Marquis de Sade
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Marquis de Sade
source : BabelioDonatien Alphonse François, marquis de Sade est un écrivain français. Né dans une vieille famille aristocratique, il entre à 14 ans dans une école militaire, puis revient à Paris en 1763 comme capitaine. Il montre, en fréquentant les actrices et les courtisanes, son goût pour la luxure, qui lui vaut, l'année même et peu de temps après son mariage, un premier séjour en prison pour "débauche outrée".
Après une seconde incarcération de six mois en 1768 pour flagellation, il est accusé en 1772 d'empoisonnement pour avoir rendu malade une prostituée à qui il avait fait prendre des dragées aphrodisiaques. Il est condamné à mort par contumace. Arrêté, puis évadé, il est finalement repris et, sous le coup d'une lettre de cachet, incarcéré successivement à Vincennes, à la Bastille et à Charenton. C'est pendant cette longue période d'emprisonnement que Donatien Alphonse François de Sade commence à écrire pour dissiper son ennui. Il est libéré en 1790 par la Révolution comme toutes les victimes de lettres de cachet.
Pendant la Révolution, ses deux fils émigrent, sa femme obtient la séparation du fait de ses violences conjugales. Ses biens en Provence ayant été pillés, sans ressources, le Marquis de Sade essaie de faire jouer ses pièces de théâtre pour pouvoir survivre. Bien qu'ayant milité dans une section révolutionnaire de quartier, il est condamné à mort en 1793. Il échappe à la guillotine à cause d'une erreur administrative. Il vit alors modestement de ses publications. Il est arrêté en 1801 à cause de ses écrits outrageux et de leur violence pornographique et interné par décision administrative à l'asile de fous de Charenton. Bien que totalement lucide et malgré ses protestations, il va y rester jusqu'à sa mort. Il aura passé trente années en prison.
Maîtrisant parfaitement la langue française, le Marquis de Sade alterne dans ses ouvrages les scènes pornographiques souvent extrêmes et les dissertations philosophiques. Dans "Dialogue entre un prêtre et un moribond" (1782), il affirme un athéisme absolu et ne laissera plus passer une occasion de l'afficher dans ses écrits. Ce n'est qu'à partir du milieu du XXe siècle que son œuvre, longtemps interdite et diabolisée, sera redécouverte et réhabilitée. Elle n'est plus lue sous le seul angle superficiel du "sadisme" et de la pornographie, mais sous sa fonction libératrice en s'attaquant aux hypocrisies de la société et à la pensée dominante.
Oeuvres principales :
- Les Crimes de l'Amour
- Aline et Valcour
- La marquise de Gange
- La Philosophie dans le boudoir
- Justine ou les Infortunes de la vertu
- La Nouvelle Justine
- Les Cent Vingt Journées de Sodome
- Juliette ou les Prospérités du vice
- Contes libertins (publication posthume)
Correspondance :
- 50 lettres du marquis de Sade à sa femme
- "Je jure au marquis de Sade, mon amant, de n'être jamais qu'à lui...", correspondance d'Anne-Prospère de Launais et du marquis de Sade
- Correspondances du marquis de Sade et de ses proches
La marquise de Gange
Et revoilà l'infernal marquis de Sade !
J'ai fini ce livre il y a un temps et il reste un peu atypique dans ses romans car il s'inspire d'un fait divers.
Une femme mariée et future héritière d'une petite fortune fait l'objet de cabales de la part de ses deux beaux-frères, qui font tout pour la pousser à la faute charnelle.
Ceux-ci laissent entendre à son mari que sa vertu est bien fragile.
On retrouve un poncif : la volupté de bafouer l'innocence. Les deux frères ne reculent devant aucun traquenard pour faire accuser la dame de crimes de moeurs.
Si l'auteur souligne son admirable constance dans la candeur, on sent pourtant un malin plaisir à opposer la pureté à la lascivité. Néanmoins, et c'est assez remarquable, Sade nous épargne les délires pornographiques habituels.
L'ouvrage est lisible par tous. Il y a de l'aventure, des enlèvements, un côté sentimental, parfois niais, et une dimension picaresque évoquant parfois Louvet de Couvray. Ce sont les Liaisons Dangereuses assagies.
C'est un peu répétitif, souvent outrancier, mais on découvre Sade autrement. Il a du souffle, de l'humour et de l'imagination.
J'ajoute que c'est une tragédie, car la vertu sera impitoyablement écrasée par la corruption ambiante... La perversion libertine est cette fois-ci psychologique.
