Carnets de Jane
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Re: Carnets de Jane
je le mettrai dans mon assiette moi !
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“Lire et aimer le roman d'un salaud n'est pas lui donner une quelconque absolution, partager ses convictions ou devenir son complice, c'est reconnaître son talent, pas sa moralité ou son idéal.”
― Le club des incorrigibles optimistes de Jean-Michel Guenassia
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"Il n'y a pas de mauvais livres. Ce qui est mauvais c'est de les craindre." L'homme de Kiev Malamud
Bédoulène- Messages : 21889
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Re: Carnets de Jane
Il faut déjà le trouver !
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« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
Tristram- Messages : 16019
Date d'inscription : 09/12/2016
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Localisation : Guyane
Re: Carnets de Jane
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Bédoulène- Messages : 21889
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Re: Carnets de Jane
C'est ce que je disais, il n'y en a pas au chinois... En tout cas, je vais faire un risotto ! aux champignons, ou à la courgette ?
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Tristram- Messages : 16019
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Re: Carnets de Jane
OK, mais pas de cèpes non plus...
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Tristram- Messages : 16019
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Re: Carnets de Jane
des trompettes de la mort, des girolles, des morilles ?
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Bédoulène- Messages : 21889
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Re: Carnets de Jane
J'essaierais bien avec des champignons du grand bois, mais lesquels sont comestibles, ou au moins goûteux et inoffensifs ?
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Tristram- Messages : 16019
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Re: Carnets de Jane
Retrouvailles d'anciens carnets:
Intemporelle, indémodable, vérifiable sempiternellement.
Il est bien ce petit Gringoire
Et puis
Clair, concis et tellement vrai.
dans Notre Dame de Paris.Victor HUGO a écrit:Hum, dit Gringoire, je me défie d'une douceur qui a les narines pincées et les lèvres minces
Intemporelle, indémodable, vérifiable sempiternellement.
Il est bien ce petit Gringoire
Et puis
dans Crime et Châtiment.Dostoïevsky a écrit:Le noir serpent de l'amour propre blessé n'avait cessé de lui mordre le coeur toute la nuit
Clair, concis et tellement vrai.
Cliniou- Messages : 916
Date d'inscription : 06/12/2016
Age : 54
Re: Carnets de Jane
merci d'ouvrir les pages pour nous !
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Bédoulène- Messages : 21889
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 79
Localisation : En Provence
Re: Carnets de Jane
Suite aux photos de Colimasson sur l'Ardèche, cela m'a rappelé ma descente en kayak d'il y a plus de 20 ans maintenant (ça ne nous rajeunit pas.....pfff)
Soyez indulgents car ça n'est pas toujours facile de remettre de l'ordre dans les souvenirs.
J'ai découvert l'Ardèche à l'âge de 8 ans; mes parents avaient décidé d'y passer l'été en camping.
Ce furent des vacances paisibles: mes souvenirs vont du goût des pêches gorgées de soleil, au chapeau de soleil en paille qui gratte le crâne, en passant par la chasse aux tétards au bord de la petite rivière du camping. Il y a aussi les nombreuses promenades dans des petits villages où mes parents adoraient fouiner chez les brocanteurs, et dont les ruelles pouvaient se transformer en fournaise tant les pierres blanchâtres réverbèraient la chaleur du soleil de plomb . Mais il y a aussi l'Ardèche, rivière dépeinte par ma mère comme colérique et imprévisible, “Ouh, quand elle est démontée par un orage, l'Ardèche, elle est terrifiante tu sais!” Et dans ma tête d'enfant, les mots colère-imprévisible-terrifiante ont fait un cocktail cataclismique innoubliable , si bien qu'à chaque fois que je voyais l'Ardèche ou que j'y ai pensé par la suite, je m'imaginais devoir affronter Poséidon.
Environ 15 années passèrent…..c'est en jeune couple que nous y sommes retournés: lui voulait me faire découvrir l'île de Ré (c'est un insulaire dans l'âme), je voulais lui faire découvrir la nature sauvage de l'Ardèche, d'autant qu'à l'époque on parlait beaucoup de la découverte de la grotte Chauvet.
