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Marie Uguay

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Marie Uguay Empty Marie Uguay

Message par Jack-Hubert Bukowski Mar 15 Aoû - 8:50

Marie Uguay
(1955-1981)

Marie Uguay Marieu10

Marie Uguay (née Lalonde) a vécu toute sa vie à Montréal dans le quartier de Côte-Saint-Paul où elle est née le 22 avril 1955. Ses parents, Denise Uguay et Jacques Lalonde, tous deux issus d’un milieu modeste, y étaient établis depuis déjà une génération. L’enfance de Marie Uguay sera centrée cependant autour du noyau familial maternel, où son grand-père, César Uguay, exerce de l’ascendant sur toute la famille par la force de son caractère et sa détermination.

[…]

Au printemps 1976, son premier recueil est complètement achevé, et c’est l’esprit ouvert que Marie Uguay part pour trois mois aux Îles de la Madeleine. Elle est heureuse et épanouie, elle écrit, elle dessine, et c’est là-bas qu’elle ébauche les premiers poèmes de son deuxième recueil L’Outre-vie

[…]

Sa vie est cependant brutalement bouleversée au début de septembre 1977, alors qu’elle apprend qu’elle a un cancer virulent des os, et un combat acharné de deux mois à l’hôpital n’empêchera pas l’inconcevable : l’amputation d’une jambe. […] Lors de cette terrible épreuve, Marie Uguay trouve néanmoins la force d’écrire, et les poèmes qui résulteront seront les plus percutants de son recueil L’Outre-vie, auquel elle donne une toute nouvelle tonalité.

[…]

Avec seulement deux recueils publiés de son vivant, ainsi qu’un dernier recueil posthume, il est rare qu’une œuvre ait autant de résonance et qu’elle persiste. […] L’authenticité de sa démarche artistique, son travail rigoureux sur la langue, la recherche de l’essentiel, ont su transgresser sa réalité biographique et trouver écho auprès de nombreux lecteurs.

Tiré de Wikipedia


Liste des œuvres

Recueils en édition originale
Signe et rumeur, calligraphie et dessins de l’auteur, Éditions du Noroît, 1976
L’Outre-vie, avec six photographies de Stéphan Kovacs, Éditions du Noroît, 1979
Autoportraits, avec des photographies de Stéphan Kovacs, Éditions du Noroît, 1982 (posthume)

Recueils regroupés
Poèmes (comprenant Signe et rumeur, L’Outre-vie, Autoportraits et Poèmes inédits), Éditions du Noroît, 1986
Poèmes (comprenant Signe et rumeur, L’Outre-vie, Autoportraits et Derniers poèmes), Saint-Hippolyte, 1994
Poèmes (comprenant Signe et rumeur, L’Outre-vie, Autoportraits ainsi que Poèmes en marge et Poèmes en prose), Éditions du Boréal, 2005

Journal
Journal, texte établi, annoté et présenté par Stéphan Kovacs, Éditions du Boréal, 2005

Entretiens
Marie Uguay, la vie la poésie, entretiens avec Jean Royer, Éditions du Silence, 1982
Écrivains contemporains. Entretiens 2 : 1977-1980, par Jean Royer, Éditions de l'Hexagone, 1983
Écrivains contemporains. Entretiens 4 : 1981-1986, par Jean Royer, Éditions de l'Hexagone, 1987




Marie Uguay a été fauchée par la vie. Elle a quand même eu le temps de laisser une œuvre appréciable. Elle est l'une des poétesses emblématiques du Québec, même si sa poésie n'est pas engagée dans une ferveur patriotique. Ses images poétiques renvoient à des motifs, à des passages et des voyages de tous genres. C'est dans cette mesure que je l'apprécie en tant qu'adepte des flâneries urbaines, elle qui nous donne à voir ce qu'elle a vu dans la conscience qu'elle se savait mener une vie courte. Une bibliothèque et une maison de la culture porte son nom dans le quartier de Côte-Saint-Paul à Montréal où elle a traversé son existence.


