Des Choses à lire
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Georges Brassens, Lettre à Toussenot

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La date/heure actuelle est Jeu 28 Mar - 9:18

322 résultats trouvés pour historique

Didier Decoin

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 13 51ge8210

Le Bureau des Jardins et des Etangs

Japon, XIIème siècle.
Miyuki était l'épouse Katsuro, le meilleur pêcheur de carpes du pays. Tellement doué que ses poissons avaient l'immense privilège d'aller parer les étangs impériaux. Mais Katsuro est mort. Malgré son désespoir, Miyuki décide de convoyer, une fois encore, les carpes pêchées par son époux jusqu'à la capitale.

Je me réjouissais à l'idée de lire le périple de cette femme affrontant seule les chemins périlleux d'un pays alors en proie aux rapines et aux raids vengeurs de clans rivaux. Une femme bien démunie dans ce monde d'hommes, n'ayant guère que son corps à monnayer, et pour la soutenir, les souvenirs d'un mariage heureux et passionné avec son pêcheur de carpes.

L'idée de départ est belle, mais une belle idée ne suffit pas à faire un bon roman. Enfin je crois.
De toute évidence, Didier Decoin a voulu faire un roman sur les sens.  A la sensualité cérébrale et quelque peu infatuée des fonctionnaires impériaux, répond celle toute brute et "animale" d'une femme simple et sans apprêts, encore brûlante des réminiscences d'un mariage passionné.
Les scènes sensuelles ou érotiques se succèdent donc. L'ennui, c'est que ma vision de la sensualité est très éloignée de celle de Didier Decoin… Là où j'aurais aimé des ellipses et du raffinement, j'ai plutôt, comme topocl, ressenti ces passages comme assez vulgaires.

L'auteur s'est visiblement bien documenté sur le Japon de cette époque, mais la symbolique, lourdement appuyée, m'a parfois agacée. L'histoire, finalement ténue, ne présente pas l'intérêt escompté et tient surtout par cette confrontation des sens. Hélas, le tout manque cruellement de subtilité…
J'attendais beaucoup de ce roman, et c'est une belle désillusion.


mots-clés : #historique
par Armor
le Mar 21 Mar - 13:01
 
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Sujet: Didier Decoin
Réponses: 11
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Erik Orsenna

L'entreprise des Indes

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 13 Tylych46

« Le 13 août 1496, au large du Portugal, le bateau que commande Christophe Colomb fait naufrage. Le futur amiral vient d’avoir vingt-cinq ans. Par miracle, il réussit à regagner la côte et trouve refuge à Lisbonne auprès de son frère cadet, Bartolomé. Lequel exerce la profession de cartographe. Depuis le début de ce xve siècle, le monde s’ouvre. Et le Portugal est le moteur principal de cette ouverture. La Renaissance commence par des expéditions lointaines. Sous l’impulsion d’Henri le navigateur, des caravelles partent chaque mois pour aller explorer les côtes de l’Afrique. À Lisbonne, capitale du savoir, se retrouvent toutes les corporations de la découverte : mathématiciens savants du ciel, cosmographes, géographes, constructeurs de bateaux et des outils de navigation… cartographes. Huit années durant, les deux frères vont travailler ensemble et préparer le voyage auquel Christophe songe depuis l’adolescence : c’est l’Entreprise des Indes, gagner Cipango (le Japon) et l’empire du Grand Khan (la Chine). Mais au lieu de la route habituelle, celle de la soie, vers l’est, on affrontera l’océan, plein ouest.
En 1484, leur projet sera rejeté par le Comité des Sages qui conseille le Roi Jean II. C’est la raison pour laquelle Christophe ira tenter sa chance auprès des monarques espagnols, Isabelle et Ferdinand. Un maître cartographe, un rhinocéros, un fabricant de veuves, une maîtresse d’école pour les oiseaux, une bécassine, une prostituée réputée principalement pour la qualité de ses oreilles, Marco Polo, quelques Dominicains, des chiens dévoreurs d’Indiens, tels sont quelques-uns des personnages secondaires de ce récit.


Il y a des livres où après lecture, on se demande pourquoi nous sommes passés devant autant de fois, sans pour autant les choisir. L’entreprise des Indes fait partie de ceux-là.
Cette fois-ci , après Colomb l’explorateur ,c’est bien Orsenna qui  sillonne l’Espagne et le Portugal du 15eme siècle , ces puissances riches et orgueilleuses , avides de savoir , de partages à l'instar des génocides.
C’est pourtant sous l’œil de l’inquisition, de l'église qui méprise le savoir des cartographes, des explorateurs, préférant inculquer « le savoir de l’ignorance » que cohabitent les esprits, les marins, ces hommes rapportant les trésors d’Afrique, les esclaves aussi, le tout clarifié par l’auteur .C’est une mine d’or que ce roman qui nous fait vivre la naissance des cartes ainsi que leur confection ,  la vérité esquissée et les mensonges sciemment  répandus… la vie des marins , les veuves …
Le projet « colomb »  se retrouvera chez le roi  du Portugal qui refusera cette expédition,  ce sera donc sous le drapeau espagnol qu’il s’accomplira.
Mais la découverte n’est-elle que vectrice d’horreurs et d’ignominies sur des peuples décimés ?
Elle n’a été que sauvageries et atrocités pour un meilleur profit.  
Est-ce  là le plus grand remord de l’entreprise des Indes ?
C'est bien sous forme de confessions et sous l'emprise de la honte que le récit se construit.
Un roman très riche.

Dieu seul sait comme j'ai aimé mon travail de cartographe, tout de précision et de rêverie mêlées. Mais, dans une autre vie, je sais que je m'adonnerais à la dissection ; avec une préférence pour les cadavres de dominicains. Quelle tâche plus exaltante que de chercher dans le corps d'un de ces saints hommes l'origine de la violence? Il doit s'agir d'un organe minuscule en forme de trébuchet, une balance interne qui le fait passer sans prévenir de l'extrême bonté à la pire sauvagerie.



mots-clés : #historique #violence
par Ouliposuccion
le Lun 20 Mar - 17:30
 
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Sujet: Erik Orsenna
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Ernst Lothar

Mélodie de Vienne

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 13 Images20

Cette grosse saga familiale décrit sur quatre générations une famille de Viennois facteurs de piano, et à travers eux les  splendeurs et le déclin de l'Autriche.

Bien que l’auteur explique vouloir révéler l'Autriche au lecteur dans toutes ses ambiguïtés, on n'échappe pas à certains stéréotypes, à des psychologie assez pesantes et dans la dernière partie à un nationalisme assez gênant. Les péripéties s'entrecroisent intimement avec l'Histoire , un peu trop d'ailleurs dans un lien fiction-réalité qui n’est pas toujours clair.
Si on retrouve avec plaisir la Vienne impériale, son  mélange de  conservatisme et de plaisirs, aucun personnage n’est réellement sympathique. Et on n'en ressort pas, contrairement à ce qui est annoncé sur le quatrième de couverture, avec l'exaltation qu'apporterait un petit frère des Buddenbrook ou de la Famille Karnovski, mais plutôt avec le regret que ce n'en soit qu'une pâle imitation.


mots-clés : #famille #historique
par topocl
le Sam 18 Mar - 9:07
 
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Sujet: Ernst Lothar
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Kenizé Mourad

De la part de la princesse morte

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 13 Tylych76

C'est une histoire authentique qui commence en 1918 à la cour du dernier sultan de l'Empire ottoman.

Selma a sept ans quand elle voit s'écrouler cet empire. Condamnée à l'exil, la famille impériale s'installe au Liban. Selma, qui a perdu à la fois son pays et son père, y sera " la princesse aux bas reprisés ". C'est à Beyrouth qu'elle grandira et rencontrera son premier amour, un jeune chef druze ; amour tôt brisé.

[i]Selma acceptera alors d'épouser un raja indien qu'elle n'a jamais vu. Aux Indes, elle vivra les fastes des maharajas, les derniers jours de l'Empire britannique et la lutte pour l'indépendance. Mais là, comme au Liban, elle reste " l'étrangère " et elle finira par s'enfuir à Paris où elle trouvera enfin le véritable amour. La guerre l'en séparera et elle mourra dans la misère, à vingt-neuf ans, après avoir donné naissance à une fille : l'auteur de ce récit.
[/i]

Ce n’est pas un livre historique à proprement parler, ni véritablement une biographie puisque Kenizé Mourad a fait appel à son imagination pour se rapprocher au plus près de sa mère. Pourtant, c’est une partie de l’histoire Ottomane, Libanaise et Indienne. Une fresque historique des plus enrichissantes et une immersion dans la cour du dernier sultan, avant la chute de l’empire Ottoman.
Au travers de Selma , c’est un plongeon au cœur d’Istanbul, cité merveilleuse et féérique aux palais somptueux, Beyrouth, cité intellectuelle, une visite de l’Inde et de ses coutumes au milieu des mouvements pour l’indépendance menés par Gandhi.
S’entrechoquent alors les diverses cultures, les idéaux mêlés aux traditions enracinées.
Destin tragique que celui de la mère de Kenizé Mourad, après avoir connu les fastes d’une princesse c’est tout une dignité qui est perdue. Loin du sultanat, c’est une étrangère partout qui jamais ne se sera vraiment trouvée.
Exposé aux tensions politiques et communautaires de l’époque c’est tout l’Orient qui gronde et l’auteure, spécialiste du Moyen-Orient et du continent Indien réussi avec savoir-faire à transmettre l’histoire et la destinée des siens.
Je lirai la suite , "Le jardin de Badalpour".


