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Message par Bédoulène Lun 1 Jan - 1:19

merci Tristam, même si j'avais lu Amado et Confiant, je doute de pouvoir faire un quelconque rapprochement)

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Message par Tristram Lun 1 Jan - 1:33

C'est un peu le même genre de "petit peuple", sud-américain ou antillais, qu'à Monterey, Californie. Des auteurs qui ont en commun une grande empathie avec les "petites gens", étonnants dans leur résilience astucieuse.

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Message par animal Lun 1 Jan - 13:18

Tu développerais la parenté avec Mark Twain (avec les autres que je ne connais pas ça m'intéresse aussi) ? John Steinbeck - Page 2 1486156233

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Message par Tristram Lun 1 Jan - 13:54

Quand j'imagine Huckleberry Finn, je vois pareil Danny jeune (tenue, physique, etc.) Amado est aussi positionné à gauche, avec le même genre de regard sur les "prolétaires". Même genre de condition en Amérique du Sud, Caraïbes, sud des US, et pas que le climat : petits boulots, ce que j'ai appelé sybaritisme (indolence, sensualité), organisation spontanée des marginaux, métissage (importante proportion noire et/ou amérindienne), etc. Difficile de préciser sans une relecture approfondie de ces auteurs, mais pour moi ils participent globalement du même univers ; et malaisé d'en parler sans tomber dans les clichés.

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Message par animal Lun 1 Jan - 13:57

Merci. Je ne connais pas bien Mark Twain bien que j'en ai apprécié mes lectures et j'apprécie beaucoup tes précisions. J'espère que nous aurons l'occasion d'y revenir !

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Message par Invité Lun 1 Jan - 16:11

Digression : Mark Twain, je l'imagine très "romanesque", un peu comme Dickens ?

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Message par Tristram Lun 1 Jan - 16:18

Pas vraiment romanesque, mais plus que Dickens, qui a un peu le même regard sur les "petits" (je ne voulais pas renvoyer à des associations un peu trop capillotractées).

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Message par bix_229 Lun 1 Jan - 17:10

On pourrait peut etre envisager une LC de Huckleberry Finn.
Avec, de préférence, la dernière traduction en date de Bernard Hoepffner, Tristram éd.
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Message par Bédoulène Lun 1 Jan - 17:25

merci Tristram, j'aime qu'on s'occupe des "petites gens" Smile

Mark twain, lecture d'enfance donc c'est loinnnnnnnnnnnnnnnn

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Message par animal Lun 1 Jan - 19:16

bix_229 a écrit:On pourrait peut etre envisager une LC de Huckleberry Finn.
Avec, de préférence, la dernière traduction en date de Bernard Hoepffner, Tristram éd.
Un beau souvenir de lecture, avec le fleuve.

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Message par Invité Dim 4 Nov - 13:27

Voyage avec Charley (1960) :

John Steinbeck - Page 2 41srbp10

Suite à la chaîne de lecture, et sur proposition avisée de kashmir, j'ai lu ce titre de Steinbeck.
Ce fut agréable de découvrir davantage l'homme - je n'avais jusqu'alors que lu des fictions de sa part.
Steinbeck nous narre son périple à travers les Etats-Unis, depuis les forêts du Maine jusqu'au désert Californien, en passant par les grands Lacs et le Texas.
Proche de la soixantaine, il se rend compte qu'il n'écrit plus que sur ses souvenirs, lui l'écrivain qui semble s'encroûter dans la banlieue New-Yorkaise. Ainsi se lance-t-il dans un road trip, à la rencontre de l'Amérique, de l'Américain, et des Américains. S'il découvre des traits communs à l'Américain, qui semble former un peuple distinctif selon lui, il en nuance aussi les traits.
Accompagné de son chien, dans sa voiture, dénommé Rossinante, en hommage à la monture de Don Quichotte, l'ami Steinbeck nous fait partager son voyage, par la grâce de sa plume et la finesse de son observation. C'est un homme assez détaché, qui veut se faire témoin de son temps, qui veut dresser un portrait sur le vif de l'Amérique dans sa diversité de paysages et de contrastes.

