Emmanuel Deraps
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Emmanuel Deraps
Emmanuel Deraps
(Né en 1993)
(Né en 1993)
Emmanuel Deraps est né à Montréal en 1993. On peut le voir participer à diverses soirées de lecture et micros-libres dans la métropole depuis plus d’une demi-décennie. Son premier recueil, la fonte, a été publié par les Éditions de l’Écrou en 2015. Failure, son deuxième livre, vient de paraître chez Del Busso éditeur, alors que son prochain, Faussaire fauve, paraîtra à l’Hexagone au courant de l’automne 2019.
Mention de source : Alexandre Turgeon Dalpé, Voix d’ici
Bibliographie
- La fonte, 2015
- Failure, 2019
- Faussaire fauve, 2019 (à paraître)
Dernière édition par Jack-Hubert Bukowski le Mer 28 Aoû - 11:09, édité 1 fois
Jack-Hubert Bukowski- Messages : 2490
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Re: Emmanuel Deraps
Failure (2019) :
Le dernier recueil d’Emmanuel Deraps, Failure, m’a beaucoup plu à la lecture. On peut parler du ratage qu’il érige en absolu, mais c’est surtout cher à «l’art de la défaite» esquissé par Hubert Aquin. Dans des descriptions qui ne manquent pas d’à-propos, le poète se place dans la lignée des devanciers de Doctorak go :
Mots-clés : #contemporain #poésie
Le dernier recueil d’Emmanuel Deraps, Failure, m’a beaucoup plu à la lecture. On peut parler du ratage qu’il érige en absolu, mais c’est surtout cher à «l’art de la défaite» esquissé par Hubert Aquin. Dans des descriptions qui ne manquent pas d’à-propos, le poète se place dans la lignée des devanciers de Doctorak go :
26 juillet 2016 - montréal
cartographiant l’île noire de mémoire
j’en perds quelques bouts je sais
le cœur d’un été de vin volé
et de terrasses abattues
sous le poids des lancements par habitude
j’en oublie comment même me rapailler
entre les micros-ouverts et le choc
des pintes levées
à ce qui nous consume
une fin
en taxi en tour de ville
à un de plus que le nombre de sièges
serrés tight jusqu’à l’abandon
sous les averses neigeuses de juillet
personne ne nous avait dit qu’on jouait
dans la nuit de ses quarante ans
il avait tout fait pour tuer
le temps
mathieu et ses manigances
comme pour se fêter en cachette
ou nous faire une surprise
nous avait dit aimer
habiter
la vingtaine des autres
Extrait, p. 27
Mots-clés : #contemporain #poésie
Jack-Hubert Bukowski- Messages : 2490
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Re: Emmanuel Deraps
Le livre est subdivisé en quelques parties. Emmanuel ne manque pas d’audace pour révéler quelques plumes récentes. Je vous montre cependant quelques poèmes triés sur le volet :
C’est exprimé dans une langue simple. Emmanuel Deraps est tout à fait conscient de la futilité du geste, mais il se refuse à abdiquer et en appelle à résister. La guerre des images est toujours en jeu et il la pratique lui-même avec son image de poète. Il écrit avec plusieurs expressions en anglais, comme pour trouer la «deraps» de sa langue. Il la pratique avec truculence, cela va sans dire.
place de la résistance
je voulais être de ceux qui résistent
qui voient le changement se produire
mais c’est les mêmes hashtags qui reviennent en refrain
les mêmes blessures qui n’arrivent plus à guérir
les mêmes gales grattées jusqu’à la moelle
les mêmes trous creusés dans nos coats
piercings d’écorce et tatouages guerriers
car c’est la guerre ici oui
une guerre comme on n’en a jamais connu
c’est quelque chose d’incroyable
que personne n’a encore vu
c’est une guerre d’images barbelées sous la langue
de tranchées internet
et de no man’s land en miroirs de malheur
c’est la crucifixion des faces figées en apparat
mais c’est une guerre oui où tous oublient
pourquoi résister pourquoi aligner
certains sons d’un coup produire un sens
sur un papier 100% recyclé
qui comme nous n’attend que la souillure
pour rejoindre le dépotoir des âmes molles
et nous avons déjà perdu la raison /
oublié les braises de la révolte
qui nous animait l’esprit
à peine quelques lignes plus tôt
l’attention est si fragile
elle se tient au fil du poème
et le poème est un danger debout
au front face à l’ennemi
on le perce de tous bords
parce que le mécanisme de nos cœurs machines
se laisse toujours plus gruger par la rouille
et que dans le satin de nos draps fraîchement lavés
il n’y a plus rien
contre quoi résister
Extrait, p. 48 et 49.
C’est exprimé dans une langue simple. Emmanuel Deraps est tout à fait conscient de la futilité du geste, mais il se refuse à abdiquer et en appelle à résister. La guerre des images est toujours en jeu et il la pratique lui-même avec son image de poète. Il écrit avec plusieurs expressions en anglais, comme pour trouer la «deraps» de sa langue. Il la pratique avec truculence, cela va sans dire.
Jack-Hubert Bukowski- Messages : 2490
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Re: Emmanuel Deraps
Merci pour le partage. Ça donne un côté un peu chanson je trouve, surtout le second extrait.
traduction de "deraps" ? (dérapage ?)
traduction de "deraps" ? (dérapage ?)
