Des Choses à lire
Visiteur occasionnel, épisodique ou régulier pourquoi ne pas pousser la porte et nous rejoindre ou seulement nous laisser un mot ?

Après tout une communauté en ligne est faite de vraies personnes, avec peut-être un peu plus de liberté dans les manières. Et plus on est de fous...


Je te prie de trouver entre mes mots le meilleur de mon âme.

Georges Brassens, Lettre à Toussenot

Des Choses à lire
Visiteur occasionnel, épisodique ou régulier pourquoi ne pas pousser la porte et nous rejoindre ou seulement nous laisser un mot ?

Après tout une communauté en ligne est faite de vraies personnes, avec peut-être un peu plus de liberté dans les manières. Et plus on est de fous...


Je te prie de trouver entre mes mots le meilleur de mon âme.

Georges Brassens, Lettre à Toussenot

Le deal à ne pas rater :
Google Pixel 7 5G – Smartphone 6,3″ OLED FHD+ 8 Go + 128 Go
316 €
Voir le deal

Pierre Reverdy

Page 1 sur 2 1, 2  Suivant

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Aller en bas

Pierre Reverdy Empty Pierre Reverdy

Message par Jack-Hubert Bukowski Dim 13 Aoû 2017 - 9:36

Pierre Reverdy
(1889-1960)

Pierre Reverdy Reverd11

Pierre Reverdy est un poète qu'on apprivoise lentement. Il m'a semblé, en le lisant, qu'il faut avoir lu et atteint un degré de maturité poétique pour comprendre sa démarche. Sa poésie n'est pas si compliquée à lire, mais qu'importe. Nous le connaissons surtout pour Plupart du temps. Il a pris part au mouvement du cubisme et fut reconnu comme un des précurseurs du surréalisme. Il est d'ailleurs considéré comme un poète exemplaire par Louis Aragon. Son cheminement a connu une brusque interruption en 1926, alors qu'il a choisi de se retirer pour se consacrer à Dieu. De nombreux poètes lui ont rendu hommage à son décès survenu en 1960.

En guise d'accompagnement, je vous propose une lecture d'extraits tirés d'Esprits nomades qui expliquent sa démarche poétique :

Notre Narbonnais aux sourcils noirs, à la mèche combattante et à l'accent épais et râpeux comme le vin lourd de la Clape, est décrété trop monotone. Certes bien sûr il a écrit des centaines de poèmes, mais en fait toujours les mêmes vous dit-on, comme ce pauvre Vivaldi avec ses concertos. C'est ne rien vouloir comprendre aux mouvements imperceptibles de l'infini.

[…]

Toute en impression fugitive, sa poésie semble rester la patte en l'air, figée par ce qu'elle seule a vu, et que nous ne voyons pas encore. […] La poésie de Reverdy ne dit pas, elle chuchote.

[…]

Sa poésie est traces de passage, avertissement des feuilles qui craquent, de la nuit qui rôde. Il est totalement limpide, dangereusement limpide, aux frontières de la transparence et de la disparition. Nous ne sommes plus sur la terre ferme, mais dans l'infini volatil. Pierre Reverdy est le cristal de l'attente […].

[…]

Un souffle obscur où il est question de lui, question de nous. Tous ces manques, ces absences, ces trous de mots, sont emplis de cette vie qui nous cristallise. La poésie de Reverdy est lourde, lourde de sens, et lucide, secrètement aimantée par les rêves des pierres. Une flamme sourde. Mouvants reflets d'un monde proche et étranger à la fois.

Tiré de : Esprits Nomades

Œuvre :