Je vous remets ici l'incipit du livre :
Lorsque j'étais très jeune et possédé du besoin d'être toujours ailleurs, les gens mûrs m'assuraient que la maturité me guérirait de cette démangeaison. Quand les ans me déclarèrent mûr, on m'assura encore que l'âge ferait son oeuvre. Puis l'on m'affirma que ma fièvre se calmerait avec le temps. Et, à présent que j'ai cinquante-huit ans, sans doute est-ce de la sénilité que viendra le remède. Jusqu'ici, rien n'y a fait.

Il livre de temps à autre des remarques sur le voyage, ou sur ce qu'il ressent et observe ; des remarques qui sont encore valables aujourd'hui :

Dans les longs préparatifs d'un voyage, il entre, je crois, la conviction intime qu'il n'aura pas lieu.
Comme approchait le jour du départ, mon lit et ma maison confortable devinrent de plus en plus désirables, et ma chère épouse se fit incommensurablement précieuse. Abandonner tout cela pendant trois mois pour les affres du manque de confort et de l'inconnu semblait une folie. Je ne voulais plus partir.

On associe, je ne sais pourquoi, la chasse à la virilité. Il existe de nombreux et excellents chasseurs qui savent ce qu'ils font. Mais, plus nombreux encore sont les messieurs bien gras, imbibés de whisky et armés de fusils de luxe. Ils tirent sur tout ce qui bouge - ou ce qui leur paraît bouger -, et leur habileté à s'entre-tuer pourrait bien résoudre le problème angoissant de la surpopulation. Si les accidents se limitaient à leur propre espèce, il n'y aurait pas de problème, mais l'assassinat de vaches, de cochons, de fermiers, de chiens et de panneaux signalisateurs, fait de l'automne une saison dangereuse pour les voyages.


Mots-clés : #voyage

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Message par Bédoulène Dim 4 Nov - 23:36

merci Arturo, c'est donc autobiographique !

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Message par Invité Mar 6 Nov - 13:30

Arturo a écrit:Voyage avec Charley (1960) :


Ce fut agréable de découvrir davantage l'homme - je n'avais jusqu'alors que lu des fictions de sa part.
Steinbeck nous narre son périple à travers les Etats-Unis, depuis les forêts du Maine jusqu'au désert Californien, en passant par les grands Lacs et le Texas.

Je suis heureuse que cette lecture t'ait plu, Arturo ! cheers  C'est vrai que ce livre nous parle davantage de l'écrivain-homme et c'était aussi une des raisons de ma proposition : te faire découvrir un peu de son âme face à l'Histoire des Etats-Unis.

En tout cas, merci de ta promptitude!

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Message par bix_229 Mar 6 Nov - 15:16

Malheureusement, Steinbeck, celui des Raisins de la colère et de Un combat douteux, a mal vieilli, trouvé une justification à la guerre de son pays au Vietnam, au nationalisme et à l'impérialisme.
Comme quoi, il est difficile de garder l'déalisme de la jeunesse.
Je l'ai regrété, j'aimais Steinbeck révolté ou s' incarnant dans le personnage de Doc.  John Steinbeck - Page 2 2441072346

Vietnam: John Steinbeck, en un combat douteux
Par Emmanuel Hecht,

Pour le reporter John Steinbeck, le Vietnam était une guerre juste. Il dut déchanter.

Il y a une vie pour les écrivains après le Nobel de littérature : reporter de guerre, par exemple. A l'âge (64 ans) où d'autres prennent leur retraite, John Steinbeck s'envole pour le Vietnam. Pendant six mois, jusqu'au printemps de 1967, il rédige 86 chroniques où il mêle choses vues entre delta du Mékong et Laos, descriptions de matériels de guerre (les hélicoptères ont sa préférence), considérations sur ce conflit sans front et l'art de la guerre selon Sun Tzu. Passionnant.
Il était impossible à l'auteur des Raisins de la colère de refuser la proposition de son ami et directeur de Newsday, Harry F. Guggenheim. Depuis l'intensification des bombardements, en 1965, et la montée de la contestation de la jeunesse américaine, il a fait du Vietnam une affaire personnelle.
Aux yeux du natif de Salinas, cette guerre est doublement juste : la démocratie se bat contre l'hydre totalitaire et les jeunes soldats, par leur courage, stopperont le déclin moral de l'Amérique. Enfin, il n'est pas question de lâcher Lyndon Johnson, son double démocrate et "provincial", raillé par les élites de la côte Est. Reste une dernière raison, plus intime, pour l'auteur d'En un combat douteux : ses deux fils s'apprêtent à rejoindre les GI's.
Dépêches du Vietnam, par John Steinbeck. Trad. de l'anglais (Etats-Unis) et préfacé par Pierre Guglielmina. Edition de Thomas E. Barden. Les Belles Lettres, 270 p., 21 euros.
Pourtant, au fil des dépêches, le faucon Steinbeck perd de sa superbe. Le jour où il comprend que l'armée américaine est perçue comme une armée d'occupation, il se fait colombe. "John est rentré chez lui pour écrire [qu'il avait changé d'avis] et a passé tout son temps à mourir", confie sa femme Elaine, peu après la disparition de l'écrivain, fin 1968."

