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Je te prie de trouver entre mes mots le meilleur de mon âme.

Georges Brassens, Lettre à Toussenot

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La date/heure actuelle est Jeu 28 Mar - 22:04

322 résultats trouvés pour historique

Hervé Abalain

Le Pays de Galles, identité, modernité

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 61yjd311

Ayant des racines galloises, bretonnes (et tchèques vous imaginez le mélange) j'avais envie de découvrir mes origines culturelles et de découvrir l'histoire d'une culture si méconnue car "écrasée" par l'identité anglaise et du Royaume Uni par extension.
Je me suis donc procuré cet ouvrage à cette fin.
Je n'ai pas été déçu. Monsieur Abelain est fin pédagogue et sait mesurer la dose de détails utiles à une bonne compréhension des diverses périodes et événements importants de l'histoire du Pays de Galles.
Une part conséquente est accordée à la cartographie et l'évolution de la langue pour comprendre les raisons du développement atypique de cette région.
Un très bon ouvrage de vulgarisation historique, clair et intéressant.



mots-clés : #historique
par Hanta
le Dim 25 Juin - 10:43
 
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Sujet: Hervé Abalain
Réponses: 3
Vues: 786

Jim Fergus

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 51zadz10

Mille femmes blanches

En 1875, Little Wolf, un chef Cheyenne décide de rejoindre Washington pour faire une proposition assez incroyable au président Grant : il s'engage à livrer mille chevaux sauvages contre mille femmes blanches, en expliquant que les enfants étant toujours élevés par la tribu de la mère, les bébés qui naîtront de ces unions apprendront au contact de leur mère toutes les techniques blanches pour vivre sans les bisons. Ce qui apparaît comme lumineux ou franchement immoral, soulève un tolet à Washington et Grant entre deux hoquets (peut-être dus à son alcoolisme) quitte la salle scandalisé.

C'est sans compter sur le courrier de centaines de femmes prêtent à s'engager dans cette aventure folle. Le gouvernement fait un rapide calcul et se dit qu'un cheyenne apprivoisé vaut mieux qu'un cheyenne humilié. Dont acte. Seulement voilà, nous sommes loin des mille femmes blanches et il va donc falloir aller recruter dans les prisons et les asiles un peu de chair toute rose.

C'est ainsi que nous découvrons May Dodd, une femme enfermée dans un asile et qui pense échapper à l'horreur blanche en nomadisant avec les cheyennes.

Si le Journal de May Dodd permet au lecteur de découvrir mille et une facettes de la vie indienne, des relations (souvent basées sur des incompréhensions) entre les armées blanches et les tribus qu'elles tentent de parquer (soit disant pour les protéger mais en réalité pour mieux pouvoir les surveiller), j'avoue ne pas avoir été touchée par l'écriture extrêmement naïve de Jim Fergus.

Le texte n'est pas désagréable à lire, il gratte fort justement aux endroits qui font mal (le rapport aux femmes, à la sauvagerie, aux rituels, au respect de l'autre) mais l'ensemble est englué dans une sorte de mélasse un peu pâteuse, qui ne parvient pas à emporter la lecture.

Pas mal de fond mais pas assez de forme...



mots-clés : #historique #journal #minoriteethnique #Amérindiens
par shanidar
le Lun 19 Juin - 18:51
 
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Sujet: Jim Fergus
Réponses: 7
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Leonardo Padura Fuentes

l'homme qui aimait les chiens

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 41j9wd10

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 Barzoi10
Lévrier barzoï


   Ce fut le temps où se concrétisa la grande désillusion.



Padura se fait une fois de plus  virtuose, scrutant l'histoire, emmêlant les destins.
Il relate la biographie sur plusieurs décennies de Léon Trotski, de son assassin Ramon Mercader, et d'un jeune, puis moins jeune écrivain cubain fictif qui a perdu ses illusions. Il relate avec ambition, et réussite, pas moins que les grandes purges de Staline, la guerre d'Espagne, la dictature cubaine.

Ce roman extrêmement riche, instructif, passionnant, foisonnant, parfois un peu trop car Padura est un  grand bavard, qui ne connaît guère les limites, aime les détails à n'en plus finir Il quitte le romanesque au profit de l’encyclopédique, et noit ainsi parfois l'ampleur de son texte. Cela donne des longueurs, d'autant que le récit est souvent fait de deux points de vue successifs sur les mêmes faits (celui de Trotski et de son assassin) mais c'est addictif, et… terrorisant, comme tout ce qui parle de l'histoire du XXe siècle.

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 Mercad10
Ramon Mercader

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 Xvm89d10
Trotski et les siens à Mexico

(commentaire récupéré)



mots-clés : #exil #historique #politique
par topocl
le Mar 23 Mai - 14:33
 
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Sujet: Leonardo Padura Fuentes
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Leonardo Padura Fuentes

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 41w2du10

Hérétiques


Trois parties, trois époques, trois histoires qui ne font qu'une, chacune pleine d'enseignements, extrêmement bien documentée. L'histoire des juifs de Cuba dans les années 30 à 50 à travers  Daniel Kaminski un jeune juif qui a fui la Pologne en 1939, dont les parents furent passagers du Saint Louis, un paquebot chargé de 900 juifs qui se virent refusé le débarquement à Cuba et furent renvoyés se faire massacrer en Europe. Au XVIe siècle, un jeune séfarade,  qui trahit sa foi en peignant. Et à Cuba de nos jours, des bandes de jeunes au psychisme dévasté d'avoir grandi dans un monde d'interdits et de corruption.

Pour faire jonction entre ces trois mondes, une intrigue, à la résolution tarabiscotée, qui tourne autour d'un tableau transmis au fil des siècles, et résolue par Mario Condé, un homme des plus sympathiques, personnage fétiche de Padura, satisfait d'avoir des livres, un bon chien, l'amitié et l'amour dit-il (on pourrait rajouter une bouteille de rhum !). Ex-policier devenu marchand de livres anciens, comme les trois personnages décrits par Padura, c'est un « hérétique », un homme qui choisit sa liberté face au dogme.

Hérétiques est un livre ambitieux, qui fourmille d'informations passionnantes, brille à faire vivre de l'intérieur chacun des personnages et chacune des époques qu'il décrit. Mais… Padura est  trèèès bavard, aime enfoncer les clous jusqu'à la garde, bien tout expliquer et réexpliquer, par des phrases longues et compliquées , voire enchevêtrées. Cela ne simplifie pas la lecture de ce roman, qui  est dense et parfois jubilatoire, mais aussi plein de longueurs, qui m'a réjouie et lassée à la fois.

(commentaire récupéré)



mots-clés : #creationartistique #historique #religion
par topocl
le Mar 23 Mai - 7:48
 
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Sujet: Leonardo Padura Fuentes
Réponses: 166
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Michel Pastoureau

Le Roi tué par un cochon

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 Pastou11

Michel Pastoureau est un conteur redoutable. A partir de ce qui ne semble à première vue qu’un épisode historique secondaire, il nous entraîne dans une enquête quasi policière pour un voyage fascinant parmi la symbolique du Moyen Age.
A point de départ, un évènement dramatique : le 13 octobre 1130, le cheval que montait le jeune Philippe, roi de France, fils aîné de Louis VI le Gros, chute dans une rue de Paris à cause d’un cochon. Le roi est projeté sur une pierre et écrasé sous le poids du cheval. Il meurt quelque temps plus tard.
Philippe ne figure pas dans la numérotation des rois de France. Toutefois, comme tous les fils aînés du roi régnant jusque Philippe-Auguste, il a été sacré à Reims afin d’assurer un principe dynastique (les Capétiens n’oublient pas que le premier d’entre eux Hugues Capet doit son pouvoir à l’élection). Oint du saint chrême, Philippe participe donc bien au caractère sacré des rois de France. Il est qualifié dans les textes de « Rex junior ». Il est d’ailleurs rapidement inhumé dans la basilique royale de Saint-Denis. Quelques jours plus tard, son frère Louis est sacré à Reims. On ne plaisante avec la continuité royale !
Que ce jeune héritier ait été tué à la chasse par un sanglier, gibier royal à l’époque, passe encore. Mais par un vulgaire porc gyrovague, bête immonde entre toutes, un « porcus diabolicus » comme en parle Suger, voilà qui entache la dynastie d’une souillure  indélébile.