Et c'est ainsi qu'après avoir sillonné la région par le dessus, on l'a fait par le dessous en descendant l'Ardèche en kayak.
Entendons-nous bien: cela veut dire un maillot qui tient et pas le truc qui vous lâche comme une vielle laitue à la première vaguelette, des lentilles de contact, la malette dans un sac étanche au cas où on se retournerait (si, si, ça peut arriver….), des horribles sandalettes Jésus en plastique (qui portent le doux nom de méduse: on peut s'interroger sur la perversité du type qui leur a donné ce nom car elles brûlent la plante des pieds de la même manière.).
On fait connaissance avec notre guide, un homme filiforme dont la combinaison nautique épouse le corps comme la panure une escalope de veau. Ensuite, nous enfilons un gilet de sauvetage jaune pétant et nous tombe dans les mains une pagaie double ajustée à notre taille. Nous voilà en tenue de combat!, il ne nous manquait plus que le filet pour être tels deux rétiaires sur le retour prêts pour une naumachie.
Après les recommandations d'usage et les conseils de base, vient le moment où nous embarquons dans notre kayak. Avec une souplesse feinte, je monte devant et lui derrière. Le départ ne se passe pas trop mal, nous suivons le guide.
Il faut savoir que cette année-là, le temps était particulièrement pourri. La pluie innondait tout et beaucoup de campeurs à l'île de Ré avaient écourté leur vacances car tente et garde-robe étaient détrempés. L'Ardèche avait meilleure mine mais pas tant que ça, nous avions d'ailleurs dû creuser une rigole autour de notre tente pour éviter les innondations dûes à la pluie.
Jusqu'au break de midi, nous avions eu un beau soleil, la promenade en kayak était facile en eau calme. Pic-nic sur une petite plage à l'ombre de quelques arbres. C'est là que notre guide, tout en mangeant ses caillettes ardéchoises (comment être filiforme en mangeant ces bombes caloriques ?) nous a exposé la suite du parcours qui allait devenir beaucoup plus compliqué. Plus il engloutissait ses caillettes moins je pouvais avaler mon sandwich; une espèce de transfert calorique s'opérait entre lui et moi.
Puis il regarde le ciel et se voulant rassurant, il dit: “Allez, on y retourne. Vous êtes des dégourdis, on arrivera avant l'orage.”
“Hein?” fis-je figée en déglutissant, “quel orage?”.
“Mais celui qui arrive”, me montrant les nuées noirâtres encore lointaines.
Du coup, comme si une guêpe nous avait piqué le derrière, nous enfourchons le kayak (la souplesse n'était plus feinte) et nous passons en tête de file juste derrière le guide.
Avant chaque rapide, il nous rappelle bien tous les mouvements qu'il faudra exécuter.
Le premier rapide ne se passe pas trop mal compte tenu du fait que ça n'est pas le plus simple pour un premier.
Le guide ne cesse d'hurler “Pagaie! Pagaie!” à un couple assez timoré dont le kayak sera plus souvent retourné qu'en place. Nous, prenant de l'assurance, attaquons le second rapide avec un sourire de cantatrice aux lèvres. (C'est là qu'il y a un appareil photo automatique en plus!) Beaucoup de pluie, donc beaucoup d'eau, donc beaucoup de remouds. Quelle aventure! J'étais la réincarnation de Philippe de Dieuleveult ! Mais en jaune pétant. Même les vautours étaient de la partie: un vol d'une fluidité royale, des cercles tracés au ralenti dans les airs. Alors que nous étions dans le même espace temps, eux évoluaient au ralenti silencieusement et nous en accéléré bruyamment. Cherchez l'erreur...
Je ne me souviens plus des différents noms des rapides, sauf celui de la Dent Noire où le ciel a franchement commencé à devenir inquiétant. Il prenait de plus en plus des allures de Jugement Dernier alors que, sincèrement, nous n'avions rien fait! Le guide surveillait toujours l'attitude des “Vieux” qui faisaient la descente en barque. Si eux décidaient d'arrêter à cause du temps,disait-il, tout le monde les suivait. Or, malgré les pesants nuages, les “Vieux” poursuivaient.
