Procédé d'écriture

Je suis très agacé par tous ces écrivains qui usent et abusent du procédé suivant : écrire un roman avec des histoires parallèles qui ne semblent pas au départ avoir de points communs et qui finissent - comme par hasard - par se relier.

Ce n'est pas pour moi de la littérature, c'est un truc de faiseur qui, à quelques exceptions près, n'offrent guère d'intérêt.

Qu'en pensez-vous ?

Ah là là, vaste sujet. Quand une formule est-elle originale et bien traitée, quand devient-elle un procédé facile pour écrivains en mal d'inspiration ?

Je n'ai pas de réponse toute faite. Si chaque personnage est bien traité et que je prends grand plaisir à la lecture, je n'y vois pas d'inconvénient.
Si par contre c'est une recette bêtement appliquée pour épater le lecteur, ça va m'agacer, je suppose. Surtout si l'auteur use et abuse de la formule au fil des livres.

Pas mieux. Mais j'avoue ne pas avoir d'exemple en tête...

D'accord aussi avec ce que dit Armor. C'est un procédé qui peut être lourd si on le rencontre trop souvent, s'il est utilisé sans raison et/ou s'il est desservi par une mise en place trop épatante (genre : tenez-vous bien, je vais vous en mettre plein la vue). Utilisé à bon escient, il peut donner du sens, en orientant les destinées décrites. Ça peut aussi être une prouesse structurale, du genre qu'on analyse avec graphique et tableau. Ou simplement ménager de plaisantes surprises au lecteur !
Bien sûr, si c'est une recette systématique, ça devient rapidement indigeste. Tu peux donner des exemples, Schlem ?

Je suis d'accord avec toi, Schlem. J'avais trouvé ça génial dans Continents à la dérive de Russell Banks. Il faut dire que le contraste entre les deux histoires avait un sens qui n'était pas purement narratif. Mais souvent ça me gonfle : procédé éculé par sa répétition, ou demandant un réel talent pour être performant (cad un talent triple , un pour chaque histoire et un pour la réussite de leur confrontation)? les deux?
Et au delà de deux histoires il doit y avoir des romans chorals (ou Choraux?) qui font ça, plein de destins qui se réunissent à la fin. il me semble que Lelouch faisait pas mal ça à une époque.

C'est peut-être un procédé qui nous vient des Etats-Unis, chez les contemporains des vingt ou trente dernières années ? Qui s'inscrivent dans des romans à rallonge, je pense à Franzen par exemple, ou même à Yalom dans une moindre mesure. Ce procédé est aussi fortement usité par les contemporains français ?

Je en vois pas bien de quel roman de Franzen tu veux parler qui utilise ce procédé, Arturo?

Mon agacement a trouvé son expression dans ma dernière lecture, celle d'un roman d'Eve de Castro, "La femme qui tuait les hommes" : une très belle écriture, un univers passionnant, et puis trois récits en parallèle, chapitre par chapitre, où je ne cessais de chercher à retrouver de qui on parle, et qui a fini par me mettre sur le bas-côté. C'est vrai que nous retrouvons souvent ce procédé dans les romans français contemporains. C'est parfois justifié, mais je sens trop souvent le travail scénaristique de l'écrivain, plus proche du cérébral que du sensible.

topocl a écrit:Je en vois pas bien de quel roman de Franzen tu veux parler qui utilise ce procédé, Arturo?

Je pensais à Les corrections, ou Freedom, je ne sais plus vraiment en fait, mais j'avais cette sensation de romans où t'as un chapitre par personnage et les histoires qui finissent par se rejoindre peu à peu dans la trame, peut-être que je me plante...

Comme ça je n'aurais pas dit, j'aurais plutôt l'impression que dans Les corrections plusieurs personnages s'entrecroisent en permanence, et non finissent par se retrouver à la toute fin du livre. Mais moi non plus je ne sais plus vraiment

C'est sûr que c'est un procédé qui sent l'atelier d'écriture, son bon faiseur effectivement.
Il en existe une variante intéressante, l'approche de deux personnages en parallèle, qui ne se rejoignent finalement pas malgré l'attente du lecteur...
En tout cas j'ai mis Continents à la dérive sur ma PAL !

J'ai tout de suite pensé à Incendies de Wajdi Mouawad, que je n'ai pas lu mais dont a été tiré le film du même nom. Il me semble que le procédé se justifie par la quête, en mettant en valeur l'errance et le chaos que traversent les protagonistes.

Parfois c'est trop visible mais parfois, il y a des livres mal ficelés. Confiteor de Cabré nous perd parfois mais on en redemande, aussi, daans le genre..

Pour mettre de l'huile sur le feu alimenter le débat, j'ai ressorti de vieux souvenirs de lecture de TC Boyle...