Invité- Invité
Re: Emmanuel Deraps
Oui, tu as bien cerné le truc, arturo, c'est une poésie très orale. Par rapport à la «dérape», on utilise cette expression au Québec, comme de «partir sur la dérape».
https://www.laparlure.com/terme/partir-sur-la-derape/
https://www.laparlure.com/terme/partir-sur-la-derape/
Jack-Hubert Bukowski- Messages : 2490
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Re: Emmanuel Deraps
Un autre poème :
À la page suivante :
Ce dernier poème faisait appel à la section du livre «une saison en enfer. se lancer par la fenêtre comme on lance un livre». Il y parle notamment de la librairie Port de tête et de ses nombreux lancements. Il y a d’autres sections du livre où il en appelle à Clara B. Turcotte et François Guerrette. Il fait d’ailleurs un brasse-camarade à ce dernier en prétextant qu’il ne savait pas parler d’étoiles…
my name is d
né downtown
élevé comme une descente
en chemin vers la détonation
je suis de cette génération d
d pour désenchantée
d pour débarque et déboire
d pour décrissée et disloquée
d pour déprime et dépression
d pour downhill et downfall
d pour défenestration
d pour demain-n’arrive-pas-finalement
d pour debt
d pour death
et si je gratte mon nom jusqu’à l’usure
c’est cette gale que je déchiffre
cette mort que je défriche
cette chute laissée là
en suspens
sur toutes les feuilles du monde
sur les parebrises des autopatrouilles sur les tableaux verts
et surtout
sur les frigos des voisins de personne
offerts à la dernière lumière
qui s’allume quand on ouvre
la porte
sur des tablettes vides
Extrait, page 54
À la page suivante :
j’ai toute la misère du monde à croire
que mes poèmes vont passer
l’hiver
je sors du refrigérateur et me dis
qu’il faut souvent s’arrêter
d’écrire
chercher par où commencent
la neige et le crime
mon nom et ce livre
il faut souvent déposer
les armes faire taire la tête
pour retrouver sa mine
son mojo quelque part entre la saison qui vient
et les recueils qu’on accumule
sur le coin de la table
au chevet des calorifères rêvés
p. 55
Ce dernier poème faisait appel à la section du livre «une saison en enfer. se lancer par la fenêtre comme on lance un livre». Il y parle notamment de la librairie Port de tête et de ses nombreux lancements. Il y a d’autres sections du livre où il en appelle à Clara B. Turcotte et François Guerrette. Il fait d’ailleurs un brasse-camarade à ce dernier en prétextant qu’il ne savait pas parler d’étoiles…
Dernière édition par Jack-Hubert Bukowski le Mer 28 Aoû - 12:35, édité 1 fois
Jack-Hubert Bukowski- Messages : 2490
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Re: Emmanuel Deraps
Je reviens à ma sélection des poèmes indépendamment des sections du livre…
Je vous propose maintenant une sélection de deux poèmes qui se suivent pour terminer mon pitch sur Failure :
Emmanuel Deraps est un poète qu’on peut considérer comme conscient de sa démarche. Il est ambitieux et en publiant à L'Hexagone, on peut le voir suivre un peu les traces de Daniel Leblanc-Poirier. Il faudrait que je refasse le décompte, mais il me semble à ma connaissance que c’est les deux seuls à avoir publié à la fois à L'Écrou et à L’Hexagone. Dans ce constant aller-retour des poètes entre les maisons d’édition, nous pouvons voir les affinités qui se développent dans les démarches des poètes.
les cassures du quotidien
j’ai toujours eu au creux du corps
la génétique des cassures
des alcools et des fruits frêles
le leurre des contrebandes
aux frontières du froid
elle la sentait déjà
je le sais ma fêlure
quand on s’est croisés full speed
pour la première fois
coin ontario de chambly
au sein des turbulences de salle de bain
cœur crushed contre la carte
où j’écrivais mes bills de tendresse
et nos langues à fondre
ne seraient peut-être que ça
le mieux qui pouvait arriver
qu’on puisse plus tard
jouer à inventer des dates d’expiration
aux lieux communs qu’on épuise
les dépanneurs à force d’attendre
nos révolutions impossibles pour vieillir
Extrait, p. 68.
Je vous propose maintenant une sélection de deux poèmes qui se suivent pour terminer mon pitch sur Failure :
au long de la main
le sais-tu
je t’ai cherchée
sur chaque coin de rue
dans chaque bar de la main
dans tous les bistros de saint-denis
j’ai avalé la vitre et vomi le givre
je ne mens pas
j’ai même frenché les lampadaires
en espérant tes yeux
j’ai laissé des pourboires aux parcomètres du ciel
lancé des mouches à la lune
et me suis
endormi dans un imaginaire
loué à la nuit
là où tes bras
me comprendraient
peut-être
p. 90
burn me tender
la tête dans les flammes du bleach
j’énumère les couleurs du ciel
et toutes leurs vertus
sélectionne la suite des choses
avant de demander
la permission de prendre la parole
entre mes doigts m’arrêter
définitivement
assis sur un tapis de brûlures
émietté par les mains de la nuit
l’automne m’assaille
au centre d’un continent d’oxycontin
au cœur de cuba qui coule
j’invoque aquin comme une formalité
m’allume coin ontario amherst
pour partir
en cendres
rejoindre
les fugitifs du cosmos
p. 91
Emmanuel Deraps est un poète qu’on peut considérer comme conscient de sa démarche. Il est ambitieux et en publiant à L'Hexagone, on peut le voir suivre un peu les traces de Daniel Leblanc-Poirier. Il faudrait que je refasse le décompte, mais il me semble à ma connaissance que c’est les deux seuls à avoir publié à la fois à L'Écrou et à L’Hexagone. Dans ce constant aller-retour des poètes entre les maisons d’édition, nous pouvons voir les affinités qui se développent dans les démarches des poètes.
Jack-Hubert Bukowski- Messages : 2490
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