L’avènement au trône de Louis VII, frère de Philippe, mal préparé à la fonction, semble confirmer la malédiction qui frappe la famille royale. C’est en effet un règne calamiteux marqué par l’échec de la 2e croisade, celui du mariage avec Aliénor suivi d’un divorce désastreux qui va livrer l’Aquitaine à l’Angleterre, et j’en passe. Trois personnes entrent alors en jeu : l’abbé de Saint-Denis, le fameux Suger, saint Bernard de Clairvaux et bien sûr le roi. Tous vouent une dévotion profonde envers la Vierge Marie. Bientôt les attributs de la Vierge, la fleur de lys, symbole de pureté, et la couleur bleue vont devenir ceux du roi de France, le fameux « d’azur semé de lis d’or ». Coup de génie qui place à nouveau le roi de France dans une position particulière, ses armes étant de nature divine, par rapport à ses confrères d’Europe. L’hypothèse séduisante, remarquablement argumentée par Michel Pastoureau, bien qu’elle ne puisse malheureusement être confirmée par aucun document, est que l’adoption des attributs mariaux lave la souillure due au porc errant. De l’animal infâme aux lis d’or sur azur il n’y aurait donc qu’un pas !
Et qu’est-il advenu de ce « porcus diabolicus ». Nous l’ignorons. Dans un passage limpide sur les procès d’animaux et leurs enjeux, l’auteur nous apprend qu’ils n’apparaissent qu’un peu plus tard. Le régicide a donc évité le jugement et probablement une condamnation à mort.

Michel Pastoureau a le privilège d’une plume claire et simple qui fait de son récit un livre abordable par tous et vraiment agréable à lire, tout en gardant une rigueur historique sans faille. C’est un historien aussi plein d’humour. Il nous dit par exemple de nous méfier de la prose de Suger, maniant mal le latin, aux phrases ampoulées, cherchant à imiter Lucain. Il nous explique également les difficultés qu’il rencontrait lors de son service militaire pour replier le drapeau tricolore selon les règles et faire en sorte que le bleu recouvre les autres couleurs !
Qui a dit que nous n’avions plus de grands historiens en France ?


mots-clés : #historique #moyenage
par ArenSor
le Ven 12 Mai - 20:00
 
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Sujet: Michel Pastoureau
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Arturo Pérez-Reverte

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 518ysi10


Le Hussard

Premier roman d'Arturo Perez Reverde....et bien heureusement que je n'ai pas commencé par celui-ci, sinon je n'aurais peut-être pas poursuivi avec cet auteur.

L'Andalousie en 1808, guerre napoléonienne Français-Espagnols....la confrontation de jeunes officiers du corps des Hussards pour qui c'est le baptême du feu....tout juste sortis de l'école Militaire... avec la dure réalité du terrain.....leurs rêves de gloire vont s'effondrer tout comme leurs chevaux, leurs camarades...dans un torrent de sang, de boue...

Et la gloire. Merde à la gloire, merde au monde entier, merde à l'escadron..........Ils pouvaient bien tous la garder pour eux, leur maudite gloire, leurs drapeaux, leurs cris de "Vive l'Empereur"......  

Nous livrons une guerre étrange qui ne figure pas dans les livres que nous avons étudiés à l’École militaire. Tu te rappelles notre conversation de cette nuit ? Il est difficile de renoncer à des guerres loyales, contre des ennemis parfaitement identifiables et bien alignés en face de nous.
— Des guerres propres, résuma Bourmont.
— Oui. Des guerres propres, où les curés ne battent pas la campagne avec leur soutane retroussée et un tromblon à l’épaule, où les vieilles n’arrosent pas nos soldats d’huile bouillante. Où les puits contiennent de l’eau et non des cadavres de camarades assassinés.
— Tu demandes beaucoup, Frédéric.
— Pourquoi ?
— Parce qu’à la guerre, on hait. Et c’est la haine qui motive les hommes.



Bref, un réquisitoire contre l'absurdité de la guerre et son horreur...

Mais, ça n'a pas suffit pour que j'accroche...je trouve qu'il n'y a pas d'émotion...  Neutral

(commentaire récupéré)

mots-clés : #guerre #historique #xixesiecle
par simla
le Ven 12 Mai - 6:38
 
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Sujet: Arturo Pérez-Reverte
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Arturo Pérez-Reverte

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Cadix, ou la diagonale du fou

"Cadix, 1811. Joseph Bonaparte est sur le trône d'Espagne et le pays lutte contre l'occupation des armées napoléoniennes. Mais dans la ville la plus libérale d'Europe, les batailles sont d'une autre nature.Des jeunes filles y sont  brutalement assassinées à coups de fouet, à l'endroit exact où tombent les bombes françaises. Ces meurtres tracent sur la cité une carte sinistre, un échiquier sur lequel la main d'un joueur invisible semble déplacer ses pions selon les lignes de tir, la direction des vents ou de savants calculs de probabilités, scellant le destin des personnages : un policier brutal et corrompu, l'héritière d'une importante compagnie de commerce maritime, un corsaire prêt à risquer sa vie par amour, un taxidermiste misanthrope et un excentrique artilleur français."

Quel roman ! Je viens de le terminer (hélas)....on est complètement pris dans l'histoire, c'est toujours aussi bien écrit, les personnages très bien campés, et toujours, du moins dans les trois romans de Arturo Perez Reverde que j'ai lus, des hommes très virils mais avec une part de vulnérabilité...envers les femmes bien entendu, une femme de caractère qui domine la plupart du temps la situation.

Lolita, qui gère d'une main de fer sa compagnie maritime,se sent attirée par le corsaire qu'elle a pris au service de sa compagnie, Pepe Lobo, un marin expérimenté et séduisant.....et tous les autres personnages décrits ci-dessus interviennent au fil des chapitres....un récit captivant, très bien documenté.

On a du mal à lâcher ce roman....j'aime toutes ces descriptions assez techniques ou pas....assez longues...et en opposition des dialogues relativement courts, aucun mot inutile.

Evidemment, j'aurais préféré une autre fin..mais j'ai adoré, quel écrivain bravo  Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 3245407319

(commentaire récupéré)

Depuis que tout a commencé, Cadix n'est plus pour Rogelio Rizon le terrain familier, le domaine connu sur lequel il s'est toujours déplacé avec aisance, impunité et cynisme. La ville s'est transformée en un échiquier hostile, plein de cases étranges, d'angles ténébreux jusque-là inconnus. Un casse-tête fait de traits géométriques dont il n'a pas la clef, avec une multitude de pièces insoupçonnées qui défilent sous ses yeux comme un défi ou une insulte. Quatre pièces perdues, jusqu'à maintenant. Et pas un seul indice. Cela signifie une gifle qui se répète chaque jour, tandis que le temps passe et qu'il continue à rester cloué sur place, perplexe. Dans l'attente d'un éclair de lucidité, d'un signal, d'une vision du jeu qui n'arrivent jamais. Qu'il ne voit jamais.


mots-clés : #historique
par simla
le Jeu 11 Mai - 7:00
 
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Marguerite Yourcenar

J'ai passé une partie de l'année dernière en compagnie de Marguerite, en voici le premier écho :

Mémoires d'Hadrien

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 Hadrie10

Yourcenar précise dans les notes qui suivent son roman historique, qu'elle a écrit sur le règne d'Hadrien parce qu'elle a en tête depuis toujours cette phrase de Flaubert : "Les dieux n'étant plus, et le Christ n'étant pas encore, il y a eu, de Cicéron à Marc Aurèle, un moment unique où l'homme seul a été".

