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Jérôme Ferrari

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Message par topocl Sam 17 Déc - 16:00

Jérôme Ferrari
Né en 1968


Jérôme Ferrari 7cd32310



Jérôme Ferrari, né en 1968 à Paris, est un écrivain et traducteur français.

Jérôme Ferrari effectue une partie de ses études à la Sorbonne, où il obtint la licence de philosophie de l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Ses parents sont originaires de Fozzano et de Sartène, et il a lui-même vécu en Corse et enseigné la philosophie au lycée de Porto-Vecchio. Durant cette période, il a organisé notamment des cafés philosophies à Bastia, puis enseigné au lycée international Alexandre-Dumas d'Alger, au lycée Fesch Ajaccio jusqu'en 2012, et au lycée français Louis Massignon d'Abou Dabi jusqu'en 2015.

Depuis la rentrée 2015, il enseigne la philosophie en hypokhâgne, au lycée Giocante de Casabianca de Bastia.

Il obtient le prix Goncourt 2012 pour son livre Le Sermon sur la chute de Rome.

Œuvre

Variétés de la mort (nouvelles), 2001
Aleph zéro, Ajaccio, 2002
Dans le secret, 2007
Balco Atlantico, 2008
Un dieu un animal, 2009
Où j'ai laissé mon âme, 2010 : Page 1
L'Art dans « Le Monde comme volonté et comme représentation » d’Arthur Schopenhauer, 2011
Le Sermon sur la chute de Rome, 2012 : Page 1
Le Principe, 2015 : Page 1
A fendre le coeur le plus dur 2017 : Page 1
A son image , 2018 : Page 1 ,

màj le 11/11/2018

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Message par topocl Sam 17 Déc - 16:03

Où j'ai laissé mon âme

Jérôme Ferrari Image153

Beau livre, très fort, très dense, très remuant.

« seul compte ce qu'il a fait, non ce qu'il a voulu. »

La guerre d'Algérie et la torture : une guerre de plus dont les hommes sont revenus muets, marqués à vie. Sans doute pouvaient-ils refuser, mais bien peu l'on fait. Une chose est sûre, à la lecture  de ce roman, c'était quasiment infaisable. On le lit terrorisé en se disant : j'aurais pu en être, j'aurais pu être confrontée à ce choix-là, en fait à ce non-choix là.
Au delà des idées, Ferrari nous offre un petit roman parfait, de concision, de qualité littéraire. Roman du doute, magistral de maîtrise. Quel est le pire des tortionnaires, du chrétien tourmenté, du terroriste charismatique ou du va-t-en-guerre droit dans ses bottes ? Dans ce trio fascinant et diabolique la violence avance triomphante, l'homme est toujours perdant, et Dieu semble s'en laver les mains.

Il a le pouvoir de faire apparaître ou disparaître une paire de chaussures, de décider qui doit rester nu et combien de temps, il peut ordonner que le jour et la nuit ne franchissent pas les portes des cellules, il est le maître de l'eau et du feu, le maître du supplice, il dirige une machine, énorme et compliqué, pleine de tuyaux, de fils électriques, de bourdonnements et de chair, presque vivante, et il lui fournit inlassablement le carburant organique que réclame son insatiable voracité, il la fait fonctionner mais c'est elle qui régit son existence, et contre elle, il ne peut rien. Il a toujours méprisé le pouvoir, l'incommensurable impuissance que son exercice dissimule, et jamais il ne s'est senti aussi impuissant.

(commentaire récupéré)


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Message par Chamaco Sam 17 Déc - 18:34

J'ai dans ma PAL : Le sermon sur la chute de Rome de ce Sartenais d'adoption...
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Message par topocl Sam 17 Déc - 18:47

Ce n’est pas celui que j'ai préféré (enfin, c'est un euphémisme). mais des goûts et des couleurs...

Le sermon sur la chute de Rome

Jérôme Ferrari Image135

Le début, j’ai adoré. Cette histoire d'une famille à travers le siècle, avec les hommes qui partent à la guerre et les femmes qui attendent le courrier, ou leur mort, et élèvent les enfants. Tout cela partant d'une vieille photo retrouvée au fond d'un tiroir dont l'analyse révèle bien des ressentis et des non-dits, c'était fait pour moi. Les générations suivantes avec leurs illusions, leur insouciance, leur égocentrisme généreux. J'ai aimé aussi le style assez brillant et mélodieux.