mots-clés : #biographie #historique
par Ouliposuccion
le Ven 17 Mar - 17:36
 
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Sujet: Kenizé Mourad
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Christopher R. Browning

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 13 55371610

Des hommes ordinaires : Le 101e bataillon de réserve de la police allemande et la Solution finale en Pologne

présentation de l'éditeur a écrit:A l'aube du 13 juillet 1942, les hommes du 101e bataillon de réserve de la police allemande entrent dans le village polonais de Jozefow. Au soir, ils ont arrêté 1 800 Juifs : 300 hommes sont sélectionnés pour le travail, les autres, femmes, enfants et vieillards, sont abattus à bout portant. Les quelque 500 policiers de réserve du 101e bataillon n'avaient rien de nazis militants ou de racistes fanatiques. Ces " hommes ordinaires " ont eu, à plusieurs reprises, l'occasion de s'abstenir. Ils ont, dans leur immense majorité, préféré obéir, faisant en seize mois plus de 83 000 victimes, assassinées sur-le-champ ou déportées vers Treblinka. Analysant les témoignages de 210 anciens du bataillon, Christopher Browning retrace leur parcours, analyse leurs actions et leurs motivations, dans un des livres les plus forts jamais écrits sur la Shoah et sur l'ordinaire aptitude de l'homme à une extraordinaire inhumanité.


Une lecture sur laquelle j'étais resté partagé. L'objectif de rigueur et d'objectivité énoncé ne donnant pas forcément l'impression d'être poussé jusqu'au bout et une construction chronologique brouillée par des allers-retours expliqueraient mes réserves.

Il faut cependant souligner que le cœur de l'ouvrage repose sur un ensemble de témoignages a posteriori, collectés dans les années 60. Épluchés, sélectionnés et recoupés ils servent à tenter une reconstitution de comment ces "hommes ordinaires", ces policiers, hommes déjà mûrs, certains pères de famille, originaires de Hambourg ont pu participer activement, plusieurs fois, aux basses besognes de la Solution finale.



L'auteur n'est d'ailleurs pas le seul historien à s'être intéressé à ces témoignages, la postface est consacrée aux divergences de vue avec un confrère (Goldhagen). Partie laborieuse qui peut rendre compte d'une recherche d'objectivité plutôt que de condamnation d'office ? faut voir. j'ai été déçu aussi dans cette dernière partie par la démonstration qui est loin d'être extraordinaire, mis à part que l'approche du livre qu'on a en main est nettement plus motivante.

Pour ce qui est des faits reconnus on apprend beaucoup, sur le rôle des ghettos, certaines évolutions de la façon de mettre en oeuvre les exécutions : alcool, "sous-traitance" à des soldats étrangers, un découpage de l'ensemble en tâches attribuées à des acteurs différents, ...

Le dur des faits, les descriptions d'exécutions, les chiffres qui vont avec dépassent de loin toute possibilité d'imagination ou de projection. Ce n'est pas un problème d'abstraction c'est que (dieu merci !) sans ce genre d'expérience il est impossible de conceptualiser ça, de concrétiser le sens des mots et des chiffres.

Avec les extraits de témoignages et d'autres documents le livre essaye de définir ce qui a rendu possible le passage à l'acte "d'ensemble", en incluant les différences de caractères et d'attitudes, les refus, degrés divers d'acceptation et  de participation active. Des clés ou des pistes sont trouvées dans le contexte historique : l'endoctrinement, la guerre, l'usure morale dans cette guerre, mais aussi dans les dynamiques de groupe : hiérarchie, peur des sanctions, une forme de solidarité aussi teintée d'une volonté ne pas se marginaliser dans une structure qui ne peut pas l'accepter. Beaucoup d'ingrédients qui laissent inquiet et songeur tellement c'est à la fois lointain et quotidien à d'autres degrés.

La démonstration ne se transforme pas pour autant en justification, ce qui n'est pas étonnant et à rapprocher des chiffres comme 500 acteurs pour 83000 victimes (exécutions et participation aux déportations). Pas étonnant mais l'énigme et l'inquiétude qui motive ce type de lecture reste entière...

Les rappels  sur les expériences comme celles de Milgram (fameuse histoire des décharges électriques) sont légers. Les retours sur le poids du groupe, les oppositions d'images lâcheté/courage, faiblesse/force, endoctrinement/libre arbitre, le racisme "d'époque"... déplacent le sujet sur une perspective qui n'est plus historique ou alors "à actualiser" (sans que ce soit formulé explicitement).

A côté du comment c'est donc la question de la légitimité de l'acte et de l'individu qui est posée, le sentiment implicite qui fait qu'on évite de se poser des questions.

Reste qu'il est à travers cette lecture seule, et dans l'absolu ?, impossible de se projeter dans ce monde d'alors et qu'on ne peut pas non plus estimer le poids du choix individuel du refus (question politique d'une forme d'inaction).

La conclusion brute qu'on serait obligé d'en garder n'est pas réjouissante : statistiquement nous sommes des monstres.

(A prendre avec des pincettes car c'est une refonte avec de lointains souvenirs d'un avis de lecture de 2010... ).


mots-clés : #antisemitisme #deuxiemeguerre #communautejuive #historique
par animal
le Dim 12 Mar - 22:01
 
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Sujet: Christopher R. Browning
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Kazuo Ishiguro

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 13 41t1c010

Le géant enfoui


Original : The buried giant (Englisch/UK, 2015)

CONTENU :
Les Romains sont disparus depuis longtemps et la Britannie décline. Au moins les guerres entre Britanniques et Saxons semblent avoir céssé. Ce nouveau roman d'Ishiguro se situe en proximité du Roi Arthur décédé, dans un monde de chevaliers errants, de dragons et d'ogres. Deux Britanniques, Axl et Beatrice, se décident à partir en quête de leur fils. Un brouillard étrange d'oubli est sur le pays et leur recherche cible aussi bien leur fils que la reconquête des souvenirs. Vers où est-ce que cela les menera ?

REMARQUES :
Le lecteur des œuvres d'Ishiguro est surpris (ou justement pas) : à nouveau le Britannique d'origine japonais change complètement le registre. Après des romans historique, absurde, aestetique, detective ou dystopique, il change ici le cadre et le genre, apparemment. A travers certaines personnes et le cadre choisi, on peut se croire dans un prolongement des legendes autour du Roi Arthur, voir même une sorte de roman Fantasy avec des chevaliers, des guerriers, des ogres, des dragons… Au même moment nous reconnaissons des élements du style de l'auteur, certains sujets : cette écriture flottante et la place de la mémoire, des souvenirs.

Dans un paysage pauvre Axl et Béatrice, un couple déjà en âge avancée, sont à la maison dans un campement souterrain briton. Derrière leur comportements d'attention, leur affection sensible nous sommes aussi rapidemment amené à constater que quelque chose d'innommables se met entre les gens : un nuage, un brouillard d'oubli, quelque chose d'incertain concernant son propre passé et celui de son peuple même. Juste des morceaux de souvenirs atteignent ces gens, comme si leur propre identité leur reste caché. Alors dès les premiers pages nous sommes devant des questions du lien entre souvenir et identité ! Mais avant que ne disparaît le tout dans l'oubli complet, le couple vieillissant veut se mettre en route et en recherche de leur fils « perdu ». Et au même moment en quête de leurs propres souvenirs. Mais l'oubli – est-ce que c'est une maladie, un sort jetée ? Ou éventuellement une punition de Dieu, signe de sa lassitude ? Ou un coussin sur lequel se reposer ? Y-t-il une responsabilité de se souvenir ou un droit à l'oubli ?

Sur leur chemin ils rencontrent des personnes diverses, chacun avec sa part de souvenirs, voir même sa tâche là-dedans. Il y a surtout Wistand, le guerrier saxon, parti pour tuer Querig, le dragon. Celui-ci, de son coté, semble lié avec ce nuage d'oubli sur le pays ! Aussi y-t-il Gawain, un chevalier d'Arthur, investi lui-aussi d'une tâche autour du dragon.

Mais je vais pas continuer concernant le contenu du roman. Qui, en entendant certains mots clés, s'attend à un roman de Fantasy ou de combats acharnés sera certainement déçu, car les descriptions de scènes d'actions me semblent un peu lourdes, sans vie, voir sans grand intérêt. Mais il me semble clair que pour Ishiguro l'attention centrale n'est pas là, mais que l'importance est dans les sujets tels que le souvenir et l'oubli de fautes, du passé, aussi bien sur un plan personnel (histoire d'amour entre le couple) que intertribal, entre éthnies différents, ici donc les Saxons et les Britons.

Ici Ishiguro met dans un contexte mythique, mi-historique, mi-parabolique, des sujets importants qui devraient nous interpeller aussi aujourd'hui, et dans ces siècles entamés de génocides et de responsabilités niées et repoussées. Est-ce que notre époque (et peut-être toute l'histoire personnelle et suprapersonnelle?) ne reste pas marquer par l'oubli sur différents niveaux ? Y-t-il une responsabilité de souvenir ? Ou aussi une néccessité d'oubli face aux grandes torts subis ? Est-ce qu'il peut y avoir identité sans souvenir, sans passé avoué ?...