La Dent Noire donc, et celui de la Toupine où les pompiers veillaient, des rochers, à intervenir avec des cordes en cas de probèmes. Et c'est là que nous avons choisi de nous retourner. Malgré les “Pagaie!” hurlants du guide, on a penché inexorablement comme un bavarois qui n'a pas pris. Pas eu le temps de faire plouf! Qu'une corde m'est tombée dessus, des cris dans tous les sens “tenez vous! Tenez vous! On va tirer, attention!” J'ai eu l'impression qu'un monstre marin m'aspirait dans les profondeurs (18 m si mes souvenirs sont bons, quand même…) alors que j'étais littéralement happée vers l'extérieur par les pompiers; au passage, j'ai croisé la tête de mon mari, yeux globuleux et bouche de carpe grande ouverte.
Le temps de reprendre notre souffle, le kayak avait été récupéré, vidé, les pagaies aussi. Nous sommes remontés dedans, un peu déconfits il faut le dire et nous nous sommes remis dans la file. Mon mari avait commencé à cligner des yeux de façon alternée car il croyait avoir une lentille mal mise…..je suppose qu'il a gardé en souvenir un film assez discontinu du reste de la descente.
Mais ne voilà-t-il pas un petit grondement qui se fait entendre ? et des gouttes de pluie qui commencent à tomber ?…...et j'entendis la voix, sombre, de ma mère….. “Ouh, quand elle est démontée par un orage l'Ardèche….”
Le guide avait lui aussi la mine sombre. “Bon, il n'y a plus de difficultés maintenant. Il faut y aller et foncer car l'orage est là.On se retrouve en bas.” dit-il avant de donner un coup de pagaie et partir en avant.
Je me retourne vers mon mari qui n'avait pas encore arrêté de cligner des yeux: “T'as entendu? Faut foncer!” et je ne fais ni une ni deux, je me mets à pagayer comme pour une compétition olympique. Lui, confiant dans mon expérience du monde sauvage ardèchois et ne voyant plus de “Vieux” dans le coin, augmente aussi la cadence.
La voix de ma mère était toujours là….”Ouh...quand elle est démontée par un orage, l'Ardèche….”
Oui ! Ca va! J'ai compris! (je reste polie)
J'étais devenue Meryl Streep dans la Rivière Sauvage. Je voyais des rochers surgir des vagues, je criais “A gauche!” “A droite” à mon mari qui m'apparaissait désormais comme Conan le Barbare en tenue aquatique qui envoyait des messages de détresse en morse avec les yeux.
Voilà que l'on croise un canoé renversé, l'homme ne tenterait-il pas de s'agripper au nôtre? Et de nous faire chavirer en rigolant?
Le son qui est sorti de ma gorge m'a moi-même térrifiée ! Il est vite reparti s'occuper de son kayak.
Les coups de tonnerres étaient de plus en plus présents, la pluie tombait droit comme un rideau, heureusement le vent n'avait pas l'air de monter à notre hauteur. J'avais l'impression que l'Ardèche s'élargissait. Nos pagaies tournaient comme des hélices, et la voix de ma mère toujours là “elle peut devenir terrifiaaannnnte.”
Tant et si bien que nous n'avons pas vu que nous étions arrivés. On pagayait, on traçait tel un hors-bord en déroute, mon mari était Evinrude et moi Bianca (oui, Walt Disney, il faut suivre hein!)
Soudain, on entendit vaguement “Stooooop! Arrêtez-vous! Ouh Ouh Arrêtez-vous! Vous allez dans le Rhône!”
“Tiens, mais ce n'est pas la voix de ma mère? Ou alors, elle a attrapé une angine!”
Nous ralentissons. A travers le rideau de pluie, on aperçoit une espèce de canari géant qui court le long de la berge avec un porte-voix. Mon mari règle le clignotement de ses yeux et finit pas distinguer un homme vêtu d'une cape de plastique jaune qui nous fait des signes désespérés.
On pivote vers la berge, mais allez-y pour remonter le courant. Donc, c'est à pied que nous avons ramené le kayak en venant du côté opposé à la normale.