[On remarque dans la phrase de Flaubert une figure de style appelée hyperbate qui consiste à intercaler entre deux mots d'autres mots ou à en inverser l'ordre classique des mots pour leur donner plus de poids ; Yourcenar utilise souvent cette forme assez rare en français ce qui donne à son style un relief tout à fait particulier ou pour le dire mieux un particulier relief.]

De cette phrase, de cette latence, de ce moment à la fois de grâce et de disgrâce, Yourcenar écrit une somme. Elle parvient à faire jaillir de la masse informe des documents, des lettres, des relevés archéologiques, des comptes rendus numismatiques, la matière qui formera son livre. Il faudra toute l'énergie d'une femme qui se sait un génie (ou tout du moins géniale) pour extraire de ce magma la substance royale de la vie de l'empereur. Et c'est en endossant le 'je' des Mémoires, que cette femme, vivant au XXème siècle, en Amérique parvient à rendre avec une parfaite détermination et une beauté étrange, les mots, les rêves, les puissances et les déboires d'un empereur qui apparaît sous les traits à la fois d'un homme et d'un dieu.

L'énergie et la maîtrise sont pour moi les deux mots qui définissent le mieux à la fois le formidable travail de Yourcenar (travail d'érudite et travail de création, travail du style et travail de la forme) et son personnage central. Homme aux mille visages et aux mille vertus, Hadrien sut transformer ses vices en fortune et son ambition en volonté de faire le Bien. Attentif à l'humanité de chacun comme à la sienne, c'est en homme éclairé qu'il finit sa vie, espérant de tout son être maintenir une période de paix, d'entente des peuples et de lucidité. Car il sait bien, Hadrien, au bord de succomber que cette accalmie ne durera qu'un temps comme lui-même .

On pourra finalement être attentif aux volontés d'un grand politique et d'un fin stratège qui fit de la Paix son obsession finale et de l'amélioration de la vie de ses sujets sa préoccupation ultime. On pourra regretter que nos politiques n'aient pas lu Yourcenar, qu'ils n'aient pas compris l'immense profit qu'ils auraient pu tirer de la vie du César. On pourra recommander à ceux qui aiment la belle littérature, le bel esprit et la finesse du langage et des idées, de s'emparer très vite de ce très beau roman.

J'ai malgré tout un peu survolé les passages concernant les questions politiques, en me promettant d'y revenir, car au-delà de son amour insensé pour la Grèce, berceau de toutes nos civilisations, au-delà de la réflexion sur les contrées barbares dont les us nous étonnent voire nous scandalisent, au-delà de la question sur l'incertitude de la présence divine ; Yourcenar semble donner quelques clefs pour mieux appréhender notre monde contemporain, barricadé, frileux, moribond et malade du cœur.


Marguerite Yourcenar est un colosse monumental récitant des vers grecs, une armée furieuse avançant avec l'ordre des légions romaines, un cataclysme sûr, un adonis à la peau ferme, aux gestes froids ; elle est tout à la fois puissante, passionnée et tendre, ouragan et simple brise, scandaleuse et cachée. Enigmatique. Tout ça ne peut laisser indifférent.


mots-clés : #historique
par shanidar
le Mer 10 Mai - 12:29
 
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Marguerite Yourcenar

L'oeuvre au noir

On pourrait penser « fichtre que c’est loin » à propos de l’époque dans laquelle vit Zénon : le seizième siècle, à la fin du Moyen-âge. Comme si le temps était un point qui progressait toujours vers plus de lumière. Ce qui est remarquable dans ce récit, c’est l’approche que le lecteur peut avoir avec Zénon. Yourcenar est au plus près de lui. Elle livre ses différents états ; intellectuels, émotionnels, physiques de façon plus ou moins entremêlée. Oui ça a comme quelque chose de Proustien, sauf que la structure des images semblent plus importer à Yourcenar, qui recompose ici une sorte d’ode à la vie. A la manière d’un rêve, avec un protagoniste qui témoigne de l’époque et de lui-même, et des forces qui s’ourdissent pour persécuter avec violence ceux qui s’émancipent du « bien » qu’on a organisé pour eux.

"Des gens avaient logé là comme un ver dans son cocon, et y logeraient après lui. Bien cachés, sinon tout à fait invisibles, un rat derrière une cloison, un insecte taraudant du dedans une solive malade voyaient autrement que lui les pleins et les vides qu’il appelait sa chambre… Il levait les yeux. Au plafond, une poutre remployée portait un millésime : 1491. A l’époque où ceci avait été gravé pour fixer une date qui n’importait plus à personne, il n’existait pas encore, ni la femme dont il était sorti. Il retournait ces chiffres, comme par jeu : l’an 1941 après l’Incarnation du Christ. Il tentait d’imaginer cette année sans rapport avec sa propre existence, et dont on ne savait qu’une chose, c’est qu’elle serait. Il marchait sur sa propre poussière. Mais il en était du temps comme du grain de chêne : il ne sentait pas ces dates taillées de main d’homme. La terre tournait ignorante du calendrier julien ou de l’ère chrétienne, formant son cercle sans commencement ni fin comme un anneau lisse. "


mots-clés : #historique
par Dreep
le Lun 8 Mai - 19:38
 
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Clara Dupont-Monod

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 Images44

Juette est née en 1158 à Huy, une petite ville de l'actuelle Belgique. Mariée à treize ans, elle est veuve cinq ans plus tard.
Juette est une femme qui dit non. Non au mariage. Non aux hommes avides. Non au clergé corrompu. Elle n'a qu'un ami et confident, Hugues de Floreffe, un prêtre. À quelles extrémités arrivera-t-elle pour se perdre et se sauver ?
Car l'Église n'aime pas les âmes fortes ...
De ce Moyen Âge traversé de courants mystiques et d'anges guerriers, qui voit naître les premières hérésies cathares, Clara Dupont-Monod a gardé ici une figure singulière de sainte laïque.



« Je m'appelle Juette, j'ai quinze ans. Je suis mariée. J'ai sans doute été punie parce que je suis mauvaise. »

Ce roman retrace le destin de Juette de Huy tel qu’il fut conté par son ami et confident, Hugues de Floreffe. C’est de nouveau une œuvre de Clara Dupont-Monod qui fait entendre deux voix en parallèle, celle de Juette, et celle d’Hugues.

On y découvre une enfant tel un oisillon fragile qui, peu entouré de l’affection des parents, vit dans ses rêves d’histoires et de chevaliers, mais est aussi animée par la foi et par maintes interrogations qu’elle partage avec son ami religieux, Hugues. Elle est touchante dans sa fragilité, sa voix que l'on entend peu, son innocence et sa gaité d'enfant, cette petite fille maigrichonne.  est comme détruite et Mariée contre son gré après avoir prononcé un  « oui je le veux » auquel elle ne donne aucun sens, elle subit la vie maritale dans une sorte d’errance entre la souffrance de la chair, le détachement, les interrogations sans fin sur ce qui l’a menée à devoir subir cela, sur la vie et les hommes, et une haine progressive à l’égard du sexe masculin. Elle ira jusqu’à craindre la damnation pour avoir espéré la mort de son époux.