Poèmes en prose, 1915, imprimerie Birault
La Lucarne ovale, 1916, imprimerie Birault
Quelques poèmes, 1916, imprimerie Birault
Le Voleur de Talan, 1917, roman, imprimerie Rullière
Les Ardoises du toit, 1918, avec deux dessins de Georges Braque, imprimerie Birault
Les Jockeys camouflés et période hors-texte, avec cinq dessins d'Henri Matisse, 1918, imprimerie F. Bernouard. Édition désavouée par le poète et par l'illustrateur. La « seule approuvée », avec l'achevé d'imprimer du 30 décembre 1918, fut tirée chez Birault.
La Guitare endormie, 1919, avec quatre dessins de Juan Gris, imprimerie Birault : Page 1
Self defence, 1919, essai critique, imprimerie Birault
Étoiles peintes, 1921, avec une eau-forte d'André Derain, Sagittaire
Cœur de chêne, avec huit gravures sur bois par Manolo, 1921, Éditions de la Galerie Simon.
Cravates de chanvre, 1922, avec trois eaux-fortes de Pablo Picasso, Éditions Nord-Sud : Page 1
Pablo Picasso et son œuvre, 1924, dans Pablo Picasso, avec vingt-six reproductions de peintures et dessins, Gallimard
Les Épaves du ciel, 1924, Gallimard
Écumes de la mer, 1925, avec un portrait de l'auteur par Picasso, Gallimard
Grande nature, 1925, Les Cahiers libres
La Peau de l'homme, 1926, roman, Gallimard
Le Gant de crin, 1927, Plon
La Balle au bond, 1928, avec un portrait de l'auteur par Amedeo Modigliani, Les Cahiers du Sud
En vrac, 1929.
Sources du vent, 1929, avec un portrait de l'auteur par Picasso, Maurice Sachs éditeur.
Flaques de verre, 1929, Gallimard : Page 1
Pierres blanches, 1930, avec un portrait de l'auteur et un frontispice de Marc Chagall, Éditions d'art Jordy
Risques et périls, 1930, recueil des contes écrits entre 1915 et 1928, Gallimard
Ferraille, 1937, Bruxelles.
Préface à Déluges, de Georges Herment, 1937, Éditions José Corti.
Plein verre, 1940, Nice.
Plupart du temps, 1945, recueil des livres Poèmes en prose, Quelques poèmes, La Lucarne ovale, Les Ardoises du toit, Les Jockeys camouflés, La Guitare endormie, Étoiles peintes, Cœur de chêne et Cravates de chanvre, Gallimard
Préface à Souspente, d'Antoine Tudal, 1945, Éditions R. J. Godet
Visages, 1946, avec quatorze lithographies d'Henri Matisse, Éditions du Chêne
Le Chant des morts, 1948, avec cent vingt-cinq lithographies de Pablo Picasso, Tériade éditeur.
Le Livre de mon bord, 1948, recueils de notes écrites entre 1930 et 1936, Mercure de France
Tombeau vivant et Dulce et decorum est pro patria mori, 1949, dans Tombeau de Jean-Sébastien Galanis, imprimé par Daragnès
Main d'œuvre, 1949, recueil des livres Grande nature, La Balle au bond, Sources du vent, Pierres blanches, Ferraille, Plein verre, Le Chant des morts, plus les inédits Cale sèche et Bois vert, Mercure de France Page 1
Une aventure méthodique, 1950, avec douze lithographies en couleurs et vingt-six en noir et blanc de Georges Braque, Mourlot
Cercle doré, 1953, chanson avec une lithographie de Georges Braque, Mourlot
Cette émotion appelée poésie, Mercure de France, no 1044, 1er août 1950
Au soleil du plafond, 1955, avec onze lithographies de Juan Gris, Tériade éditeur.: Page 1
La Liberté des mers, 1959, illustré par Georges Braque, Éditions Maeght
À René Char, 1962, poème épistolaire tiré à 4 exemplaires avec un dessin de Georges Braque, P. A. Benoît
Sable mouvant, 1966, avec dix aquatintes de Picasso, L. Broder éditeur
La revue Nord-Sud, 16 numéros du 15 mars 1917 au 15 octobre 1918, a été réimprimée en 1980 par l'éditeur Jean-Michel Place.
Anthologie, Éditions de la Différence, 1989.

màj le 12/11/2017

Mot-clé : #poésie


Dernière édition par Jack-Hubert Bukowski le Jeu 24 Aoû 2017 - 12:47, édité 2 fois
Jack-Hubert Bukowski
Jack-Hubert Bukowski

Messages : 2490
Date d'inscription : 04/12/2016
Age : 42
Localisation : Montréal

  • Revenir en haut
  • Aller en bas

Pierre Reverdy Empty Re: Pierre Reverdy

Message par Jack-Hubert Bukowski Dim 13 Aoû 2017 - 9:57

Plupart du temps :

Pierre Reverdy Pierre10

Je dois le dire d'emblée ici, j'ai lu le recueil de manière plutôt désordonnée et même à l'envers pour ainsi dire. C'est le cas pour la plupart des relectures en poésie. J'ai profité de l'occasion pour revenir sur le fil du forum défunt. Constance avait mis sa pierre à l'édifice. Pour ma part, je propose une autre lecture de Reverdy, qui colle davantage à sa prose poétique.

Débutons tout d'abord par un bloc de prose poétique :

«Plus tard»

Le temps passé dans une chambre où tout est noir reviendra plus tard. Alors j'apporterai une petite lampe et je vous éclairerai. Les gestes confus se préciseront. Je pourrai donner un sens aux mots qui n'en avaient pas, et contempler un enfant qui dort en souriant.

Est-il possible que ce soit nous-mêmes en vieillissant? Il y a quelques morceaux de ruines qui tombent. Ceux-là ne se relèveront plus. Il y a aussi quelques fenêtres qui s'éclairent. Et devant la porte un homme solide et doux qui connaît sa force et qui attend.

Il ne reconnaîtrait pas lui-même son visage.

Pierre Reverdy est un poète dont on découvre la force :

«Étoile filante»

À la pointe où se balance un mouchoir blanc
Au fond noir qui finit le monde
Devant nos yeux un petit espace

Tout ce qu'on ne voit pas
Et qui passe

Le soleil donne un peu de feu

Une étoile filante brille
Et tout tombe

Le ciel se ride
Les bras s'ouvrent

Et rien ne vient
Un cœur bat encore dans le vide

Un soupir douloureux s'achève
Dans les plis du rideau le jour se lève


Dans ce poème, il est possible de reconnaître une certaine musicalité d'âme :

«Pour le moment»

La vie est simple et gaie
Le soleil clair tinte avec un bruit doux
Le son des cloches s’est calmé
Ce matin la lumière traverse tout
Ma tête est une lampe rallumée
Et la chambre où j’habite est enfin éclairée