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Message par Invité Mar 6 Nov - 18:16

L'idéalisme est un fruit qui semble mal supporter l'usure du temps...

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Message par Invité Mar 6 Nov - 18:41

Ah, oui mais quand je parlais de l'Histoire des Etats-Unis, je faisais allusion à ce qu'il voit et restitue de la ségrégation raciale dans le Sud, en fait.

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Message par Tristram Sam 23 Mar - 20:52

Au Dieu inconnu

John Steinbeck - Page 2 John-s10

Joe Wayne (mais oui, le fils de John) défriche des terres à l’Ouest pour lui et ses frères, à l’ombre tutélaire d’un chêne où il voit son père disparu.
Signes avant-coureurs du désastre dont l’attente lourde imprègne tout le récit : le sanglier qui dévore ses petits, le jeune charretier terrorisé par « ce lieu mort et desséché » dans son sommeil, la sinistre chapelle protestante du mariage…
L’hostilité du protestantisme avec le christianisme, le paganisme, voire l’animisme (l’arbre ; le rocher et la source du bois de pins) sourd également tout au long de l’histoire, qui parle du sacré (donc du sacrifice) sous différentes formes : dès le commencement, Steinbeck souligne le besoin de possession charnelle de la terre chez Joseph, sa « passion pour la fertilité », peut-être biblique, mais pas que…
« Dès le premier jour de mon arrivée, j'ai compris que ce pays était peuplé de fantômes. Il s'arrêta, incertain. Non, ce n'est pas ça. Les fantômes sont de pâles reflets de la réalité. Ce qui vit ici est plus réel que nous. C'est nous, les fantômes de cette réalité-là. »

« "Gardez-moi de ce qui est ancien dans mon sang." Elle se rappela que son père lui avait dit que ses ancêtres mille ans auparavant avaient suivi le rite druidique. »
À ce propos, To a God Unknown n’aurait-pas été mieux traduit par À un Dieu inconnu ?
On est peut-être là à une source du nature writing, tant est prégnant le portrait rendu de cette vallée californienne luxuriante puis désertique.
Il y a une dimension shakespearienne aussi, à la limite du fantastique (on pense à Arthur Machen et Algernon Blackwood), avec quelque chose, mais oui, d’Henri Bosco.
Parmi les quatre frères, dont le benjamin séducteur qui chante et boit, et le protestant rigoriste, Thomas est un personnage qui m’a particulièrement plu :
« Thomas aimait les animaux et les comprenait : il ne ressentait pas plus d'émotion à les tuer que les animaux lorsqu'ils s'entretuent. Il avait trop l'instinct d'une bête, pour être sentimental. »