A lire.
--
Tatie- Messages : 278
Date d'inscription : 14/02/2021
Re: Marquis de Sade
J'avoue que les "délires pornographiques" de Sade ne me tentent guère. Du coup, un livre qui en est dépourvu pourrait être une bonne idée pour découvrir sa plume. Je note !
_________________
"Et au plus eslevé trone du monde, si ne sommes assis, que sus notre cul." (Michel de Montaigne)
Armor- Messages : 4589
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 43
Localisation : A l'Aise Breizh
Re: Marquis de Sade
Merci pour le fil, Tatie. La marquise de Gange m'avait semblé en effet assez différent de ses autres textes.
Je pense à lire Sade, bientôt, certainement Les prospérités du vice (avec en parallèle La littérature et le mal, de Bataille). Je dirais qu'il y a quand même une sorte d'intérêt/fascination pour cet auteur, tant il paraît nous échapper, lui et sa démarche. Censuré, puis oublié pendant le XIXème, remis au goût du jour par les Surréalistes, aujourd'hui il est même dans la Pléiade.
Je conseille toujours le film "d'animation" (en pâte à modeler) Marquis, imaginé par Topor, qui est assez indescriptible, et génial (à mon goût). Aujourd'hui, il y a Annie Le Brun qui est une fervente essayiste et passionnée par le Marquis, il y a eu une expo il y a peu sous sa direction, j'aurais bien aimé la voir.
Quelques vers d'Octavio Paz :
Je pense à lire Sade, bientôt, certainement Les prospérités du vice (avec en parallèle La littérature et le mal, de Bataille). Je dirais qu'il y a quand même une sorte d'intérêt/fascination pour cet auteur, tant il paraît nous échapper, lui et sa démarche. Censuré, puis oublié pendant le XIXème, remis au goût du jour par les Surréalistes, aujourd'hui il est même dans la Pléiade.
Je conseille toujours le film "d'animation" (en pâte à modeler) Marquis, imaginé par Topor, qui est assez indescriptible, et génial (à mon goût). Aujourd'hui, il y a Annie Le Brun qui est une fervente essayiste et passionnée par le Marquis, il y a eu une expo il y a peu sous sa direction, j'aurais bien aimé la voir.
Quelques vers d'Octavio Paz :
traduction Jean Claude MassonTu n'es pas effacé.
Les lettres de ton nom sont encore une cicatrice,
un tatouage d'infamie sur certains fronts.
Comète au lourd sillage phosphorescent : raisons, obsessions,
tu traverses le dix-neuvième siècle une grenade à la main
et tu éclates en butant sur notre époque.
Invité- Invité
Re: Marquis de Sade
M'est revenu en tête un passage très visionnaire où Sade évoque l'idée qu'un jour tout sera "privatisé" dans la société. Bon, il le dit mieux et avec ses mots. Dans ses écrits sur l'athéisme. Il faut que je retrouve cela.
En analyse politique, il était très pertinent, je trouve.
En analyse politique, il était très pertinent, je trouve.
Tatie- Messages : 278
Date d'inscription : 14/02/2021
Re: Marquis de Sade
Je conseille les Lettres de Sade à sa femme.
bix_229- Messages : 15439
Date d'inscription : 06/12/2016
Localisation : Lauragais
Re: Marquis de Sade
Les premiers principes de ma philosophie, Juliette, continua madame Delbène qui s’attachait plus particulièrement à moi depuis la perte d’Euphrosine, sont de braver l’opinion publique ; tu n’imagines pas à quel point, ma chère, je me moque de tout ce qu’on peut dire de moi. Et que peut faire au bonheur, je t’en prie, cette opinion de l’imbécile vulgaire ? Elle ne nous affecte qu’en raison de notre sensibilité ; mais si, à force de sagesse et de réflexion nous sommes parvenues à émousser cette sensibilité, au point de ne plus sentir ses effets, même dans les choses qui nous touchent le plus, il deviendra parfaitement impossible que l’opinion, bonne ou mauvaise des autres, puisse rien faire à notre félicité. Ce n’est qu’en nous seules que doit consister cette félicité, elle ne dépend que de notre conscience, et peut-être encore un peu plus de nos opinions sur lesquelles seules doivent être étayées les sûres inspirations de la conscience ; car la conscience ; poursuivait cette femme remplie d’esprit, n’est pas une chose uniforme ; elle est presque toujours le résultat des mœurs et de l’influence des climats, puisqu’il est de fait que les Chinois, par exemple, ne répugnent nullement à des actions qui nous feraient frémir en France.
in Juliette ou les prospérités du vice
Invité- Invité
Re: Marquis de Sade
jamais lu, mais peut-être Juliette est plus accessible
_________________
“Lire et aimer le roman d'un salaud n'est pas lui donner une quelconque absolution, partager ses convictions ou devenir son complice, c'est reconnaître son talent, pas sa moralité ou son idéal.”
