La littérature c'est koi ?
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Re: La littérature c'est koi ?
« …] la fonction de la littérature, c’est la communication entre choses différentes en tant qu’elles sont différentes, sans en émousser la différence mais au contraire en l’exaltant, selon la vocation propre au langage écrit. »
Italo Calvino, Leçons américaines, 2
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« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
Tristram- Messages : 15596
Date d'inscription : 09/12/2016
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Re: La littérature c'est koi ?
Le roman-roman tend à disparaître, on fait maintenant des romans-essais... D'ailleurs le roman est un genre indéfini, limité tout au plus par les autres genres littéraires : c'est un dépotoir où l'on peut tout mettre... Nous vivons une époque tellement tragique, comment pourrions-nous nous en détacher complètement en faisant un roman : nous y jetons nos préoccupations réelles, notre inquiétude, nos idées.
Béatrix Beck, citée dans un article d'Hubert Aquin, dans Mélanges littéraires I, profession écrivain
Invité- Invité
Re: La littérature c'est koi ?
On peut mieux comprendre d'où vient le vivier culturel dans lequel j'évolue au Québec...
Jack-Hubert Bukowski- Messages : 2490
Date d'inscription : 04/12/2016
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Re: La littérature c'est koi ?
Alors, Hubert Aquin, cette fois :
La fiction n'est pas seulement un arrangement imaginaire et inventé, mais une composition où la réalité et l'invention se côtoient et où elles sont inextricablement mêlées. Voilà, au moins, l'intérêt des romans qui constituent, qu'on le veuille ou non, des représentations conscientes et inconscientes de la vie.
Invité- Invité
Re: La littérature c'est koi ?
C'est tiré de quel livre, Arturo ?
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Tristram- Messages : 15596
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Localisation : Guyane
Re: La littérature c'est koi ?
Tristram a écrit:C'est tiré de quel livre, Arturo ?
Ah oui, désolé, même livre que mentionné ci-dessus, Mélanges littéraires I, profession : écrivain. Jack en avait parlé sur le fil, c'est une collection d'articles, conférences, et projets de romans.
Invité- Invité
Re: La littérature c'est koi ?
Merci ; d'Aquin, je ne peux disposer que de Blocs erratiques pour l'instant.
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Tristram- Messages : 15596
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Re: La littérature c'est koi ?
Si ça vous intéresse, la maison d'édition Bibliothèque québécoise affiche les titres parus d'Hubert Aquin...
http://www.livres-bq.com/auteur/3-hubert-aquin.html
http://www.livres-bq.com/auteur/3-hubert-aquin.html
Jack-Hubert Bukowski- Messages : 2490
Date d'inscription : 04/12/2016
Age : 42
Localisation : Montréal
Re: La littérature c'est koi ?
On a constaté avec surprise que la question : « Qu’est-ce que la littérature ? » n’avait jamais reçu que des réponses insignifiantes. Mais voici plus étrange : dans la forme d’une pareille question, quelque chose apparaît qui lui retire tout sérieux. Demander : qu’est-ce que la poésie ? qu’est-ce que l’art ? ou même : qu’est-ce que le roman ? on peut le faire et on l’a fait. Mais la littérature qui est poème et roman, semble l’élément de vide, présent dans toutes ces choses graves, et sur lequel la réflexion, avec sa propre gravité, ne peut se retourner sans perdre son sérieux. Si la réflexion imposante s’approche de la littérature, la littérature devient une force caustique, capable de détruire ce qui en elle et dans la réflexion pouvait en imposer. Si la réflexion s’éloigne, alors la littérature redevient, en effet, quelque chose d’important, d’essentiel, de plus important que la philosophie, la religion et la vie du monde qu’elle embrasse. Mais que la réflexion, étonnée de cet empire, revienne sur cette puissance et lui demande ce qu’elle est, pénétrée aussitôt par un élément corrosif, volatil, elle ne peut que mépriser une Chose aussi vaine, aussi vague et aussi impure et dans ce mépris et cette vanité se consumer à son tour, comme l’a bien montré l’histoire de Monsieur Teste.