Un seul rayon suffit
Un seul éclat de rire
Ma joie qui secoue la maison
Retient ceux qui voudraient mourir
Par les notes de sa chanson

Je chante faux
Ah que c’est drôle
Ma bouche ouverte à tous les vents
Lance partout des notes folles
Qui sortent je ne sais comment
Pour voler vers d’autres oreilles
Entendez je ne suis pas fou
Je ris au bas de l’escalier
Devant la porte grande ouverte
Dans le soleil éparpillé
Au mur parmi la vigne verte
Et mes bras sont tendus vers vous

C’est aujourd’hui que je vous aime

Par rapport au poème introduisant le fil, je vous invite à la lecture de ce dernier poème, tel qu'il se versifie :

«Vue d’autrefois»

La cloche qui sonnait au loin
                                        Dès le réveil
Battement d'aile
                    Sur ma tête où joue le soleil
Un souvenir remue à peine
                 Mon cœur s'arrête d'écouter
            Les voix qui parlent
Depuis longtemps tout ce qui s'est passé
Est-ce le même
                 En passant qui m'a regardé

Ce sont les mêmes yeux qui tournent
                       Mais le portrait s'est effacé

Les traits de ton visage s'écartent
                       Un autre vient
Le front vieilli qu'avait caché ta main
Enfin la voix qui parle
           Un enfant qui courait ne te rappelle rien
Et celui qui s'en va là-bas
                      Tes lèvres tremblent
Dans un pays lointain et noir
                   Tu lui ressembles

Ici, il convient de rappeler l'importante dette contractée pour la retranscription informatisée de tous les poèmes. Avoir su, je me serais abstenu d'acheter Plupart du temps, même si je le dis par esprit de contradiction et avec un sens de la dérision. La poésie de Pierre Reverdy est quelque chose qui mûrit lentement à mesure que nos regards s'affinent à travers le temps.


mots-clés : #poésie
Jack-Hubert Bukowski
Jack-Hubert Bukowski

Messages : 2490
Date d'inscription : 04/12/2016
Age : 42
Localisation : Montréal

  • Revenir en haut
  • Aller en bas

Pierre Reverdy Empty Re: Pierre Reverdy

Message par Jack-Hubert Bukowski Lun 14 Aoû 2017 - 8:59

Je continue sur cette partition de Pierre Reverdy. J'ai attendu de revenir avec deux autres poèmes.

«Filet d’astres»

La seule clef du ciel entre ces rochers blancs
C'est l'aigle
Quand la lame de fer coupe la vague en deux
Ma main écrit ton nom sur la glace déserte
Un navire indécis navigue vers mes yeux
Les rayons du soleil tombent en lourdes tresses
Au bord du matin blanc
Et sur le sable fin les pistes en détresse
Tournent à tous les vents
L'ombre silencieuse est humide
Autour de l'horizon et sous les rochers noirs
Où le poisson mourant joue sa dernière carte
Le côté blanc de notre espoir
Dans l'émouvant et doux sillage de la barque
Suit le trait d'union entre les continents
Dans le grelot d'azur immense perle vide
Midi sonne au vibrant métal
Toutes les bouches plus avides se taisent au même
signal
Quand le chemin s'ouvre et s'anime
Aux reflets dansants du falot
Le chemin qui rampe et qui brille
Le chemin secret plein d'échos
d'éclairs de lanterne et d'étoiles
de formes dans la vapeur d'eau
Sur les têtes noyées sans rêve et sans mystère
Les têtes détachées des astres sans halo

Pour terminer, un poème en prose que j'ai bien apprécié dans la condition qui est la mienne :

«Les musiciens»

L'ombre et la rue dans le coin où il se passe quelque chose. Les têtes attroupées écoutent ou regardent. L'œil passe du trottoir à l'instrument qui joue, qui roule, à la voiture qui traverse la nuit. Les lames du bec de gaz tranchent la foule et séparent les mains qui se tendent, tous les regards qui pendent et les bruits au hasard. Le peuple est là et tous à la même heure, au carrefour. Les voix qui se dispersent mènent le mouvement sur la corde qui grince et meurt à tous moments. Puis le signe du ciel, le geste qui ramasse et tout disparaît dans le pan de l'habit, du mur qui se dérobe. Tout glisse et le brouillard enroule les passants, disperse les échos, cache l'homme, le groupe et l'instrument.

Je vous convie maintenant à nourrir ce fil. Pierre Reverdy est un poète très mésestimé, mais j'ai l'impression qu'avec les canons de la poésie, il est un surréaliste qui survivra mieux aux affres du temps, même s'il y a parfois un temps de pénitence historique avant de parvenir à une forme de reconnaissance littéraire. Il faut quand même dire que le surréalisme est très connu en tant que mouvement et que les œuvres des poètes des diverses influences successives du surréalisme y ont apporté chacun-e leur marque.
Jack-Hubert Bukowski
Jack-Hubert Bukowski

Messages : 2490
Date d'inscription : 04/12/2016
Age : 42
Localisation : Montréal

  • Revenir en haut
  • Aller en bas

Pierre Reverdy Empty Re: Pierre Reverdy

Message par Bédoulène Lun 14 Aoû 2017 - 13:18

je me souviens bien que Constance nous l'avait présenté.