Une fois libérée des chaînes du mariage, Juette va s’affranchir peu à peu de la société, de ses peurs, croyances, ce jusqu’à remettre ouvertement en question l’ordre religieux, l’accusant de ses impiétés. Elle qui a choisi d’être auprès des lépreux, exclus par la société, sa voix et sa rebellion est entendu par nombre de femme qui la suivront comme un mentor, ainsi que d’autres, ce d’autant plus qu’elle a des extases. C'est une exemple de force et de positionnement qui jamais ne flanche, une des pionnières dans la libération des femmes de ce destin préécrit qu'on leu impose, mais aussi une femme pieuse qui va s'enfermer de plus en plus dans ce lien particulier qu'elle entretient avec sa foi.

Hugues, quant à lui, est touchant de sa présence constante et délicate envers Juette, dans ses attentes dans l'ombre à différents moments de sa vie, dans la permanence de sa pensée envers elle, de comment elle le touche, comment il va l'aimer en ne lui touchant que le cœur.
Il m'a émue dans son évolution au fil des années, dans ses peurs pour Juette, ses sentiments jamais nommés, seul à attendre dans l'ombre de cette femme devenue sainte qui ne sera plus pour lui à la fin que celle qu'il attend sans espoir pour qu'enfin peut être elle réponde à cette question qu'il a et demeure en suspens...

Un roman intéressant, mais lu très vite après "Le roi disait que j'étais diable", je ne me suis pas laissée emmener aussi facilement dans ce style particulier de l'auteur en tant qu'il m'a donné un arrière goût de déjà vu, même si le fond est différent. Juette est ici dépeinte en partie de par les éléments collectés à son propos par Hugues, d’autre part par l’imaginaire de l’auteur qui lui donne vie, émotion, l’interprète, la parle … certainement aussi par ce qu’induisent les écrits de Hugues de Floreffe.

Je dirai que le style de l’auteur est à découvrir, mais peut être si chaque roman se fait sur la même trame cela risque de devenir lassant, bien que reprenant des moments historique datant du moyen âge, période semble t’il de prédilection de l’auteure


mots-clés : #historique #moyenage #religion
par chrysta
le Sam 6 Mai - 18:09
 
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Sujet: Clara Dupont-Monod
Réponses: 9
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Richard Powers

Le temps où nous chantions

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 Le-tem11

Un poisson et un oiseau peuvent tomber amoureux mais comment parviendront-ils à construire un nid ? Et quelle sera la vie de leur progéniture ? Sera-t-elle oiseau ou poisson ou un mix des deux sorte de oisson ou de poiseau ?

C'est en très raccourci à ces questions que Richard Powers nous invite à nous confronter dans ce roman qui retrace de 1939 à (presque) nos jours l'histoire américaine et en particulier celle des Noirs américains.

Delia Daley naît dans une famille noire et rencontre David Strom qui est blanc, juif et allemand. Contre toute attente et contre toutes les lois en vigueur au pays des Amériques, ils vont s'aimer, se marier et enfanter. A partir de là, la catastrophe commence et elle a pour nom : métissage. Comment élever des enfants de parents aussi différents et énigmatiquement unis par un lien musical qui remplace toutes les écoles, toutes les morales et toutes les lois du monde ? Que seront ces trois mômes dont les couleurs de peau varient et dont les parents, désireux de les protéger comme tout parent se doit de l'être, imaginent pouvoir les élever sans se poser la question de la race ou plutôt en la dépassant, envisageant de vivre dans un monde où la couleur de la peau n'aurait plus d'incidence sur le rang social, sur l'éducation, l'accès à la culture, sur la liberté. Mais aux Etats-Unis, au XXième siècle, cette éducation est formellement impossible et les enfants du couple mixte vont rapidement être confrontés à la problématique du racisme, de la loi et de la différence. Car le cœur du roman de Powers est bien celle-là : comment vivre en tant que métis dans un monde qui ne reconnaît pas le droit au mélange  ? Dans un monde qui ne s'envisage que de manière polarisée, soit noir soit blanc mais jamais gris ; dans un monde qui n'hésite pas à avoir recours à la bombe atomique, à l'assassinat politique (Martin Luther King, Malcom X,…), au lynchage de mômes pour faire régner l'Ordre. A cette problématique chacun des enfants répondra à sa manière, Jonah sera un ténor reconnu dans le monde entier en chantant des musiques blanches, Ruth s'associera aux Black Panthers pour tenter de changer le monde et Joseph cherchera à être le pilier familial dont la mort de Delia aura privé toute la famille.

Ce livre, ce grand livre, n'est pas seulement une réflexion extrêmement pointue sur le racisme, sur la manière d'élever ses enfants, sur l'histoire politique américaine, il est aussi un livre impressionnant sur la musique et sur le chant en particulier, avec ce que cela veut dire de souffle, de corps, de coffre, de tessiture et de voix, un livre sur toutes les influences musicales qui vont traverser les vies de nos protagonistes et les construire (déconstruire) presqu'autant que la politique ou l'amour. Et si le constat, amer, que fait Powers me reste au fond de la gorge, celui qui consiste à dire que l'éducation choisie par Delia et David est un leurre, qu'un enfant ne peut pas choisir en conscience sa vie, qu'il ne peut décider pour lui-même, en lui-même quels chemins il désire explorer et quels sont ceux qu'il va volontairement ignorer, on ne peut que lire ce livre dans la fièvre d'un désir de réconciliation, d'entente et de partage, tout en rêvant de jour meilleur. La toute fin, d'ailleurs, laisse espérer qu'il pourrait peut-être un jour en être ainsi...

Mais pour être encore un peu plus exhaustif, il faut ajouter une troisième dimension à ce roman et cette dimension est celle du temps. Car si David Strom est allemand et juif, il est également physicien et s'intéresse à la question du temps, permettant ainsi à Richard Powers d'écrire un livre à l'architecture parfaitement magistrale, j'insiste absolument unique.

En effet, ce que nous apprenons à la lecture de ce texte, grâce aux travaux de David, c'est d'abord que le temps n'existe pas et que nous sommes toujours maintenant, dans une succession d'instant présent qui s'emboîte à l'infini les uns dans les autres. Ce que nous découvrons ensuite, c'est que nous pouvons envoyer des messages dans le passé ou le futur mais que nous sommes incapables de les recevoir. Pourtant, la troisième leçon nous informe que nous pouvons voyager dans le passé, revenir à un évènement antérieur à partir du moment où nous l'avons vécu au moins une fois, selon le principe que si nous y sommes présent il est possible d'y retourner. Enfin, David découvre à la toute fin de sa vie que le temps forme des boucles et que nous sommes donc en quelque sorte prisonnier de boucles temporelles qui se referment sur elles-mêmes, ce qui voudrait dire que les évènements peuvent se déplacer continuellement vers leur propre avenir tout en revenant sur leur propre passé ; mais pour se faire il faut pouvoir prouver que les galaxies ont un sens de rotation préféré. Ce que Richard Powers offre au lecteur c'est la mise en application littéraire de cette théorie pour en faire un fabuleux roman.


Reste donc la musique, ce langage qui devrait unir toutes les nations et tous les êtres puisque cette Tour de Babel dressée au milieu des villes comme des déserts, en passant par les sons dépasse le clivage des accents, et pourtant, et pourtant, il n'en reste pas moins, qu'ici comme ailleurs, une blanche vaudra toujours deux noires…


mots-clés : #historique #segregation #racisme
par shanidar
le Jeu 4 Mai - 19:38
 
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Clara Dupont-Monod

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 17737610

Clara Dupont-Monod reprend cette figure mythique et invente ses premières années comme reine de France, aux côtés de Louis VII. Leurs voix alternent pour dessiner le portrait poignant d'une Aliénor ambitieuse, fragile, et le roman d'un amour impossible.
Des noces royales à la seconde croisade, du chant des troubadours au fracas des armes, émerge un Moyen Age lumineux, qui prépare sa mue.