En ce qui me concerne j'étais à nouveau fasciné par la capacité d'Ishiguro de poser des questions essentielles dans une écriture apparemment simple, voir une peu flottante. Celui qui cherche la confrontations avec de telles questions aura de quoi manger ici !

Mais de toute façon je suis peut-être un inconditionnel de cet auteur que j'estime énormement ?


mots-clés : #contemythe #historique
par tom léo
le Jeu 9 Mar - 22:17
 
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Sujet: Kazuo Ishiguro
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Robert Menasse

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 13 Menass10

Chassés de l'enfer

Viktor, la quarantaine bien tassée, décide de mettre un peu d'ambiance à un repas de classe (25 ans après l'obtention de son baccalauréat) en révélant le passé nazi de ses anciens professeurs, presque tous présents au dîner. Auquel il ne reste plus que Viktor et Hildegund, les autres ayant fui sous l'outrage ; non sans avoir copieusement insulté l'impétrant.

Mais pourquoi Viktor, devenu historien, a-t-il eu besoin de faire resurgir l'Histoire ? Pourquoi cet homme n'a-t-il jamais accepté la défection de ses parents et son placement à l'internat ? Pourquoi, chez lui, ne parlait-on jamais de la période nazie ? Pourquoi a-t-il été privé de son histoire familiale, une histoire juive (il s'appelle Abravanel) et lourde ?

Parallèlement au récit de Viktor, le lecteur suit l'histoire d'un petit garçon portugais, Manoel, qui en 1612 va voir surgir le fabuleux carrosse de l'Inquisition et s'envoler tous ses rêves de gamin. Ses parents sont des marranes, des juifs convertis au christianisme, mais qui continuent à célébrer les rites de leur ancienne religion. L'enfant, qui ne comprend pas ce qui lui arrive, est envoyé chez les Jésuites alors que ses parents sont torturés par l'Inquisition. Cet enfant est cependant promis à un grand avenir… juif dans la Nouvelle Jérusalem que sera Amsterdam au XVIIème siècle.

Les deux récits s'interpolent de manière à former une sorte de miroir, de relais, d'écho de l'un à l'autre ; les deux enfants ayant vécu de manière à la fois similaire et différente les mêmes troubles, les mêmes questionnements et les mêmes douleurs profondes.

Mais ce que je retiens plus particulièrement (en dehors du très efficace jeu temporel, de la finesse des analyses historiques et psychologiques et des questionnements philosophiques), c'est bien l'allure globale du récit. Un récit qui semble ligoté, enchaîné, un récit qui est comme contenu, réprimé, bâillonné et le lecteur sent (de manière physique) cet empêchement, cette contention, cette rétractation et il est impossible de ne pas entendre gronder les eaux de la révolte, de ne pas percevoir les coups de béliers cognant contre les portes, les cris qui s'étouffent mais qui voudraient jaillir. Pourtant si le texte échappait à cette contention alors il deviendrait un hurlement sauvage, un maelstrom dévastateur, incompréhensible et dangereux. C'est pourquoi le lecteur sait gré à l'auteur de contenir sa rage, son impuissance et de la mettre en mot, et même de lui donner un visage, une figure, une attitude :


Maintenant qu'il avait le fouet en main, il le fit siffler en frappant l'enfant : Voyou de petit Juif, je vais t'apprendre à souiller un chrétien… (et de nouveau le fouet cingla Mané), comme tu l'as fait, espèce de porc ! … (un coup de fouet) Cochon de Juif ! Les chevaux entendirent le fouet et se cabrèrent, redémarrèrent, le cocher eut fort à faire pour les dompter, Caaaaalmes ! Mais l'homme, lui, ne se calmait pas. Regarde ce que tu as fait ! Et encore le fouet - et là se produisit une chose étrange : Mané aurait pu se sauver en courant, le gros homme poussif n'aurait eu aucune chance de le rattraper. Courir ! Mais où ? Mané n'en avait aucune idée. La seule qui lui vint, c'était que, s'il supportait cela, s'il ne courait pas, s'il encaissait les coups avec résignation, tête baissée, alors la rage de cet homme s'apaiserait plus vite. Et l'homme, voyant avec quelle résignation l'enfant recevait le fouet, laissa tomber celui-ci après un dernier coup déjà moins assuré : Ah, tu veux m'apprendre le christianisme ! Tu tends l'autre joue ! Espèce de porc !


L'attitude de résignation de l'enfant Manoel est exactement celle de l'auteur face à un texte qui pourrait être un cri de révolte mais qu'il transforme en parole et de cette parole jaillit d'infinis questionnements sur le sang, sur l'appartenance (ou pas) à une religion, sur ce qui fonde (ou ceux qui fondent) nos certitudes, nos engagements et en filigrane se pose la question du déterminisme : les juifs sont-ils déterminés (par le sang ? Par leur Histoire ? Par leur religion ?) à ne pas se rebeller contre la déportation et à en faire une force ?


Chassés de l'enfer est un texte d'une ampleur (temporelle, philosophique) impressionnante et parfois effrayante. Il convoque les grandes questions qui traversent les siècles : la religion, la soumission, la révolte, le renoncement. Mais c'est aussi, et peut-être avant tout, un roman, un roman d'apprentissage, la vie de la naissance à l'âge adulte de deux êtres que tout sépare hors leur commune origine juive, et l'auteur s'attache à raconter ces vies, parfois minuscules, parfois immenses, qui font de ce roman un véritable récit d'aventures modernes, anciennes, mélangées.


mots-clés : #communautejuive #historique #initiatique
par shanidar
le Mar 7 Mar - 21:46
 
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Sujet: Robert Menasse
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Vues: 810

José Frèches

Gengis khan

tome 1 L'homme qui aimait le vent

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 13 Tylych36


tome 2 Le conquérant

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 13 Tylych37

De la Chine aux frontières de l’Europe, il a régné sur le plus grand empire de l’Histoire.
Dès son enfance, Temüdjin, futur Gengis Khan, rêve de grands espaces. Son précepteur chinois, Vieille Cime, lui parle d’Alexandre le Grand : il veut le surpasser en nombre de conquêtes. Il apprend à manier l’arc, à monter à cheval, à apprivoiser les aigles. À la mort de son père, ce nomade prend la tête du clan des Quiyat, puis, en 1206, est élu chef des Mongols.
Séducteur, autoritaire, il rallie à lui de nombreux peuples, bousculant les grandes civilisations sédentaires qui l’entourent : à l’ouest, l’Europe des cathédrales, à l’est, la Chine des Song.
Pour atteindre son rêve de grandeur, Gengis Khan doit se révéler impitoyable.
Avec virtuosité, José Frèches nous raconte les années d’apprentissage et l’ascension fulgurante de ce guerrier implacable qui faisait corps avec ses chevaux et aimait les femmes avec passion et sensualité. Un homme qui voulait vivre tous ses rêves.
Le destin fascinant d’un personnage de légende


Ca faisait un moment que j'attendais de lire une biographie sur Gengis Khan , sans jamais en trouver une vraiment intéressante.
José Frèches qui ne m'était pas inconnu l'a faite , romancée certes , mais étant un historien de la Chine , ça me semblait une bonne chose de choisir celle-ci.
Fascinée par ce guerrier , les mongols , ces steppes d'Asie Centrale , cet empire gigantesque qui fut le plus grand au monde , je voulais connaître la psychologie de ce personnage , sa stratégie guerrière et déterminer si oui ou non , Gengis Khan n'était qu'un tyran sanguinaire ou un héros , puisqu'il est encore l'un où l'autre selon les contrées de l’Asie. Un despotique ou le père d'une nation , il reste un personnage qui encore aujourd'hui fait rêver ou trembler.
Ayant eu la chance de connaître divers endroits de la route de la soie , dont Boukhara , Ourgench et Samarcande qui fut des capitales détruites et pillées par l'armée de Gengis Khan , des lieux d’exactions et d'extermination massive , il m'a semblé qu'au travers de ces romans , José Frèches reste dans une narration assez crédule bien loin de la réalité que peuvent relater les historiens de toutes ces régions.
Encore à ce jour , une haine féroce gronde toujours en Ouzbekistan et au Kirghizistan lorsque l'on évoque Gengis Khan , 800 ans plus tard.
Difficile de juger un tel personnage quand on sait que les mongols défendaient un territoire peu à peu envahit par la grande puissance de Chine , les guerres de clans et les passages de plus en plus étendus de la route de la soie , faite de profit et de stratèges bien loin d'un système mongol proche de la nature et faite de trocs , luttant pour la liberté nomadisée et voyant la sédentarité comme une petite mort.
Sanguinaire peut-être , mais surtout réfléchi , instruit par une éducation auprès d'un sage chinois , Gengis Khan n'était pas le mongol inculte et imprudent , mais un homme qui avait un rêve «  outrepasser Guillaume le Conquérant et construire le plus grand empire mondial »
D'un idéal naît la vanité. Après avoir brisé la muraille de Chine , L'occident devient prenable et accessible.
Pourtant sous cette façade d'homme autoritaire , de conquérant implacable, existe le questionnement, le trouble et la naissance d'une question «  A quoi tout cela a t il servi ? »
2 353 000.
C'est le dernier nombre de morts qu'il a noté avant son décès sur un cahier qu'il ne quittait jamais, un décompte quotidien d'une vie.
Je n'ai pas ressenti ce côté sanguinaire , tout est enjolivé dans ce roman , l'auteur démontre bien plus le côté intellectuel de Gengis Khan , la naissance d'une nation ainsi que son système de répression.C'est un parti pris.
Il aurait pourtant été intéressant de ne pas survoler ce qui a fait de lui l'homme le plus impitoyable , d'aller au delà de la narration des villes prises et des déplacements d'une armée. Finalement très peu de passages illustrent la violence subie au delà de quelques lignes sur des amas de gens brûlés , décapités ou lapidés.
Non pas que j'aime lire cette violence , mais qu'elle est représentative de ce qu'étaient Gengis Khan et son armée barbare.
Représenté comme un homme sensuel et amoureux des femmes , on parle très peu des viols de masse et des meurtres de celles-ci , leurs enfants compris.
Ce n'est sans doute pas pour rien qu'encore à ce jour , il reste l'homme qui a la plus grande descendance au monde...
J'ai pu néanmoins m'égarer dans les steppes de Mongolie et d'Asie centrale avec grand plaisir , dans ces lieux que je connais tant , c'est la grande force narrative de José Frèches qui sait donner vie aux paysages.
Pour conclure , je dirais que ça reste une lecture très intéressante pour ceux qui méconnaissent ce pan de l'histoire fascinant , cet homme qu'est Gengis Khan , un peu moins pour ceux qui sont déjà sur un terrain connu , bien que quelques clés m'aient été données , je reste un peu sur ma faim du fait de tout ce qui n'a pas été relaté.