_________________
“Lire et aimer le roman d'un salaud n'est pas lui donner une quelconque absolution, partager ses convictions ou devenir son complice, c'est reconnaître son talent, pas sa moralité ou son idéal.”
― Le club des incorrigibles optimistes de Jean-Michel Guenassia



[/i]
"Il n'y a pas de mauvais livres. Ce qui est mauvais c'est de les craindre." L'homme de Kiev Malamud
Bédoulène
Bédoulène

Messages : 21018
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 79
Localisation : En Provence

  • Revenir en haut
  • Aller en bas

Pierre Reverdy Empty Re: Pierre Reverdy

Message par Invité Lun 14 Aoû 2017 - 16:04

Merci Jack. Reverdy n'a pas encore croisé ma route de lecteur. Mais nul doute qu'il va finir par s'amener dans mes pérégrinations. Very Happy

Invité
Invité


  • Revenir en haut
  • Aller en bas

Pierre Reverdy Empty Re: Pierre Reverdy

Message par Aventin Lun 14 Aoû 2017 - 21:11

Sur le sujet Reverdy / Surréalisme, il faut bien garder en tête que Reverdy s'est vite tenu à l'écart du mouvement, et de façon définitive (il se retire à Solesmes, dans la Sarthe, à deux pas de l'abbaye dès 1926).

Je me demande même s'il convient, décemment, de l'y inclure:
Il refuse l'adoubement par Breton, l'idée d'être embrigadé dans un quelconque "mouvement" le révulse.
Il est, à mon sens, souhaitable d'appliquer aussi au surréalisme le "divorce" de la célèbre sentence de Reverdy:
 
Quand on divorce avec le monde, il faut prendre tous les torts pour soi.

Quand on dit "le monde", et qu'on est un viveur en vue du tout-Paris d'après la 1ère guerre mondiale (il arrive à Paris en 1910 en provenance de sa Montagne Noire et de Narbonne), qu'on fut un des amants de Coco Chanel, qu'on est pote avec des Georges Braque, des Fernand Léger, des Amadeo Modigliani ou des Pablo Picasso, 'etc...), ce n'est pas rien.

Surprise d'ailleurs, cherchant à poster le tableau de Modigliani représentant Reverdy...je constate qu'il orne aussi la note wikipedia de Reverdy !

Pierre Reverdy Amedeo10
Aventin
Aventin

Messages : 1984
Date d'inscription : 10/12/2016

  • Revenir en haut
  • Aller en bas

Pierre Reverdy Empty Re: Pierre Reverdy

Message par Aventin Lun 14 Aoû 2017 - 21:49

Du recueil Flaques de verre (1929) bien sûr à recommander sans réserve, ce Rocher Blanc:

LE ROCHER BLANC

La pluie — la plus grosse fleur gonflée d’orgueil, de pierreries. Goutte à goutte l’or jaune des prairies, le rouge vif des revers soulevés par le vent et le long des chemins, des bordures des champs.
On se demande où finit ce creux entre les souches d’arbres et les couches du temps. Avec patience, les cris qui traversent les branches se font entendre loin. Les appels désolés cachés dans l’air et tout ce mouvement dans les soupentes.
Le mélange et les écarts de pas sur ce terrain sec et résonnant.
Sous la pierre c’est l’ombre molle et peut-être un animal vivant. Car dans cet espace tout est comme la main et l’œil — tout se comprend.



Reverdy post-1926, c'est souvent ces petits pavés disposés (voir aussi "Les musiciens", poème posté par J-H B. un peu plus haut dans cette page), une tentative -réussie, à mon humble avis- d'introduire le cubisme en écriture (Reverdy est bien plus cubiste que surréaliste); le lyrisme aussi y concourt, en effet il point dans la scansion, plus hachée que coulante.
Reverdy puise volontiers aux quatre éléments, aux paysages; ici en l'occurence la campagne, des détails et puis, et puis...- l'envoi puis la touche - voir cette fulgurance, à peine décorée par la phrase qui précède, au reste la première phrase introductive du poème (car c'en est un):
On se demande où finit ce creux entre les souches d’arbres et les couches du temps

Pierre Reverdy venait d'une famille de sculpteurs, de tailleurs de pierre d'église. Même s'il ne l'a su que fort tard.
Le minéral (comme ce Rocher Blanc) a une présence plus particulièrement signifiante dans l'œuvre du solitaire de Solesmes.

Pierre Reverdy Utrill10
Maurice Utrillo Les rochers d'Ouessant 1912.
(NB: Toile où l'on ne voit pas de rochers, entièrement suggérés par le décrochement première ligne d'horizon -terrestre- et seconde ligne -l'horizon marin -)  
Utrillo était aussi un ami de Reverdy, de surcroît son voisin d'immeuble (étage du dessus) à Montmartre.