Et puis le vent tourne. Tous les protagonistes deviennent veules, mauvais, vulgaires, la baise et l'argent mènent le monde, Jérôme Ferrari montre la « chute des empires » et cela devient sordidement inélégant. Je ne pense pas que le monde ne soit peuplé que de gens sordides, coléreux, mesquins et cette vision pessimiste me paraît assez bornée. Curieusement, peu à peu, Ferrari se perd dans les défauts de son style, on a l'impression que le point n’existe plus comme signe de ponctuation, cela prend un aspect boursouflé à la limite du pédant.

Et la pédanterie se déploie dans les dernières pages, le fameux sermon sur la chute de Rome, qui m'est resté assez obscur : Ferrari, dont on sait qu'il est professeur de philosophie, n'a pas su choisir entre roman et philo, et qu'est-ce qu'un bon roman, si ce n'est celui qui n'a pas besoin d'explications, qui se suffit à lui-même ?

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Message par tom léo Mer 29 Mar - 22:08

Jérôme Ferrari 41sify10

Le sermon sur la chute de Rome


En ce qui me concerne j'ai beaucoup aimé. Juste quelques remarques et opinions personnelles :

D'abord le style et le langage m'ont parlé. D'accord, on pourrait discuter si les très longues phrases de certaines parties sont dans un français habituel ou pas, mais il me semble que cela reste lisible. Derrière l'apparente distance neutre, il se cache des tournures, des phrases assez drôles, voir, ironiques, cyniques (peut-être trop?).

Mais ce qui me plaît avant tout c'est le contenu, le « propos ». Peut-il être mal compris, pris comme une morale, ou une description de plus en plus apocalyptique de l'être humain ? Certes, je ne peux pas prétendre d'avoir compris toutes les implications du roman, ni du Sermon en soi d'Augustin. Mais à mon avis il ne s'agit pas avant tout d'une condamnation (par exemple) de ceci et cela, ni de décrire juste des choses de plus en plus grotesques. A voir de plus près, chaque bribe d'histoire, de personne, de lieu dans ce roman est intimement atteint par le flux du temps : cela commence avec ces pages merveilleuses du début à partir d'une photo d'un « monde disparu », et cela continue ailleurs : la mort des uns et des autres, la guerre ici et là, les changements en somme dans une vie aussi etc.... Est-ce que cela est si loin ? A mon avis Ferrari décrit ici à partir de l'expérience de l'état transitoire de tout (et tout peut-être « monde », comme quelqu'un disait) – une expérience en fin de compte partagée par nous tous, même contre notre volonté ! - notre place dans le monde et on est comme invité : Et qu'est-ce qui reste ? Sur quoi je batis vraiment mon édifice ?

Les parallèles avec Saint Augustin et la chute de l'empire romain semblent seulement à première vue inadaptés ou tirés de loin.  Augustin, grand penseur, mais aussi prédicateur, se trouvait dans un charnier d'époque. Nous ne pouvons même pas imaginé ce qu'a signifié pour les Romains l'invasion des « barbares » : la fin d'un monde... Si là on transpose ce mot sur le roman, certes, on pourrait se retenir d'utiliser « empire » pour le monde corse et « barbare » pour ceci ou cela! Mais l'essentiel se trouve probablement dans les réponses d'Augustin : Au lieu de se révolter contre l'état éphémère inhérente de ce monde et aussi de nos répères si bien aimés, il faut lâcher prise. Comme si l'essentiel ne consiste pas à s'identifier à 100% avec un état (= un monde) somme toute transitoire, mais de se détacher. Des grands mots ? Cela peut sonner comme cela pour certains ou mettre de malaise comme si cela impliquerait que ce monde n'aurait pas de valeur. Non, ce n'est pas ça, mais pour moi cela me semble (« terriblement ») actuel et proche.