Ce roman est construit sur deux voix qui s’interposent sans jamais se rencontrer : celle d’Aliénor et celle de Louis VII. C’est une impossible rencontre entre deux êtres englués dans des héritages familiaux dont ils ne peuvent se défaire vraiment, entourés chacun de leurs ombres qui ne sont pas les mêmes. Là où l’une porte les restes des croyances archaïques, l’autre se voue aux croyances nouvelles ; là où l’une est colère, rage, désir de se dégager du lourd regard familial qui pèse et de prouver ce qu’elle vaut, l’autre, roi par défaut, pétri de honte et de colère, va se laisser balloter entre désir pour sa femme impossible à toucher et repli sur lui-même tant elle l’amène à être un autre qu’il refuse.

« Sur le chemin du retour, la fièvre retombe. L’absurdité me saute au visage. Je redeviens un meunier aux mains noires. La ville saccagée, les cris des enfants, et mes hurlements lorsque la porte cède sous mes coups… Ces mêmes portes ouvertes au fond de moi, déversant la colère que je déteste. Et ce n’est qu’un début. (…) Je le sais. Tu me voudras guerrier avant d’être roi. Je vois bien que pour toi, il y a de la noblesse à menacer la vie. Personne ne t’a appris la grandeur du langage et de la bienveillance. Et personne ne m’a appris, à moi, que l’on pouvait aimer quelqu’un qui vous détruit. J’ai vu tes bras ouverts lorsque je suis rentré. Tu t’es inclinée devant moi puis tu as levé les yeux vers mon heaume. Tout cela m’a donné envie de pleurer. Pourquoi faut-il que tu me regardes uniquement lorsque je me ressemble si peu ? J’aurais du hurler : « cet homme n’est pas moi ! », mais c’est bien cet homme, à cet instant, que tu remerciais. Alors je n’ai rien dit."

Dans ce couple improbable qui unit Aliénor d’Aquitaine à Louis VII, c’est la dame qui tient la barre. Elle le pousse à se renier pour elle, sans jamais, ou presque, le reconnaître ni le voir. Et tout au long du roman nous entendons Louis dans sa complainte face à cette femme adulée qui ne le voit pas, voire le méprise et l’amène à moult actes terribles. Mais nous l’entendons aussi grandir, changer, peu à peu se ranger à la voie d’une raison qu’il n’acquiert que bien tard. Certes, Aliénor ne peut porter la responsabilité de ce qu’elle lui a fait commettre, il en a sa part, elle ne semble qu’avoir permis qu’il délie ses colères, tue son (ses) père(s) dans les meurtres qu’il commet essentiellement au nom de l’honneur de sa femme.

Quant à Aliénor, elle se livre telle une femme blessée, arrachée aux siens, à sa ville, ses racines. Une femme finalement restant dans le fond l’enfant dont les ombres parentales qu’elle veut apaiser la suivent une bonne partie du roman. Louis lui permettra en partie d’en être libérée.

Ce roman a été pour moi une belle découverte, et je me suis laissée bercer et emmener par la plume de l’auteur à traverser des épisodes d’histoire aux côtés de ce couple médiéval célèbre. Il noue, dans un style rapide et entrainant, les figures contraires du calme et du chaos. Il nous fait rencontrer deux personnages dans leurs aspects psychologiques, leurs failles, leurs forces, leurs faiblesses, et nous les montre évoluer page après page au fil d’une histoire dure et chargée de combats et de morts dépeinte dans une sorte de poésie horrifique.


mots-clés : #historique #moyenage
par chrysta
le Mer 3 Mai - 17:00
 
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Sujet: Clara Dupont-Monod
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Mireille Calmel

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 72279810

Le lit d'Aliénor

Aliénor d'Aquitaine.
Une belle jeune fille au caractère fougueux, encore à marier. Sa dot : le duché d'Aquitaine, des terres débordant de richesses. D'ailleurs, en 1137, il fait bon vivre dans le château d'Aliénor à Bordeaux, luxueusement décoré et résonnant des chants des troubadours, alors que le Louvre de ce pauvre roi de France est sinistre, sale et silencieux. Au côté d'Aliénor, depuis quelques jours, une charmante silhouette se profile, celle de Loanna de Grimwald.

Elle a quinze ans, le même âge qu'Aliénor, mais elle n'est pas tout à fait comme les autres, un peu fée, un peu sorcière. Envoyée par son ancêtre Merlin l'Enchanteur, héritière des secrets druidiques, Loanna a une mission : devenir la confidente d'Aliénor, son ombre, et faire en sorte qu'elle épouse un jour Henri, le futur roi d'Angleterre. Un premier roman éblouissant, où le surnaturel et la sensualité se mêlent à l'Histoire, recréant une Aliénor d'Aquitaine insoupçonnée.



Aliénor d’Aquitaine, née en 1122, a été reine deux fois, d’abord femme de Louis VII à la cour de France, puis de Henri de Plantagenêt à la cour d’Angleterre. Elle enfanta 2 filles avec Louis et 3 rois avec Henri, dont Richard Cœur de Lion.
Ce livre retrace la partie de la vie d’Aliénor aux côtés de Louis VII, soit 15 années nous emmenant dans les méandre du 12ème siècle, de la cour de France, de ses intrigues, alliances, allégeances, mais aussi au-delà puisque nous partons aussi aux côté d’Aliénor dans la croisade dans laquelle elle accompagne Louis, de Constantinople  l’Asie mineure.

Le roman reprend toutes les grandes lignes de cette période qui associa Aliénor à Louis VII, et nous permet de découvrir (ou redécouvrir) ce pan de l’histoire de France autour de personnages qui en ont fait la légende : Aliénor, Louis, l’abbé Suger, le troubadour Jaufré Rugel notamment. Mais ce livre est aussi romancé, et, pour donner vie à l’histoire, peut être en combler les vides, lui donner une touche romanesque, l’auteure introduit le personnage de Loanna de Grimwald, narratrice la plupart du temps, aux côtés d’Aliénor. Elle serait la dernière descendante de la lignée de Merlin et des fées d’Avalon,  à une époque où les anciennes croyances, si elles persistent encore en certaines contrées, ont été délaissées et sont pourchassées au profit d’un Dieu unique. Placée auprès d’Aliénor, elle serait celle qui manipule sa vie pour écrire le destin de l’Angleterre en l’amenant à devenir par la suite reine aux côtés d’Henri plantagenêt.

On découvre au fil des pages une époque dépeinte dans ses rites et croyances, dans son verbe (bien que je doute que les personnages parlent vraiment comment avant). On rencontre Aliénor, reine en avance sur son temps qui soutient troubadours, poète et tout ce qui est arts, jeune fille passionnée, caractérielle et volage ; mais aussi jeune femme qui s’immisce dans la vie politique.On s’attache aussi à Louis, roi qui souhaitait devenir moine propulsé à cette place par la mort de son frère, celui qui aurait du régner. On fait aussi connaissance de Jaufré Rudel, troubadour chantant l’amour courtois et sans espoir, et dont certains de ses textes ont été retrouvés.

Force est de dire que l’on s’attache aux personnages, qu’ils nous émeuvent ou nous agacent. Le style romancé permet une certaine facilité de lecture, même si parfois les amours à la cour prennent trop le pas dans l’histoire et que l’on en oublie un peu la trame historique.

J’en suis sortie avec des doutes sur ce qui fait partie de l’histoire et ce qui a été ajouté et, après avoir épluché quelques articles sur la question, il s’avère que l’histoire est retracée dans nombre de ses dimensions et événements, du coup j’ai comme appris un bout d’histoire en me détendant car, sauf quelques moments plus longuets, j’ai apprécié ce livre de détente qui m’a emmenée bien loin de notre époque, entre monde médiéval, cour de France, et magie merlinienne.


mots-clés : #historique #moyenage
par chrysta
le Mer 3 Mai - 7:39
 
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Sujet: Mireille Calmel
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Alessandro Manzoni

Les Fiancés (I Promessi Sposi)

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 70331010

L’histoire se déroule en Lombardie à la fin des années 1620. Deux jeunes villageois, Renzo et Lucia veulent convoler. Hélas, un seigneur local, Don Rodrigue, à la suite d’un pari avec un parent, a jeté son dévolu sur la belle. Il va tout faire pour empêcher ce mariage, en premier lieu faire pression sur le curé du lieu. Cette situation va entraîner nos deux promis dans une série d’aventures toutes plus périlleuses les unes que les autres entre malfrats repentis, religieuse traîtresse, foule en colère, sans oublier la grande peste de Milan de 1630.  