mots-clés : #biographie #historique #violence
par Ouliposuccion
le Lun 6 Mar - 18:05
 
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Sujet: José Frèches
Réponses: 2
Vues: 967

José Frèches

L'impératrice de la soie

1 - Le toit du monde

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En 655, sous la dynastie des Tang, la Chine détient une somptueuse richesse : la soie. Sa finesse chatoyante en fait une matière précieuse convoitée. Bouddhistes et chrétiens, moines et brigands, tous, sur la légendaire Route de la Soie, rêvent de s'emparer du secret de sa fabrication. De Peshawar au Tibet, en passant par le palais impérial, les tensions s'exacerbent. Mais l'étoffe moirée n'attise pas que la convoitise, elle préside aussi à la destinée des cœurs purs : ainsi Cinq Défenses, paisible moine bouddhiste, se voit-il confier brusquement deux mystérieux nourrissons par un lama tibétain. Le visage de l'un des enfants est à demi recouvert de poils, ce signe ne trompe pas, ils sont les jumeaux Célestes sur lesquels repose l'avenir de l'Empire...



2 - Les yeux de Bouddha

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Sur la route montagneuse où ils fuient la menace du brigand Majib, Cinq Défenses et Umara, la jeune chrétienne nestorienne, savent que leur amour a la puissance du Yin et du Yang. Et ce n'est pas un hasard s'ils ont entre leurs mains ces deux sublimes nourrissons, les Jumeaux Célestes, précieux fardeaux qui accentuent néanmoins leur vulnérabilité. La rumeur concernant les enfants divins les suit partout, du plus petit village jusqu'à la capitale impériale, Chang'An, où le couple vient s'abriter. Or la lutte entre l'impératrice rebelle, Wuzhao, et son époux Gaozong déchaîne les intrigues. Sans le savoir, le jeune couple risque ses pas au coeur d'une terrible tourmente où seule pourra les sauver la pureté de leurs sentiments?


3 - L'usurpatrice

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Les sublimes Jumeaux Célestes ont grandi et se nomment Lotus et Joyau. Des foules entières viennent les honorer à Luoyang. Car depuis que Cinq Défenses et Umara lui en ont confié la garde, l'impératrice Wuzhao élève ces enfants avec une délicate tendresse. D'ailleurs, elle devine que leur présence dans son palais préfigure la réussite de ce rêve qu'elle caresse depuis si longtemps : devenir le premier empereur de Chine ! Alors, elle pourra dénouer les fils sinueux qui se sont emmêlés le long de la Route de la Soie entre chrétiens et bouddhistes, Chinois et Tibétains. Et enfin, autour d'elle, comme sur un mandala, chacun pourra retrouver sa place, en un Parfait Équilibre.


L'impératrice de la soie , fascinante trilogie que j'ai lue il y' a maintenant quelques temps , plusieurs années même...se devait d'être sur ce forum alors que ce fil accordé à José Frèches s'ouvre.
Je garde en mémoire encore ce voyage au cœur de la chine à son apogée, durant la dynastie des Tang , époque prospère grâce à la route de la soie qui nous est contée , sa magnificence et sa grandeur , cette époque historique ou chaque civilisation se rencontrait , se narrait ses légendes et s'échangeait leur richesse , avide de savoir et de dialogue.
La soie , trésor d'état , était alors considérée comme ce qui était le plus beau , le plus raffiné des biens , que ce soit en Orient ou en Occident , et c'est au travers de cette œuvre que l'on découvre les procédés qui ont permis à la Chine de préserver cette fabrication secrète et par quels moyens elle y est arrivée , faisant de cette étoffe douce et brillante , le rêve le plus éclatant du monde entier.
Puis il y a Whuzao , impératrice de Chine , l'unique femme au pouvoir en Chine , créature remarquable qui réussi à s'imposer par ses charmes et ses meurtres...Une intrigante sournoise qui m'a toujours fascinée en vue de son parcours et son intelligence , par cette volonté si affirmée dans ce monde d'homme à régner sur cet empire monumental.
On sillonne ces romans avec nos deux compagnons de route , entre chrétienneté et bouddhisme , une histoire d'amour qui atteste d'une époque ou chaque culture se rejoignait , où le charnel est onirique et sensuel.
Une saga opulente , romancée certes , mais emplie d 'histoire , de poésie et d'intrigue , comme il en existera toujours , pourtant , c'est le charme et la féerie d'une culture au folklore si fantasmagorique qui sûrement fait de celle ci un joyau littéraire.


mots-clés : #historique #religion
par Ouliposuccion
le Sam 4 Mar - 17:00
 
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Jenny Erpenbeck

Le bois de Klara

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Dans cette maison proche de Berlin, l'auteur a passé, enfant, de merveilleux étés. Elle y  revient un temps clandestinement, une fois qu'elle est vendue, et explore les archives pour retracer son histoire au fil du siècle.
Au départ il y avait le bois de Klara, la fille « bredine » du maire, qui a été vendu en 3 lots. C'était un lieu idyllique, au bord d'un lac, dans une nature enchanteresse, et les propriétaires successifs y ont installé leur demeure. Ils ont adoré ce lieu-refuge, lieu-privilège aussi, qui accompagnait leurs bonheurs et leurs malheurs intimes. Et si leurs vies étaient ballottées voire détruites par l’histoire du pays et ses remous dramatiques, le constant jardinier continuait à tondre, tailler, aménager, couper le bois…

Il y a donc un côté intime du quotidien bienheureux , les promenades, les baignades dans le lac, le bateau accroché au ponton… Les merveilleuses descriptions de Jenny Erpendeck n'ont pas manqué de faire remonter en moi le souvenir ancien de baignades féeriques dans des lacs allemands  sauvages… (mais dan s le livre, c'est beaucoup plus subtil que ça). La nature sublime, indifférente aux tragédies, l'homme l'aménage au fil du siècle pour son confort, et son plaisir.

Mais l'Histoire est là qui s'approprie les lieux, et décide des destins. Chaque époque est l'occasion de le rappeler , de façon souvent allusive et habilement contournée : l'architecte nazi, le juif, la femme terrorisée par l'arrivée de l'Armée Rouge, le communiste récompensé de sa fidélité à l'idée dominante,... Tout ce que l'Allemagne a connu de tragédies au fil des ans, avec en fil rouge, les exils successifs et ce qu'ils impliquent d'abandon et de spoliation, où l'on laisse derrière soit des trésors cachés au pied des arbres, mais emmène ce qui ne pèse pas : la musique.

C'est donc une leçon d'histoire très particulière, par petites touches, à la mélancolie poétique, avec des leitmotivs. Si l'on croit longtemps que la maison et la nature vont résister à l'offense de l'Histoire, on apprendra au fil des pages que comme les hommes, les maisons ont leur vie, leur apogée, leur décrépitude et leur mort.

J’ai vraiment été très touchée par ce livre atypique, subtil et audacieux récit du destin du peuple allemand.


mots-clés : #historique
par topocl
le Mar 28 Fév - 18:14
 
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Sujet: Jenny Erpenbeck
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Eduardo Hughes Galeano

Les veines ouvertes de l'Amerique latine

Le livre de Galeano met le doigt sur le désastre économique que fut pour la Bolivie l’exploitation du minerai d’argent, dans les mines du Potosi, à compter du  XVIII° siècle.
Après un énorme accroissement démographique la Bolivie rétrograda dans l’ordre des nations d’Amérique du Sud,, ses temples et ses palais tombèrent en ruine, le pays connut huit millions de morts dans la population indienne qui fournissait les ouvriers des mines. « Après avoir alimenté la fortune des nations les plus riches...Potosi est une ville pauvre de la pauvre Bolivie …. (Potosi) reste une plaie ouverte dans le système colonial américain : une accusation toujours vivante»
On découvre également dans ce livre le manque d’humanité dont furent victimes les indiens « les indiens étaient des païens, ils ne méritaient pas une autre vie »
Galeano établit une étude économique et sociologique du pillage dont fut victime l’Amerique latine, pillage qui enrichit un temps les espagnols mais les plongea également dans un tres grand marasme les siècles suivants, la punition en quelque sorte. Cet ouvrage offre une large part à l’histoire, l’économie, sa lecture permet de comprendre les révoltes qui ont agité ces pays jusqu’à nos jours et éclairent l’ingratitude du peuple américain qui au lieu de fournir de l’aide tente d’établir des frontières infranchissables à la pauvreté (prendre sans rien donner)...