Maurice Blanchot, La littérature et le droit à la mort, in De Kafka à Kafka.
Invité- Invité
Re: La littérature c'est koi ?
J'apprécie la référence à Valéry, à ce genre de littérature qui passe aussi par Michaux, Cortázar et même Brautigan (celle dont on ne sait dire ce qui nous y touche, alors qu'elle semble ne rien contenir de notable).
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Tristram- Messages : 15596
Date d'inscription : 09/12/2016
Age : 67
Localisation : Guyane
Re: La littérature c'est koi ?
J'ai l'impression que pour certains, il y a une hiérarchisation dogmatique et, excessive à
mon gré", pour décider ce qui est "littérature" ou non.
mon gré", pour décider ce qui est "littérature" ou non.
bix_229- Messages : 15439
Date d'inscription : 06/12/2016
Localisation : Lauragais
Re: La littérature c'est koi ?
Passons plutôt à des choses sérieuses...
Qu'est-ce qu'un nez ?
Je me réfère à Sterne pour y réfléchir, personnellement.
Qu'est-ce qu'un nez ?
Je me réfère à Sterne pour y réfléchir, personnellement.
Dreep- Messages : 1539
Date d'inscription : 08/12/2016
Age : 31
Re: La littérature c'est koi ?
Tu peux aussi aller voir chez Edmond Rostand, qui reprit ce nez, en passant par Nicolas Gogol. Sinon, tu peux juger de visu en Côte d'Opale sur le site des Deux-Caps (Blanc-Nez et Gris-Nez).Je voulois voir le Cap-des-Nez dont j’ai entendu parler. Je l’ai vu ; et vous voyez vous-même que je n’ai pas perdu mon temps : j’en ai rapporté un qui est assez beau.
Laurence Sterne, Vie et opinions de Tristram Shandy, LXIII
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Tristram- Messages : 15596
Date d'inscription : 09/12/2016
Age : 67
Localisation : Guyane
Re: La littérature c'est koi ?
C'est koi, nous demandons-nous ?
Philippe Jaccottet, recueil L'ignorant (1952-1956), compilé dans Poésie 1946-1967, nrf Poésie/Gallimard adresse un avis dépouillé, si ce n'est épouillé, poème Notes pour le petit jour:
Son souffle pour tout bien et pour toute force qu'un langage peu certain, voilà qui rejoint assez les conclusions de Jacques Réda (telles qu'exprimées dans son essai Quel avenir pour la cavalerie ? Une histoire naturelle du vers français), n'est-il pas ?
Philippe Jaccottet, recueil L'ignorant (1952-1956), compilé dans Poésie 1946-1967, nrf Poésie/Gallimard adresse un avis dépouillé, si ce n'est épouillé, poème Notes pour le petit jour:
Notes pour le petit jour a écrit:
[...]
Mais toujours, sur ces gouffres d'eau, luit l'éphémère...
Et c'est la chose que je voudrais maintenant
pouvoir dire, comme si, malgré les apparences,
il m'importait qu'elle fût dite, négligeant
toute beauté et toute gloire : qui avance
dans la poussière n'a que son souffle pour tout bien,
pour toute force qu'un langage peu certain.
[...]
Son souffle pour tout bien et pour toute force qu'un langage peu certain, voilà qui rejoint assez les conclusions de Jacques Réda (telles qu'exprimées dans son essai Quel avenir pour la cavalerie ? Une histoire naturelle du vers français), n'est-il pas ?
Aventin- Messages : 1984
Date d'inscription : 10/12/2016
Re: La littérature c'est koi ?
Insaisissable et essentielle ...
et décriée, incomprise...
Encore du Blanchot, même source que précédemment :
et décriée, incomprise...