Quel plaisir de lecture ! Pourtant, j’ai horreur des romans historiques ! Mais justement, le livre de Manzoni est bien plus que cela. Toutefois, sous ce simple aspect, le lecteur ne devrait pas être déçu. En effet, les péripéties s’enchainent les unes aux autres et maintiennent sans difficulté l’attention. Quel spectacle un Visconti, par exemple, aurait pu tirer de ce roman ! Ce qui m’a beaucoup plus intéressé est la psychologie des personnages qui n’a rien de caricaturale. Manzoni nous livre de beaux portraits d’hommes et femmes dont parfois les décisions sont surprenantes, le secours ou la détresse ne viennent pas forcément de ceux que l’on pense. Surtout, l’auteur en fin politique analyse remarquablement les relations sociales de l’époque. Dans un monde où les règlements ne sont pas respectés, ce sont de petits potentats locaux qui font la loi aidés de quelques hommes de main. Par leur parentèle plus élevée en noblesse, par quelques hommes de loi corrompus, ils arrivent toujours, ou presque, à leur fin. Don Rodrigue en est un parfait exemple. Heureusement, parfois un grain de sable déjoue leurs pronostics. Certaines situations sont clairement expliquées par Manzoni ; ainsi les causes de la disette à Milan liée à de mauvaises récoltes, et aggravée par une taxation du blé imposée par quelques « populistes » afin de calmer le peuple mais qui ne mènent qu’à l’émeute. Sur cela vient se greffer la fameuse épidémie de peste qui ravage le Milanais à la suite de la descente des troupes de lansquenets sur Mantoue. Nous retrouvons cette litanie de l’époque « a peste, a fame, a bello, liberere nos domine ». Manzoni montre parfaitement l’enchaînement de ces trois fléaux. « Les Fiancés », c’est aussi comment les appétits de puissance de quelques individus provoquent des ravages parmi le peuple ; heureusement, c’est aussi quelques hommes dévoués qui avec des moyens dérisoires tentent de remédier au pire, tentent de secourir et de soulager dans une ville de Milan ravagée par la peste dont Manzoni donne une description apocalyptique, mais malheureusement véridique. « Les Fiancés » est un très très grand livre.
Rien de mieux pour vous donner envie, je l’espère, que deux passages qui montrent toute la finesse d’analyse de l’auteur et aussi son humour, comme le souligne Quasimodo.
 
« Quant à ce qui forme la masse, et comme le matériel du tumulte, c’est une mixture accidentelle d’hommes qui tiennent plus, ou moins, selon une gradation infinie, de l’un ou de l’autre extrême : un peu échauffés, un peu fripons, un peu enclins à une certaine justice, telle qu’eux-mêmes l’entendent, un peu curieux aussi du spectacle d’une grosse affaire, prompts à la férocité et à la miséricorde, à détester ou à adorer, selon que se présente l’occasion de ressentir avec plénitude l’un ou l’autre sentiment ; avides à tout moment d’en apprendre, ou d’en croire de belles, avec le besoin de vociférer, d’applaudir quelqu’un ou de le conspuer. »


«Ayant tout bien pesé, le comte invita un jour à dîner le père provincial, qui trouva là un cercle de convives assortis entre-eux avec une intention raffinée. Quelques parents, des plus titrés, de ceux dont le seul nom patronymique était un titre , et qui par leur seul maintien, une certaine assurance native, une nonchalance hautaine, une manière de parler de grandes choses en termes familiers, réussissaient, sans même le faire exprès, à imprimer ou à rafraîchir, à tout moment, l’idée de la supériorité et de la puissance ; et quelques clients, liés à la maison par une dépendance héréditaire, et aux personnages par une servitude de toute leur vie ; lesquels, commençant, dès le potage, à dire oui, de la bouche, des yeux, des oreilles, de toute la tête, de tout leur corps, de toute leur âme, vous avaient, au dessert, réduit un homme à ne plus savoir comme on peut faire pour dire non. »
(traduction Yves Branca)




mots-clés : #guerre #historique #social
par ArenSor
le Mar 2 Mai - 19:06
 
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Sujet: Alessandro Manzoni
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Eric Vuillard

On se remonte le moral en repartant en arrière (en 2009) :

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 C_conq10

Conquistadors

Eric Vuillard a écrit:« Conquistadors raconte un épisode de la conquête du monde telle que je l’ai rêvée, ouragan ou invasion de sauterelles. C’est en tous les cas un grand raout d’or et de sang, épopée glorieuse et vulgaire, comme elles le sont toutes, assortiment de hautes manœuvres et de mauvais coups.
Cet épisode est celui de la conquête du Pérou par Francisco Pizarre et de la destruction de l’Empire inca. On y voit s’ouvrir la tragédie de notre monde, celui où nous vivons, par un grand fait divers où la mappemonde, Dieu, l’or et la poudre se rencontrent.
Ainsi, s’accrochant aux pentes sèches de la Cordillère pour la grande chasse à Dieu, les mercenaires d’Espagne soufflèrent sur les premières braises de l’empire le vent glacial du progrès. »


C'est une écriture assez lourde, sans devenir lourdingue, qui s'étend sur un même rythme lentement épuisant sur les 400 et quelques pages du livre. Comme une pâte très dense mais qui s'écoule infailliblement. C'est un mélange d'Histoire comme si on y était, en fait c'est l'histoire, les faits mais après seulement les pensées des hommes, chefs plus ou moins grands au fil d'une longue épopée particulièrement meurtrière. ça n'empêche pas le regard et les réflexions modernes, l'après-coup qui donne sa dimension au roman en dégage les perspectives, cherchant entre autres à esquisser ce que signifie la découverte d'un monde fini ou la fin d'une civilisation.

L'épopée est brutale et résolument crade, collante, sans que ça pousse le lecteur à saturation, un petit sentiment de too much. La violence fondamentale est nécessaire à l'épuisement moral qui nourrit le récit et le propos mais c'est toujours bizarre de se demander comment s'affirme un auteur (moderne) lorsqu'il utilise à répétition le verbe pisser. Superflu peut-être... huhu.

Revenons à nos moutons (ou à nos morts). A côté de la part fresque historique, l'auteur nous emmène vers un rêve-cauchemar du côté de notre civilisation, civilisation chrétienne riche d'images, de douleur et de pitié... intéressant là encore, plus réussi dans l'ambiance que sur le fond, je ne sais pas, je garde l'impression que l'auteur n'a pas tenu toutes ses promesses... il a quand même avec beaucoup d'ambition (qui n'est pas systématiquement un défaut, la preuve) cherché à gratter les recoins sombres de mythes de civilisation et de soif humaine, l'énigmatique soif de condition.

La forme est un peu risquée, l'entreprise aussi, celle d'un vrai livre massif, presque énorme, écrasant... risqué mais mis à part les promesses pas toutes tenues et des petites faiblesses (liées aux style, je le crois) l'expérience de lecture est réelle, efficace, une écriture, lourde, forte qui peut être lu sans déplaisir de façon assez intense (2-3 jours pour ce genre de bouquin chez moi c'est très court!) avec quelques réflexions culturellement et largement vivement intéressantes et pertinentes, de beaux morceaux d'humanité avec ou sans le va-et-vient des souvenirs d'Espagne et de misère, des morceaux d'humanité dégueulasse et franche...