(Enfant adultérin, déclaré "né de père et de mère inconnus" à l'état-civil de Narbonne, Reverdy n'est reconnu par sa mère qu'à l'âge de 22 ans. Son père, découvert tard, était viticulteur dans la Montagne Noire.
La culture de la solitude de Reverdy ne vient pas du hasard. )
Aventin
Aventin

Messages : 1984
Date d'inscription : 10/12/2016

  • Revenir en haut
  • Aller en bas

Pierre Reverdy Empty Re: Pierre Reverdy

Message par Jack-Hubert Bukowski Mar 15 Aoû 2017 - 6:09

Pour te répondre, Aventin, j'étais bien au fait de la nuance fine à faire dans le cas de Reverdy. Il est bien évidemment plus cubiste que surréaliste et il est un devancier dans la génération qui précéda l'avènement du surréalisme et qui finit par embrigader les poètes dans des écoles bien précises. Je le mets sur un même plan qu'Apollinaire et Tzara dans la mesure où il a devancé Breton et compagnie. Des poètes comme Artaud et Ponge auront également à éprouver des réticences envers les étiquettes des surréalistes. Imaginez, si Jack Kerouac rejetait l'étiquette de père des Beatniks, imaginez ce que c'est d'être surréaliste quand le mouvement est traversé par une grande diversité de perspectives tout aussi contradictoires les unes que les autres...

À la genèse du fil, j'ai pris plaisir à lire la notice des Esprits nomades. Je retiens un extrait en particulier :

«Oui chez Reverdy tout est dans les replis.

Mais ils semblent tissés de rosée et d'inquiétude, alors on n'ose les dérouler. Il procède par replis, lentes énumérations, lisières des choses. Mais contrairement aux surréalistes il refuse le hasard non contrôlé des images :

« L'image est une création pure de l'esprit. Elle ne peut naître d'une comparaison mais du rapprochement de deux réalités plus ou moins éloignées.

Plus les rapports des deux réalités rapprochées seront lointains et justes, plus l'image sera forte - plus elle aura de puissance émotive et de réalité poétique ».

Et il refuse d'être un simple médium passif du monde. Lui l'ascétique, le converti au catholicisme en 1926, et très vite désillusionné, refuse le jeu. Il met toujours son existence en balance dans ses mots. Ses poèmes « ne sont qu'entre les lignes ». Il faut les deviner, passer par leur ambiguïté, leurs flaques de silence et de verre, leurs tourbillons d'ombre, leur musique d'ombre. L'univers de Reverdy est un univers mouvant, incertain. Il faut savoir s'y perdre, se chercher dans ses déchirures, ses signes énigmatiques. Il met les mots à la suite « comme un tas de pierres ». Ils continuent à tenir debout malgré tous les vents du temps.»

Lien URL : http://www.espritsnomades.com/sitelitterature/reverdy/reverdy.html

Pour toutes ces raisons évoquées, je me sens plus proche de la perspective tracée par Pierre Reverdy, notamment en ce qui concerne «le refus du hasard non contrôlé des images». Il me semble qu'il y a là une piste plus porteuse, qui «embrigade» moins la floraison diverse des mouvements surréalistes qui tirent leur origine du cubisme et de la 1ère guerre mondiale.
Jack-Hubert Bukowski
Jack-Hubert Bukowski

Messages : 2490
Date d'inscription : 04/12/2016
Age : 42
Localisation : Montréal

  • Revenir en haut
  • Aller en bas

Pierre Reverdy Empty Re: Pierre Reverdy

Message par Aventin Lun 4 Sep 2017 - 15:08

Nous sommes tout à fait d'accord, Jack-Hubert, l'emploi d'un mot, d'une prosodie (etc...) chez Reverdy n'est jamais le fait du hasard, ni non plus de l'assonance, ni de diverses combinaisons "boutiquant poème": c'est toujours une rencontre mot-émotion (ou ressenti émotif peut-être plus exactement), une façon poétique bien à part, il s'agit de cristalliser, voire de sublimer.

On le sait marqué par l'immanence et la transcendance, voilà ce que son art tente...même si quelque réminiscence de rime vient parfois sourdre en surface, comme une non insoumission totale à l'accord musical phrasé, voir par exemple la première strophe de cet étonnant "Cran d'arrêt" (recueil "Bois vert", 1946-1949), se trouve également dans le nrf/poésie "Main d'œuvre" (1913-1949):

Cran d’arrêt




Je n’espère rien du néant

Je ne garde rien de la fête

Et je n’oublie pas le présent

Auquel il faut me tenir tête



Décroche la lumière à fond

Sur cette poitrine rebelle

Plus dure que la pierre où s’épanche son sang



Je ne mens que d’un œil

Une trappe qui s’ouvre

Sur tous les espoirs interdits

Un recul plus farouche devant l’antre qui s’ouvre

Une gorge plus sourde

Au coude de la nuit

Et puis le temps et puis la lampe

Un pas qui trompe sans retour

Dans la rue plus de vie plus d’aile

Sur la route plus d’avenir

De mon cœur jusqu’au fond du monde l’étouffante épaisseur d’un mur
Aventin
Aventin

Messages : 1984
Date d'inscription : 10/12/2016

  • Revenir en haut
  • Aller en bas

Pierre Reverdy Empty Re: Pierre Reverdy

Message par Bédoulène Lun 4 Sep 2017 - 16:16

merci je suis sensible à Reverdy (Constance où es-tu ?)