L'homme était un peu dépité mais riait quand même de nous voir “remontant du Rhône” alors que les autres descendaient de l'Ardèche.
Soyez indulgents car ça n'est pas toujours facile de remettre de l'ordre dans les souvenirs.
J'ai découvert l'Ardèche à l'âge de 8 ans; mes parents avaient décidé d'y passer l'été en camping.
Ce furent des vacances paisibles: mes souvenirs vont du goût des pêches gorgées de soleil, au chapeau de soleil en paille qui gratte le crâne, en passant par la chasse aux tétards au bord de la petite rivière du camping. Il y a aussi les nombreuses promenades dans des petits villages où mes parents adoraient fouiner chez les brocanteurs, et dont les ruelles pouvaient se transformer en fournaise tant les pierres blanchâtres réverbèraient la chaleur du soleil de plomb . Mais il y a aussi l'Ardèche, rivière dépeinte par ma mère comme colérique et imprévisible, “Ouh, quand elle est démontée par un orage, l'Ardèche, elle est terrifiante tu sais!” Et dans ma tête d'enfant, les mots colère-imprévisible-terrifiante ont fait un cocktail cataclismique innoubliable , si bien qu'à chaque fois que je voyais l'Ardèche ou que j'y ai pensé par la suite, je m'imaginais devoir affronter Poséidon.
Environ 15 années passèrent…..c'est en jeune couple que nous y sommes retournés: lui voulait me faire découvrir l'île de Ré (c'est un insulaire dans l'âme), je voulais lui faire découvrir la nature sauvage de l'Ardèche, d'autant qu'à l'époque on parlait beaucoup de la découverte de la grotte Chauvet.
Et c'est ainsi qu'après avoir sillonné la région par le dessus, on l'a fait par le dessous en descendant l'Ardèche en kayak.
Entendons-nous bien: cela veut dire un maillot qui tient et pas le truc qui vous lâche comme une vielle laitue à la première vaguelette, des lentilles de contact, la malette dans un sac étanche au cas où on se retournerait (si, si, ça peut arriver….), des horribles sandalettes Jésus en plastique (qui portent le doux nom de méduse: on peut s'interroger sur la perversité du type qui leur a donné ce nom car elles brûlent la plante des pieds de la même manière.).
On fait connaissance avec notre guide, un homme filiforme dont la combinaison nautique épouse le corps comme la panure une escalope de veau. Ensuite, nous enfilons un gilet de sauvetage jaune pétant et nous tombe dans les mains une pagaie double ajustée à notre taille. Nous voilà en tenue de combat!, il ne nous manquait plus que le filet pour être tels deux rétiaires sur le retour prêts pour une naumachie.
Après les recommandations d'usage et les conseils de base, vient le moment où nous embarquons dans notre kayak. Avec une souplesse feinte, je monte devant et lui derrière. Le départ ne se passe pas trop mal, nous suivons le guide.
Il faut savoir que cette année-là, le temps était particulièrement pourri. La pluie innondait tout et beaucoup de campeurs à l'île de Ré avaient écourté leur vacances car tente et garde-robe étaient détrempés. L'Ardèche avait meilleure mine mais pas tant que ça, nous avions d'ailleurs dû creuser une rigole autour de notre tente pour éviter les innondations dûes à la pluie.
Jusqu'au break de midi, nous avions eu un beau soleil, la promenade en kayak était facile en eau calme. Pic-nic sur une petite plage à l'ombre de quelques arbres. C'est là que notre guide, tout en mangeant ses caillettes ardéchoises (comment être filiforme en mangeant ces bombes caloriques ?) nous a exposé la suite du parcours qui allait devenir beaucoup plus compliqué. Plus il engloutissait ses caillettes moins je pouvais avaler mon sandwich; une espèce de transfert calorique s'opérait entre lui et moi.
Puis il regarde le ciel et se voulant rassurant, il dit: “Allez, on y retourne. Vous êtes des dégourdis, on arrivera avant l'orage.”
“Hein?” fis-je figée en déglutissant, “quel orage?”.
“Mais celui qui arrive”, me montrant les nuées noirâtres encore lointaines.