― Le club des incorrigibles optimistes de Jean-Michel Guenassia
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"Il n'y a pas de mauvais livres. Ce qui est mauvais c'est de les craindre." L'homme de Kiev Malamud
Bédoulène- Messages : 21081
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 79
Localisation : En Provence
Re: Marquis de Sade
Contes étranges
Contes écrits en prison (entre 1778 et 1789) dont l’étrangeté se situe plutôt dans le ton que le contenu narratif. Sade s’amuse, il multiplie les quiproquos, fourberies, retournements et situations indécentes, où la cruauté précède un « tout est bien qui finit bien » délicieusement narquois. Seulement, l’effet n’est pas souvent à la hauteur de ces péripéties retorses dont le lecteur même s’il sourit, même s’il rit, a deviné d’avance le dénouement (il y a deux trois magnifiques exceptions). De plus, la violente critique que lui inspire la société et les institutions a peine a trouvé une place cette satire qui punit davantage l’inconséquence que les plaies combattues par Sade de façon marginale, par quelques saillies. C’est l’étrange paradoxe du conte le plus drôle de l’ouvrage ― et de loin le plus long : Le Président Mystifié ― dans lequel l’acharnement contre un homme de loi paraît d’abord ambigu (gratuit même, mais hilarant) puis secondairement tout à fait justifié. L’attaque contre son ministère est féroce et intelligente, mais on ne semble punir que la sottise* de ses ardeurs conjugales.
*: Lui se croit sincèrement aimé, c’est le père qui a forcé sa fille à épouser le magistrat.
Contes écrits en prison (entre 1778 et 1789) dont l’étrangeté se situe plutôt dans le ton que le contenu narratif. Sade s’amuse, il multiplie les quiproquos, fourberies, retournements et situations indécentes, où la cruauté précède un « tout est bien qui finit bien » délicieusement narquois. Seulement, l’effet n’est pas souvent à la hauteur de ces péripéties retorses dont le lecteur même s’il sourit, même s’il rit, a deviné d’avance le dénouement (il y a deux trois magnifiques exceptions). De plus, la violente critique que lui inspire la société et les institutions a peine a trouvé une place cette satire qui punit davantage l’inconséquence que les plaies combattues par Sade de façon marginale, par quelques saillies. C’est l’étrange paradoxe du conte le plus drôle de l’ouvrage ― et de loin le plus long : Le Président Mystifié ― dans lequel l’acharnement contre un homme de loi paraît d’abord ambigu (gratuit même, mais hilarant) puis secondairement tout à fait justifié. L’attaque contre son ministère est féroce et intelligente, mais on ne semble punir que la sottise* de ses ardeurs conjugales.
*: Lui se croit sincèrement aimé, c’est le père qui a forcé sa fille à épouser le magistrat.
