Messages : 1984
Date d'inscription : 10/12/2016
Re: Poésie
c'est tellement émouvant !
_________________
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"Il n'y a pas de mauvais livres. Ce qui est mauvais c'est de les craindre." L'homme de Kiev Malamud
Bédoulène- Messages : 21081
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 79
Localisation : En Provence
Re: Poésie
Redresse-toi et va parmi ceux à genoux
parmi ceux qui se détournent parmi les effondrés
tu n’as pas été préservé pour vivre
tu as très peu de temps il te faut témoigner
ose même lorsque la raison défaille ose
dans le bilan final cela seul comptera.
que ta Colère impuissante soit comme la mer
chaque fois que tu entendras les humiliés les battus…
et ne pardonne pas en vérité il ne t’appartient pas
de pardonner au nom de ceux qui furent trahis à l’aube…
garde-toi de la sécheresse du cœur aime la source matinale
l’oiseau au nom inconnu le chêne d’hiver
la lumière au mur la splendeur du ciel
ils n’ont pas besoin de ta chaude haleine
ils sont là pour te dire : il n’y a pas de consolation
veille- et quand la lumière sur les monts te donne
le signal- lève-toi et va
tant le sang fait tourner dans ta poitrine la sombre étoile
Redis les exorcismes anciens des hommes les légendes les contes
tu conquerras ainsi le bien que tu ne conquerras pas...
Va..Sois fidèle
parmi ceux qui se détournent parmi les effondrés
tu n’as pas été préservé pour vivre
tu as très peu de temps il te faut témoigner
ose même lorsque la raison défaille ose
dans le bilan final cela seul comptera.
que ta Colère impuissante soit comme la mer
chaque fois que tu entendras les humiliés les battus…
et ne pardonne pas en vérité il ne t’appartient pas
de pardonner au nom de ceux qui furent trahis à l’aube…
garde-toi de la sécheresse du cœur aime la source matinale
l’oiseau au nom inconnu le chêne d’hiver
la lumière au mur la splendeur du ciel
ils n’ont pas besoin de ta chaude haleine
ils sont là pour te dire : il n’y a pas de consolation
veille- et quand la lumière sur les monts te donne
le signal- lève-toi et va
tant le sang fait tourner dans ta poitrine la sombre étoile
Redis les exorcismes anciens des hommes les légendes les contes
tu conquerras ainsi le bien que tu ne conquerras pas...
Va..Sois fidèle
Va
(Monsieur Cogito : L’envoi, extraits, traduction Jacques Burko
Herbert Zbigniew est un grand poète polonais. Ils sont nombreux.
bix_229- Messages : 15439
Date d'inscription : 06/12/2016
Localisation : Lauragais
Re: Poésie
Corde de lumièreDeux gouttes
Les forêts brûlaient -
et eux
se nouaient les bras au cou
comme des bouquets de roses
les gens couraient aux abris -
il disait des cheveux de sa femme
qu’on pouvait s’y cacher
une couverture pour deux
ils chuchotaient des mots sans honte
litanie des amoureux
Quand tout allait très mal
ils plongeaient dans les yeux en face
avant de les serrer fort
très fort pour ne pas sentir le feu
qui déjà léchait les cils
jusqu’au bout courageux
jusqu’au bout fidèles
jusqu’au bout semblables
comme deux gouttes
arrêtées au bord du visage
et eux
se nouaient les bras au cou
comme des bouquets de roses
les gens couraient aux abris -
il disait des cheveux de sa femme
qu’on pouvait s’y cacher
une couverture pour deux
ils chuchotaient des mots sans honte
litanie des amoureux
Quand tout allait très mal
ils plongeaient dans les yeux en face
avant de les serrer fort
très fort pour ne pas sentir le feu
qui déjà léchait les cils
jusqu’au bout courageux
jusqu’au bout fidèles
jusqu’au bout semblables
comme deux gouttes
arrêtées au bord du visage
Traduction Jacques Burko
De Herbert Zbigniew encore. Sur le site Esprits nomades
bix_229- Messages : 15439
Date d'inscription : 06/12/2016
Localisation : Lauragais
Re: Poésie
Pour ceux qui comprennent l'anglais, le poète Gary Snyder, poète "beat", spiritualiste et écolo
de toujours.
Trop peu connu en France.
Avis aux éditeurs.
de toujours.
Trop peu connu en France.
Avis aux éditeurs.
bix_229- Messages : 15439
Date d'inscription : 06/12/2016
Localisation : Lauragais
Re: Poésie
Oui il était bon Snyder. J'ai lu un de ses recueils il y a quelques temps.
Il a tout de même eu 5 recueils traduits en français, ce qui est pas mal.
Peut-être que d'autres suivront un jour...
Il a tout de même eu 5 recueils traduits en français, ce qui est pas mal.
Peut-être que d'autres suivront un jour...
Invité- Invité
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