Il en manque beaucoup dans ce que je raconte, des idées, des faits, un rendu de la lecture (notamment dans la géographie, les paysages, la volonté de restituer un contexte complet avec des repères européens)... manque aussi des indiens et des incas, forcément présents dans cette histoire.

Un peu fou, un peu casse gueule, pas parfait mais vrai livre quand même avec une volonté de consistance... je ne regrette pas de m'être laissé tenter par ce "livre de la rentrée" proposé par le libraire. Une lecture pareil sur un weekend pareil (fatigue, ras le bol, ...), aussi dense, lourd et passer aussi bien. Respect. (comme on dit).


mots-clés : #historique
par animal
le Jeu 20 Avr - 20:12
 
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Sujet: Eric Vuillard
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Eric Vuillard

ah ça m'avait gêné moi aussi cette tristesse de la terre, auto-pillage pour l'occasion :

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 Buffal10

Tristesse de la terre

Grosse déception. Même recette, et même format, que les deux précédents (La Bataille d'occident et Congo) mais cette fois de l'autre côté de l'Atlantique. Quelques photos et un peu d'histoire autour de Buffalo Bill, de son vrai nom William Cody, figure historique et pittoresque de l'Ouest américain qui s'est incarné lui-même dans de multiples représentations de son Wild West Show. Représentations aux Etats-Unis mais aussi en Europe (il est question de son passage à Nancy). Ah, en fait le sujet du livre pourrait être le spectacle, le grand spectacle et son acte de travestissement de la réalité à fois nocif et vaguement salutaire.

Le problème c'est qu'on en reste à de gros clichés qui ne sont pas loin d'un (très bobo ?) anti-américanisme primaire et de pleins de bons sentiments pour tous ces pauvres indiens qui eux étaient tous gentils alors que les américains de maintenant et bien ils étaient tous méchants et déjà tous idiots (et cruels). Servi sur un toast d'histoire et de chronologie approximative ça aurait eu beaucoup de mal à prendre et les quelques réflexions pas toutes inintéressantes et bien on est fort de tenté de les oublier le plus rapidement possible avec le reste du bouquin.

Je ne sais pas ce que je trouve le plus dommage de mon manque d'intérêt ou de l'impression d'avoir lu un truc rapide, très formaté, et pas forcément très réfléchi. Sur les trois c'est celui qui fait de l'ombre aux autres, c'est celui (de trop ?) qui fait de l'ombre tout court.

L'avantage c'est qu'avec le "format Actes Sud" (qui m'agace aussi) c'est vite lu...


mots-clés : #historique
par animal
le Mar 18 Avr - 19:51
 
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Sujet: Eric Vuillard
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Agustina Bessa-Luis

Le confortable désespoir des femmes

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 Confor10


Originale : O Mosteiro (Portugais, 1980)

CONTENU :
Métaillié (raccourci) a écrit:Ce roman est fait de croisement, de digressions fulgurantes sur deux thèmes principaux : la marche du jeune Belchior vers la réalité de son rapport à la terre, alors que toute son éducation était programmée pour le « succès inutile du monde », et le sebastianisme, ce messianisme portugais qui attend le retour de Don Sebastiao disparu au cours d'une bataille inutile et perdue, au Xvème siècle.

Ces deux leitmotive se déceloppent dans l'atmosphère étouffante d'une famille de cinq femmes dont Augustina Bessa Luis fait des portraits incroyables de justesse et de pénétration.


REMARQUES :
En cinq grands chapitres de 48 à 78 pages serrés, en soi plus sous-divisés et plutôt « ininterompus », c'est bien l'histoire de Belchior qui est racontée. Il est fils de Salvador, lui-même de la fratrie des Teixeira qui compte encore cinq sœurs, l'une plus éclectique que l'autre. Belchior avait grandi en ville, à Porto, mais il va retourner, après la fin de sa vie de couple, dans la campagne et le domaine familial. L'histoire se déroule sur plusieurs générations, voire époques de l'histoire, avec des retours dans un passé même lointain, et une forme de désordre de bouts d'approches. L'écriture consiste pas tellement dans des dialogue très developpés et fréquents, ou des « actions » nombreuses, mais me semble presque une suite ininterrompue de portraits, de traits caractéristiques de la vie intérieure de ses protagonistes. Une approche très « psychologique », mais qui vire dans une description souvent vécue comme difficile, élaborée, voire sèche, même si extrêmement perspicace. Il faut aimer ce genre de livre très dense. Ce n'est pas le pur plaisir d'une lecture fluide, mais demande un engagement, une attention soutenue. Pour ce lecteur-là ce sera une découverte intéressante, introduisant pas seulement dans la vie de quelques personnes détachées d'un environnement concret, mais aussi encadré par l'histoire portugais, certaines données typique qui apparaissent en filigrane.

Il y a des éléments qui laissent penser que l'auteure insère la petite histoire dans la grande, dans les changements historiques. Nous sommes aussi héritiers d'un passé : certainement vrai dans d'un pays à l'histoire immense.

Pendant une grande partie le narrateur apparaît de temps en temps discrètement. On devine qu'il est impliqué. Quand est-ce qu'il va faire l'entrée en scène ? Pour le lecteur ayant cherché des infos sur la vie de l'auteure, il reconnaît toute de suite certaines données qui pourrait la mêler intimement avec cette histoire : Le nom de famille, Teixeira, est aussi un de Bessa Luis ! Elle vivait une grande partie de sa vie, comme Belchior, à Porto…. Son père avait vécu un temps en Amérique Latine, tout comme Salvador...

Je dois avouer d'avoir abandonné. Pas qu'il s'agit d'un mauvais livre: j'y vois des qualités. Mais après une dizaine de jours de lecture, je suis à peine à 130 pages de 300. Il faut dire que ce sont des pages ultraserrées qui ailleurs auraient pris 500, probablement. Donc, pas ma longeur préférée... Mais il y a autre chose : une lecture difficile, malgré des qualités indéniables, surtout dans ses descriptions "psychologiques". Mais cela dépasse guère l'énumération de ces descriptions et a pour moi quelque chose de "sec", de très difficile à digérer.
Vu que je n'ai pas énormement de temps pour la lecture et que je peine ainsi, j'ai décidé d'arrêter. Donc il s'agit ici d'un début de fil pour lancer le partage…


mots-clés : #historique #psychologique #religion
par tom léo
le Dim 16 Avr - 10:19
 
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Sujet: Agustina Bessa-Luis
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Robert Seethaler

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 Produc12


Dans la Vienne de la fin des années 30, sur fond de montée du nazisme et de l’antisémitisme, Franz, a quitté son village et le contexte de misère dans lequel il vivait sur injonction de sa mère, pour venir travailler à Vienne dans le tabac d’Otto Tresniek, une vieille connaissance de sa mère. Apprenti auprès de cet homme qui deviendra comme un mentor, il rencontre par l’entremise du tabac un vieux professeur, S.Freud, avec lequel il entretiendra une relation amicale, qui prend naissance et se poursuit en partie autour de l’entrée dans la vie amoureuse de Franz suite à sa rencontre avec Anezka.

J’ai été séduite en entrant dans ce roman sur l'art de l’auteur de faire ressentir les ambiances. Notamment celle du tabac, pour ne citer qu’elle, qui nous amène à « voir » les lieux dans notre imaginaire, s’en imprégner, même presque à en ressentir les odeurs. Et ceci perdure tout au long du livre. C’est une atmosphère qui est posée et qui nous ramène à cette époque, chaque lieu (ou presque), m’ayant un peu donné le sentiment d’y être, de le voir, de le ressentir.