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mots-clés : #historique
par Chamaco
le Dim 26 Fév - 17:40
 
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Laurent Binet

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HHhH 


Originale: Français, 2009

CONTENU :
Se promenant à travers Prague l’auteur découvre une plaque commémorative, placée sur le mur d’une église. On y fait mention de ces resistants tchèques et slovaques, infiltrés par Londres et le gouvernement de Benes en exile. Ils s’y sont cachés après l’attentat contre Heydrich : chef de la Gestapo, du reseau d’espionnage nazi, planificateur de la « solution finale », à la tête des massacres perpetrés par les SS dans l’Est, protecteur par interim de la Moravie et de la Bohémie, appelé aussi « le bourreau », « la bête blonde », « l’homme le plus dangéreux du Troisième Reich ». Et dans cette crypte trouvera la fin la traque de ces héros de la résistance.

Le narrateur, Binet alors lui-même (très présent dans ce récit) retrace les pas de Heydrich, puis de ces hommes de la résistance jusqu’au jour de l’attentat...

REMARQUES :
Le livre consiste de 257 chapitres assez brefs, numérotés sur un total de 448 pages. Au centre : des personnages et des événements historiques. L’auteur se défend qu’on appelera ce roman « historique ». Pourtant ce n’est pas non plus un pur livre d’Histoire. Ni un pur roman : pour cela l’auteur prétend trop souvent de s’écarter le moins possible des certitudes.

Le titre paraît cryptique, l’était au moins pour moi. En français on le laisse tel quel (et pourquoi ? Il y avait quelqu’un qui pourrait l’expliquer?), tandisque dans l’édition allemande on poursuit avec l’explication de cette abbrévation : « Himmlers Hirn heißt Heydrich » donc « le cerveau de Himmler, c'est Heydrich ».

Mais oui : Heydrich incarne en lui la machinerie de mort en marche. Il n’y est pas juste un executant, et le bras droit de Himmler (Chef des SS), mais aussi un cerveau, p.ê LE cerveau derrière les solutions, les idées les plus radicales, brutales. Un homme sans scrupules...

Par le titre alors l’attention semble se porter vers ce serviteur de la mort. Et à part des pages d’introduction résumant un peu le contexte jusqu’à l’attentat, toute une première partie, voir la moitié du livre, est consacrée à raconter son devenir, ses apparitions aux moments clés ou se décident les choses les plus horribles... Par contre, plus tard Binet expliquera lui-même que l’éditeur n’avait pas retenu le titre proposé « Operation anthropoïde », selon le code pour l’entreprise de resistance. Il aurait avant tout voulu rendre hommâge à l’héroïsme de ces hommes, partis de Londres avec la quasie certitude de ne pas survivre à cette mission suicidaire. Mais cet acte était (et devrait être) un signe symbolique et parlant pour la volonté de liberté de tout un peuple opprimé sous le joug des Nazis.

Oui, ce livre est certainement bien recherché (Binet a éudié l’Histoire), on devine des lectures faites. Certaines informations ne m’étaient pas connues, ou sont tombées dans l’oubli.
Oui, il y a des passages émouvants de ces jeunes gars et leur résolution, partant pratiquemment sans espoir de survivre.
Oui on trouve certaines idées, commentaires justes et enrichissants. Par exemple (pour moi) je trouvais intéressant la composition de ce pair de résistant : Un Slovaque (Gabcik) et un Tchèque (Kubis), selon la volonté de Benes en exile. Car il fallait exprimer une volonté unie de ces deux unités qui prenaient apparemment des cheminements différents : Ici la Bohèmie/Moravie comme partie du Reich (« Protectorat »), là un état vassalle, apparemment libre, mais soumis, à l’image de Vichy : la Slovaquie. Le livre fait surmonter des simplifications.
Les pages qui m’ont presque le plus touchés sont l’évocation des innommables, des multitudes sans noms qui étaient engagés dans la resistance, qui ont apporté leur pierre et ont souvent payé avec leur vie... Qui pensent à eux, en fait mémoire ? Comment ne pas oublier ?

Dans une introduction (ou une explication à la fin du livre?) l’auteur aurait pu expliquer ce qui semble le hanter : la frontière entre fiction et réalité, la part de l’auteur, ses choix, ses questionnements etc.

MAIS face au sujet, et presqu’en général, je trouvais le ton pris par l’auteur proche de l’insupportable. Quelle place centrale LUI il joue ici dans le roman ! Est-ce qu’il s’agit alors des victimes, des héros, dont il parle aussi volontiers ? Je ne veux pas exprimer toutes mes doutes, mais sa façon de procèder m’a profondément énnervé, oui, énnervé. Peu de pages où n’apparaît pas un regard vers son nombril. Cela dévie le lecteur, au moins moi, de l’essentiel. Je n’avais pas envie de lire un livre sur Binet ! Quelles reflexions centrées sur soi d’un écrivain amoureux de sa personne ?!

Mais je m’arrête ici. Avec pas mal de coupures le livre avait tout pour être excellent, mais dans ce traitement cela devient moyen, très moyen.

A chacun de juger.


mots-clés : #deuxiemeguerre #historique
par tom léo
le Mar 21 Fév - 22:49
 
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Sujet: Laurent Binet
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Arthur Koestler

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la 13ème tribu



Commentaire qui ne saurait être que rudimentaire tant il y aurait à dire sur cette lecture intéressante, instructive et l’écriture de Koestler que j’apprécie de plus en plus au fil de mes lectures.

Pourquoi  l’appellation de 13ème tribu ? tout simplement parce que jusqu’à ce que le monde en ai connaissance, n’étaient connues  que les 12 tribus d’Israël, or  nous savons aujourd’hui qu’une autre tribu  s’est convertie  au judaïsme en 740 .  Ces ancêtres  là se sont installés au fil des siècles dans toute l’Europe orientale et jusqu’en Hongrie et Pologne et leurs descendants essaimés par de nombreuses ramifications ont émigré dans le monde.

Le peuple Chinois repoussaient depuis le Ier siècle les nomades vers l'ouest, d'où la présence de nombreuses tribus, mais qui s'éteignirent, ce dont bénéficia  ladite 13ème tribu, celle des KHAZARS. La Khazarie règnera 1 siècle et demi sur la région ce qui démontre sa puissance.

A l'époque les peuples nomades étaient appelés indifféremment du nom collectif de "Turks" par rapport non à la race mais bien à leur langue ouralo-altaïque (en référence géographique à l'Oural et la chaine de Montagne l'Altaï)

La structure politique  de la Khazarie  était gérée par 2 chefs,  le Kagan qui détenait le pouvoir religieux et le Kagan- Bek  le pouvoir séculier. L’économie  était prospère (commerce, taxes de douanes, tributs des suzerains auxquels s’ajoutaient les prises de butins)

La khazarie a une fonction étatique vis à vis des peuplades suzeraines.

Dans les premiers temps de leur conversion les Khazars avaient conservé leurs  habitudes nomades et les rites païens . On peut dire que la conversion s’est installée par étapes jusqu’ au  messianisme.

Pour  garder la position de 3ème puissance face au Califat et à Byzance et ne pas être sous la coupe de l'un, ni de l'autre en adoptant l'une de ces religions ; le choix du Judaïsme s'imposait donc au Kagan.

Cependant ce serait faire outrage à l'intelligence des Khazars et à leurs Kagans que de penser qu'ils n'avaient pas étudié quelque peu cette religion, avec la présence de la communauté Juive en leur royaume.

Il faut noter l’esprit de tolérance dont faisait preuve la Khazarie, en effet sa « capitale » Itil comportait plusieurs quartiers, les Juifs, les Musulmans et les tribus païennes,  chacun de ces quartiers possédait 2 juges de leur religion libres de gérer les problèmes éventuels.

Comme les Khazars avaient su s’imposer et dominer, ils avaient fait barrière à  l’invasion Musulmane en Europe Orientale comme  la France à la bataille de Tours, pour l’Europe occidentale.

J’ai noté aussi les liens des Khazars avec les Magyars (accueillis avec une branche des Khazars en Hongrie)  qui ne se sont jamais déliés.

Après des vagues d’invasion se succédant au fil des siècles, les  Rhus (vikings dont le prince fut l'artisan de la destruction de la forteresse Khazare de Sarkel), les Ghuzz(ou Kumans) et pour finir la plus terrible invasion celle des Mongols (qui  plongea les steppes orientales dans l'âge des ténèbres) et bien que jusqu’au 13ème siècle les Khazars vécurent encore sur leur territoire réduit, la plupart des Juifs khazars trouvèrent accueil en Hongrie et en Pologne où leur habileté dans les arts et métiers fut appréciée.

Je pense que nous pouvons donc considérer qu'il n'y a pas eu d'extinction des Khazars, peut-être (?) seulement du territoire de la Khazarie.

