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Claude Simon

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Message par Nadine Dim 4 Déc - 21:45

Claude Simon 
1913-2005


Claude Simon Claude11


A partir de personnages peu individualisés, de sujets en apparence peu importants, de l'histoire des hommes, l'écrivain tente de saisir une réalité dont "(...) le propre est de nous paraitre irréelle, incohérente". il s'avoue en effet" hanté par deux choses : la discontinuité, l'aspect fragmentaire des émotions qui ne sont jamais reliées les unes aux autres, et en même temps leur continuité". D'où l'effort de substituer au temps classique une "durée vague, hachurée" où le passé et le présent coincident. la phrase participe à cette recherche: longue, coupée de parenthèsesqui introduisent des descriptions minutieuses ou des analyses psychologiques"fragmentaires". Elle parvient à suggérer les rapports complexes de la conscience et de la réalité.
Source Le petit Robert des noms propres


Différence avec Marcel proust (sic) :
  • Le modèle vanté par Proust saisit des flux de conscience
    et les vestiges d'une perception gustative nommés « mémoire involontaire » (la métaphore de la madeleine)
     pour recomposer l'image d'une société disparue.
    Par cette opération, le Narrateur proustien accède à l'éternité d'un temps sublimé par l'imaginaire et goûte à la toute-puissance de la création artistique.

  • Simon prend le chemin inverse : il diffracte la mémoire en fragments de souvenirs,
    en figures floues ou en bribes d'espaces-temps irréconciliables les unes avec les autres,
    mettant ainsi en scène les ruines d'une pensée torturée et hantée par les marques physiques de l'histoire vécue.



Source WIKIPEDIA

Bibliographie :

1945 : Le Tricheur
1947 : La Corde raide
1952 : Gulliver
1954 : Le Sacre du Printemps
1957 : Le Vent. Tentative de restitution d'un retable baroque : Page 2
1960 : La Route des Flandres : Page 1
1962 : Le Palace : Page 2
1966 : Femmes (sur vingt-trois peintures de Joan Miró)
1967 : Histoire : Page 2
1969 : La Bataille de Pharsale
1970 : Orion aveugle
1971 : Les Corps conducteurs
1973 : Triptyque
1975 : Leçon de choses
1981 : Les Géorgiques : Page 2
1984 : La Chevelure de Bérénice (Reprise du texte de Femmes)
1986 : Discours de Stockholm, texte prononcé à l'occasion de la remise du Prix Nobel
1987 : L'Invitation : Page 1
1988 : Album d'un amateur
1989 : L'Acacia
1992 : Photographies, 1937-1970
1994 : Correspondance avec Jean Dubuffet
1997 : Le Jardin des Plantes,
2001 : Le Tramway : Page 1
2009 : Archipel et Nord
2012 : Quatre conférences
2015 : Le Cheval

màj le 02/09/2023


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Message par Fancioulle Dim 4 Déc - 21:59

Je ne suis absolument pas d'accord avec la fin, tirée de Wikipedia.
Je ne crois pas que Simon diffracte quoi que ce soit, surtout la mémoire : c'est simplement qu'à ses yeux, la mémoire est fragmentaire par nature et l'écriture du souvenir passe dès lors par une esthétique du fragment car il serait vain et factice de tenter une recomposition fluide à la manière des biographes mal inspirés (cf. Géorgiques, III il me semble). Tout cela est expliqué également ailleurs, peut-être la préface d'Orion aveugle, il faut que je retrouve ça
Il faudrait développer bien davantage, mais voilà déjà ces quelques mots.
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Message par Nadine Dim 4 Déc - 22:14

Super Sullien, Animal va être comblé. Il demandait un fil éclairé hihi

De mon côté, pour le seul lu (la route des Flandres) j'aurais dit qu'il ne diffracte en effet pas du tout, car la puissance ne perd jamais sa force, même lorsque nos repères se troublent; 
Et j'aime bien par contre la notice du petit Robert.