_________________
“Lire et aimer le roman d'un salaud n'est pas lui donner une quelconque absolution, partager ses convictions ou devenir son complice, c'est reconnaître son talent, pas sa moralité ou son idéal.”
― Le club des incorrigibles optimistes de Jean-Michel Guenassia



[/i]
"Il n'y a pas de mauvais livres. Ce qui est mauvais c'est de les craindre." L'homme de Kiev Malamud
Bédoulène
Bédoulène

Messages : 21018
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 79
Localisation : En Provence

  • Revenir en haut
  • Aller en bas

Pierre Reverdy Empty Re: Pierre Reverdy

Message par Jack-Hubert Bukowski Lun 4 Sep 2017 - 18:40

Depuis que j'ai créé le fil, les recueils de Reverdy me manquent. Il me semble avoir entrevu que ce n'est pas un poète très «couru» et que ses recueils de poèmes ne sont pas tellement en circulation... mais je vais m'arranger pour avoir d'autres titres de lui et venir vous en parler.

Pour ce qui est de Constance, il y a des cycles dans la vie d'un forum. L'important est qu'elle ait été là à un moment...
Jack-Hubert Bukowski
Jack-Hubert Bukowski

Messages : 2490
Date d'inscription : 04/12/2016
Age : 42
Localisation : Montréal

  • Revenir en haut
  • Aller en bas

Pierre Reverdy Empty Re: Pierre Reverdy

Message par bix_229 Lun 4 Sep 2017 - 19:51

NUIT


Derrière la porte où je suis caché
Le soir tarde à venir
Je regarde le ciel par cet œil en losange
Les avions de feu sont presque tous passés
A travers les signaux d'alarme
Il y avait dans ma poche une arme
Une aile qui battait moins haut
La lune retenant ses larmes
Et des rires moqueurs dans les plis du rideau.


Au soleil du plafond. - Poésie/Gallimard
bix_229
bix_229

Messages : 15439
Date d'inscription : 06/12/2016
Localisation : Lauragais

  • Revenir en haut
  • Aller en bas

Pierre Reverdy Empty Re: Pierre Reverdy

Message par Bédoulène Mar 5 Sep 2017 - 8:44

merci Bix ! extra !

_________________
“Lire et aimer le roman d'un salaud n'est pas lui donner une quelconque absolution, partager ses convictions ou devenir son complice, c'est reconnaître son talent, pas sa moralité ou son idéal.”
― Le club des incorrigibles optimistes de Jean-Michel Guenassia



[/i]
"Il n'y a pas de mauvais livres. Ce qui est mauvais c'est de les craindre." L'homme de Kiev Malamud
Bédoulène
Bédoulène

Messages : 21018
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 79
Localisation : En Provence

  • Revenir en haut
  • Aller en bas

Pierre Reverdy Empty Re: Pierre Reverdy

Message par Jack-Hubert Bukowski Mer 6 Sep 2017 - 6:08

Très beau, Bix!
Jack-Hubert Bukowski
Jack-Hubert Bukowski

Messages : 2490
Date d'inscription : 04/12/2016
Age : 42
Localisation : Montréal

  • Revenir en haut
  • Aller en bas

Pierre Reverdy Empty Re: Pierre Reverdy

Message par Jack-Hubert Bukowski Sam 28 Oct 2017 - 7:10

En ouvrant le tome I des Œuvres complètes de Pierre Reverdy, j’ai fait cette sélection de poèmes en sachant que j’ai introduit hier le fil de Hector de Saint-Denys Garneau dont on dit qu’il a été beaucoup influencé par Pierre Reverdy.

Extrait de La guitare endormie :

«Le nouveau venu des visages»

Contre la glace éteinte les têtes se retournent
La carte de visite pivote au bout des doigts
C'est la girouette qui grince pour indiquer la route au vent des ailes
Mais le nom de l'enseigne qui y est écrit on ne le voit pas
Celui qui entre revient avec la marée montante des faubourgs
Dans la dernière maison après les terrains vagues et avant la
campagne saine et propre sans détours
Le café c'est un nuage à l'ombre plein de voix
Où le passant se glisse entre l'odeur et le froid
Contre la glace éteinte les têtes se retournent
La nuit suit son chemin
Mais quelqu'un s'en détache et entre
Toutes les têtes se retournent pour deviner le nom approximatif de
ce nouveau visage

Extrait du recueil Le cadran quadrillé :

55

Le bleu du ciel

On ne sait pas si c’est une prison ou un asile

Derrière
le paysage est décoré de verdure singulière
Des cloches tintent à la cime des arbres et leur son parcourt l’espace
derrière le train qui fuit dans un nuage lourd et bas jusqu’à la ville

Elle s’ouvre sur le rempart qu’entoure le fleuve et les patients
s’échappent.
À la même minute à un pôle opposé où règne le
calme le plus régulier s’élève un mur blanchi à la
chaux sans aucune fenêtre
C’est l’horizon
Et toutes les têtes apparaissent sur la crête et se penchent
Les yeux s’étonnent et s’ouvrent démesurément
devant l’étendue de la campagne
Et les cloches énormes sonnent
Les pendules qui règlent le temps se balancent
Les ailes tournent autour de ces mêmes rues
dressées sans s’arrêter jamais
Et le ciel s’éloigne toujours
Plus loin des têtes qui se lèvent
Plus loin des yeux qui s’agrandissent
Et qui peu à peu se confondent
Dans la même couleur

(suite au prochain message)
Jack-Hubert Bukowski
Jack-Hubert Bukowski

Messages : 2490
Date d'inscription : 04/12/2016
Age : 42
Localisation : Montréal

  • Revenir en haut
  • Aller en bas

Pierre Reverdy Empty Re: Pierre Reverdy

Message par Jack-Hubert Bukowski Sam 28 Oct 2017 - 7:13

Dans le poème qui suit, il est possible de sentir l'empreinte de Reverdy sur la plume de Saint-Denys Garneau.