Dernière édition par Jack-Hubert Bukowski le Mar 22 Aoû - 7:46, édité 2 fois
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Message par Jack-Hubert Bukowski Mar 15 Aoû - 9:14

Marie Uguay Marieu12

En lisant un peu mon recueil édition Boréal pour la première fois au hasard, j'ai essayé de sortir des sentiers battus pour re-découvrir une nouvelle Marie Uguay. Nous avons souvent d'elle cette image forte du Mont-Mégantic, elle qui est sensible à la nature. Nous pouvons émettre l'hypothèse selon laquelle sa situation géographique en ville l'a mise dans la conscience de la proximité de l'eau et de la montagne dans le Sud-Ouest de Montréal.

Je me suis donc attardé aux motifs qu'elle esquisse dans L'Outre-vie, notamment de la ville, de la fenêtre et d'une chaise :

La grande ville métamorphose s'élance
dans le blanc roide de l’hiver
ou de ses gratte-ciel aux vitres magiciennes
(Derrière une fenêtre le dos détendu
d’une chaise de paille
évoque le tressage heureux
d’un quelconque voyage au soleil)

Sur le noir le bouleau est un signe amoureux
une rivière divisible et l’attente
sa blancheur semble fendre une nuit lucide

De tous ces jours et de toutes ces nuits malades
je n’ai gardé que le harcèlement de mon amour
que cette destruction monotone du ciel
que ce lent étouffement de mes sens
Je ne reconnais plus mon corps
je suis entrée dans un univers maladroit
habité uniquement par la trépidation des rues

p. 48

Sa conscience urbaine est bien ancrée dans la mesure où le Sud-Ouest contient sa part de béton, ce qui lui donne un côté urbain irréductible. Elle précise néanmoins sur le motif de la chaise :

Une chaise est postée comme un guetteur
comme une grille de jardin
comme un tambour
comme un cœur matinal sur le linoléum
Une chaise pliante pour un souvenir
un tableau de vacances
l’été tu as pris un verre d’orange
qui reposait dans sa couleur
et tu l’as bu
La chaise a dérivé comme une île
comme un bouchon sur le fleuve
happée
comme un morceau de bois grugé par l’eau

p. 95

Marie Uguay a une conscience insulaire et près de l'eau, même en ville. Ça me fait l'apprécier davantage dans une sensibilité que je partage avec elle... fait à noter, elle a cité Marguerite Duras en ouverture de son recueil.

mots-clés : #poésie #québec


Dernière édition par Jack-Hubert Bukowski le Jeu 17 Aoû - 9:38, édité 1 fois
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Message par Jack-Hubert Bukowski Mer 16 Aoû - 10:38

Marie Uguay Marieu11

Marie Uguay s'est illustrée dans le contexte des années 1970 et début 1980... Elle a eu la chance de commenter le contexte de la mort de Jean-Paul Sartre, alors qu'elle combattait le cancer et allait mourir de longues souffrances l'année suivante. Voici comment elle s'exprime dans son journal - je tire un extrait de celui-ci :

La mort de Sartre, cette béance magistrale, ce silence. J'écris pour ne pas tomber dans la démence, le désespoir. Respirer. Je me voudrais humble et insoumise, m'en aller sans que personne ne le sache, là où les yeux de mon amour se sont arrêtés à jamais. Chaque page tournée glacée d'effroi, mon miroir, mon double. Rien ne va changer. Mais tout va continuer dans l'inéluctable boue. De plus en plus réduite à ce vocable : patiente/malade. De plus en plus appelant mon amour : Docteur. De plus en plus risible l'ordre des choses appelé fatigue, lutte, oubli, repas copieux pris en bonne société ou nausée dans une petite chambre sombre, seule. Savoir à l'avance ce que la vie nous réserve. Bouger le moins possible, ne pas déplacer d'air, regarder ce corps mutilé, l'admettre. Composer avec la souffrance et l'ennui pour s'accrocher au seul plaisir d'un vague parfum, d'une vague renommée. Personne pour dire les choses importantes, personne qui n'allégera le poids du désir. Je suis moi aussi entrée dans le rang. Je n'ai pas à mourir, je suis déjà presque morte. Ne me reste que la douleur physique, qui est sans cesse le couteau tiré dans la plaie.