Dreep- Messages : 1539
Date d'inscription : 08/12/2016
Age : 31
Re: Marquis de Sade
La Philosophie dans le boudoir
Sade a préféré inviter la philosophie dans son « boudoir » que dans sa prison. Pendant la courte période où il fut libre, le « Marquis » publia un roman sous forme dialoguée. Sept dialogues et un fort long discours lu par l’un des personnages : Français, faites encore un effort si vous voulez être républicain. Plus de deux siècles n’y font rien, La Philosophie dans le boudoir continue d’être sidérant. Non pas forcément du fait de l’obscénité parfois sordide dont Sade fait étalage, mais bien parce qu’il tient le plaisir sexuel comme valeur suprême, et pour ainsi dire pour seule valeur. Est-il positivement sérieux ― ou alors feigne-t-il avec génie ― lorsqu’il repousse toutes les limites, jusqu’à finalement ne plus pouvoir être pris au sérieux…? Mais alors vraiment, après tous ces dialogues, toutes ces complexes acrobaties de corps nus ― est-ce qu’un metteur-en-scène a déjà osé les représenter ?* ― la plaisanterie finit par être un peu éculée. L’outrance fait rire puis fatigue. Sauf pour approuver cet infatigable professeur, il ne s’agit pas tellement de discuter : celui-ci distille les éléments de la future leçon (Français, faites encore un effort…) en résonnance direct avec les événements de la révolution française. À la religion, premier bataillon de l’ancien régime, Sade oppose un culte alternatif ― le cul ― à la tyrannie classique et pyramidale (celle du roi et de ses sujets) il oppose une tyrannie qui s’exerce dans tous les sens. Plus personne n’est propriétaire de son corps, plus personne n’est même propriétaire de sa vie (puisque Sade revendique une prostitution institutionnalisée, justifie le viol et le meurtre) la destruction étant un phénomène de la Nature, elle n’est pas une mauvaise chose. On a envie de glisser doucement à Sade que remplacer une tyrannie par une autre ne sert strictement à rien, à moins que ce culte alternatif ne soit qu’un coup de poing, que cette « utopie » soit un châtiment, allant jusqu’à l’anéantissement de l’humanité dans une ultime jouissance… Il n’y a qu’à demander à Madame de Mistival…
*: Je suis peut-être extrêmement naïf, n’ayant jamais regardé le Salo de Pasolini par exemple…
Sade a préféré inviter la philosophie dans son « boudoir » que dans sa prison. Pendant la courte période où il fut libre, le « Marquis » publia un roman sous forme dialoguée. Sept dialogues et un fort long discours lu par l’un des personnages : Français, faites encore un effort si vous voulez être républicain. Plus de deux siècles n’y font rien, La Philosophie dans le boudoir continue d’être sidérant. Non pas forcément du fait de l’obscénité parfois sordide dont Sade fait étalage, mais bien parce qu’il tient le plaisir sexuel comme valeur suprême, et pour ainsi dire pour seule valeur. Est-il positivement sérieux ― ou alors feigne-t-il avec génie ― lorsqu’il repousse toutes les limites, jusqu’à finalement ne plus pouvoir être pris au sérieux…? Mais alors vraiment, après tous ces dialogues, toutes ces complexes acrobaties de corps nus ― est-ce qu’un metteur-en-scène a déjà osé les représenter ?* ― la plaisanterie finit par être un peu éculée. L’outrance fait rire puis fatigue. Sauf pour approuver cet infatigable professeur, il ne s’agit pas tellement de discuter : celui-ci distille les éléments de la future leçon (Français, faites encore un effort…) en résonnance direct avec les événements de la révolution française. À la religion, premier bataillon de l’ancien régime, Sade oppose un culte alternatif ― le cul ― à la tyrannie classique et pyramidale (celle du roi et de ses sujets) il oppose une tyrannie qui s’exerce dans tous les sens. Plus personne n’est propriétaire de son corps, plus personne n’est même propriétaire de sa vie (puisque Sade revendique une prostitution institutionnalisée, justifie le viol et le meurtre) la destruction étant un phénomène de la Nature, elle n’est pas une mauvaise chose. On a envie de glisser doucement à Sade que remplacer une tyrannie par une autre ne sert strictement à rien, à moins que ce culte alternatif ne soit qu’un coup de poing, que cette « utopie » soit un châtiment, allant jusqu’à l’anéantissement de l’humanité dans une ultime jouissance… Il n’y a qu’à demander à Madame de Mistival…
Donatien Alphonse François de Sade a écrit:Ceux qui veulent proscrire ou condamner ce goût prétendent qu’il nuit à la population. Qu’ils sont plats, ces imbéciles qui n’ont jamais que cette idée de population dans la tête, et qui ne voient jamais que du crime à tout ce qui s’éloigne de là ! Est-il donc démontré que la Nature ait de cette population un si grand besoin qu’ils voudraient nous le faire croire ?
*: Je suis peut-être extrêmement naïf, n’ayant jamais regardé le Salo de Pasolini par exemple…
Dreep- Messages : 1539
Date d'inscription : 08/12/2016
Age : 31
Re: Marquis de Sade
waw. ça ne me donne pas tellement envie de me pencher sur ses écrits. Il est à fond, quoi. Merci pour le partage Dreep.
@Armor, merci, aussi, de signaler le film d animation de Topor sur lui, je vais voir si je peux le trouver sur le net !
@Armor, merci, aussi, de signaler le film d animation de Topor sur lui, je vais voir si je peux le trouver sur le net !
Nadine- Messages : 4832
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 48
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