Du coup, comme si une guêpe nous avait piqué le derrière, nous enfourchons le kayak (la souplesse n'était plus feinte) et nous passons en tête de file juste derrière le guide.
Avant chaque rapide, il nous rappelle bien tous les mouvements qu'il faudra exécuter.
Le premier rapide ne se passe pas trop mal compte tenu du fait que ça n'est pas le plus simple pour un premier.
Le guide ne cesse d'hurler “Pagaie! Pagaie!” à un couple assez timoré dont le kayak sera plus souvent retourné qu'en place. Nous, prenant de l'assurance, attaquons le second rapide avec un sourire de cantatrice aux lèvres. (C'est là qu'il y a un appareil photo automatique en plus!) Beaucoup de pluie, donc beaucoup d'eau, donc beaucoup de remouds. Quelle aventure! J'étais la réincarnation de Philippe de Dieuleveult ! Mais en jaune pétant. Même les vautours étaient de la partie: un vol d'une fluidité royale, des cercles tracés au ralenti dans les airs. Alors que nous étions dans le même espace temps, eux évoluaient au ralenti silencieusement et nous en accéléré bruyamment. Cherchez l'erreur...
Je ne me souviens plus des différents noms des rapides, sauf celui de la Dent Noire où le ciel a franchement commencé à devenir inquiétant. Il prenait de plus en plus des allures de Jugement Dernier alors que, sincèrement, nous n'avions rien fait! Le guide surveillait toujours l'attitude des “Vieux” qui faisaient la descente en barque. Si eux décidaient d'arrêter à cause du temps,disait-il, tout le monde les suivait. Or, malgré les pesants nuages, les “Vieux” poursuivaient.
La Dent Noire donc, et celui de la Toupine où les pompiers veillaient, des rochers, à intervenir avec des cordes en cas de probèmes. Et c'est là que nous avons choisi de nous retourner. Malgré les “Pagaie!” hurlants du guide, on a penché inexorablement comme un bavarois qui n'a pas pris. Pas eu le temps de faire plouf! Qu'une corde m'est tombée dessus, des cris dans tous les sens “tenez vous! Tenez vous! On va tirer, attention!” J'ai eu l'impression qu'un monstre marin m'aspirait dans les profondeurs (18 m si mes souvenirs sont bons, quand même…) alors que j'étais littéralement happée vers l'extérieur par les pompiers; au passage, j'ai croisé la tête de mon mari, yeux globuleux et bouche de carpe grande ouverte.
Le temps de reprendre notre souffle, le kayak avait été récupéré, vidé, les pagaies aussi. Nous sommes remontés dedans, un peu déconfits il faut le dire et nous nous sommes remis dans la file. Mon mari avait commencé à cligner des yeux de façon alternée car il croyait avoir une lentille mal mise…..je suppose qu'il a gardé en souvenir un film assez discontinu du reste de la descente.
Mais ne voilà-t-il pas un petit grondement qui se fait entendre ? et des gouttes de pluie qui commencent à tomber ?…...et j'entendis la voix, sombre, de ma mère….. “Ouh, quand elle est démontée par un orage l'Ardèche….”
Le guide avait lui aussi la mine sombre. “Bon, il n'y a plus de difficultés maintenant. Il faut y aller et foncer car l'orage est là.On se retrouve en bas.” dit-il avant de donner un coup de pagaie et partir en avant.
Je me retourne vers mon mari qui n'avait pas encore arrêté de cligner des yeux: “T'as entendu? Faut foncer!” et je ne fais ni une ni deux, je me mets à pagayer comme pour une compétition olympique. Lui, confiant dans mon expérience du monde sauvage ardèchois et ne voyant plus de “Vieux” dans le coin, augmente aussi la cadence.
La voix de ma mère était toujours là….”Ouh...quand elle est démontée par un orage, l'Ardèche….”
Oui ! Ca va! J'ai compris! (je reste polie)
J'étais devenue Meryl Streep dans la Rivière Sauvage. Je voyais des rochers surgir des vagues, je criais “A gauche!” “A droite” à mon mari qui m'apparaissait désormais comme Conan le Barbare en tenue aquatique qui envoyait des messages de détresse en morse avec les yeux.