Extrait de La meule de soleil :

«Les regards qui changent»

Vers quatre heures je serai là
Il passera certainement quelqu'un
Alors j'ouvrirai la porte

La porte s'ouvre comme un œil
Et je regarde à l'intérieur
J'ai trop peur pour entrer
Et je ne sais que dire

Les marches à monter
Jusqu'au palier obscur
Et là peut-être la chambre
Peut-être rien
Peut-être un mur

C'est qu'arrive le crépuscule
Je serai là et je t'attends
J'attends que passe une voiture
Qui emportera mon tourment

Et puis vers la prochaine gare
Je te suis nous irons plus loin
Enfin de la maison d'en face
On me regarde en souriant

Je reprendrai ici un poème que Constance a cité sur l’autre forum :

Verso


La pièce dans le courant d'air
Sous la flamme qui se répand
Dans la ville endormie
Près des sables mouvants
Du mur de pierres
Au bout du chemin
qui entoure la terre


C'est là
la tête penchée au dehors
les rayons de soleil près de la chevelure
le visage noyé
les larmes
Toutes les raisons de ne plus croire à rien
Les mots se sont perdus tout le long du chemin
Il n'y a plus rien à dire
Le vent est arrivé
Le monde se retire
L'autre côté.

(Extrait de Cravates de chanvre, qu’on peut lire à loisir dans le recueil Plupart du temps)
Jack-Hubert Bukowski
Jack-Hubert Bukowski

Messages : 2490
Date d'inscription : 04/12/2016
Age : 42
Localisation : Montréal

  • Revenir en haut
  • Aller en bas

Pierre Reverdy Empty Re: Pierre Reverdy

Message par bix_229 Ven 2 Fév 2018 - 22:11

Réalité du miroir - qui est réalité en tant que miroir. Voilà l' homme.
Mais si l' homme disparait, il reste la terre, les objets inanimés, les
pierres sans chemin.
Si la terre disparait, il este tout ce qui n' est pas la terre.
Et si tout ce qui n' est pas la terre disparait, il  reste ce qui ne peut pas
disparaitre - on se demande d' ailleurs pourquoi - parce qu' on ne peut
meme pas le pense et c' est en fin de compte, ça la réalité - si loin de
l' esprit et du miroir de l' homme qui ne peut meme pas le penser.


En vrac. - Ed du Rocher
bix_229
bix_229

Messages : 15439
Date d'inscription : 06/12/2016
Localisation : Lauragais

  • Revenir en haut
  • Aller en bas

Pierre Reverdy Empty Re: Pierre Reverdy

Message par Aventin Ven 13 Avr 2018 - 18:19

Son premier recueil (poèmes en prose, 1915, que l'on trouve aujourd'hui dans le tome I de la compilation Plupart du temps -Nrf Poésie/Gallimard) a une patte cubiste que s'en est bonheur.

Ici, dans ce bref (comme l'instant saisi par le poète, du reste) poème, la restitution cinétique est remarquable.
Des trouvailles, comme par exemple On ne voit pas ses mains et le guidon remplace les pédales pour signifier que le cycliste est en danseuse, et à toute allure, dans une côte raide se dégustent, ainsi que les trois judicieux "On", sourds et marquant l'étonnement comme par onomatopée, disposés en entrée des vers/propositions poétiques:




Le patineur céleste


 On a transformé le trottoir en vélodrome. Il n'y a qu'un seul coureur. Alors pourquoi court-il si vite?

 On ne voit pas ses mains et le guidon remplace les pédales. Il monte.

 On a peur de le voir tomber et qu'une lourde voiture l'écrase; mais au coin de la rue une glace absorbe son image qui tourne. Il est sauvé.






Aventin
Aventin

Messages : 1984
Date d'inscription : 10/12/2016

  • Revenir en haut
  • Aller en bas

Pierre Reverdy Empty Re: Pierre Reverdy

Message par Bédoulène Ven 13 Avr 2018 - 22:54

superbe "la glace qui absorbe son image qui tourne. Il est sauvé."

_________________
“Lire et aimer le roman d'un salaud n'est pas lui donner une quelconque absolution, partager ses convictions ou devenir son complice, c'est reconnaître son talent, pas sa moralité ou son idéal.”
― Le club des incorrigibles optimistes de Jean-Michel Guenassia



[/i]
"Il n'y a pas de mauvais livres. Ce qui est mauvais c'est de les craindre." L'homme de Kiev Malamud
Bédoulène
Bédoulène

Messages : 21018
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 79
Localisation : En Provence

  • Revenir en haut
  • Aller en bas

Pierre Reverdy Empty Re: Pierre Reverdy

Message par Aventin Ven 25 Jan 2019 - 21:49

Encore un poème de jeunesse, du recueil (courte plaquette est plus exact) Quelques poèmes (1916) - se trouve compilé dans Plupart du temps, tome I:

NB: très difficile la transcription, j'ai ferraillé un long moment et je n'y arrive toujours pas, le premier "quote" ci-dessous est un nullissime entre tous les bâclages approximatifs et échouages auxquels je me suis livré, mais le but c'est surtout de vous donner envie d'aller voir le texte imprimé, pour tout vous dire je traînais ça dans mes brouillons depuis le 6 janvier...2018 !