Hélas, les Hongrois au prétexte des croisades et de la Peste noire commirent sur les Juifs les plus terribles représailles, ce qui conduisit les Juifs à se tuer rituellement eux-mêmes pour se sauver de leurs agresseurs.  

Nous savons de nos jours ce que les Juifs ont subi de plus ignoble, d’  inhumain.

J’ai noté aussi que le Kagan s’'était senti affecté par les exactions commises sur les Juifs d’autre pays au point d’en punir, par exemple les musulmans en détruisant le minaret qu’il leur avait construit. (solidarité tribale)

                                        ********

Les annexes en fin de livre apportent un complément quant à la véracité des textes choisis par Koestler. Il est conscient de l'impact que risque d'avoir ce livre.

Koestler explique bien que le territoire de l'Etat d'Israël ne saurait être mis en cause quelles que soient les racines des Israëliens, "cet Etat existe de jure et de facto et il est impossible de le supprimer, sinon par génocide"


l'analyse de Koestler sur la diaspora est intelligente et à mon sens d’actualité  (cf le livre de Shlomo Sand) :

"Et pourtant l'influence persistante du message racial et historique du Judaïsme, bien qu'il soit fondé sur des illusions, sert de frein affectif puissant en faisant appel au loyalisme tribal. C'est dans ce conteste que le rôle joué par la treizième tribu dans l'histoire de leurs ancêtres peut concerner les juifs de la diaspora."

Les sujets qui ont trait à l'anthropologie sont bien traités aussi, il y a eu mixité naturelle notamment par les mariages ou forcée (viol) ; les apparences physiques sont donc souvent subjectives et relèvent plus des facteurs sociaux, environnementaux et comportementaux.


C'était une lecture très nourrissante, c’est l’Histoire inconnue, mais  j'ai le sentiment d'avoir beaucoup appris.


(récupération)


mots-clés : #historique #essai
par Bédoulène
le Sam 18 Fév - 16:41
 
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Han Wu

Han Wu
1909-1969


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Wu Han est un des plus importants historiens chinois.
Historien et essayiste, Wu Han, né en 1909, fit une brève incursion dans la littérature. L'itinéraire de ce fils de lettré pauvre du Zhejiang rappelle celui de beaucoup d'intellectuels de sa génération: études provinciales, monte à Pékin où il est recruté par l'université Qinghua et se fait un nom comme historien de la dynastie des Ming. Il collabore plus tard à une chronique littéraire critiquant Mao Zedong à mots couverts. Victime des gardes rouges dès 1966, Wu Han est soumis à toutes sortes d'avanies, puis emprisonné. Il meurt le 10 octobre 1969.

Source : Éditions Philippe Picquier



Bibliographie en français :

1998: L'empereur des Ming






L'empereur des Ming

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Au XIVème siècle, un certain Zhu Yuanzhang devint empereur de Chine. Il fonda une dynastie, celle des Ming, qui "éclaira" la Chine trois siècles durant.
C'est le destin de cet homme que fait revivre ici l'historien Wu Han, celui de ce gardien de troupeau qui devint chef de bande, puis généralissime des armées en lutte contre les troupes mongoles, avant de se proclamer empereur des Ming.
Trente et un ans de règne à force de massacres, de sadisme et de tortures: il inaugura l'un des régimes les plus tyranniques qu'ait connu la Chine. Conquérant ambitieux et cruel, il élimina ses ennemis : militaires, intellectuels, fonctionnaires, avant d'imposer un régime despotique et une politique de terreur dans toute la Chine.


Une biographie que je pensais romancée de Zhu Yuangzhang (Hongwu) mais agréable surprise , Wu Han s'en tient à relater l'homme et la dernière dynastie sous la domination des hans (ethnie ancestrale principale chinoise), les Ming.
Pourquoi cet intérêt pour les Ming ?
Parce que ce fut une période importante dans l'histoire de l'art chinois , aussi bien en littérature qu'en théâtre , une ouverture d'esprit qui mena à la réflexion et aux débats au sein même de la politique , ce qui reste en Chine une avancée majeure artistique du moins...
Mais qui peut oublier avant ça son fondateur , un des empereurs les plus détestés , despote et sanguinaire... certainement pas les hommes qui réitèrent peut-être sans le savoir le gouvernement d'un tyran du 14eme siècle au fil des temps : la délation de son prochain , les tortures , le massacre des intellectuels...
Ça vous rappelle des choses ? Démonstration :Mao Zédong bien sur ! Le communisme ? Sacré Staline..On pourrait continuer longtemps mais finalement pourquoi aller si loin...On a eu le gouvernement de Vichy.
Mais revenons sur le parcours d'un pauvre orphelin qui fut moine avant de rejoindre la révolte des turbans rouges avec zèle et qui par alliances et stratèges mit fin aux Yuan (Mongols) pour enfin accéder au trône de cette nouvelle dynastie des Ming.
Hongwu instaure un régime autocratique ordonnant l'extermination de dignitaires administratifs tout en mettant son nouveau renouvellement sous contrôle d'une police militaire qui fit vivre une période de terreur et de carnage sans nom.
Renoue-t-il avec ses racines quand paradoxalement , il interdit les exactions du petit peuple ou est-ce purement politique afin d'avoir le soutien de celui-ci qui voyait en lui un espoir...
Il en reste que trop d'exterminations affaiblissent un peuple et que trop nettoyer afin d'assurer la succession de son fils a été un mauvais calcul : ironie du sort , le dauphin n'avait plus de généraux pour le défendre , son père les avait tous tués...
Je n'étoffe pas plus afin de vous laisser du croustillant sous la dent.
Un destin plutôt fascinant quand on part de la pauvreté la plus extrême pour s'asseoir sur un trône durant plus de 30 ans. Un déchirement quand on constate que le parti communisme de Chine en 2016 fait encore disparaître les opposants et intellectuels sous la torture ( je me borne au sujet parce qu'on pourrait en citer beaucoup).
Un livre édifiant qui fait réfléchir au delà de son contenu et ravira les férus de l'histoire de Chine.


mots-clés : #historique
par Ouliposuccion
le Sam 18 Fév - 13:07
 
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Sujet: Han Wu
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Stefan Zweig

Le monde d'hier

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Nous sommes en 1941. Stephan Zweig, désespéré de l'homme et du monde, dévasté par un nouvel exil, joue une fois de plus son rôle d'écrivain : témoin et penseur se retournant sur son histoire et l'histoire de ce siècle . Ce livre se partage entre l' autobiographie à orientation littéraro-intellectuelle, et un témoignage historique. On sent dès le début que c'est un cri désespéré.

La première moitié du livre est consacrée au tournant XIXème-XXème siècle , cet avant guerre insouciant.  De Vienne, à la fois libérale et puritaine, Zweig, jeune homme précocement brillant et descendant d'un bourgeoisie plus qu'aisée, voyage sans limites à travers l'Europe et le monde, tisse des amitiés artistiques dans toutes les capitales... jusqu'à l'assassinat de Louis- Ferdinand et au déclenchement de la 1ere guerre mondiale, où, citoyen européen qui commence à être reconnu en tant qu'auteur, il se retrouve l'un des seuls à prôner un pacifisme résolu, attaché à sa « liberté intérieure».

C'est un récit à la fois fort instructif, élégant et très maîtrisé , les différences de mentalités entre les capitales sont finement analysées, Zweig décrit de belles figures d'amis artistes. Par contre absence totale de femmes,  on est là pour parler de choses sérieuses...
J'ai également  été gênée par une vision du monde tout à fait biaisée par sa situation privilégiée, ignorant tout du sort des moins favorisés (les ouvriers étaient bienheureux en ces temps où l'on avait réduit leur temps de travail, explique-t'il) et l’impression que tous les citoyens partagent, et son bonheur, et ses points de vue. Comme s'il régnait une fraternité universelle, comme si la notion de nationalisme n'avait émergé que le jour de la déclaration de guerre, pour mieux exploser dans les décennies suivantes. Cette « naïveté » explique sans doute sa  surprise à découvrir les excès de la haine et les enthousiasmes belliqueux.

Dans l'après-guerre, les blessures du traité de Versailles qu'on croit enterrées, la misère et la famine jugulées, l'inflation maîtrisée, s'installe un temps que Zweig veut croire serein.
Il y connaît un succès planétaire, fréquente les grands de ce monde en matière de pensée et d'art, sa collection d’autographe trouve un essor éblouissant, dans le temps-même où le festival de Salzbourg s'épanouit. Quelques confrontations avec les chemises noires mussoliniennes, lui mettent la puce à l'oreille, mais son ingénuité est toujours là, ce sont des temps heureux. Là encore il semble curieusement croire que cette plénitude est commune à tous.

Ce n'est que peu à peu qu'émergent Hitler et ses sbires, « dressés à l'attaque, à la violence et à la terreur », sans trop attirer l'attention. Puis, brutalement, les interdictions aux Juifs, les brimades, et pour Zweig, le choix de l'exil d'où il sera confronté aux tentatives de conciliation qui n'empêcheront pas la déclaration de guerre. C'est la fin des choix, la perte d'une nationalité, l'effroyable statut d'apatride, puis d'étranger ennemi. Là encore une certaine ingénuité, l'idée qu'en Amérique du Sud, loin de l'Europe explosée, un monde meilleur de tolérance est possible.

