Salomé

"à la fois gore et sexy"
"à la fois l'urgence de vivre et la mort à l'oeuvre"

Gustave Moreau, l'homme des sveltes Salomés ruisselantes de pierreries, des Muses porteuses de têtes coupées et des Hélènes aux robes maillées d'or vif, s'érigeant, un lis à la main, pareilles elles-mêmes à de grands lis fleuris, sur un fumier saignant de cadavres ! Gustave Moreau, l'homme des symboles et des perversités des vieilles théogonies, le poète des charniers, des champs de bataille et des sphinx, le peintre de la Douleur, de l'Extase et du Mystère, l'artiste entre tous les modernes qui s'est approché le plus de la Divinité et l'a toujours évoquée meurtrière ! Gustave Moreau, l'âme de peintre et de penseur qui m'a toujours le plus troublé !
Salomé, Hélène, l'Ennoïa fatale aux races, les Sirènes funestes à l'humanité ! A-t-il été assez hanté, lui aussi, de la cruauté symbolique des religions défuntes et des stupres divins adorés autrefois chez les peuples !"

« Rue d’Odessa, dans la chambre de mon amour, il n’y avait rien, ni meubles ni objets, à part le lit et quelques livres jetés sur une table. Et sur un mur, bien en vue des oreillers, une esquisse d’Artemisia Gentileschi, un dessin à l’encre d’une âpre violence graphique. Fedora l’avait achetée une petite fortune dans une galerie de Londres où vécut des années la grande artiste caravagesque, laquelle œuvra longtemps dans l’ombre de son père Orazio à la cour des Médicis, avant d’affirmer une maîtrise déjà baroque à Rome, Venise ou Naples. Il s’agissait d’une Judith décapitant Holopherne, variation sur un thème de prédilection, que l’époque illustra amplement depuis Cranach, mais on ne connaissait pas le tableau de référence et sans doute Artemisia, qui avait tous les motifs de s’identifier à l’héroïne juive, en imagina-t-elle plus d’une version après avoir été violée par son précepteur, le peintre fresquiste Agostino Tassi que son père lui avait dévoué pour pallier l’interdiction faite aux femmes d’accéder à l’enseignement des Écoles. Il y eut plainte devant le tribunal papal. Dans les actes du procès, le témoignage d’Artemisia ressemble à la vengeance de Judith. »
Hubert Haddad, Géométrie d'un rêve

« Votre beauté m'a troublé. Votre beauté m'a terriblement troublé, et je vous ai trop regardée. Mais je ne le ferai plus. Il ne faut regarder ni les choses ni les personnes. Il ne faut regarder que dans les miroirs. Car les miroirs ne nous montrent que des masques... »
Oscar Wilde, Salomé