Encore du Blanchot, même source que précédemment :
La littérature n’est pas rien. Ceux qui la méprisent, ont le tort de croire la condamner en la tenant pour rien. « Tout cela n’est que littérature. » On oppose ainsi l’action, qui est intervention concrète dans le monde, et la parole écrite qui serait manifestation passive à la surface du monde, et ceux qui sont du côté de l’action, rejettent la littérature qui n’agit pas, et ceux qui cherchent la passion se font écrivains pour ne pas agir. Mais c’est là condamner et aimer par abus. Si l’on voit dans le travail la puissance de l’histoire, celle qui transforme l’homme en transformant le monde, il faut bien reconnaître dans l’activité de l’écrivain la forme par excellence du travail.
Invité- Invité
Re: La littérature c'est koi ?
La vulgarisation scientifique à été récemment évoquée dans le fil "revue". Scienceshumaines fait partie des magazines précieux à ce titre. Perso, le parcourir supplée quelque peu à mon inaptitude à lire des ouvrages de sciences humaines (surtout en anglais, comme souvent ils se présentent). Voici le lien vers un article qui apporte des réflexions à prendre en compte si on cherche à savoir à quoi sert la littérature (au cas où elle servirait à quelque chose), plus précisément par rapport à la réflexion éthique et comme fonction cognitive.
Quand j'ai posé cette question, c'est koi, c'était pour réunir les points de vue dans la perspective d'une réponse claire, mais l'interrogation reste, ou même devient, profuse et irréductible à un avis simplement formulé...
https://www.scienceshumaines.com/la-litterature-nous-rend-elle-meilleurs_fr_43590.html
On y mentionne Henry James et Musil, mais aussi Bouveresse, Antoine Compagnon, et effectivement ça donne envie d'approfondir.
Demeure que les livres sont parmi nos plus belles "expériences de pensée" !
Quand j'ai posé cette question, c'est koi, c'était pour réunir les points de vue dans la perspective d'une réponse claire, mais l'interrogation reste, ou même devient, profuse et irréductible à un avis simplement formulé...
https://www.scienceshumaines.com/la-litterature-nous-rend-elle-meilleurs_fr_43590.html
On y mentionne Henry James et Musil, mais aussi Bouveresse, Antoine Compagnon, et effectivement ça donne envie d'approfondir.
Quant à moi, je partagerais presque l'opinion de Platon... mais j'espère bien qu'il est juste de dire que "L’empathie vient en lisant" !« La littérature, exprimant l’exception, procure une connaissance différente de la connaissance savante, mais mieux capable d’éclairer les comportements et les motivations humaines. Elle pense, mais non pas comme la science ou la philosophie. Sa pensée est heuristique (elle ne cesse jamais de chercher), non algorithmique. […] C’est ainsi qu’un roman nous change la vie sans qu’il y ait une raison assignable à cela, sans que l’effet de la lecture puisse être reconduit à un énoncé de vérité. »
Antoine Compagnon, La Littérature, pour quoi faire ?
(Là, on rejoint la question de l'appréciation des personnes selon leur expression faciale, évoquée hier au Café philo-psycho-socio autour d'une vidéo en ligne.)« La fiction est une simulation de la sphère sociale. De la même manière que certains améliorent leurs capacités de pilotage via un simulateur de vol, ceux qui lisent des romans peuvent faire progresser leurs compétences sociales »
Keith Oatley, Fiction: Simulation of social worlds
Demeure que les livres sont parmi nos plus belles "expériences de pensée" !
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Tristram- Messages : 15596
Date d'inscription : 09/12/2016
Age : 67
Localisation : Guyane
Re: La littérature c'est koi ?
Thierry Metz in recueil Terre, p. 60-61-62:
Assez riche, avec d'abord cette idée que le support [d'écriture] n'est pas forcément l'allié de celui qui compose:
Ensuite il y a la traduction en mots via les signes tracés, la main, du ressenti, de ce qui vibre à l'intérieur du poète lui-même, et -aux limites angoissantes- la source et le ressort:
L'outil, donc, le maniage de l'outil, l'âne est le domestique docile, la main à la plume qui vaut la main à la charrue selon Rimbaud, la main au parpaing eût pu dire, vécu à l'appui, Thierry Metz, et la cible idéale et quasi toujours ratée (on s'arrête toujours).
Le vrai nom à celui qui se tait, "celui" n'est-ce pas son œuvre ?