Extrait de Marie Uguay, Journal, 2005, Montréal : Boréal, p. 213-214.
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Message par Jack-Hubert Bukowski Jeu 17 Aoû - 9:19

J'ai lu les «Poèmes en marge» et les «Poèmes en prose» de Marie Uguay. Voilà ce que je retiens comme impressions, en saillance :

Apollinaire quand tu avais la tête fendue par un obus
et le coeur fendu par une orange
aujourd'hui encore ciel et terre
stupeur et espoir fixe
mon regard aussi roule dans un panier d'oranges
l'illusion est mon lot une fontaine et mon sang
romance contre des mondes étroits
et pour un amour roulant dans ses branches
que d'amours éclatés dans le sol funéraire
nous sommes ensemble seuls dans la vague éthérée
l'ombre translucide nous enfuit

Marie Uguay est très lucide dans l'acte poétique :

Nuit parcourue de partout à la fois
et maintenant sans bien-être choses différées
actes qui ne s'accomplissent pas
gestes las qui vont marquer le parcours
jusqu'au fond de la nuit
vitrines dont les pâles silhouettes respirent l'eau
hâtes circulaires que divisent l'aveuglement
et l'éblouissement
voici le vêtement posé sur la chaise
et le regard masque
d'un long discernement des mains
la nuit aura une fin spectaculaire
sur le miroir givré de l'horizon
retirée de sa plaie évanouie de ses lustres
son odeur de javel flottant une dernière fois
dans les salles d'urgence
les comptoirs gelés
nous n'entendrons plus que les pointes d'une danseuse
sur le plancher noir d'un théâtre
un froissement de sa robe d'ange
puis plus rien

Je vous laisse sur cette poésie en prose soigneusement choisie :

Oui, dit-elle, cet homme réel pour lequel je suis partie, celui que je cherche, précisément, que j'aime précisément, avec ce visage que je voudrais à nouveau embrasser et ce corps que je voudrais à nouveau saisir, voilà qu'à force de vouloir l'atteindre il s'est perdu en moi, et ce désir s'est mué en tous les désirs, cet homme en tous les hommes, à force de l'aimer inutilement il s'est abstrait en moi, il est devenu Énée qui abandonna Didon, Thésée qui abandonna Ariane, Ulysse qui abandonna Calypso. Et moi je ne suis plus rien, toute ma mémoire s'en va en lui, avec lui qui disparaît. Je suis prête à naître qui je veux, à réinvestir l'absence de ma propre force. Je m'acharne sur mon ancienne peau. Mon désir est ma liberté, il me laisse à moi-même. Il est devant moi comme un granit, un mur où je me suis effondrée. Celle qui l'aime ne peut plus vivre, il en fait une autre et qui l'aime différemment.

Marie Uguay avait sa manière bien à elle de vivre l'amour et d'en traiter dans sa matière poétique. Elle n'aura pas été si différente de la vague des féministes que l'époque en cours aura portée. Il m'a en tout cas semblé qu'elle voulait porter le flambeau bien haut, un peu comme les Josée Yvon et Louky Bersianik l'ont fait d'une manière bien originale et inédite. Elle n'aura pas vécu bien longtemps et sa poésie lui aura survécu. Nous pouvons encore aujourd'hui apprécier ce legs.
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Message par Jack-Hubert Bukowski Sam 19 Aoû - 11:31

Autoportraits :

Je viens de relire le recueil d'une traite. Il est accompli, très intense même. Quand même... nous pouvons l'apprécier de bien des façons :

cette musique intense je ne l'oublie pas
qui venait de l'agencement maintenant usé des formes
voici le châssis de briques avec le soir violet
et les passants qui murmurent entre eux des choses
      incompréhensibles
cette conversation comme une ultime rivière je ne l'oublie pas
voici le châssis de briques avec l'horizon disséminé

Jérémy m'a chuchoté indirectement - en mentionnant la collection Ovale de Noroît parmi ses lectures :

l'ovale blond du visage
sur la vitre forestière
comme à la page le livre s'ouvre
livrant son lourd parfum
et sa flamme vite éteinte
tu te surprends à trembler de hâte
à vouloir toujours vouloir
ce tendre accompagnement
du corps vers sa nuit indivisible
si lourdement retombée aveugle
d'un dos qui s'allonge vers toi