Tu as raison de commencer à souligner le simpliste de la typologie Proust/Simon : c'est par contre une superbe invite à la palabre et l'affinage.
j'espère que tu nous en diras plus, c'est un des souvenirs les plus beaux de lecture que j'ai en mémoire. Je ne suis pas sortie de la transe et n'ai jamais tenté d'en décortiquer quoi que ce soit. j'aimerais bien comprendre. mais n'oserai pas le rouvrir. C'est comme un totem.
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Message par Fancioulle Dim 4 Déc - 22:23

Claude Simon 41kurv10

J'ai pêché sur Parfumdelivres un souvenir de relecture (La route des Flandres,ma première fois avec Simon) :

Quelle joie de retrouver cette narration erratique, qui défie toute linéarité historique, et s'affranchit pour ainsi dire des carcans de la temporalité propre au récit (car au fond, la question qui se pose et s'impose à un des narrateurs, c'est bien de savoir si l'expérience traumatique de cette guerre peut se lire autrement que dans la fulgurance de moments isolés qui ne renouent que difficilement, et comme après-coup, à une cohérence dont on peut toujours se demander si elle n'est pas l'artifice du ou des lecteurs - qu'ils appartiennent ou non au roman) ; dès lors, dans l'écriture rétrospective, qui est moins une écriture de l'expérience vécue que de l'expérience telle qu'elle se présente*, dans cette écriture, donc ouvre un espace où la langue se délie en un flux apparemment désordonné de pensées qui semble refuser, repousser âcrement le lecteur. Des romans que j'ai lus, c'est un des rares à faire sens autant par le dire que par le dit, sans que l'un ne vienne jamais gêner l'autre.

Plus tard...
Le côté artificiel ou exercice de style est bien moins sensible chez C. Simon que dans certaines tentatives aventureuses de la génération Nouveau Roman... Lors de mes deux lectures, j'ai été assez intrigué par ce paradoxe d'une temporalité brisée (conformément à cette esthétique du collage) , comme une trame dont les fils s’effilocheraient, mais qui ne brise pas pour autant le sentiment d'une progression (davantage une trouée qu'une marche en avant), atteignant presque la limite de la narration, mais sans jamais l'outrepasser et prendre le risque de ne pas laisser sa place au lecteur.
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Message par Nadine Dim 4 Déc - 22:25

Oh merci Sullien !

je cherche une bibliographie mais elle est énorme. j'ai été voir sur le site de l'association des lecteurs de Claude simon.. Bon on verra.
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Message par Fancioulle Dim 4 Déc - 22:27

Nadine a écrit:Oh merci Sullien !

je cherche une bibliographie mais elle est énorme. j'ai été voir sur le site de l'association des lecteurs de Claude simon.. Bon on verra.
Son oeuvre est assez monumentale, moins par le nombre que par la densité.
Chaque récit est une véritable touffe : difficile d'y frayer.
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Message par Nadine Dim 4 Déc - 22:28

A quoi réfère l'astrerisque ? A "ecriture rétrospective" ?
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Message par Fancioulle Dim 4 Déc - 22:30

Nadine a écrit:A quoi réfère l'astrerisque ? A "ecriture rétrospective" ?
Aucune idée. J'avais dû vouloir faire une note en postant le commentaire, note que j'ai fini par oublier. Surprised
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Message par Nadine Dim 4 Déc - 22:32

"(...)autant par le dire que par le dit" : wahou. ça va plaire à Shanidar ! Shanidaaaar! Viens voir !
bah dis donc Sullien.. 23 ans pas perdus. Chapeau. Tu donnes matière ! ^^
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Message par Nadine Dim 4 Déc - 22:34

Le point paradoxal que tu évoques : n'est-ce pas appuyé par cette histoire de tableau (qui dans mon édition ornait la couverture) , tout ce développement du pictural comme allégorie de la pensée ?
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Message par Hanta Mar 6 Déc - 23:06

L'invitation

Claude Simon 97827012

Je n'ai pas réussi à accrocher. Les phrases de plusieurs pages, sans point, ont eu raison de mon attrait.
J'ai personnellement besoin d'un rythme un minimum rapide, ou du moins d'une cadence, ce qui n'est pas le cas dans ce récit.
L'histoire, personnellement, à cause de ces phrases, je n'ai pu en retenir grand chose.
Et cette manière de décrire quasiment dans un exercice de médecine légale, chaque acte, chaque mouvement d'un personnage chaque situation m'a lesté et ce récit pourtant court fut pour moi interminable.
C'est pourtant un brillant exercice de style, excellemment écrit, ce n'est juste pas du tout pour moi.
Je n'ai jamais été fan du Nouveau Roman et cela se confirme. Pour autant je ne déconseille pas ce livre il a une grande qualité mais qui ne m'accroche pas.
Si je dois l'évaluer ce sera l'évaluation de mon expérience avec lui non une volonté d'objectiver sa qualité.[/center]


mots-clés : #nouveauroman
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Message par shanidar Jeu 8 Déc - 14:39