Témoignage et réflexion sur un monde en mutation qui perd une certaine innocence et qui court à sa perte, on ne doit pas attendre de Le monde d'hier une objectivité historique ; c'est le regard désespéré d'un homme des plus choyés,  naufragé au sein d'un monde en perdition. On découvre cet homme et sa vision de l'histoire des quarante premières années du XXème siècle. Car Stefan Zweig a choisi de s'épargner de voir la suite.

(commentaire récupéré)


mots-clés : #autobiographie #historique #regimeautoritaire
par topocl
le Mer 15 Fév - 11:31
 
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Sujet: Stefan Zweig
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Alberto Angela

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Empire : Un fabuleux voyage dans l'Empire romain avec un sesterce en poche

IIème siècle de notre ère ; l'Empire romain, alors dirigée par Trajan, n'a jamais été aussi étendu, aussi puissant, aussi prospère. Un âge d'or qu'Alberto Angela fait revivre sous nos yeux en partant d'une idée toute simple et pourtant lumineuse : suivre les pérégrinations d'un sesterce aux quatre coins de l'Empire. Cette petite pièce de monnaie est donc le prétexte qui nous conduit de l'Angleterre à l'Egypte, de la Dacie (actuelle Roumanie) à Leptis Magna, en passant _ entre autres_ par Rome et Carthage…
L'occasion de découvrir cet Empire si éloigné de nous et pourtant si proche par certains aspects. Une mondialisation avant l'heure (langue commune, même façon de vivre et de s'habiller) qui ne va pas sans provoquer les mêmes avantages, mais aussi les mêmes maux qu'aujourd'hui : épuisement des ressources, déforestation, et _ si si !_ délocalisations...

Rarement projet de vulgarisation aura été aussi réussi. L'auteur combine à merveille la Grande Histoire et les petites anecdotes du quotidien, s'attardant sur tous les aspects de la vie sous l'Empire. Quid de la médecine, de l'entraînement des légionnaires, de la sorcellerie ou de la confection des routes ? Que vous picoriez parmi les différents chapitres ou que vous le lisiez d'une traite comme moi, ce livre vous apportera des réponses qui vous réserveront bien des surprises !
Je vous laisse ainsi le soin de découvrir par vous-même comment ces diables de Romains faisaient sauter des pans entiers de montagnes pour les besoins miniers alors que les explosifs leur étaient totalement inconnus... Un indice ? Ils utilisaient les pouvoirs insoupçonnés de… l'eau !

Cette plongée dans l'univers romain, aussi ludique qu'instructive, m'a réservé des moments délectables. Un ouvrage qui ouvre l'appétit et donne envie d'en savoir plus. Que vous soyez passionnés par l'Antiquité ou simplement curieux, je ne saurais trop vous en conseiller la lecture !

(ancien commentaire remanié)


mots-clés : #antiquite #historique
par Armor
le Ven 10 Fév - 13:10
 
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Sujet: Alberto Angela
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Amin Maalouf

Samarcande

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Samarcande, c'est la Perse d'Omar Khayyam, poète du vin, libre penseur, astronome de génie, mais aussi celle de Hussan Sabbah, fondateur de l'ordre des Assassins, la secte la plus redoutable de l'histoire. Samarcande, c'est l'Orient du XIXè siècle et du début du XXe, le voyage dans un univers où les rêves de liberté ont toujours su défier les fanatismes. Samarcande, c'est l'aventure d'un manuscrit né au XIe siècle, égaré lors des invasions mongoles et retrouvé six siècles plus tard. Une fois encore, nous conduisant sur la route de la soie à travers les plus envoûtantes cités d'Asie, Amin Maalouf nous ravit par son extraordinaire talent de conteur. A la suite d'Edgar Allan Poe, il nous dit : "Et maintenant, promène ton regard sur Samarcande ! N'est-elle pas reine de la Terre ? Fière, au- dessus de toutes les villes, et dans ses mains leurs destinées.


Quelle magnifique plume pour nous conter la perse, la sagesse de l’esprit et la poésie d’Omar Khayyâm , hédoniste croyant mais critique envers les religieux, reflétant par le vin la vie et ses délices,poésie si chère à l’Iran que l’on retrouve un peu plus tard chez Alisher Navoi , poète Ouzbek (1441-1501).

Après avoir lu Alamut, c’est avec plaisir que j’ai pu joindre historiquement ces deux histoires, Omar Khayyâm et le vieux de la montagne Hassan Sabbah , la naissance de cet ordre des assassins ayant construit la plus redoutable des machines à tuer, les fidais ou fédayins, soit les martyrs d’aujourd’hui…
Quelle richesse culturelle que ce livre qui nous fait voyager dans le temps, du prestigieux empire Perse à la plus grande invasion menant au plus vaste empire mondial, les mongols : Gengis khan et Kubilaï Khan, jusqu’au XXème siècle, date à laquelle le premier Parlement de la perse vit le jour (1909) mais sous quelles conditions…
La philosophie n’est-elle pas dans le temps l’arme la plus formidable de l’histoire ?
Quoiqu’il en soit, au-delà de toutes les batailles et tous les empires conquis par les plus redoutables guerriers , seuls des vers philosophiques ont traversé le temps pour nous les conter.

Cette roue sur laquelle nous tournons est pareille à une lanterne magique. Le soleil est la lampe; le monde, l'écran. Nous sommes les images qui passent. »Omar Khayyâm
« Ne vous reprochez pas que mon vin soit amer, cette amertume est celle même de la vie »Omar Khayyâm


Un vrai plaisir de lecture qui nous fait bien mieux appréhender l’Orient , sa culture et son histoire.
Samarcande d'Omar Khayyâm , un manuscrit perdu lorsque le Titanic a sombré ?
Voici un des Robaiyats de Khayyâm:


"Tu demandes d’où vient notre souffle de vie
S’il fallait résumer une trop longue histoire,
Je dirais qu’il surgit du fond de l’océan,
Puis soudain l’océan l’engloutit à nouveau."


Un vrai bijou littéraire à ranger précieusement dans sa bibliothèque.


mots-clés : #historique #creationartistique
par Ouliposuccion
le Mar 7 Fév - 9:42
 
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Sujet: Amin Maalouf
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Jon Kalman Stefansson

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 13 51vwpz10

D'ailleurs les poissons n'ont pas de pieds  


c'est d'ailleurs pour cela qu'ils ne marchent pas sur l'eau....dit ce poète de Jon Kalman Stefansson

J'ai adoré ce roman, comme ses précédents  I love you

L'histoire de l'Islande vue à travers les destinées de trois générations d'islandais, un poète, des pêcheurs, une région, une ville Keflavik, l'implantation d'une base américaine qui influence toute une génération, et ensuite l'instauration des quotas de pêche qui mène cette ville à "une non existence" :


"Keflavik a trois points cardinaux : le vent, la mer, l'éternité"

Ari, revient au pays, après un long séjour a Copenhague où il travaillait dans une maison d'édition, il a quitté d'une façon abrupte sa femme, ses filles, son père, avec lequel il n'a quasiment pas ou peu de relations, lui fait parvenir un colis de souvenirs et tous ceux-ci remontent à la surface, sa mère décédée, la mémoire des grands-parents, leur vie de pêcheurs..



Les femmes sont omniprésentes, une justesse d'analyse dans leurs personnalités, leur place dans la société bien définie, le pouvoir des hommes les maintenant toujours à une place pas toujours bien vécue ni choisie...je dirais que Stefansson est un féministe convaincu  Wink

"Il ne savait pas que cette femme aussi belle que la lune, aussi mystérieuse que la nuit du mois d'août,n'avait supporté ni le poids des responsabilités, ni la fatigue éreintante, il ne savait pas que les deux conjugués avaient fini par engendrer ce démon qui venait l'assaillir dans son sommeil, l'accueillait à son réveil, elle avait ployé, puis s'était effondrée et enfuie par cet escalier menant au sous-sol de la maison du quartier de Vesturbaer à Reykjavik, elle avait fui sa petite fille de trois mois qui pleurait et hurlait dans son berceau, fui sa fille ainée, la mère d'Ari alors âgée de dix-huit mois, qui toussait et se mouchait sans relâche, refusait de s'alimenter, avait arraché la cuiller des mains de sa mère en trépignant, toutes trois hurlaient et pleuraient, la plus petite à cause de la fatigue et du mal de ventre, la plus grande parce qu'elle était souffrante et que la réaction de sa mère l'avait effrayée, quant à la grand-mère que j'ai en commun avec Ari, elle s'était mise à hurler parce que cette chose qui aurait du être la plus belle du monde, le but de la vie elle-même, la source de la beauté et de l'innocence avait transformé son existence en véritable enfer.
La vie n'avait rien à voir avec tout ça, ces difficultés financières, cette constante fatigue, ce manque de sommeil et son mari en haute mer qui ne comprenait rien, ne remarquait rien, c'en était fini de l'aventure....."

--------------------

"Les plus vieux écrits de ce monde, ceux qui sont si anciens qu'ils ne sauraient mentir, affirment que le destin habite les aurores et qu'il convient donc de s'armer de précautions au réveil : caresser une chevelure, trouver les mots qu'il faut, prendre le parti de la vie....