Le recueil s'apprécie de bien des façons, que je vous disais :

recueil
cette faim cette fatigue
comme cet attrait tout autour
les heures germent
aveugles et flammes
nous imaginent nous épargnent nous dévorent
tes épaules infranchissable nuit
(au bord des larmes l'ordre du monde)
les flots raclent nos mémoires
en toi une destination inconnue
(tu connais des éclairages successifs)
s'exclame

Rheuuu intense :

le gris lance ses voiles
le ressac privilégie l'intense
enchantements pareils aux rides
le roc se morcelle en clartés
tous les éléments épars
s'installent dans son désir

vagues succédant aux vagues
songe bariolé
une seule peine s'allonge
bonheur inédit ténu
suspendu à la ligne de l'horizon
que chaque bras tendu développe

une robe vibre sur un fond de jardin
un refuge s'élève
maintenant la vie hésite sous la ramure docile
les contrastes se font plus vifs
l'air iodé presque froid l'enchante
un matin pour une fois dissemblable

À ce qu'il m'a semblé, Marie Uguay était plus accomplie dans ce dernier recueil qu'elle aura laissé de son vivant. Il se peut que je me trompe, mais elle en a publié juste trois que j'ai déjà lus avec une mémoire tout de même vague, voilà l'effet que ça donne...

Edit : J'imagine qu'il y a aussi un processus de maturation poétique et de réceptivité aux tons de sa poésie. Et dieu, ça fait un bien fou de lire un recueil qui se lit de manière confortable. J'aime ceux de l'édition Noroît, mais mon exemplaire usagé de Marie Uguay me faisait peiner, tellement le livre était «rigide».
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Message par Jack-Hubert Bukowski Dim 20 Aoû - 10:13

Signe et rumeur :

Aussitôt que j'ai terminé la lecture d'Autoportraits, j'ai voulu vérifier mes impressions antérieures de Signe et rumeur. Dans le temps de tendre vers ce mouvement, j'ai lu le recueil. J'ai vite compris pourquoi je n'avais pas nécessairement autant accroché que dans Autoportraits. Je dirais que nous avons vu une poétesse naître devant nous, à mesure qu'elle écrivait ses recueils.

Les vers de Signe et rumeur sont assez compacts alors que dans les recueils subséquents, ils deviennent plus longs et maîtrisés. Il faut tout de même admirer cet art de la brièveté qui se retrouve dans le style d'expression qui la caractérise dans les recueils suivants. Marie Uguay se révélait déjà dans les premiers poèmes compacts qu'elle expédiait.

Nous pouvons en voir quelques exemples ici :

j'ai fait cette démarche apaisante
de te dessiner à chaque souvenir
qui me revient comme un matin fragmentaire
comme une avance vers la mémoire entière
de ton visage

Avec grâce, elle s'exprime :

au bord de quel rivage
ce détachement parfait
cette disponibilité nouvelle
cet apaisement des alentours
et de l'heure
cette très calme habitation de l'histoire

Nous voyons tout de même un fragment de sa poésie à venir qui s'échappe dans ce recueil :

ces îles dont nous parlons depuis des siècles
avec leurs diamants d'os taillés sur d'anciennes vies
avec leur gratitude d'oiseaux inassouvis
avec leur misère toujours pareille

ces îles où nous irons ouvrir la terre
reconnaître le ciel des saisons découpées
aux heures des songes et aux matins d'orange
ces îles à bout de bras
dont nous parlons depuis des siècles
ô ces solitudes

J'ose espérer que cette invitation à lire l'œuvre de Marie Uguay depuis quelques années vous permettra de mieux découvrir son œuvre.
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Message par Jack-Hubert Bukowski Dim 11 Aoû - 6:58

Pour reprendre ce périple poétique entre Michel Beaulieu et Marie Uguay :


maintenant nous sommes assis à la grande terrasse

où paraît le soir et les voix parlent un langage inconnu

de plus en plus s’efface la limite entre le ciel et la terre

et surgissent du miroir de vigoureuses étoiles

calmes et filantes



plus loin un long mur blanc

et sa corolle de fenêtres noires



ton visage a la douceur de qui pense à autre chose

ton front se pose sur mon front

des portes claquent des pas surgissent dans l’écho

un sable léger court sur l’asphalte

comme une légère fontaine suffocante



en cette heure tardive et gisante

les banlieues sont des braises d’orange



tu ne finis pas tes phrases

comme s’il fallait comprendre de l’œil

la solitude du verbe

tu es assis au bord du lit

et parfois un grand éclair de chaleur

découvre les toits et ton corps

Marie Uguay a écrit du Sud-Ouest de Montréal. Elle parle du soleil des banlieues et de l'asphalte, des choses que nous pouvons observer dans Côte-Saint-Paul.
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Message par Invité Mer 1 Jan - 17:18

