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Georges Brassens, Lettre à Toussenot

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Hubert Mingarelli

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Message par églantine Ven 2 Déc - 18:37

Hubert Mingarelli
(1956 - 2020)


Hubert Mingarelli Liste_10

Nationalité : France
Né(e) à : Mont-Saint-Martin (Lorraine), le 14/01/1956

Ce lorrain arrête l'école à 17 ans pour s'engager dans la marine. Il va donc voyager, surtout en Méditérranée.et dans le Pacifique.

A son retour, il entreprend un périple à travers l'Europe, qui le conduit à Grenoble où il s'installe.

Il commence à publier en 1990.

Il est lauréat du Prix Médicis en 2003 pour son roman "Quatre Soldats"
.

Les femmes sont relativement absentes de ses romans et nouvelles. Il s'intéresse plus volontiers au rapport père-fils que ce soit dans "Une rivière verte et silencieuse" (1999), "La Dernière Neige" (2000) ou encore dans "La Beauté des loutres" (2002). Dans "Quatre Soldats" (2003), il évoque l'amitié de ces quatre hommes dont un est à peine sorti de l'adolescence. Les trois nouvelles de son recueil "Océan Pacifique" (2006) racontent la vie de matelot qu'il a lui même vécue. Cet ouvrage lui vaut le Prix Livre & Mer Henri-Queffélec au Festival Livre & Mer - Concarneau 2007.

Il vit aujourd'hui dans un hameau de montagne de Matheysine dans les Alpes françaises.


Bibliographie

Le Secret du funambule, 1990.
Le Bruit du vent, 1991.
La Lumière volée, 1993.
Le Jour de la cavalerie, 1995 : Page 1
L'Arbre, 1996.
Vie de sable, 1998.
Une rivière verte et silencieuse, 1999 : Page 1
La Dernière Neige, 2000 : Page 1
La Beauté des loutres, 2002.
Quatre soldats, 2003. (Prix Médicis) : Page 1
Hommes sans mère, 2004.
Le Voyage d'Eladio, 2005.
Océan Pacifique, 2006.
Marcher sur la rivière, 2007.
La Promesse, 2009
Un repas en hiver 2012 : Page 1
L'homme qui avait soif : Page 1
L'incendie (avec Antoine Choplin ), 2015 : Page 2
La route de Beit-Zera, 2015 : Page 1, 2
Une histoire de tempête, 2015 : Page 2
La terre invisible, 2019 : Page 2

màj le 11/08/2019


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Message par églantine Ven 2 Déc - 18:41

Un repas en hiver

Hubert Mingarelli 97822310

Un court roman dans l'épure stylistique mettant en scène trois allemands , un polonais et un juif prisonnier autour d'un repas improvisé dans une vieille maison désaffectée lors de la seconde guerre mondiale .

Quelques minutes de réchauffement , quelques secondes de bien-être dans la communion pourtant improbable dans d'autres conditions , un élan fugace de compassion , un regard de haine engendrant une réaction compassionnelle impossible l'instant d'avant , un refuge névrotique pour l'un , un refuge éphémère dans le rêve pour l'autre , une armure d'insensibilité encore ou une absence à soi ....


Il a fallu faire partir le décor en fumée pour se réchauffer de la bonne soupe sur la cuisinière à bois : pour taire la faim , pour retrouver une étincelle d'humanité et d'éclat de fraternité ...Mais bientôt le bruit de la cuillère contre le quart vide annonce la fin de la trêve .


Cinq hommes dans la survie , l'âme abimée par l'histoire de l'humanité et le rôle que le destin leur fait porter : quel que soit le choix restreint du moment , les conséquences seront tragiques , comment garder un peu d'humanité face à une implacable destinée historique ....


La trivialité du moment décrite avec une sobriété quasi minimaliste laisse hurler le silence et fait résonner les pensées secrètes de chacun ou les absences intellectuelles ....Que reste-t-il de l'homme lorsque sa conscience se trouve prisonnière de l'absurdité de l'histoire ...


On pourrait disserter à l'infini : Mingarelli éveille les blessures secrètes de l'humanité par la petite porte intimiste ....


Inutile de vouloir refermer le livre : il vit en nous , c'est toute l'histoire du monde et de l'humanité auquel il est vain de vouloir échapper puisque nous en sommes créateurs ....


mots-clés : #psychologique #guerre
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Message par Bédoulène Sam 3 Déc - 9:04


Quatre soldats

Hubert Mingarelli 413heh10

un peu hésitante dans les  premières pages, j'ai ensuite regardé, écouté (les silences plus encore) ces 4 soldats que le hasard ? une cigarette, un plat, un mot, un regard ont réunis. Chacun avec sa faiblesse et sa force, oui celle de parler ou de se taire ou d'aider et tous d' apprécier l'autre, le compagnon. Le lac représente un havre, un lieu de partage qu'ils se réservent.
Aucun ne rejoint son bataillon, après la trêve de l'hiver, sans regret mais pourtant lorsque Pavel suggère de déserter, les 3 autres sont démunis, non ils ne peuvent ni ne veulent accepter, cette idée les panique.Alors ils suivront la longue marche dans la guerre.
L'étudiant que leur supérieur leur impose est un atout pour eux, il écrit, il a un carnet ;  alors ils lui demandent de raconter leur vie présente, chacun veut être représenté dans le carnet, une manière de conserver les petits bonheurs de la trêve. Même s'ils ne liront jamais ces écrits, puisqu'ils sont illettrés,  cela leur importe, eux savent.

La guerre, la mort rattrape deux d'entre eux.

Je trouve les personnages bien campés, la simplicité de l'écriture sied à cette période de repos dans  la guerre, s'adapte à ces hommes.  J' aime leur complicité, leur simplicité, leurs astuces, l'attention qu'ils se portent.

Comme dans d'autre livres sur la guerre, à cette période, il apparait que dans les pays européens il y a beaucoup d' illettrés. (certainement dans le monde aussi )

Après réflexion me semble que les cauchemars de Pavel  (la tête, comme Shanidar le dit)montrent que l'homme n'est pas aussi stable que l'apparence qu'il donne, la guerre le marque.


mots-clés : #guerre


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Message par Bédoulène Sam 3 Déc - 9:05

Un repas en hiver

Hubert Mingarelli 97822310


un petit livre mais quelle richesse dans les sentiments !

L' histoire : Trois soldats Allemands en poste en Pologne et dont l' activité de la compagnie est la "chasse" et l'élimination des Juifs. Pour se soustraire à la corvée de la fusillade les trois hommes convainquent le Commandant de leur accorder une journée de chasse : s'ils reviennent avec un "gibier" ils seront de fait exemptés de la corvée le jour suivant.

"Parce que si vous voulez savoir ce qui me faisait du mal et qui m'en fait jusqu'à ce jour de maintenant, c'était de voir ce genre de choses sur les habits des Juifs que nous allions tuer : une broderie, des boutons en couleur ou dans les cheveux un ruban ; ces tendres attentions maternelles me transperçaient."

Mais la journée est longue et surtout froide, il gèle, la progression dans la neige est difficile, il leur faut "chasser" le ventre vide car ils sont partis à l'aube pour ne pas être retenus.

"Et dans ce silence là je lu que le lait chaud, ils le voyaient en rêve comme moi, ils marchaient avec lui, et ça leur faisait un poids. [...] leur rêve de lait chaud rendait le mien moins douloureux."

Les 3 compagnons liés d'amitié parviennent à se réfugier dans une maison abandonnée et à préparer, oh bonheur, une soupe. Ils la partagerons bon gré, mal gré avec un Polonais et leur prise, un jeune Juif.

"Alors, soudain, la faim qui nous avait un peu oubliés, cette faim que les cigarettes, l'alcool de pommes de terre et le feu dans la cuisinière avaient endormie, monta soudain de la casserole et nous retomba dessus comme si elle était vivante. C'est que la soupe était belle et sentait bon."

A approcher leur prisonnier les trois soldats mettent leur moral en danger ; le ramener ou pas ? un choix difficile mais obligé.


autre extrait


[...]et je savais qu'il fallait dire une prière ou quelque chose, mais Bauer me regardait et je regardais Bauer parce que nous n'osions plus regarder Emmerich et tout le sang qu'il avait craché, et la pluie de printemps qui tombait au-dessus et à côté de nous, avec tout le vacarme qu'elle faisait j'ai longtemps pensé ensuite, pour nous soulager, qu'elle avait parlé pour nous ; il fallait bien que, ce jour là, en Galicie, quelqu'un ait parlé."

une excellente lecture, n'hésitez pas, 87 pages qui suffisent amplement pour découvrir ces hommes dans une atmosphère palpable.

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Message par Bédoulène Sam 3 Déc - 9:05

Une rivière verte et silencieuse

Hubert Mingarelli 41t4xm10


Un père et son enfant Primo, adolescent : ils s'aiment !

Une petite ville dont l'usine de compresseurs fournit principalement du travail aux habitants ; lui le père est sans travail, il fait des petits boulots, tonte des pelouses, cueillette des tomates.... , le fils se construit dans les champs un tunnel où il rêve d'un avenir meilleur où il déroule ses pensées.
Leur espoir, les 100 pots dans lesquels le père a planté des graines de leur superbe rosier grimpant et comme Perrette et son pot au lait, le père et le fils imaginent ce qu'ils pourront obtenir de la vente des rosiers. Ils prient ensemble tous les jours pour avoir le soutien de Dieu. Parce que si Dieu n' a pas fait obtenir la place convoitée au père, il a fait fleurir le rosier, alors .........

C'est une lecture touchante, fraîche !


extraits

"Un aller et retour me permettait de dérouler de longues pensées sans m'interrompre. Des pensées entre 4 et 8 kilomètres. Cela me permettait d'aller au fond des choses

"Le pire qu'il puisse arriver, c'est que la mouche se mette à se frotter les pattes à l'instant où vous allez l'aspirer. C'est toujours un moment pathétique de tuer ainsi une mouche tandis qu'elle fait sa toilette. Vous entrez dans son intimité, et tout de suite après vous la tuez. Il s'ensuit toujours un bref remords. Jamais je n'ai aspiré les mouches avec plaisir. Qu'elles se frottent les pattes ou pas. J'ai toujours fait ça parce qu'il le fallait."
"Les gens prétendaient que mon père était un raté. Ils omettaient de dire qu'il avait attrapé des truites bleues à la main.
Je fermais les yeux.
Une rivière verte et des truites bleues."


mots-clés : #initiatique #famille


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Message par shanidar Lun 5 Déc - 16:59

La route de Beit Zera

Hubert Mingarelli Lemur10

Dans ce roman très beau, très tendre, très triste, Hubert Mingarelli nous raconte l'histoire d'un homme, déjà vieux, habitant dans une maison en pleine forêt, accompagné d'une chienne vieillissante, une chienne qui jour après jour perd ses forces alors que Stepan regarde avec amour et attention à la fois les oiseaux dans les arbres et la traîne blanche que laisse un avion dans le ciel. On sent chez cet homme un désespoir latent, une absence, celle du fils parti de l'autre côté du monde et une solitude palpable, qui chaque jour le met à l'épreuve de lui-même. Jusqu'au jour où un jeune enfant, un enfant arabe, c'est-à-dire l'enfant de ses ennemis surgit entre deux eucalyptus et adosse son propre mutisme à celui du vieil homme. Mais Amghar ne vient pas pour Stepan, il vient pour la chienne, celle que la mort attend, celle avec qui les mots sont inutiles.

C'est à une sorte de jeu de cache-cache géant que nous invite Mingarelli, mais un cache-cache adulte, celui d'un vieil homme qui tour à tour se montre orgueilleux et peureux, silencieux puis bavard, meurtri et joyeux, colérique et attentif, tendre et triste à la fois. Celui qui remonte le moral de son copain Samuelson, pleurant comme un veau sur ses malheurs passés et celui qui regardant sa chienne sait qu'il faudra en finir avec sa décrépitude. Celui qui serre très fort son fils dans ses bras, qui lui écrit chaque jour une lettre à heure fixe, qui a construit sa vie autour d'un vide, d'une crevasse et d'un cri ravalé, un hurlement coincé dans la gorge, un aboiement de rage. Pourtant la colère, il l'exprime parfois, parfois aussi l'énervement ou le désintérêt mais la douleur, comment la dire en dehors de ce gémissement rentré, de ce grognement inaudible, de ce grondement inarticulé ? C'est dans ce cri interdit que le personnage de Stepan bouleverse le lecteur, dans sa relation quasiment fusionnelle avec sa chienne, dans le geste sacrificiel qu'il doit commettre que se tisse le lien entre l'homme et celui qui le découvre. Le lecteur, prisonnier des lentes répétitions qui donnent au livre une sorte de rythmique, comme un gospel, une incantation sourde, une marche funèbre derrière laquelle on avance en se balançant d'un pied sur l'autre, en tentant de ne pas effrayer l'enfant, ni la chienne, ni le vieil homme, c'est dans cette atmosphère de recueillement et de silence que le lecteur est tout à coup sidéré par la justesse de ce qui est dit, par la tristesse foudroyante qui émane de ce texte d'une beauté dense, sylvestre, rapace.

J'ai été profondément touchée par ce roman. Profondément attristée par ce que nous raconte Mingarelli, sans jamais verser dans le pathos, mais en chantant à la fois le requiem des peuples qui se haïssent et en marquant le long silence qui suit un chant funèbre avant les applaudissements. C'est dans cet interstice que Mingarelli parvient à glisser toute son humanité.



mots-clés : #conflitisraelopalestinien #solitude
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Message par topocl Lun 5 Déc - 19:53

Un repas en hiver

Hubert Mingarelli 97822310

Trois soldats allemands dont les ennemis premiers sont la faim, le désespoir, et le froid glacial de l’hiver polonais. Qu’unit une amitié qui ne se dit pas par des mots, mais par le seul fait d'être bien à marcher côte à côte, de se comprendre en un clin d’œil. Embarqués dans le tourbillon infernal de la Shoah par balles,  acteurs malgré eux, à la fois consentants et sidérés de ce consentement même, ils représentent une ambiguïté qui est le cœur de l'interrogation de ce roman qu'il ne faut en aucun cas raconter (fuyez le quatrième de couverture, une fois de plus).

Je règle d'entrée de jeu son compte à l'alternance de nous et de on, qui m'a gênée dans toute la lecture du livre,  mais qui n'a pas suffi à me détourner de ses qualités.

Je l'avais abordé avec une certaine réticence : encore un livre sur le nazisme ! Y a-t-il encore des choses à dire ? et la Shoah par balles en plus ! Quelle part accordée au spectacle et au voyeurisme dans l'utilisation de l'horreur ? Est-ce vraiment décent d’y revenir encore pour faire de la littérature ? Ces interrogations se lèvent d'elle-même au profit d'une lecture incroyablement proche des hommes et de leurs propres questionnements face à l’inexplicable, l'inexprimable.

La progression de ces trois êtres, au fil d'une journée à la fois ordinaire spéciale, la richesse des détails quotidiens et des faits anodins, des émotions simples, des regards, des dialogues frustres nous parlent de leur sidération, aussi humains et fragiles que le lecteur, aussi inhumains que tout ceux qui furent pris dans cette dérive de l'horreur que fut le nazisme.
Une cigarette partagée, un saucisson qui sort d'une poche, un feu qui soulage, une rencontre dans une cabane abandonnée au milieu de l'immensité glacée font basculer, le temps de quelques minutes - mais un temps définitivement crucial pour ces 3 hommes - le fragile équilibre qu’ils ont inconsciemment construits pour affronter et tolérer ce destin insoutenable auquel ils sont soumis.

Ce livre laisse l'impression d'une grande délicatesse au sein de l'horreur, d’une compréhension de l’impuissance humaine assez bluffante.



(commentaire rapatrié)


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Message par églantine Mar 6 Déc - 17:24

Hubert Mingarelli 413heh10



Quatre soldats
.

De l'armée Russe .Dans l'attente . En mode survie . 1919 .
C'est l'hiver , ils attendent . Et s'organisent en espérant être encore vivants au printemps malgré le froid , la faim .
Rester vivants pour retourner au combat et servir de chair à canon . Absurdité de la situation .
Et avec cette économie de mots qui caractérise l'écriture de Mingarelli , faisant écho au retour à l'essentiel , on s'immisce dans une tranche de vie de Quatre soldats , construite autour d'un jeu de dé , d'une partie de pêche , d'une bravade de gamin,  d'une complicité tissée de fils invisibles.
Petits plaisirs partagés , des petits riens , ceux qui restent quand tous le tralala de la vie de surface disparait . Avoir chaud , dans son corps . Et dans son âme . Serré contre son camarade . Dormir avec une photo de femme et ne pas oublier sa virilité . Prendre soin de l'autre, parce que c'est prendre soin de soi .Dans ces moments-là ça se fait tout seul .
Non c'est pas l'intellect qui commande . Juste la force de vie qui fait pousser les meilleures armes : la fraternité , l'humanité .
Et dans cette attente de chronique de mort annoncée , Quatre soldats vont vivre l'instant , précieux car sans avenir , comme des enfants qui n'auraient pas encore acquis la notion du temps .
Hubert Mingarelli raconte la guerre autrement , dans ce compte à rebours . Quelques longues semaines d'intimité au plus près de son vrai soi et des autres , parce que l'instinct de survie ne s'embarrasse pas de superflus et que les dernières petites joies de la vie sont probablement celles du partage .
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Message par shanidar Mar 6 Déc - 17:56

et bien, j'ai vraiment l'impression d'être passée complètement au travers de ce roman (Quatre soldats)...
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Message par églantine Mar 6 Déc - 18:09

shanidar a écrit:et bien, j'ai vraiment l'impression d'être passée complètement au travers de ce roman (Quatre soldats)...
Peut-être .
Ou pas .
C'est vrai que l'appréciation d'une oeuvre d'art , d'une lecture ....ça tient tellement à rien que ça bascule dans un sens ou un autre . Quand on prend conscience de ça , ça fait presque peur je trouve .
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Message par Bédoulène Mar 6 Déc - 18:25

Shanidar tu veux dire que tu n'a rien récupéré de ton "passage" au travers de ce roman ?

en tout cas tu les as vu !

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Message par Hanta Mar 6 Déc - 23:04

Un repas en hiver

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Il est des histoires qui émeuvent et touchent par la beauté des mots et du style, il est des ouvrages qui nous impressionnent par la justesse des personnages.
Il est des oeuvres qui nous fascinent par la beauté de la description des paysages et des instants. Ce livre est la synthèse de toutes ces qualités.
Les mots sont simples mais choisis, le style est clair mais rigoureux. L'émotion est présente mais pas sempiternelle, les instants sont dramatiques mais optimistes.
La description des personnages est excellente : elle révèle les contradictions humaines dans ce qu'elles ont de plus complexes, un père absent préoccupé, un soldat troublé par la faiblesse de l'ennemi, un paysan affamé et cruel qui devient un roublard négociateur. Un narrateur absent, tellement absent que l'on ne connait quasiment rien de lui alors qu'il est protagoniste de l'histoire. Or ces multiples facettes qui font notre identité et qui se révèlent lors des moments chaotiques sont justement une aide lorsqu'elles se contredisent : elles nous placent où l'on peut être et survivre. C'est ce qui m'a beaucoup plu dans ce livre.
Pas de nazisme ni d'explication politique, pas d'allégorie de la nature et de son rapport à l'homme juste des individus perdus qui essaient de ne pas sombrer.
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Message par shanidar Mer 7 Déc - 10:39

églantine a écrit:
shanidar a écrit:et bien, j'ai vraiment l'impression d'être passée complètement au travers de ce roman (Quatre soldats)...
Peut-être .
Ou pas .
C'est vrai que l'appréciation d'une oeuvre d'art , d'une lecture ....ça tient tellement à rien que ça bascule dans un sens ou un autre . Quand on prend conscience de ça , ça fait presque peur je trouve .

Bédoulène a écrit:Shanidar tu veux dire que tu n'a rien récupéré de ton "passage" au travers de ce roman ?

en tout cas tu les as vu !

Je ne sais pas quoi répondre...
L'impression d'avoir été traversée par quelque chose qui ne m'a pas atteinte (peut-être en dehors des dernières pages, parce qu'on a là quelque chose de tangible, l'inversion du rêve, la nécessité de prendre vite et pour le mieux une décision tragique ; évènement qui me trouble et me fait réfléchir, mais pour le reste, tout cela m'a plutôt ennuyée).

Et pour ce qui est de la perception de l'œuvre, du basculement vers le saisissement, c'est en effet l'objet inexplicable après lequel le lecteur court de lecture en lecture...
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Message par tom léo Mer 7 Déc - 18:03

Eh bien: si vous n'aviez pas commencé ce fil sur Mingarelli, je l'aurais fait plus ou moins tard. C'est pour dire, de façon plus générale, à quel point j'estime cet auteur, justement sous-estimé dans sa timidité et sa discrétion. Au moins je le perçois ainsi. Au même moement je ne vois vraiment pas beaucoup d'auteurs français contemporains qui arrivent à la hauteur de cet écrivain! Donc, chapeau!

Avant d'ajouter (si vous me laissez l'occasion?) encore de fils sur des livres pas encore commentés, je vais d'abord mettre mes reflexions sur les livres dont vous avez déjà parlé:

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Quatre soldats

Au cours de l’année 1919 des soldats de l’Armée Rouge passent l’hiver dans les forêts, loin des combats, juste prêts à survivre au froid. Dans ces circonstances quatre soldats bien différents se trouvent et nouent d’amitié. Chacun apporte son savoir, peut-être minime, le propre de son tempérament. Le leader révèle ses angoisses, le fort est bien souvent la cible des plaisanteries, le discret bien efficace dans son métier… La vie consiste à survivre dans une baraque de fortune, de jouer aux dès, des baignades dans un lac, de vivre bien symboliquement un amour si peu connu d’une femme et d’autres gestes anodines. A l’approche du printemps un jeune leur est attribué qui paraît d’abord comme un intrus. Mais il semble pouvoir écrire et il devient le chroniqueur et témoin de leurs vies…

On parle bien de « soldat », et la guerre n’est pas absente, mais sur le fond d’une vie quotidienne en hibernation dans une forêt reculée, la violence semble à première vue loin. C’est en regardant de plus près qu’on découvre l’art de Mingarelli de parler des peurs, et de la présence de la guerre. Les dernières vingt pages vont raconter presque l’inévitable…, mais c’est cette amitié simple entre hommes, et pas de héros, qu’on va retenir.

Le langage de l’auteur est de nouveau d’une grande simplicité. Pourtant il faut savoir lire entre les lignes et discerner ce qui est esquissé. J’aime beaucoup cette écriture très pure, pas artificielle. Les personnages sont peints avec grande simplicité, et quand même aussi avec leur contradictions et luttes intérieures.

Splendide !
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Message par tom léo Sam 10 Déc - 16:50

Merci, shanidar, pour ton commentaire très intéressant et éclairant sur ce même livre en haut! J'ajoute mon ressenti...:

Hubert Mingarelli 51b9sl10

La route de Beit Zera


Originale : Français, 2015

CONTENU :
Stépane vit avec sa chienne quelque part en Israël dans une maison isolée près des bois. Il écrit chaque jour à son fils Yankel, forcé de se cacher à l’autre bout du monde. Il raconte ainsi sa vie de solitude et dit son espoir, un jour, de le retrouver. En faisant face à son chagrin, il se souvient de l’époque où il contrôlait les Palestiniens aux postes-frontières, éprouvait de la haine, de la honte ou de la compassion.

Depuis quelque temps, un adolescent mystérieux lui rend visite et s’attache peu à peu à la chienne...
(description de Stock, raccourci)

REMARQUES :
Après des romans qui jouaient tantôt au Japon, en Russie qu’en France, et si souvent dans le contexte de guerre, nous nous retrouvons ici avec ce roman de Mingarelli au milieu d’une autre région de crise, dans le cadre du conflit paléstino-israélinne. Celui-ci ne s’impose pas par des images crus et violents, mais plutôt est suggéré par une méfiance inhérente à tout contact entre les peuples.

Dans la solitude voir l’isolement de sa maison, Stépane a (trop?) de temps pour se souvenir du temps passé à l’armée et surtout la séparation de son fils qui, il y a une dizaine d’années, a du fuir la justice et le pays parce qu’il avait tué un innocent. En cette époque-là Stépane a quitté la ville et s’est retiré dans les bois. Son camarade de l’armée, Eran, passe régulièrement pour apporter des vivres, prendre la marchandise (Stépane met ensemble des boîtes d’emballage, de quoi ? De flocons de parfums?) et s’enivrer avec lui. Mais sinon ? L’isolement et le silence complet..., extérieur et...intérieur.

A peu près une année avant le « temps présent », où le protagoniste est devant le choix de devoir tuer sa chienne trop faible et souffrante, arrive un garçon mystérieux, silencieux, lui aussi portant un mystère, une souffrance ? Il n’y a presque pas de communication, juste extrêmement lentement naissent un signe de la tête, un échange monosyllabique, le chien confié aux sorties du garçon... jusqu’à une forme d’acceptation très fragile entre les deux. Peut-être à tort je me sentais rappelé ces mots clés chez Saint Exupéry sur « s’apprivoiser et faire connaissance ».

L’auteur raconte dans des petites unités de 2 à 5 pages, sa langue est simple et sans artifice, comme toujours. Si ce n’est justement cette simplicité et accessibilité épurée qui rend la lecture limpide.

Suivant le processus de faire connaissance l’un de l’autre, Mingarelli choisit un rythme lent, sans s’imposer. Pour certains s’y passent... rien. Ou presque. Mais si ce serait le (seul?) chemin comment ces peuples devenus si lointains et étrangers l’un de l’autre se retrouvaient ?

Merci encore une fois à la plume de cet auteur !!!
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Message par Bédoulène Sam 10 Déc - 16:56

j'aurai plaisir à lire tes commentaires sur tous les livres que tu nous présenteras Tom Léo

j'ai aimé les 3 livres lus de Mingarelli et j'en ai en attente

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Message par tom léo Mar 13 Déc - 18:45

Hubert Mingarelli 515vdn10

La dernière neige


Le narrateur, un enfant, est attiré par un milan en cage et rêve d’en faire sa possession. Il va mettre à coté un part de l’argent qu’il gagne en promenant des personnes âgées dans un parc, tandis qu’il contribue aussi à faire vivre sa famille. Le père est malade – ils vivent une grande intimité: souvent le garçon est amené à lui raconter le récit de la capture (imaginaire) du Milan! La mère est souvent absente, et on se demande pour quoi…: on devine une déchirure dans cette famille. Mais cela prend beaucoup de temps de rassembler l’argent demandé pour l’oiseau par le cupide Di Gasso! Un peu par hasard, le jeune va accepter une fois, puis une deuxième fois, de noyer des chatons pour se faire de l’argent. Jusqu’où va-t-il aller? Quel prix est-ce qu’il va payer ?

Il me semble que dans ce court roman il n’y a véritablement aucun mot difficile ou tournure artificielle: c’est une langue d’une grande simplicité, dans le meilleur sens du mot. Ce n’est justement pas : platitude ! Mais derrière ces paroles se cachent des rêves, des drames, des allusions et surtout la belle histoire d’une relation père-fils.

Datant de, il me semble, 2000, ce roman contient un peu plus de violence "raconté" que ceux qui allaient suivre. Plus tard, c'était encore plus par touches, quelques allusions?

Cela fut à l'époque mon premier livre de Mingarelli. Et ça allait avoir une suite ! Il me semble que cet auteur mérite bien l’attention des Chosiens !


mots-clés : #famille
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Message par Bédoulène Mar 13 Déc - 22:46

merci Tom je n'en ai pas fini avec Mingarelli et ton commentaire me pousse plus encore.

Tu devrais aimer aussi "une rivière verte et silencieuse" car là aussi c'es une belle histoire, comme tu le dis d'une relation père-fils

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Message par tom léo Jeu 15 Déc - 18:44

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L’homme qui avait soif


Originale : Français, 2014

CONTENU :
Japon, 1946, pendant l’occupation américaine.
Démobilisé depuis peu, Hisao Kikuchi revient de la montagne avec une soif obsédante et des rêves qui le hantent. À bord du train qui doit le conduire vers la femme aimée, il commet une terrible erreur. Descendu pour boire, il voit le train repartir avec sa valise et l’oeuf de jade qu’il a prévu d’offrir à Shigeko, sa promise.
Alors qu’un suspens subtil mais intense invite le lecteur à suivre les péripéties d’Hisao courant après sa valise, se dessine la bataille de Peleliu où il a combattu aux côtés de Takeshi, jeune soldat troublant qui chante dans le noir. Et qui mourra à ses côtés…

Dans ce roman aussi puissant que poétique, Hubert Mingarelli évoque avec une rare élégance l’amitié entre hommes et le Japon meurtri par la guerre.
Hisao retrouvera-t-il sa valise et arrivera-t-il jusqu’au « mystère Shigeko » ?
(Source : Présentation de l'éditeur, légèrement élargie ; Stock)

REMARQUES :
C’est ce va-et-viens qui constitue une part de la subtilité de ce livre: entre les souvenirs de Hisao des dernières semaines véceus sur l’île de Peleliu, cet ile aprement combattue (voir aussi : http://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Peleliu ) et, d’autre coté le chemin de retour dans le « maintenant » (vers 1946), marqué par la perte de la valise et la course pour la rattraper.

Les détails affreux des combats d’un coté ne seront pas énumérés avec une morbidité ; même ici – au milieu de l’angoisse – se crée une amitié entre Hisao et son camerade Takeshi. Celui-ci étonne par sa capacité de trouver des mots, de les chanter et crée ainsi une autre ambiance, une apparence d’être gardé, entouré ? Mais au milieu de la montagne, où ces soldats creusent des tunnels en vue de la bataille finale et attendent l’attaque américaine, c’est le desastre qui se dessine : le petit groupe sera coupé par des masses de terre qui tombent, et c’est d’abord juste Takeshi et Hisao qui survivent.