Carrés

Le masque honteux cachait ses dents. Un
autre œil voyait qu'elles étaient fausses.
Où cela se passe-t-il ? Et quand ? Il est seul,
il pleure, malgré l'orgueil qui le soutient, et
il devient laid. Parce qu'il a plu sur les sou-
liers, disait l'autre, de la salive sur mes
souliers, je suis devenu pâle et méchant. Et
il embrassa le masque |qui le mordit en
ricanant.

Le profil, le même profil que la
grande chanteuse ! Elle voulait
l'avoir, elle l'eut et aussi son
immense bouche sans sa voix.
Mais ce qu'elle enviait le plus
c'était sa robe et jamais elle ne
put l'avoir.


Si vous entendez derrière
vous faire Psst et qu'en
même temps passe un taxi
ne vous retournez pas...
c'est pour le taxi.



Les cheveux coupés, la                                                                                          Je passe en m'engouf-
tête tranchée, le sabre                                                                                          frant je m'engouffre en
restait encore entre ses dents.                                                                             passant. Quel gouffre !                                               
Le bourreau ama-                                                                                                  La tête qui tournait               
teur pleurait et sa figure                                                                                         autour de moi a dis-
était un masque. On                                                                                              paru. — Les Oiseaux      
l'avait importé de Chine                                                                                        chantaient derrière la
et il ne savait plus être                                                                                          fenêtre; ils chantaient
.           cruel.                                                                                                          faux et n'étaient pas en  
                                                                                                                                plumes véritables.
                                                                                 
                                                                                                               


Le rhum est excellent
la pipe est amère et les
étoiles qui tombent de vos cheveux s'envolent

dans la cheminée.



De la reliure de tes                                                                                                                      
Après les premiers pas
lèvres de la reliure de                                                                                                                  
sur les pointes il avait

tes volets de la reliure                                                                                                                 
pris son vol. Les pre-
  de nos mains. O peut-                                                                                                               
miers nuages l'arrêtent.
être plus facile. Sur le                                                                                                                 
Ce sont des glaces. Et
balcon de bois elle mon-                                                                                                           
là, où il retrouvait notre
tait la garde en chemise                                                                                                     
 monde sans la chair, il se

.         éclatante.                                                                                                                              
    crut au ciel.        .

Pour une transcription linéaire, lisible en somme, ce serait (mais c'est moins bien, ça enlève complètement le côté cubiste qui fait tout le sel de ce poème):

Le masque honteux cachait ses dents.
Un autre œil voyait qu'elles étaient fausses.
Où cela se passe-t-il ?
Et quand ?
Il est seul, il pleure, malgré l'orgueil qui le soutient, et il devient laid.
Parce qu'il a plu sur les souliers, disait l'autre, de la salive sur mes souliers, je suis devenu pâle et méchant.
Et il embrassa le masque |qui le mordit en ricanant.

Le profil, le même profil que la grande chanteuse!
Elle voulait l'avoir, elle l'eut et aussi son immense bouche sans sa voix.
Mais ce qu'elle enviait le plus c'était sa robe et jamais elle ne put l'avoir.



Si vous entendez derrière vous faire
Psst et qu'en même temps passe un taxi ne vous retournez pas... c'est pour le taxi.



Les cheveux coupés, la tête tranchée, le sabre restait encore entre ses dents.
Le bourreau amateur pleurait et sa figure était un masque.
On l'avait importé de
Chine et il ne savait plus être cruel.



Je passe en m'engouf-frant, je m'engouffre en passant.
Quel gouffre !
La tête qui tournait autour de moi a disparu. —
Les
Oiseaux chantaient derrière la fenêtre; ils chantaient faux et n'étaient pas en plumes véritables.



Le rhum est excellent la pipe est amère et les étoiles qui tombent de vos cheveux s'envolent dans la cheminée.



De la reliure de tes lèvres de la reliure de tes volets de la reliure de nos mains.
O peut-être plus facile.
Sur le balcon de bois elle montait la garde en chemise éclatante.



Après les premiers pas sur les pointes il avait pris son vol.
Les premiers nuages l'arrêtent.
Ce sont des glaces.
Et là, où il retrouvait notre monde sans la chair, il se crut au ciel.
Aventin
Aventin

Messages : 1984
Date d'inscription : 10/12/2016

  • Revenir en haut
  • Aller en bas

Pierre Reverdy Empty Re: Pierre Reverdy

Message par Contenu sponsorisé


Contenu sponsorisé


  • Revenir en haut
  • Aller en bas

Page 1 sur 2 1, 2  Suivant

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Revenir en haut

 Des Choses à lire :: Lectures par auteurs :: Écrivains européens francophones

- Sujets similaires

 
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum