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Marguerite Duras

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Message par animal Jeu 12 Jan - 21:59

Marguerite Duras
(1914-1996)


Marguerite Duras Duraso10

Carrière au cinéma

L'écriture cinématographique est, pour Marguerite Duras, très proche de l'écriture littéraire : après l'adaptation de quelques-uns de ses romans par des réalisateurs tels que René Clément (Barrage contre le Pacifique, 1956) ou Peter Brook (Moderato cantabile, 1960), Marguerite Duras écrit pour le cinéma Hiroshima mon amour, d'Alain Resnais. Dans son oeuvre, les frontières entre roman, théâtre et cinéma sont perméables. En 1966, elle coréalise avec Paul Seban l'adaptation de sa pièce La musica puis, trois ans plus tard, elle réalise seule Détruire, dit-elle. En 1972, Nathalie Granger inaugure le processus inverse : le film précède le livre. Marguerite Duras s'approprie le cinéma, invente les règles plus qu'elle ne s'y plie. Le septième art fournit des lieux vides que le texte vient habiter, au sens littéral du terme : dans Nathalie Granger, les comédiennes Lucia Bose et Jeanne Moreau ne parlent pratiquement pas et, lorsqu'elles s'expriment, c'est un son postsynchronisé que l'on entend, séparé du corps des actrices. A partir d'India song (1974), l'écrit l'emporte sur l'image : des textes énoncés en voix off sur une musique de Carlos d'Alessio accompagnent les images. Marguerite Duras utilise cette bande son pour d'autres films, et c'est au spectateur de raccorder les récits d'amours fous et d'incestes évoqués en voix off avec le palace en ruine de Son nom de Venise dans Calcutta désert (1976) ou les plages de Trouville dans Agatha et les lectures illimitées (1981). Le camion (1977), dans lequel Marguerite Duras s'expose le plus, à la fois comme auteur et comme personnage, est un film au conditionnel : elle et Gérard Depardieu parlent d'un film qui pourrait se faire, et là encore, c'est au spectateur de faire l'effort intellectuel pour transposer le film au présent. Elle atteint l'extrême limite du cinéma avec L'homme atlantique (1981) où les écrans noirs redonnent toute sa place au texte. Aussi expérimental soit-il, le cinéma de Marguerite Duras ne quitte jamais les rives du récit. Elle le prouve en 1984 avec une comédie sociale et populaire, Les enfants. Marguerite Duras reste l'emblème d'un cinéma radical ainsi que le démontre la violente polémique autour du film de Jean-Jacques Annaud, L'amant (1991). Marguerite Duras ne valide pas cette adaptation et écrit " son " film, L'amant de la Chine du nord.

Autres activités

Marguerite Duras, femme de lettres, écrit entre autres Barrage contre le Pacifique, Moderato cantabile, L'amour (1972), Savannah Bay (1983) et , pour lequel elle obtient le prix Goncourt.

cinema.encyclopedie.personnalites.bifi.fr

Filmographie (réalisatrice) :

1966 : La Musica (coréalisé avec Paul Seban)
1969 : Détruire, dit-elle
1971 : Jaune le soleil
1972 : Nathalie Granger
1974 : La Femme du Gange
1975 : India Song
1976 : Des journées entières dans les arbres
1976 : Son nom de Venise dans Calcutta désert
1977 : Le Camion
1977 : Baxter, Vera Baxter
1978 : Le Navire Night
1979 : Césarée, Court-métrage avec la voix de Duras
1979 : Les Mains négatives, Court-métrage avec la voix de Duras
1979 : Aurélia Steiner, dit Aurélia Vancouver, Court-métrage
1981 : Agatha et les lectures illimitées
1981 : L'Homme atlantique
1982 : Dialogue de Rome
1985 : Les Enfants

Le fil pour l'écrivaine : clic

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Message par animal Jeu 12 Jan - 22:08

Marguerite Duras Duras-10

Le Camion (1977)

Deux fois deux personnages. Le salon d'une maison de campagne à la lumière changeante où une femme lit un manuscrit à un homme, la cabine, invisible, d'un camion avec le conducteur et une femme prise en stop et qui parle. Le manuscrit serait celui d'un film, où du film puisqu'il s'agit d'une femme "déclassée" et d'un chauffeur. On ne voit cependant que l'auteur (Marguerite Duras) et Lui (Gérard Depardieu). Elle raconte cette histoire et lui réagit. Parfois ils s'arrêtent et quelque chose se précise. Des visions du camion infatigable et des paysages qui défilent avec lenteur, zones industrielles, paysages brumeux et vides (la Beauce) et évocations de la mer.

Un parti pris et une économie de moyens résolument casse-gueules. Le film s'installe sur un rythme précis mais lent. Les deux personnages ne sont pas les images de ceux qui seraient dans le camion mais le sont quand même (comme l'inverse). Il en est de même pour le rapport du texte au camion et au paysage ou à la mer. Le plus souvent l'image n'illustre pas le texte, et c'est justement là que quelque chose se joue. C'est un aiguillon du film, la différence entre l'image vue et l'image attendue et ce que les paroles, le texte, l'écriture impliquent. Les effets de surprise sont particuliers au sens où le film et son sens deviennent mouvants, comme en suivant les lacets d'une route.  

Le dialogue, les dialogues ne sont pas une compréhension et les solitudes ne sont pas réellement rompues alors qu'on assiste pourtant à une grande tentation de rapprochement, provoquée peut-être par l'existence de ces solitudes et par la presque langueur un peu inquiète du texte. Peut-être aussi la "fin du monde", une fin de la terre et le bruit de la mer, ensuite et en arrière plan, mais aussi une fin politique.

Ce fût d'ailleurs là une des grosses surprises du film. Souvent des passages politiques m'ont semblé casser le texte dans ce que j'ai lu (le peu que j'ai lu) de Duras mais ici le mariage se fait plus heureux... Il faut dire qu'une ambiguïté règne, c'est d'un après qu'il s'agit. L'après d'un idéal avec des identités qui ne se rejoignent pas entre différences d'âges et de classes. La portée humaine et politique converge vers une solitude embuée et n'est pas dénuée de sens.

Drôle de film, un bel exercice de parole (le rythme, la lecture bien que ce ne soit pas seulement de la lecture) et de rapport à l'image. Un film fait de ce qu'il n'est pas, avant et après, et qui vaut plus que pour  l'exercice de style puisqu'il provoque l'émotion, l'attente et la réflexion.

Il y a un déséquilibre très sensuel de l'opposition aussi, une opposition assez forte d'ailleurs. Les répliques de Lui ou du chauffeur sont limitées, une récurrence du "Vous voyez ? -  Oui, je vois" ou c'est sans doute ça et autre chose. Il faudrait peut-être parler d'écoute plus que de dialogue ? ça demande un peu d'attention mais c'est un film intéressant et beau (comme un camion, évidemment).

‑‑‑‑‑ Extrait d’un entretien avec Marguerite Duras ‑‑‑‑‑

Entretien paru dans Le Monde, en 1977

Comment peut-on concevoir un film qui repose uniquement sur la parole ?
Le Camion ne repose pas uniquement sur la parole, il y a quelqu’un qui lit, quelqu’un qui écoute. Le camion sur une route, c’est une image, c’est de l’image. Ça n’aurait pas pu être du théâtre, Le Camion n’est pas joué, il est lu, et il n’a pas été répété. S’il l’avait été, ç’aurait été un autre film.
Je ne sais pas si on peut parler de mise en scène ni même de montage dans Le Camion, mais peut-être seulement d’une mise en place. Dans la chaîne de la représentation, il y a un créneau blanc : en général, un texte, on l’apprend, on le joue, on le représente. Là, on le lit. Et c’est l’incertitude quant à l’équation Camion. Je ne sais pas ce qui s’est passé, j’ai fait ça d’instinct, je m’aperçois que la représentation a été éliminée. Le Camion, c’est seulement la représentation de la lecture elle-même. Et puis il y a le camion, élément uniforme, constamment identique à lui-même, qui traverse l’écran comme le ferait une portée musicale.
Je dis Le Camion comme j’entends l’écriture se faire. Car on l’entend, avant la projection sur la page. Avant la sortie de la phrase, elle est entendue. Je me tiens dans cet espace-là, c’est être au plus proche de l’énoncé interne. En général, il y a la projection sur la page et la préhension de l’écrit par un tiers. C’est le spectacle, Là, ça n’existe pas. On ne descend pas vers l’éclatement du texte. La lecture fait remonter vers lui, vers le lieu où il n’est pas encore dit. Dans une relation personnelle, dans la vie, il y a surgissement de la parole, et rien à faire, on ne le retrouve, jamais, ni au cinéma ni au théâtre. Il y a une sorte de passage à I’acte du texte qui l’use qui le vieillit. Dans Le Camion, sauf moi qui le connaissais pour l’avoir écrit, personne n’avait entendu le texte. Bien sûr, c’est un risque très grand. Le Camion, c’est ce risque là.
C’est un texte approximatif et interchangeable pour la plus grande part. Il y a ça qui compte beaucoup. À tout moment, je pouvais m’autoriser à tout changer. Le film s’est fait en même temps qu’il s’est filmé.
source : leseditionsdeminuit.com

(récup légèrement ajustée).

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Message par animal Jeu 12 Jan - 22:18

Et c'est un film qui m'avait beaucoup marqué et intrigué que j'ai revu. Le rythme très particulier de l'auteure, le glissement fantomatique sur les routes le long des zones industrielles et commerciales du 78. Plus réveillé et préparé à la structuration inattendue du film je n'en ai pas été moins impressionné. Improvisation mais grande attention au détail, jusqu'aux ruptures de la narration, les pauses cigarettes ou considérations sur l'exercice de la lecture. Tout ça fait partie de l'ensemble, c'est une respiration de l'esprit qui fait partie de l'entièreté du film et de son effet.

Comme toutes les pistes inachevées de la famille, de la politique, du non rapprochement entre cette femme et cet homme, il y a un ressassement "ouvert" qui est grisant, le rien, ou presque rien, s'approche d'un absolu. C'est un film superbe. Une démonstration sur le texte, le langage, la solitude, le temps autre du dire et de l'écouter sans rentrer dans l'imaginaire sauvage. Intériorisé mais ouvert à tout.

Et il y a toujours cette sensualité du texte et de la parole.

Quelques brumeuses images :

Marguerite Duras Vlcsna23
Marguerite Duras Vlcsna24
Marguerite Duras Vlcsna22
Marguerite Duras Vlcsna25

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Message par Tristram Mer 14 Fév - 11:09

Qu'est-ce qui déclenche la création chez Duras ? éléments ici

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Message par Tristram Dim 11 Oct - 1:46

India Song

Marguerite Duras India_10

À l'ambassade de France en Calcutta, dans les années 30, l’épouse de l’ambassadeur promène son ennui en dansant avec ses prétendants.
Les personnages errent accompagnés de la musique originale de Carlos d'Alessio et de voix off, y compris les leurs ; il paraît que ce choix de ne pas faire parler les acteurs à l'image est dû à une méconnaissance des contraintes de l'enregistrement sonore en live par la réalisatrice (et scénariste)...
Ces oisifs fruits de l'exploitation coloniale traînent donc (assez fastidieusement) leur tædium vitæ ; un petit rappel en avance du glamour In The Mood For Love...
La photo est excellente, tirant remarquablement parti du grand miroir en pied (comme on le voit sur l'affiche).
Long hymne à la lenteur. Évocations de chaleur, de mousson ; fumées, d’encens, des usines, des crématoires.
Puis, une nuit, le vice-consul de France à Lahore, écarté de son poste parce qu'il a tiré à la carabine sur des lépreux, lui crie son amour en plein bal.
Excursion aux îles, résidence de « l’Inde blanche », les voix off dialoguent, commentant leurs remémorations (effet particulier, seyant, des assertions soulignées d’un « oui », dénégations d’un « non »).
Action off. Les « amants du Gange » avaient essayé de mourir ensemble dans une chambre de bordel de Chandernagor. On retrouva le peignoir de la disparue sur la plage.

Duras joue des variations sur des thèmes déjà présents dans Le Vice-Consul, comme la mendiante venue du Laos vendre son enfant.
Près de deux heures. Disponible gratuitement sur Arte jusqu'au 29/11, en hommage à Lonsdale.

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