Voilà que l'on croise un canoé renversé, l'homme ne tenterait-il pas de s'agripper au nôtre? Et de nous faire chavirer en rigolant?
Le son qui est sorti de ma gorge m'a moi-même térrifiée ! Il est vite reparti s'occuper de son kayak.
Les coups de tonnerres étaient de plus en plus présents, la pluie tombait droit comme un rideau, heureusement le vent n'avait pas l'air de monter à notre hauteur. J'avais l'impression que l'Ardèche s'élargissait. Nos pagaies tournaient comme des hélices, et la voix de ma mère toujours là “elle peut devenir terrifiaaannnnte.”
Tant et si bien que nous n'avons pas vu que nous étions arrivés. On pagayait, on traçait tel un hors-bord en déroute, mon mari était Evinrude et moi Bianca (oui, Walt Disney, il faut suivre hein!)
Soudain, on entendit vaguement “Stooooop! Arrêtez-vous! Ouh Ouh Arrêtez-vous! Vous allez dans le Rhône!”
“Tiens, mais ce n'est pas la voix de ma mère? Ou alors, elle a attrapé une angine!”
Nous ralentissons. A travers le rideau de pluie, on aperçoit une espèce de canari géant qui court le long de la berge avec un porte-voix. Mon mari règle le clignotement de ses yeux et finit pas distinguer un homme vêtu d'une cape de plastique jaune qui nous fait des signes désespérés.
On pivote vers la berge, mais allez-y pour remonter le courant. Donc, c'est à pied que nous avons ramené le kayak en venant du côté opposé à la normale.
L'homme était un peu dépité mais riait quand même de nous voir “remontant du Rhône” alors que les autres descendaient de l'Ardèche.
Cliniou- Messages : 916
Date d'inscription : 06/12/2016
Age : 54
Re: Carnets de Jane
Une conteuse naturelle, notre Cliniou !
bix_229- Messages : 15439
Date d'inscription : 06/12/2016
Localisation : Lauragais
Re: Carnets de Jane
extraordinaire ! merci Cliniou j'ai bien ri ! tu croques superbement les personnes de ton mari et du guide ; c'était saisissant de réalisme !
_________________
“Lire et aimer le roman d'un salaud n'est pas lui donner une quelconque absolution, partager ses convictions ou devenir son complice, c'est reconnaître son talent, pas sa moralité ou son idéal.”
― Le club des incorrigibles optimistes de Jean-Michel Guenassia
[/i]
"Il n'y a pas de mauvais livres. Ce qui est mauvais c'est de les craindre." L'homme de Kiev Malamud
Bédoulène- Messages : 21889
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 79
Localisation : En Provence
Re: Carnets de Jane
Merci pour vos gentils commentaires
Le partage n’est apprécié que s’il vous est agréable.
Le partage n’est apprécié que s’il vous est agréable.
Cliniou- Messages : 916
Date d'inscription : 06/12/2016
Age : 54
Re: Carnets de Jane
Eh ben... mon copain veut qu'on y retourne prochainement pour faire du kayak... je ferais bien gaffe aux nuages... je crois qu'on est passés devant un panneau qui indiquait la fameuse Dent Noire la dernière fois lors de notre rando...
Re: Carnets de Jane
Les caillettes .
Toute mon enfance.
Et la dent noire : brrr .
En canoé , j'ai bien failli tué mon coéquipier il y a une trentaine d'années de ça .( je l'ai revu par hasard dans les rues de Privas l'an dernier , je reste son pire cauchemar d'adolescence à ce pauvre homme .Mea culpa . )
En mode kayak je pense que ça m'irait mieux .
Mais bon l'Ardèche et ses gorges aujourd'hui , je fuis .
Je préfère le plateau . Plus sauvage .
Toute mon enfance.
Et la dent noire : brrr .
En canoé , j'ai bien failli tué mon coéquipier il y a une trentaine d'années de ça .( je l'ai revu par hasard dans les rues de Privas l'an dernier , je reste son pire cauchemar d'adolescence à ce pauvre homme .Mea culpa . )
En mode kayak je pense que ça m'irait mieux .