« Thomas avait capturé un ourson grizzli dans la montagne et il essayait, sans grand succès, de le domestiquer.
– C'est plus un homme qu'un animal, affirmait Thomas. Il ne veut rien apprendre. »
Une étonnante représentation de la nature dans sa temporalité si éloignée de celle des hommes :
« Très haut, sur une énorme cime surplombant les chaînes de montagnes et les vallées, siégeaient le cerveau du monde et les yeux qui regardaient le corps de la terre. Le cerveau était incapable de comprendre la vie qui grouillait sur son corps. Il demeurait inerte, vaguement conscient du fait qu'il pouvait bouleverser et détruire la vie, les villes, les petites demeures champêtres dans la fureur d'un tremblement de terre. Mais le cerveau était assoupi, les montagnes tranquilles et, sur la falaise arrondie qui descendait vers l'abîme, les champs étaient paisibles. Et cela s'érigeait ainsi durant un million d'années, masse immuable et tranquille où le cerveau du monde somnolait vaguement. Le cerveau du monde se chagrinait un peu, car il savait qu'un jour il lui faudrait bouger et, par là même, secouer et détruire la vie, anéantir le long travail des labours et faire crouler les maisons de la vallée. Le cerveau était navré, mais il n'y pouvait rien changer. Il pensait : « Je supporterais même d'être mal à mon aise pour préserver cet ordre qui s'est établi accidentellement. Quel dommage d'avoir à détruire ce qui s'est ordonné de la sorte. » Mais la cime terrestre se fatiguait de rester dans la même position. Elle se déplaça soudain : les maisons s'écroulèrent, les montagnes se soulevèrent affreusement et le travail d'un million d'années fut perdu. »

« Joseph méditait lentement sur ce sujet : "La vie ne peut pas être coupée d'un seul coup. Une personne n'est morte que lorsque les choses qu'elle a modifiées sont mortes à leur tour. L'unique preuve de la vie est dans ses répercussions. Tant qu'il demeure d'elle ne fût-ce qu'un souvenir plaintif, une personne ne peut être retranchée de la vie, ne peut être morte." Et il pensa : "C'est un long et lent processus pour un être humain que de mourir. Nous tuons une vache et dès que sa chair est mangée, elle n'existe plus, mais la vie d'un homme s'éteint comme un remous à la surface calme d'un étang, par petites vagues qui s'étendent et meurent dans la quiétude." »

« – Je ne veux pas de toi ici, dit-il d'un ton malheureux. Ça prolongerait l'attente. A présent, il n'y a que la nuit et le jour, l'obscurité et la lumière. Si tu devais rester là, il y aurait mille autres pauses qui retarderaient le temps, les pauses entre les mots et les longs intervalles entre un pas et un autre pas. »


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Message par Bédoulène Dim 24 Mar - 7:44

merci Tristram ! je reviendrai à Steinbeck.

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Message par Tristram Dim 24 Mar - 12:19

Oui Bédoulène ; celui-là est étonnant, il vaut franchement le détour de mon point de vue.

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Message par topocl Mar 30 Avr - 16:30

Au dieu inconnu

John Steinbeck - Page 2 57377710

Quand il marchait tête nue à travers champs, sentant le vent dans sa barbe, un feu de sensualité couvait dans ces prunelles. Autour de lui, tout – sol, bêtes et gens – était fécond et  Joseph était la source, la racine de cette fécondité. Son désir était le pivot de tout cela. Il voulait voir croître, croître vite, concevoir et se multiplier tout son entourage. La stérilité était un péché sans rémission, –  péché intolérable, impardonnable.

Joseph a répondu à l’appel de l’Ouest et installé une ferme sur une parcelle à défricher en Californie. Il est vite rejoint par  ses frères, et la vie prospère, travailleuse et riante. Le clan comme le bétail se multiplie. Les paysages sont splendides, et la vie est un don de Dieu qui réjouit, mais interroge,  les cœurs des hommes comme des femmes.

Dans cet éblouissement du labeur récompensé par la fertilité, Joseph est soutenu par un chêne majestueux, qui incarne pour lui son père décédé et lui assure protection. Simple superstition ou  paganisme, ce culte à l’arbre  dérange les bons chrétiens,  et, quand arrivent les épreuves, que le récit laissait redouter depuis le début, il vire au mysticisme et emporte peu à peu l’espérance et l’esprit de Joseph.

La rudesse de ce pays sauvage, les intempéries redoutables , l’isolement autarcique mènent hommes et femmes vers de curieuses croyances, où se diluent leurs forces et leurs projets. Au dieu inconnu est le roman tragique d’un homme tourmenté, confronté aux forces de la nature, divinité animiste  qui le choisit plus qu’il ne la choisit.


Dernière édition par topocl le Mar 30 Avr - 16:57, édité 2 fois

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