l'hiver se tient immobile sur la ligne droite du silence
sa détresse mystérieuse aspire ma détresse

rien ne peut me dissocier du paysage familier
en lui je reconnais mon attente et mon amour

(extrait de signe et rumeur).

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Message par Jack-Hubert Bukowski Jeu 30 Déc - 9:27

Je vais revenir à Poèmes en marge :

Aimer et cette silhouette de craie à la vitre
derrière toi il y a tant de ruptures splendides de réverbérations
(qui entendra ce gourd démantèlement de l'esprit du coeur)
devant moi grimpe l'odieuse sérénité de septembre
et le plafond bas avec son cri d'agneau
la crue du désespoir de toucher sans toucher ton front
(qui entendra reviendra guérira
si ce n'est un double un ange de haine
l'instinct de vivre)

// p. 140

[...]

L'air était si doux dans quel but
l'arbre interrompu entre sa floraison et l'espace
avant que sa vie ne se multiplie en entier dans ses racines
toute étreinte se prolonge au hasard
engendre d'autres saisons d'autres secrets
la nuit nous déconstruit par coeur

// p. 144

Marie Uguay, Poèmes (Édition Boréal)
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Message par Bédoulène Jeu 30 Déc - 17:03

merci Jack ! j'aime le dernier extrait !

_________________
“Lire et aimer le roman d'un salaud n'est pas lui donner une quelconque absolution, partager ses convictions ou devenir son complice, c'est reconnaître son talent, pas sa moralité ou son idéal.”
― Le club des incorrigibles optimistes de Jean-Michel Guenassia



[/i]
"Il n'y a pas de mauvais livres. Ce qui est mauvais c'est de les craindre." L'homme de Kiev Malamud
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Message par Jack-Hubert Bukowski Lun 14 Nov - 21:24

Il arrive parfois qu'on ait besoin de reprendre son souffle. Quelqu'un m'a contacté en privé pour m'encourager à propos du fil de Marie Uguay. Il m'a mis sur la piste d'un poème assez particulier, spécial et je dirais que c'est le plus éclatant parmi les poèmes de Marie Uguay :


Il existe pourtant des pommes et des oranges

Cézanne tenant d’une seule main

toute l’amplitude féconde de la terre

la belle vigueur des fruits

Je ne connais pas tous les fruits par cœur

ni la chaleur bienfaisante des fruits sur un drap blanc

Mais des hôpitaux n’en finissent plus

des usines n’en finissent plus

des files d’attente dans le gel n’en finissent plus

des plages tournées en marécages n’en finissent plus

J’en ai connu qui souffraient à perdre haleine

n’en finissent plus de mourir

en écoutant la voix d’un violon ou celle d’un corbeau

ou celle des érables en avril

N’en finissent plus d’atteindre des rivières en eux

qui défilent charriant des banquises de lumière

des lambeaux de saisons ils ont tant de rêves

Mais les barrières les antichambres n’en finissent plus

Les tortures les cancers n’en finissent plus

les hommes qui luttent dans les mines

aux souches de leur peuple

que l’on fusille à bout portant en sautillant de fureur

n’en finissent plus

de rêver couleur d’orange

Des femmes n’en finissent plus de coudre des hommes

et des hommes de se verser à boire

Pourtant malgré les rides multipliées du monde

malgré les exils multipliés

les blessures répétées

dans l’aveuglement des pierres

je piège encore le son des vagues

la paix des oranges

de sa construction

et tout l’été dynamique s’en vient m’éveiller

s’en vient doucement éperdument me léguer ses fruits

Merci à la lecture de cet article :

https://journalpsychouqam.wordpress.com/2018/03/08/il-y-a-pourtant/

Et oui, je vais reprendre mon souffle...
Jack-Hubert Bukowski
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