Mais bon l'Ardèche et ses gorges aujourd'hui , je fuis .
Je préfère le plateau . Plus sauvage .
églantine- Messages : 4431
Date d'inscription : 02/12/2016
Localisation : Savoie
Re: Carnets de Jane
Quelques mots sur Bologne...
Quand on arrive à la gare de Bologne, les environs ne sont pas des plus accueillants. Les alentours d'une gare, comme dans toutes les villes, sont souvent glauques. Mais en prenant la direction de la piazza maggiore, on se laisse apprivoiser doucement. Les premiers portiques nous tendent la main et le charme opère. Ah, les portiques de Bologne, Bologne la rouge à cause de la couleur des briques...mais aussi à cause du sang communiste, Bologne la grasse car si gourmande.
Imaginez cette brume d'un matin de juin qui s'étend et traîne sous les portiques, on se croirait en pleine filature dans un roman policier. Puis le soleil mutin qui étire ses rayons dans les rues étroites, dépité que l'esapce sous les colonnes lui soit interdit, il fait exploser la couleur rouge rouille des bâtiment.La ville s'éveille et c'est alors que des effluves de brodo, de ragù, de mortadelle viennent titiller nos narines, les étalages des magasins débordent de pâtes fraîches et d'amaretti morbidi.
Alors on n'y tient plus, on s'asseoit à la terrasse d'un café sur la piazza maggiore pour prendre un espresso digne de ce nom et on observe les techniciens préparer le matériel pour la projection en plein air d'un film avec Marcello Mastroiani.Ensuite nous allons flâner à la libreria Nanni, vous venez ? Et si vous tendez l'oreille, peut-être entendrez-vous les bouillonements d'un des nombreux torrents cachés sous la ville mais qui font parfois surface dans des endroits secrets.
Mes lectures:
L'oeil de Carafa (Q ) de Luther Blissett: collectif d'écrivains bolognais qui se nomme désormais Wu Ming. C'est un roman historique, qui se passe au XVIè S durant les révoltes dûes à la réforme protestante, et qui est présenté comme un roman d'espionnage: le personnage principal, anabaptiste radical, prend part à plusieurs révoltes dans différentes villes dont les issues sont à chaque fois dramatiques. Il finit par comprendre qu'il y a un traitre parmi ses accolytes et n'aura de cesse de retrouver cet Oeil de Carafa (Q), espion au service du Cardinal Carafa.
Le tour de force, c'est que tout est précis, vérifiable, tous les personnages ont existé, toutes les dates sont correctes. Et pourtant, il n'y a aucune lourdeur, on est emballé par l'intrigue qui finit en scène de cape et d'épée.
Bologne, Ville à vendre + Les souterrains de Bologne, de Loriano Macchiavelli. Romans policiers écrits par un écrivain originaire de la ville, donc des anecdotes intéressantes dont on ne parle pas dans les guides touristiques. Alire sur place, c'est encore mieux !
Quand on arrive à la gare de Bologne, les environs ne sont pas des plus accueillants. Les alentours d'une gare, comme dans toutes les villes, sont souvent glauques. Mais en prenant la direction de la piazza maggiore, on se laisse apprivoiser doucement. Les premiers portiques nous tendent la main et le charme opère. Ah, les portiques de Bologne, Bologne la rouge à cause de la couleur des briques...mais aussi à cause du sang communiste, Bologne la grasse car si gourmande.
Imaginez cette brume d'un matin de juin qui s'étend et traîne sous les portiques, on se croirait en pleine filature dans un roman policier. Puis le soleil mutin qui étire ses rayons dans les rues étroites, dépité que l'esapce sous les colonnes lui soit interdit, il fait exploser la couleur rouge rouille des bâtiment.La ville s'éveille et c'est alors que des effluves de brodo, de ragù, de mortadelle viennent titiller nos narines, les étalages des magasins débordent de pâtes fraîches et d'amaretti morbidi.
Alors on n'y tient plus, on s'asseoit à la terrasse d'un café sur la piazza maggiore pour prendre un espresso digne de ce nom et on observe les techniciens préparer le matériel pour la projection en plein air d'un film avec Marcello Mastroiani.Ensuite nous allons flâner à la libreria Nanni, vous venez ? Et si vous tendez l'oreille, peut-être entendrez-vous les bouillonements d'un des nombreux torrents cachés sous la ville mais qui font parfois surface dans des endroits secrets.
Mes lectures:
L'oeil de Carafa (Q ) de Luther Blissett: collectif d'écrivains bolognais qui se nomme désormais Wu Ming. C'est un roman historique, qui se passe au XVIè S durant les révoltes dûes à la réforme protestante, et qui est présenté comme un roman d'espionnage: le personnage principal, anabaptiste radical, prend part à plusieurs révoltes dans différentes villes dont les issues sont à chaque fois dramatiques. Il finit par comprendre qu'il y a un traitre parmi ses accolytes et n'aura de cesse de retrouver cet Oeil de Carafa (Q), espion au service du Cardinal Carafa.
Le tour de force, c'est que tout est précis, vérifiable, tous les personnages ont existé, toutes les dates sont correctes. Et pourtant, il n'y a aucune lourdeur, on est emballé par l'intrigue qui finit en scène de cape et d'épée.
Bologne, Ville à vendre + Les souterrains de Bologne, de Loriano Macchiavelli. Romans policiers écrits par un écrivain originaire de la ville, donc des anecdotes intéressantes dont on ne parle pas dans les guides touristiques. Alire sur place, c'est encore mieux !
Cliniou- Messages : 916
Date d'inscription : 06/12/2016
Age : 54
Re: Carnets de Jane
merci pour cette entrée Cliniou, des photos ?
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“Lire et aimer le roman d'un salaud n'est pas lui donner une quelconque absolution, partager ses convictions ou devenir son complice, c'est reconnaître son talent, pas sa moralité ou son idéal.”
― Le club des incorrigibles optimistes de Jean-Michel Guenassia
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"Il n'y a pas de mauvais livres. Ce qui est mauvais c'est de les craindre." L'homme de Kiev Malamud
Bédoulène- Messages : 21889
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 79
Localisation : En Provence
Re: Carnets de Jane
Pour répondre à Bédoulène
La découverte de l'huître Tsarskaya de Cancale.
La demoiselle a été créée à la ferme Saint Kerber à Cancale en mémoire des tsars de Russie très friands d'huîtres. Je pense qu'elle est née en 2004 et commercialisée depuis 2008 (élevée 4 ans pour en faire une belle jeune huître). C'est une huître ferme, charnue, à la robe blanche, longue en bouche, iodée mais très douce voire légèrement sucrée, un petit goût noisette par derrière.
On la déguste nature tout simplement, tant elle se suffit à elle-même, mais rien n'empêche d'y ajouter un peu de poivre, pas de citron pour moi; elle peut être dégustée chaude également, elle a d'ailleurs inspiré plusieurs grands chefs.
Pour les amateurs d'huîtres, c'est un réel plaisir. Elle est aussi savoureuse qu'une plate !
Fortement exportée, depuis l'embargo de Poutine, on parle un peu plus de la Tsarskaya en France, et c'est tant mieux !
La découverte de l'huître Tsarskaya de Cancale.
La demoiselle a été créée à la ferme Saint Kerber à Cancale en mémoire des tsars de Russie très friands d'huîtres. Je pense qu'elle est née en 2004 et commercialisée depuis 2008 (élevée 4 ans pour en faire une belle jeune huître). C'est une huître ferme, charnue, à la robe blanche, longue en bouche, iodée mais très douce voire légèrement sucrée, un petit goût noisette par derrière.
On la déguste nature tout simplement, tant elle se suffit à elle-même, mais rien n'empêche d'y ajouter un peu de poivre, pas de citron pour moi; elle peut être dégustée chaude également, elle a d'ailleurs inspiré plusieurs grands chefs.
Pour les amateurs d'huîtres, c'est un réel plaisir. Elle est aussi savoureuse qu'une plate !
Fortement exportée, depuis l'embargo de Poutine, on parle un peu plus de la Tsarskaya en France, et c'est tant mieux !
Cliniou- Messages : 916
Date d'inscription : 06/12/2016
Age : 54
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