Et des moments, des expériences liés à ce temps traumatisant remplissent les nuits et jours ultérieurs de Hisao : la solitude, cette soif incroyable (n’ayant plus d’eau potable ou, plus tard voulant même se jeter dans l’eau salé de la mer), l’obscurité des tunnels, ce rire insupportable du soldat ennemi quand il le « rate » en tirant et lui, Hisao, qui sort de la montagne « comme un animal ».

Et ainsi cette recherche sur la piste de sa propre valise perdue (presque une mini-forme de road-movie) et vers la femme encore jamais vue, mais promise, vivant sur l’île de Hokkaïdo, deviendra aussi la question s'il pourra se débarasser de « l’animalique », redevenir un homme. Revenir de la guerre – mais oui, cela prendra dans son sens profond, du temps. En passant il y a la question de la honte (sujet très japonais?) des vétérans. Survivre comme condamnation ? Tous ces anciens qu’il rencontre sur son chemin seront à leur façons dans un écart à la société, dans une incompréhension, mais aussi une forme de solidarité entre eux. Cela me rappela de loin aussi cette littérature très spéciale des revenants de la guerre dans les romans ou petites formes d’un Wolfgang Borchert ou d’un Heinrich Böll (écrivains allemands).

Juste encore deux petites remarques sur le texte de la 4ème de couverture (voir en haut). Primo : Hisao ne commet pas, à mon avis « une terrible erreur » en laissant partir quasimment le train. C’est plutôt le signe d’une obsession de soif, plus fort que toute volonté. Secundo : Hisao, comme tellement de victimes de la guerre, n’a finalement PAS combattu dans cette bataille historique. Ils ont été proche de la mort, même avant d’avoir « combattu ».

Et Mingarelli fait tout cela avec une langue aussi bien réaliste, mais aussi très poètique, dans une grande simplicité dont il a le secret. Pendant une partie du roman j’en étais moins convaincu que par d’autres, lus de lui, mais il me semble que surtout vers la fin du livre il arrive à une densité et une forme d’ouverture de l’histoire que j’ai beaucoup aimé.

Donc, splendide !
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Message par tom léo Dim 18 Déc - 17:41

Hubert Mingarelli 41mv7v10

Le jour de la cavalerie


1995

CONTENU :
Une ferme, quelque part dans le Sud des États-Unis. Une journée torride. Le jeune Samuel s'occupe de la "vieille ", paralysée dans son fauteuil, muette. À Samuel de faire les questions et les réponses, de meubler de ses rêves une journée entière. Seuls, deux personnages passeront entre le lever et le coucher du soleil : Chester, ouvrier agricole et Homer, en quête de travail, qui raconte la mer, les bateaux... un Ailleurs qui s'achèvera à la tombée de la nuit.
Et demain, tout recommencera, dans un huis-clos pesant, inquiétant.

REMARQUES :
Celui qui connaît Mingarelli déjà par d'autres titres, ne s'attendra pas non plus ici à un rythme de narration « infernal ». L'action ne se démarque pas par des scénarios changeant rapidemment ou des sauts inattendus. Par contre on trouve une atmosphère entre oppression et rêves qui se construit peu à peu par touches. Samuel « Sam » vit entre rêves, idées pour l'avenir et un menace envers son patron le « vieux », absent pendant la journée. Pour lui et, selon lui aussi pour la « vieille », celui-ci est un vrai épine. En pensées il organise déjà l'avenir de la ferme après sa mort…Mais ce plan semble aussi loin de son execution.

Sam est probablement entre l'enfance et l'adolescence : il y a au même moment quelque chose d'enfantin encore en lui. Les passants dans la journées, Chester de la ferme voisin, et Homes en recherche de travail, éveillent d'autres rêves.

L'entretien avec la « vieille » est un monologue où il se donne lui-même les réponses, même si de temps en temps la femme réagit avec un signe de la main.

Un jour entre ennui et créativité, entre innocence et menace. Mingarelli nous présente cela avec un minimum de moyens, proche à un huis-clos qu'on peut s'imaginer comme une pièce de théatre.

Je préfère peut-être les œuvres plus récentes, mais l'amateur de Mingarelli va déjà trouver dans ce livre de 1995 des éléments qui caractèrisent cet auteur.
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