Trois remarques par rapport à ce qui a été dit :

Tout comme pour Nadine, La Route des Flandres est pour moi un totem (mais je l'ai relu et rien n'a bougé). L'impression d'avoir eu entre les mains quelque chose de l'ordre du séisme, une narration, une forme qui fait basculer le monde, mon monde, mon univers mental. L'impression d'avoir assisté à une Révolution (tant d'un point de vue littéraire qu'astronomique, c'est dire). On rencontre peu d'écrivains qui parviennent à ce résultat là : un avant eux et un après eux (Sarraute a fait la même chose et Aragon et Enard et...).

Et je rejoins Sullien sur la question du fragment, du mémoriel que l'auteur rendrait par le fragment. Je n'en crois rien. Au contraire, il y a une fluidité, une longueur (celle qui justement ne parvient pas à atteindre Hanta), un étirement dans le temps qui à mon sens évincent l'idée même de fragment. On ne peut pas lâcher la lecture parce qu'elle est une sorte de bloc (c'est là sans doute sa plus grande difficulté), on ne peut pas la découper (essayez de mettre un extrait), on ne peut pas la séquencer ; ce ne sont pas des petits bouts de souvenirs qui s'agencent c'est quasiment de l'ordre du souffle épique, l'immensité d'un chant (et d'un champ de bataille) qui ne se laisse jamais circonscrire.

Dernière remarque, celle concernant l'expérience du continu, du cohérent, d'une histoire qui aurait un début, un milieu et une fin ; cette illusion de la construction narrative à laquelle Simon se refuse me semble le creuset même de la question temporelle qui traverse toute l'œuvre de Simon.

Je compte relire Histoire, bientôt et lire Les Géorgiques, aussi.
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Message par Fancioulle Dim 11 Déc - 20:23

Par l'esthétique du fragment (qu'il a mise en oeuvre par des techniques de collage dans La Route des Flandres), Simon ne souscrit pas à une mode littéraire : il épouse au plus près ce que la ressaisie peut avoir de lapidaire.

L'écriture de Simon est une Weltanshauung, une école du regard, autour de ce qu'il appelle la "persistance rétinienne".
Un exemple saisissant :

Les langues pendantes du papier décollé laissent apparaître le plâtre humide et gris qui s’effrite, tombe par plaques dont les débris sont éparpillés sur le carrelage devant la plinthe marron, la tranche supérieure de celle-ci recouverte d’une impalpable poussière blanchâtre. Immédiatement au-dessus de la plinthe court un galon (ou bandeau ?) dans des tons ocre-vert et rougeâtres (vermillon passé) où se répète le même motif (frise Smile de feuilles d’acanthe dessinant une succession de vagues involutées. Sur le carrelage hexagonal brisé en plusieurs endroits (en d’autres comme corrodé) sont aussi éparpillés parmi les débris de plâtre divers objets ou fragments d’objets (morceaux de bois, de brique, de vitres cassées, le châssis démantibulé d’une fenêtre, un sac vide dont la toile rugueuse s’étage en replis mous, une bouteille couchée, d’un vert pâle, recouverte de la même poussière blanchâtre et à l’intérieur de laquelle on voit une pellicule lilas de tanin desséché et craquelé déposée sur le côté du cylindre, etc.). Du plafond pend une ampoule de faible puissance (on peut sans être aveuglé en fixer le filament) vissée sur une douille de cuivre terni.
Au-dessous du minuscule et immobile déferlement de vagues végétales qui se poursuivent sans fin sur le galon de papier fané, l’archipel crayeux des morceaux de plâtre se répartit en îlots d’inégales grandeurs comme les pans détachés d’une falaise et qui se fracassent à son pied. Les plus petits, de formes incertaines, molles, se sont dispersés au loin après avoir roulé sur eux-mêmes. Les plus grands, parfois amoncelés, parfois solitaires, ressemblent à ces tables rocheuses soulevées en plans inclinés par la bosse (équivalent en relief du creux — ou d’une partie du creux — laissé dans le revêtement du mur) qui en constitue l’envers et sur laquelle ils reposent. Sur leur face lisse adhère quelquefois encore un lambeau de feuillage jauni, une fleur.
La description (la composition) peut se continuer (ou être complétée) à peu près indéfiniment selon la minutie apportée à son exécution, l’entraînement des métaphores proposées, l’addition d’autres objets visibles dans leur entier ou fragmentés par l’usure, le temps, un choc (soit qu’ils n’apparaissent qu’en partie dans le cadre du tableau), sans compter les diverses hypothèses que peut susciter le spectacle. Ainsi il n’a pas été dit si (peut-être par une porte ouverte sur un corridor ou une autre pièce) une seconde ampoule plus forte n’éclaire pas la scène, ce qui expliquerait la présence d’ombres portées très opaques (presque noires) qui s’allongent sur le carrelage à partir des objets visibles (décrits) ou invisibles — et peut-être aussi celle, échassière et distendue, d’un personnage qui se tient debout dans l’encadrement de la porte. Il n’a pas non plus été fait mention des bruits ou du silence, ni des odeurs (poudre, sang, rat crevé, ou simplement cette senteur subtile, moribonde et rance de la poussière) qui règnent ou sont perceptibles dans le local, etc., etc.
Claude Simon. « Générique » de Leçon de choses (Minuit, 1975, p. 9-11)
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Message par shanidar Lun 12 Déc - 11:40