Voilà une/ma lecture du livre.
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Message par tom léo Dim 10 Sep - 8:58

Jérôme Ferrari 41pcng10

Le principe

Originale: Français, 2015

CONTENU :
Fasciné par la figure du physicien allemand Werner Heisenberg (1901-1976), fondateur de la mécanique quantique, inventeur du célèbre "principe d'incertitude" et Prix Nobel de physique en 1932, un jeune aspirant-philosophe désenchanté s'efforce, à l'aube du XXIe siècle, de considérer l'incomplétude de sa propre existence à l'aune des travaux et de la destinée de cet exceptionnel homme de sciences qui incarne pour lui la rencontre du langage scientifique et de la poésie, lesquels, chacun à leur manière, en ouvrant la voie au scandale de l'inédit, dessillent les yeux sur le monde pour en révéler la mystérieuse beauté que ne cessent de confisquer le matérialisme à l'œuvre dans l'Histoire des hommes.

REMARQUES :
Un jeune étudiant de philosophie des années 80 met sa propre vie en dialogue avec celui du physicien allemand Werner Heisenberg et son époque, ainsi que ses découvertes essentielles dans la mécanique des quantas et le principe d'incertitude. En cela des mots clés comme par exemple « position, vitesse, energie, temps » servent comme point de départ pour montrer d'un coté dans des réflexions plus ou moins compréhensibles certains éléments de la théorie scientifique, et d'autre part, comme des expressions à partir desquelles on peut comprendre des processus même dans la vie du scientifique allemand, son temps, la société. ET notre époque. Ainsi on pourrait bien discerner trois niveaux de lecture différents, ou disons trois pôles ?!

Celui craignant déjà le mot de « physique » pourrait être étonné de découvrir ici en passant des explications abordables et passionnantes pour une théorie complexe, celle de l'incertitude, des quantas. On sera étonné comment Ferrari met son jeune narrateur (alors étudiant de philosophie, donc un peu un alter ego de Ferrari?) dans les questionnements que provoquent alors les découvertes : cette nouvelle physique met en question une compréhension classique et des façons classiques de procéder. Elle change et changera notre idée du monde, introduit un aspect d »'incertitude » là, où nous aspirons tellement à des certitudes inébranlables. Ces notions d'une compréhension d'un monde vont changer nos idées. Mais on pourrait aussi – avec certaines énoncés du texte – dire qu'une telle physique demande un changement du regard, une sorte de flexibilité intérieure, voir de créativité. Ainsi – si on accepte ces mots comme approches – on pourrait bien prétendre qu'il y ait une fructification, une relation vivante entre théorie scientifique, observations concrètes ET idée, conception du monde et réalisation dans notre époque et notre vie.

Une ouverture d'esprit, voir un changement d'attitude est demandé, exigé par l'observateur pour se libérer d'anciennes contraintes et visions. Ainsi on dit dans le texte une fois que « le principe d'incertitude surpasse le monde des atomes pour étendre son influence sur les hommes ».

Le narrateur, « alter ego » proche de Ferrari lui-même, s'adresse au Heisenberg décédé dans une très grande partie du livre. Il questionne ses découvertes, mais aussi la vie de l'homme qui surtout dans les années du fascisme en Allemagne connaissait un positionnement qu'on a jamais pu définir exactement. Là alors c'est un bon exemple comment le « flou » de la théorie, réjoind comme description la vie de l'homme. Il y a d'autres équivalents dans le livre. Le jeune Heisenberg de l'événement clé de Helgoland est montré comme un homme proche de la nature, prêt à s'étonner, voir s'enthousiasmer face à la beauté. Autre approche vers les réalités présentes ?! Ainsi on trouvera dans sa vie, comme dans celles de beaucoup de physiciens et scientifiques de son époque, un certain « mysticisme ». N'a-t-il pas regarder « par dessus l'épaule de Dieu » ?

On accompagne Heisenberg sur ce plan de découvertes scientifiques et des implications dans une vie de relations avec son époque, l'imbrication avec l'Histoire. Mais on parle peu de la personne familiale ou autre. Donc, ce n'est pas une biographie, ni non plus une pure vulgarisation d'un sujet scientifique. Premières expériences : les années 20, puis les relations partiellement turbulentes avec d'autres grandeurs, le temps dans le IIIème Reich, la recherche commandé pour une bombe (atomique ), l'enfermement temporaire en Angleterre avec d'autres jusqu'à un discours clé et célébre à Munich dans les années 50.