Aux côtés de Franz, à travers son regard un peu naïf des débuts qui va évoluer vers une vision bien moins candide, au fil de ses interrogations et constats, nous découvrons la société de l’époque prise dans le « débousselement » de ses valeurs, et nous assistons à la montée en puissance d’Hitler et du nazisme, à l’installation progressive de l’antisémitisme. Des quelques éléments anodins distillés au début du livre comme éléments de paysage, l’auteur agrémente de plus en plus le décor de son histoire d’événements et éléments signes de la montée du nazisme, ce jusqu’aux événements dramatiques de la fin ou plus rien n’est réellement « discret ». Et  nous ouvrons avec Franz progressivement sur ce qu’il se passe, sur comment cela monte en puissance pour prendre, vers la fin du roman, beaucoup de place, voire toute la place. Ce seront d’abord quelques croix gammées aperçus au bras de passants, puis des cris lors de manifestations, etc… ce jusqu’aux arrestation musclées et à leurs conséquences mortelles. Cela montre aussi comment on se réveille souvent trop tard dans ces contextes qui font leur lit doucement.

Je ne dirai pas que ce livre a été très addictif pour moi, mais il s’est insinué tout en douceur, avec ce vague sentiment de bizarrerie d’abord, puis, avec Franz, ce sentiment que le monde devient fou, pour terminer avec de l’indignation, voire du dégoût, tout en même temps que de l’impuissance. Franz, lui, garde une certaine liberté de pensée qui le perdra, comme d’autres avant lui.

C’était une jolie découverte en tous les cas, et je remercie Tom Léo de cette idée de lecture qui m’allait sur les thèmes « comme un gant ». Une lecture qui ne sera certes pas parmi mes préférées, mais dont la traversée a été riche et très intéressante. Je me lancerai d’ailleurs peut être dans l’autre roman traduit en français de cet auteur.


mots-clés : #historique #regimeautoritaire
par chrysta
le Dim 9 Avr - 7:55
 
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Sujet: Robert Seethaler
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Gérard Delteil

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 Savona11

La conjuration florentine
Le pape Alexandre VI Borgia a décidé de se débarrasser du moine Savonarole, qui dénonce la corruption du Vatican. Il missionne un jeune novice, Stefano Arezzi, dont la foi frise le fanatisme. Mais Stefano découvre Florence, ses charmes, ses mœurs et ses complots. Il y rencontrera la belle et influente Antonella, le jeune Machiavel, et Savonarole lui-même dont le charisme le fera douter de ses certitudes


Thriller historique qui m'a permis de découvrir un morceau de cette histoire à laquelle je ne connais rien qui donne une toile de fond très pittoresque qui réveillera sans doute des curiosités et imaginations endormies. Ruelles, places, cathédrales, Italie, Renaissance, ...

Et le cocktail attendu du thriller : du mystère, du suspens, de l'action, du poison, une femme fatale, des trahisons et des doubles jeux. Pas mal de branches auxquelles se raccrocher et ce n'est pas plus mal. Je reconnais un intérêt fluctuant (c'est que j'ai été plus motivé par mes autres lectures de l'auteur et que ce n'est pas une période qui m'attire a priori) et ce métier a l'air parfois rustique du thriller, la mécanique apparente du genre m'a quand même fait avaler des pages par dizaine avec plaisir !

Ce n'est pas non plus un divertissement écrit "dans le vide", Gérard Delteil donne en postface ses sources et éclaire sur ce qu'il a inventé et les versions historiques qu'il a retenues pour écrire son livre. C'est un vrai plus.

Mais le plus intéressant, et un de ses points forts pour ce que j'ai lu de lui, c'est la manière dont il fait évoluer son Stefano vers moins de crédulité et moins d'intransigeance au fur et à mesure qu'il lui fait découvrir des complexités humaines en plus d'oppositions qui sont autant sociales que morales. Plus que par les personnages du jeu politique c'est par cet aspect qu'on peut dire thriller politique. L'actualité de la question de la foi, de son usage politique, celle de l'opposition des puissants et des faibles, des moyens du gouvernement, de l'équité ? la troublante énigme de la croyance et de l'espoir... Le miracle est espéré, instrumentalisé. Cette facette là du récit est pas mal fichue vivante et m'a bien plu.


mots-clés : #historique #polar
par animal
le Ven 7 Avr - 16:09
 
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Sujet: Gérard Delteil
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Jaume Cabré

Sa Seigneurie

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On est à Barcelone dans les dernières semaines du XVIIIe siècle,une Barcelone boueuse et battue par une pluie incessante, où le son omniprésent des cloches des diverses églises rappelle à certains leur devoir religieux, à d'autres leurs obligations de plaisirs. Indifférente à la Révolution qui a sévi pas très loin, la monarchie expose ses débauches et ses dérives.Là s'ébattent les riches et les puissants, avides de pouvoir, d'argent et de sexe, comme tous les puissants...(et comme beaucoup d'autres) et "qui n'aspiraient qu'à une chose, comme tout le monde, tenir la queue de la poêle.".
On prépare avec fébrilité les réjouissances qui marquent le passage du siècle, on salonne, on intrigue. Quand une cantatrice étrangère est assassinée, cela entrouvre une brèche dans le passé de l'impitoyable Régent de l'Audience, Don Rafel, et malgré  une enquête bâclée et un coupable fabriqué, tous ses ennemis , et ils sont nombreux et insatiables,  vont s'y engouffrer pour la transformer en faille, puis en gouffre.

C'est un conte cruel et acerbe, qui dépeint de façon jouissive un milieu totalement factice et haineux, avec ses fausses dévotions, ses alliances hypocrites. Confrontant allègrement l'apparence glorieuse et les pensées putassières, revanchardes, mesquines de ses sordides protagonistes, Jaume Cabre réussit un numéro hilarant de haute voltige, dans cette société insouciante d'autre chose que d'elle-même. Car mieux vaut rire que pleurer. Il mène cela avec une truculence, une finesse, un humour dévastateurs.

Mais on peut lui faire confiance pour ne pas conduire ce simple thriller historico-politique au premier degré. Ces vaniteux d'une époque décadente nous tendent un miroir monstrueux :
Ne dit-on pas de Don Rafel:
À coup sûr, des personnes présentes dans ce cercle, don Rafel était le plus envié, le plus haï et le plus craint parce qu'il était influent, inflexible et corrompu, trois qualités qui allaient normalement de pair avec la carrière de ceux qui, en ces années de grâce, tenaient le haut du pavé à Barcelone.


Il en arriva même à être tenu pour un homme politique incombustible, un de ces hommes qui savent dire que la  politique ne les intéresse pas, qu'ils ne sont pas des hommes politiques, vraiment pas, et que s'ils sont là où ils sont, c'est pour rendre service, c'est différent, parce que la politique, non merci.


Ne se pavane t'il pas ridiculement à essayer ses costumes fastueux?
N'est-il pas totalement déconnecté de la vie quotidienne de ses concitoyens ?

D'une fenêtre grillagée lui parvint un relent de chou bouilli : il fit une grimace de dégoût, du chou au dîner, les pauvres gens.


Ne court-il pas en voiture à cheval,  et non en scooter, concupiscent, vers sa jeune maîtresse, pas du tout intéressée, à travers les rues obscures de la ville?
Ne reste t'il pas superbe et indifférent face aux attaques, dans  la certitude  de son bon droit?

Il se fâcha, il rit en disant voilà bien des bêtises, ses yeux se révulsèrent, il fit claquer sa langue, se reprit à rire, dit moi ? eh ? moi ? et il nia tout, définissant cette histoire comme un sale mensonge, pourri.


Les temps ont changé, nous  dit-on. Mais nous savons tous qu'il ne faut pas le croire.


mots-clés : #historique
par topocl
le Ven 31 Mar - 12:56
 
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Sujet: Jaume Cabré
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