On retrouve ici dans le cadre du tableau et son hors cadre la question évoquée par Nadine du pictural comme allégorie de la pensée.

Et cette expression de 'persistance rétinienne' me ramène immanquablement à Marcel Duchamp dont les expériences optiques restent en mémoire. S'agit-il d'art ou de science ? Quelles descriptions du temps et de la vision nous offrent-elles ?

On pourrait d'ailleurs voir l'écriture de Simon comme une illustration littéraire du travail de Duchamp sur le mouvement en peinture, avec cette 'fragmentation' défragmentée du tableau :

Claude Simon Ducham10
Nu descendant un escalier (1912)
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Message par Fancioulle Lun 12 Déc - 12:08

Oui, ou plus largement des injonctions du futurisme (Marinetti : "nous voulons exalter le mouvement agressif", "la beauté de la vitesse") - d'un Balla par exemple, exploratoire du mouvement. Les pages consacrées à peindre une course hippique, dans La Route des Flandres, sont un exercice de style où l'écrivain renouvelle radicalement les techniques de l'ekphrasis pour rivaliser avec la peinture.
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Message par shanidar Lun 12 Déc - 12:13

alors l'ekphrasis, je l'ai rencontrée chez Carlos Fuentes (Terra Nostra, un bijou) et en deux mots c'est :

la description d'une œuvre d'art (réelle ou imaginaire).

Et tu as tout à fait raison de parler du futurisme italien qui a bien en tête aussi cette idée du mouvement comme représentation d'un temps, d'une époque d'accélération des inventions (chemin de fer, voiture, machine industrielle...).
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Message par Fancioulle Lun 12 Déc - 12:20

shanidar a écrit:alors l'ekphrasis, je l'ai rencontrée chez Carlos Fuentes (Terra Nostra, un bijou) et en deux mots c'est :

la description d'une œuvre d'art (réelle ou imaginaire).
C'est vrai, le sens de ce terme s'est beaucoup spécialisé avec le temps. A l'origine, l'ekphrasis est un exercice d'école de rhétorique qui consiste en une description qui donne à voir de manière très suggestive ; elle correspondrait à un trope comme l'hypotypose.
Simon orchestre aussi bien les deux types d'ekphrasis dans son oeuvre ; s'agissant de la course de chevaux, qui constitue une scène romanesque intégrée à l'intrigue, je pensais plutôt à la première.
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Message par topocl Sam 31 Déc - 13:00

Le tramway

Claude Simon Images95

Il n'y a pas grand chose dans ce tramway que des états vécus dans la plénitude de l'instant et des détails qu'il apporte, de par des descriptions minutieuses faites de notations, digressions, retours en arrière et parenthèses. Mais ce pas grand chose happe, c' est un monde , c'est une vie, un homme finissant  sur un lit d’hôpital et  qui observe, et revit l' enfant qui jadis a observé, sans que cela soit une nostalgie, mais des faits qui émergent de « l'impalpable et protecteur brouillard de la mémoire », mémoire sur laquelle sont passées la mort d'une mère et une guerre vite torchée.
L'intérêt n'est pas tant cette confrontation de deux époques qu'une façon de les dire, de les rouler comme des galets dans la mer, et de les relancer pour un nouveau passage, tout à la fois identique et différent.