Le procédé de l'auteur est intéressant, voir convaincant, et pose des questions autour de la science et ses implications. Mais aussi sur la possibilité de tirer des conclusions de la théorie sur notre monde, ou de voir l'influence de nos attitudes sur les possibles conséquences dans la recherche scientifique. Peut-être faut-il un minimum d'intérêt pour le sujet ? Oui, bien sûr. Mais il me semble que l'auteur réussit bien en passant de faire expliquer des bribes du « principe d'incertitude », et dans la science, et dans nos vies.


mots-clés : #philosophique #science
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Message par topocl Jeu 15 Fév - 13:33

A fendre le cœur le plus dur
avec Oliver Rohe
Jérôme Ferrari Fendre10

Ce texte est paru, initialement aux Editons Inculte dont Olivier Rohe est l'un des créateurs,   dans le cadre de l'exposition éponyme qui exploite des archives mêlant  photographies et textes d'un écrivain-reporter de guerre, Gaston Chérau, envoyé en Libye lors de la guerre italo-turque en 1911. Quelques photos reproduites donnent un reflet de ce terrible corpus de plus de 200 clichés.

Jérôme Ferrari Chyrau10

Passée la sidération de la découverte de clichés reproduisant la pendaison de 14 rebelles dans une mise en scène soigneusement organisée, les auteurs les mettent en perspective avec le reste du corpus, et  réfléchissent  à la propagande photographique en temps de guerre, et au sens à décrypter à travers ces cliches, à la question de la représentation de la  violence dont l'obscénité même justifie, ici, la nécessité.

Ce texte est constitué de petits chapitres qui lui donnent un côté un peu disparate. Il laisse un petit goût de superficialité cachée derrière une rhétorique pompeuse, qui le mène parfois à la limite de l'obscur. On regrette que la seule réflexion soit mise en avant, au détriment d'une connaissance du photographe, Gaston Chérau, dont la position face à ces clichés n'est que vaguement ébauchée (à tel point qu'on ne peut savoir si elle s'appuie sur l'analyse des documents écrits, ou s'il s'agit d'une interprétation des auteurs). Il n'en demeure pas moins qu'il pose de bonnes questions, fait émerger des documents jusque là oubliés quoique primordiaux, et qu'on y trouve quelques idées à glaner. L'exposition devait être passionnante!

mots-clés : #colonisation #essai #guerre #violence


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Message par tom léo Sam 10 Mar - 15:59

Jérôme Ferrari Image153

Où j’ai laissé mon âme

Français, 2010

CONTENU :
4ème de couverture a écrit:1957. A Alger, le capitaine André Degorce retrouve le lieutenant Horace Andreani, avec lequel il a affronté l'horreur des combats puis de la captivité en Indochine. Naguère victimes, ils sont désormais chargés de soumettre à la question les prisonniers d'une guerre qui ne dit pas son nom. Si Andreani assume pleinement ce nouveau statut de bourreau, Degorce, dépossédé de lui-même, ne trouve l'apaisement qu'auprès de Tahar, commandant de l'ALN retenu dans une cellule qui prend des allures de confessionnal où le geôlier se livre à son détenu... Sur une scène désolée, fouettée par le vent, le sable et le sang, trois personnages réunis par les injonctions de l'Histoire témoignent de l'impossible vérité de l'homme dès lors que l'enfer s'invite sur terre.

REMARQUES :
La période principale de l’ »action » centrale du roman se trouve dans l’Algérie de l’année 1957. Mais tant de retours en arrière, des sauts en avant…, des perspectifs différents enfin aussi. Car on commence et on termine en écoutant ce Horace (encore un Corse dans l’œuvre de Ferrari!), s’adressant comme dans une lettre, comme dans un espèce d’amour déçu, de respect voir d’amour ET d’accusation et de dégoût (c’est souvent lié, n’est-ce pas?) à son « capitaine », André Degorce.

De lui parle plutôt le narrateur omniscient dans les autres parties : Il avait été à deux reprises quasiment un « survivant ». La première fois il était jeune résistant dans la France occupée, puis arrêté et envoyé à Buchenwald… Il revenait amaigri, était accueilli par la veuve un peu plus âgé Jeanne-Marie qui deviendra sa femme. Il se décidait pour une carrière militaire et atterrissait en Indochine. Et voilà : deuxième arrestation, deuxième expérience de torture et d’inhumanité. C’est là qu’il devenait une personne de respect pour Horace, voir un héro de résistance.

Et « maintenant », en 1957 ? Responsable pour les arrestations des insurgés, des revoltés en Algérie, les rôles s’inversent… et la victime d’autrefois deviendra bourreau. Avec toute sa « mauvaise conscience » d’un croyant d’autrefois, il n’arrive pas à surmonter ses contradictions intérieures. Comment alors encore écrire à la femme aimée, aux enfants ??? Mais Andreani, lui, engagé aussi dans ces entreprise, n’a pas de scrupules, et commence à « mépriser » ce moralisme faux et inadéquat...

Voilà, c’est autour de ces questions de souvenir, d’empathie, du « devoir », de la dignité et de la culpabilité que tournent à mon avis ce roman dense, et qu’on trouve certaines idées très fortes et dérangeantes. Plus qu’un roman politique, c’est un roman sur les combats intérieurs : la tentative de rester honnête, mais de ne pas (pouvoir) l’être. Quand est-ce qu’il aurait fallu prendre une décision franche ???

Ferrari a enseigne en Algérie et s’est alors confronté avec ces questions d’une façon existentielle. Ailleurs il semble distant de la foi, mais encore on trouvera ici des références bibliques très à propos en citations : L’assassinat d’Abel ; « ce que vous avez fait aux plus petits... » ; Jésus connaissant les profondeurs de l’être humain (dans son mal).

C’est fort...
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Message par Bédoulène Sam 10 Mar - 18:02

merci Tristram ! jamais lu (encore) mais sujet intéressant

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Message par églantine Dim 2 Sep - 15:10

Jérôme Ferrari A_son_12


J'ai lu A son image : assurément il marquera la rentrée littéraire 2018 . Une portée philosophique Schopenhauerienne qui devrait accrocher le lecteur , des questionnements sur la responsabilité de chacun , sur le sens de l'image comme vérité ou pas , objectivité du photographe , la temporalité et la valeur de l'image au sein de celle-ci , l'absurdité de l'acte et les issues possibles ( On pense à Dostoievski souvent ) .
A travers le portrait d'Antonia , photographe reporter , qui durant un instant se laissa illuminer et éblouir par les premiers rayons d'une belle journée estivale , instant de douce félicité fatale , l'auteur invite le lecteur à ses funérailles dans une approche rétrospective narrative à l'image de la jeune femme mettant en lumière les errances et tâtonnements de l'être humain dans l'obscénité de la vie et sa représentation , les faiblesses et manquements , la traversée du temps et l'inanité de l'art photographique pour capter l'instant . Tout est déjà fini avant même le clic du photographe .
Fortement documenté pour nous faire découvrir quelques grands photographes qui ont marqué leur temps par une organisation narrative ingénieuse , embrassant l'espace-temps habilement aussi , voilà une oeuvre romanesque impactante qui devrait échapper au pilon .
Plus subjectivement , je n'ai pas éprouvé grand plaisir dans ma lecture : Probablement trop distancié dans son écriture , aussi brillant qu'il soit , Jérôme Ferrari ne force pasl'adhésion de son lecteur . Probablement qu'il me faudra continuer à le découvrir pour apprécier l'étendue de son talent et sa grande (trop ? )maîtrise de l'architecture romanesque .
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Message par tom léo Mar 23 Oct - 18:58

A son image

Jérôme Ferrari A_son_12


Originale: Français, 2018

CONTENU :
Le point de départ est rapidemment raconté : Antonia a 38 ans, elle est photographe avec des expériences lors de la guerre en Ex-Yougoslavie. Après une dizaine d’années elle rencontre en Août 2003 à Calvi/Corse à nouveau Dragan, un soldat serbe, et prolonge son séjour court. Tôt le matin, fatigué, elle veit rentrer vers le Sud de l’île, chez ses parents, mais elle aura un accident mortel.

Das la forme d’un Requiem pour la morte des morceaux et images de la vie et du faire de la décédée viendront dans la tête du prêtre célébrant, son parrain. Et on se rappelle aussi du nationalisme corse, de la violence de guerres différentes et des relations au moins ambigues et multiples entre photographie, image, réalité et mort...

REMARQUES :
Ce nouveau roman de Ferrari est à nouveau à multiples couches et niveaux, agilement conçu. Mais derrière une apparente multitude de sujets et de lieux d’action on retrouve quelques fils conducteurs, quelques accents communs, liés entre eux d’une façon assez impressionnants.

Lieu et aussi cadre temporaire principaux de nombreux chapitres sont le jour de l’enterrement d’Antonia. Nous prenons en large partie la perspective du prêtre, son cousin et parrain de 17 ans plus âgé qu’elle. Il était depuis toujours proche d’Antonia, et ses pensées retournent à différents moments clés de la vie de sa cousine : comment elle recevait à travers lui sa première caméra, dirigeant à la suite sa vie comme d’abord journaliste locale, pis reporter de guerre en Bosnie. Y sont intercalés par exemple deux chpitres historiques sur des photographes de guerre du Xxème siècle, avec leurs questionnement autour de la reconstitution de la « vérité/réalité », un service imposé par les autorités ET aussi la mise à nu des violences, des absurdités qui resulte en accusation et refus. Et toujours, par rapport à la photographie, et au-délà, la question de la relation entre réalité et image, peut-être aussi : entre vie en mouvement et instant gelé (=mort), entre exigence et réalité.

Autre sujet fort du livre (on admire quand même le culot de Ferrari…) les relations complexes d’Antonia avec le nationalisme corse, montré dans ses contradictions, voir sa ridiculité...

Et mine de rien, en prenant le Réquiem comme guide extérieur de l’assemblage des chapitres, et les pensées du prêtre célébrant comme point de vue, nous approchons une autre vie complexe dans sa lutte avec l’absurdité, le non-sens de la mort innocente d’Antonia : face à la foi, il ne trouve pas de réponses, mais un immense lassitude. La description de la vie intérieure de ce prêtre est – à mon avis – encore un signe de la complexité des questionnements de Ferrari, et aussi d’une forme de « spiritualité » qu’il faudrait pas trop vite nommer et vouloir coincer dans des définitions. Très fort ! Dans ce contexte on pourrait peut-être comprendre le titre aussi comme un rappel discret à l’énoncé sur la création « à son image »…

Il est probablement impossible de rendre toute la complexité et richesse du roman dont je fus conquis ! Bravo !

mots-clés : #guerre #spiritualité
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Message par topocl Mar 23 Oct - 19:33

J'hésite, j'hésite...

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Message par Chamaco Dim 11 Nov - 19:04

A son image

Desde La Havana

Le livre de Jérome Ferrari est une longue messe pour une défunte servant de support à l histoire  de l'héroine  du roman dont le parrain de baptême  devenu prêtre d'un petit village de Corse profonde accompagne le parcours de sa naissance à sa mort.
Cette longue litanie ponctuée par les divers actes du religieux accompagne l"âme de la défunte pour la conduire au tombeau dans un processus similaire a la vie du Christ (à son image ) et son martyre a celle du peuple corse dans sa jeunesse autonomiste insouciante puis tragique, c est du moins ce que j ai été amené à comprendre.
La vie de cette jeunesse encadrée par les traditions , les codes de l'honneur pour lesquels dévier signifie trahison et mort.
D"une écriture poignante et parfois insoutenable Ferrari remue la gangue qui englue de façon inéluctable, inviolable, enserre les comportements sous le regard d'une société ou tout est tracé d'avance, contrôle, tout est écrit avant  que cela commence, c est un hymne à l'âme corse, souvent pénible, impénétrable  pour qui n est pas issu de la famille.
Rarement un livre n a été aussi prenant pour moi, bouleversant, lourd de sens, cotoye sans vraiment y participer, car pièce rapportée depuis mon enfance, des histoires de familles comme beaucoup dans cette île, des histoires qui se répètent jusqu'à l 'absurde, comme des successions de miroirs à facettes desquelles on préfère s'éloigner en ne cherchant pas a comprendre au sens de prendre avec car que comprendre alors que l'on est rejette de l autre côté de l'Histoire...

Amitiés à toutes et tous.


Dernière édition par Chamaco le Mar 13 Nov - 21:41, édité 1 fois
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Message par Bédoulène Dim 11 Nov - 19:54

merci Chamaco ! bon séjour !

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