Par opposition avec celui qui emploie (dans son cas, agriculteur, chef de chantier, etc.)
Donc le littérateur est dans sa production authentique lorsqu'il exerce pleinement son art - pas quand il pisse la copie vivrière, autant sans doute faire manœuvre sur un sale chantier de la banlieue agenaise.
Il y a cette idée de plénitude, de complétion, d'ouvrage abouti - le maître artisan qui signe sa production, à caractère unique par rapport à une production de série:
Car c'est ainsi:
Dès que je touche le carnet
il se détourne,
me distance
exige d'autres bords.
Je n'ai que sa blancheur
toujours éparse
laconique
et moi mon chariot
qui lui passe dessus
comme de la craie.
Interrompu par le poème
aux hanches étroites
comme sur le cratère
ou l'amphore
où irais-je chercher
ce qui de ma main
à ma voix
servira d'attelage ?
Mais ce que j'écris n'est qu'un
âne dans ma main,
on s'arrête toujours
les femmes rient
et ce rire d'à-propos
me destine à l'isolement
à cette goutte d'eau
qui érotise la paroi du bol.
Longtemps et loin
je dois me supporter
je ne donne mon vrai nom qu'à celui
qui se tait -
à l'autre qui m'emploie
je m'arrange avec ce qu'il donne.
Assez riche, avec d'abord cette idée que le support [d'écriture] n'est pas forcément l'allié de celui qui compose:
Outil retors, indompté, effrayant même:Dès que je touche le carnet
il se détourne,
me distance
exige d'autres bords.
Je n'ai que sa blancheur
toujours éparse
laconique
Ensuite il y a la traduction en mots via les signes tracés, la main, du ressenti, de ce qui vibre à l'intérieur du poète lui-même, et -aux limites angoissantes- la source et le ressort:
où irais-je chercher
ce qui de ma main
à ma voix
servira d'attelage ?
L'outil, donc, le maniage de l'outil, l'âne est le domestique docile, la main à la plume qui vaut la main à la charrue selon Rimbaud, la main au parpaing eût pu dire, vécu à l'appui, Thierry Metz, et la cible idéale et quasi toujours ratée (on s'arrête toujours).
Mais ce que j'écris n'est qu'un
âne dans ma main,
on s'arrête toujours
Le vrai nom à celui qui se tait, "celui" n'est-ce pas son œuvre ?
Par opposition avec celui qui emploie (dans son cas, agriculteur, chef de chantier, etc.)
Donc le littérateur est dans sa production authentique lorsqu'il exerce pleinement son art - pas quand il pisse la copie vivrière, autant sans doute faire manœuvre sur un sale chantier de la banlieue agenaise.
Il y a cette idée de plénitude, de complétion, d'ouvrage abouti - le maître artisan qui signe sa production, à caractère unique par rapport à une production de série:
Longtemps et loin
je dois me supporter
je ne donne mon vrai nom qu'à celui
qui se tait -
à l'autre qui m'emploie
je m'arrange avec ce qu'il donne.
Aventin- Messages : 1984
Date d'inscription : 10/12/2016
Re: La littérature c'est koi ?
J'ai apprécié aussi l'image de récipient : cratère, amphore, bol.
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Tristram- Messages : 15596
Date d'inscription : 09/12/2016
Age : 67
Localisation : Guyane
Re: La littérature c'est koi ?
La littérature peut être ça (Thierry Metz toujours - in Le drap déplié):
Feuillet blanc
plié
un drap
frais
dans mes mots
je l'étends
sur l'herbe.
Aventin- Messages : 1984
Date d'inscription : 10/12/2016
Re: La littérature c'est koi ?
« Écrire : essayer méticuleusement de retenir quelque chose, de faire survivre quelque chose : arracher quelques bribes précises au vide qui se creuse, laisser, quelque part, un sillon, une trace, une marque ou quelques signes. »
Georges Perec, Espèces d'espaces
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Tristram- Messages : 15596
Date d'inscription : 09/12/2016
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Localisation : Guyane
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