Je me dis que qui a aimé cela ne saurait renoncer à lire Christine Montalbetti où on retrouve ce phrasé moelleux et enrobant, un poil d'humour et d'empathie en plus.

(commentaire récupéré)

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Message par animal Sam 31 Déc - 20:17

je ne sais pas trop comment tourner ça. Au futurisme j'associe le mouvement, il y a donc bien un rapport au temps mais qui reste, a priori, le plus souvent défini en unités identiques ou comparables, comme une recomposition de clichés pris à intervalles réguliers et là où les deux se rencontreraient le plus c'est dans cette recomposition en un tout actuel. Le travail sur la forme avec l'écriture/lecture prenant place de fait dans un temps relativement normé (j'ai lu vingt minutes) ça devient intéressant en ça qu'il déroule des temps et des instants de façon très différentes. La recomposition se fait par ajout de strates pouvant se recouvrir mais des strates d'ampleurs et de "vitesses" différentes. Le présent, seul résultat possible ? se trouvant le résultat de cette équation en perpétuelle évolution, la perception du souvenir au présent s'ajoutant au présent pour composer le même souvenir.

Claude Simon Images94

C'est une chose que je ne percevais pas vraiment à la lecture de La route des Flandres, qui avait de faux airs d'épreuve par moments, mais qui m'est apparue après avec L'Herbe et Le Tramway. Je me suis probablement trop retenu à ce qui me dérangeait ou démangeait plutôt. Peut-on être dérangé par la part autobiographique introspective factuel du récit ? Par la nécessité de jeter le récit par dessus une cassure qui se trouve au milieu de toutes ses minutieuse descriptions être indescriptible.

La cassure brutale de la guerre est mécanique. Mécanique est aussi la sensation de l'exercice de style qui n'en vise pas moins les sens et le temps de celui qui lit. Il y a ce paradoxe souvent peu évident à apprivoiser d'une écriture cérébrale à l'extrême qui sert une sensibilité très affinée, qui cherche à aller au plus près d'elle.

Pour l'indicible, la limite du sens on pourrait dégainer Blanchot ou simplement pour évoquer cette famille de geste littéraire dans laquelle la forme est un objet, un outil qui doit ne pas être fini, figé.

C'était dur La Route des Flandres mais il est probable que je le relise un jour. Et à la longue je me rends compte de ce que mes lectures de l'auteur m'ont apporté. Synthétique, c'est affirmer que le temps de soi, tout quantifiable qu'il est n'en reste pas moins une expérience autre aussi infinie que déjà perdue... toutefois persistante.

Et si j'ai relu un ancien commentaire, pas de copier-coller dans cette histoire.

Ah si, un, d'une interview de l'auteur :

The composition of my books gives me great problems. While working on The Flanders Road, I gave a color to each of the themes and characters. Doing this, I could visualize the whole, modify it, improve the placement of the fade-ins, the alterations of scenes, the rehearsals, the curtain calls. One day the composer Pierre Boulez told me that my biggest problem must be that of periodicity, which in music is the frequency of repetitions of one theme or refrain in a composition, often subject to variations or changes of tone. Boulez was exactly right. He did not find too many repetitions in my books, but understood that one of my problems was arranging them well.

A l'arrache ça donne :
La construction de mes récits me pose beaucoup de problèmes. Pour La Route des Flandres, j'ai attribué à chaque thème et chaque personnage une couleur. Ce qui m'a permis de visualiser l'ensemble, le modifier, améliorer le placement, les fondus, l'altération des scènes, les répétitions, les "appels de rideaux" (<- je n'ai pas le vocabulaire qui va avec). Un jour le compositeur Pierre Boulez m'a dit que mon plus grand problème devait être celui de la périodicité, qui en musique est la fréquence des répétitions d'un thème ou d'un refrain, généralement sujet à des variations ou changements de ton. Boulez avait parfaitement raison. Il n'a pas trouvé trouvé trop de répétitions dans mes livres mais a compris qu'un de mes problèmes était de les agencer d'une façon juste.

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Message par Nadine Dim 1 Jan - 9:54

Intéressant, merci Animal.
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