Il est vrai qu'à l'aube nous ressemblons parfois à une plaie ouverte.Nous sommes fragiles et désarmés et tout tient au premier mot prononcé, au premier soupir, à la manière dont tu me regardes quand tu t'éveilles, dont tu me considères au moment où j'ouvre les yeux pour m'arracher au sommeil, cet univers étrange où nous ne sommes pas toujours nous-mêmes, où nous trahissons ceux que nous ne pourrions imaginer trahir, où nous accomplissons d' héroïques prouesses, cet univers où nous volons, où les défunts revivent et où les vivants périssent. On dirait parfois que nous entrevoyons l'autre versant du monde, qu'il se livre à nous dans une autre version, comme s'il entendait par là nous rappeler que nous ne sommes pas forcément celui ou celle que nous devrions être, que la vie a mille facettes et qu'il n'est - hélas et Dieu merci- jamais trop tard pour s'engager sur une voie nouvelle, un chemin imprévu. Puis nous nous réveillons, si fragiles, désarmés et à fleur de peau, que tout est suspendu à nos premiers soupirs.Le jour tout entier, la vie tout entière peut-être. Alors regarde-moi avec délicatesse, dis quelque chose de beau, caresse-moi les cheveux car la vie n'est pas toujours juste, elle n'est pas tous les jours facile et nous avons si souvent besoin d'aide, viens et apporte-moi tes mots, tes bras, ta présence, sans toi je suis perdu, sans toi je me brise au creux du temps. Sois auprès de moi à mon réveil."

------------

L'amour, déclare-t-il, est une Voie lactée rayonnante et indestructible ! Et le plus douloureux dans la vie est sans doute de n'avoir pas assez aimé, je ne suis pas certain que celui qui s'en rend coupable puisse se le pardonner."

Du pur Stefansson, un des seuls auteurs qui me donne la chair de poule en le lisant, quelle joie de savoir qu'il existe  Very Happy

(commentaire récupéré)


mots-clés : #conditionfeminine #historique #famille
par simla
le Ven 3 Fév - 0:48
 
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Sujet: Jon Kalman Stefansson
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Anna Bikont

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 13 Produc33

Le crime et le silence


C’est un article dans la presse qui m’a conduit à la lecture de ce livre.

« L'auteur polonais Jan GROSS s'est vu retirer sa médaille d'Ordre du mérite reçue en 1996 pour avoir publié “Les Voisins, un massacre de Juifs en Pologne”, dans lequel il décrit la complicité des Polonais dans les crimes nazis en 1941. » (le président élu en 2015 a mis la barre à droite)

J’ai choisi de lire le livre d’Anna Bikont car elle s’intéressait à l’ambiance de la ville de Jedwabne 60 ans après le crime ;  qu’elle a pendant 4 ans dressé un journal, interrogé les derniers témoins encore vivants (victimes et assassins y compris) et les descendants de ceux disparus.

Pogroms du mois de Juillet 1941
Le 5 à Wasosz
Le 7 à Radzilow
Le 10 à Jedwabne

Mais il y a eu d’autres progroms et des assassinats après la fin de la guerre.

Son journal commence en 2000. L’antisémistisme est aussi virulent, entretenu par le curé, comme à l’époque, et par le Parti Nationaliste. La journaliste est insultée car elle est d’origine Juive. Les témoins ont peur, même lorsqu’ils livrent leur vérité ils demandent l’anonymat. L’approche de la commémoration du 10 Juillet 2001 pour les 60 ans soulèvent des rejets, la participation du Maire et du Président de la Pologne sont critiqués et le conseil municipal refuse les travaux conduisant au monument pour les Juifs. Le Maire se retrouve seul à gérer et à porter les critiques.

Anna Bikont rencontrera les Juifs rescapés et/ou leurs descendants en Israël, aux USA et en Pologne et recueillera leurs souvenirs, leurs témoignages. Très rares sont les descendants qui reconnaissent les actes commis par leurs parents et un seul de Jedwabne finira par dire son regret à la journaliste.

Parallèlement à son enquête, il y aura une instruction sur cette terrible journée du 10 juillet 1941, les procès qui se sont déroulés en 1949 seront revus, exploités ainsi que de nombreux documents et le procureur donnera ses conclusions préliminaires :

« Les Allemands, a-t-il dit, doivent être considérés comme les auteurs du crime au sens large. Les exécutants ont été des habitants polonais de Jedwabne et des environs, des hommes, quarante au moins. »

Le procureur est critiqué dans ses conclusions, notamment par le très populaire hebdomadaire catholique Niedziela.

Dans son post-critum daté de 2010 Anna Bikont dit que

Si le pays a évolué,
Si le Président a donné importance aux commémorations du 10 juillet,
Si les évêques ont demandé le pardon,
Si le président de l’Institut de la mémoire nationale a exprimé sa compassion pour les citoyens polonais d’origine juive assassinés

A Jedwabne et dans de nombreux endroits l’antisémitisme est toujours aussi présent, sur la place du marché a été édifié un contre-monument pour commémorer les Polonais déportés en Sibérie (dont les Juifs ont été rendus responsables) pendant la guerre, aucun habitant ne participe à la modeste commémoration , le panneau qui indiquait le lieu du martyre a été enlevé.

Pourquoi tant de haine des Polonais chrétiens envers les Juifs ? il semble que les Polonais enviaient la situation des Juifs, plus riches, ils voulaient leurs maisons, leurs biens. Les Juifs étaient installés en Pologne depuis environ 800 ans mais comme les Polonais les traitaient en « visiteurs » ils ont trouvé que la visite était un peu longue.

Les Polonais ont du se sentir humiliés des services rendus par les Juifs ; de leur côté les Juifs n’appréciaient guerre les goyims parce qu’ils étaient pour la plupart analphabètes, ivrognes…. (les Juifs travaillaient dur)

« La graine de la haine est tombée sur un terrain bien fertilisé, soigneusement préparé pendant de longues années par le clergé. Et l’envie de s’approprier les grains et les richesses des Juifs a encore aiguisé les appétits. »

Anna Bikont a honnêtement cités les personnages qui se sont comportaient correctement avec les Juifs, voire les ont aidés ou soutenus ; elle a d’ailleurs interviewé  deux Justes parmi les Nations.

C’était une lecture éprouvante mais la démarche de la journaliste m’intéressait.


mots-clés : #antisemitisme #communautejuive #historique
par Bédoulène
le Mar 31 Jan - 23:06
 
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Sujet: Anna Bikont
Réponses: 10
Vues: 842

Françoise Chandernagor

La chambre

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 13 Tylych30

« Le tour de l'île : vingt-quatre pas. Six du nord au sud et d'est en ouest, depuis la porte d'entrée jusqu'à la fenêtre. Les cloisons de planches, la cheminée de marbre et, comme un lac suspendu, le grand miroir - la géographie de la chambre, ses rivages, ses déserts, sa faune, j'en sais tout. Mais le décor, cet étrange décor, acajou et pavé, brocart et chaises dépaillées, qui l'a composé ? Qui, surtout, a donné l'ordre de condamner les portes, puis la fenêtre, la cheminée, de poser des serrures, des verrous, je l'ignore... Et l'enfant ? Lorsqu'on a détaché sa chambre du continent, pourquoi n'a-t-il pas crié ? Pourquoi s'est-il laissé couler ?
À l'origine du crime, qu'y avait-il ?
Quand la foi soulève des montagnes, elle écrase des enfants. Est-ce la foi qu'on trouve au commencement de cette histoire ? Ou bien la peur, la bêtise, le hasard ? Qu'y avait-il "au commencement" ?»


Qui n'a pas été curieux du sort réservé au fils de Louis XVI ?
Est-il mort dans la tour , est-il sorti vivant ?
Aujourd'hui encore , beaucoup de prétendants pour cette descendance...
Françoise Chandernagor narre ce qu'a été la vie du dauphin , cet enfant de 8 ans enfermé dans la chambre , coupé du monde dans les temps les plus sanglants de notre histoire , cette période de terreur : 1789.
Une séquestration qui reste un fait divers au regard de l'horreur extérieure , de la politique déchirée et d'une administration dans le chaos.
C'est l'histoire d'une invraisemblable affaire en huit-clos qui nous transbahute dans une pièce dans laquelle toutes les humiliations et conditions de détention des plus cruelles s'abattent , l'observation de la déchéance et de la solitude jusqu'à l'autisme , l'agonie.
L'auteur ressuscite l'abomination , retraçant grâce aux documents d'époque , des témoignages anciens de tous ceux ayant approché le dauphin dans la tour , le tout renfermant l'atrocité d'une période ou chacun craint pour sa tête , narrant sans prendre de gant la peur qui régnait dans chaque logis de France face aux rouages d'une société embrasée et sanguinaire.
D'une manière générale , ce roman soulève au delà de ce fait historique l'inhumanité , la bêtise de masse et nos temps sombres , toujours d'actualité dans divers pays dans lesquels l'infamie règne en toute liberté , à l'image de la Russie Stalinienne , l'Argentine sous Pinochet , le Liban ou la Syrie et j'en passe...
Chandernagor délivre un livre avec toujours cette écriture académique , un récit fouillé des plus intéressants , peut-être parfois un peu trop monotone lorsqu'elle bifurque dans les anfractuosités de l'administration d'antan , ce qui peut lasser certains lecteurs.
Il en reste que l'humanité en ressort et que l’hommage est rendu à un oublié de l'histoire , ainsi qu'à tous les martyrs qui subissent encore leurs bourreaux.


mots-clés : #historique
par Ouliposuccion
le Mar 31 Jan - 22:35
 
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Sujet: Françoise Chandernagor
Réponses: 9
Vues: 897

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