Premières phrases
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Re: Premières phrases
Antoine8 a écrit:anagramme a écrit:Chaque jour j’attache moins de prix à l’intelligence. Chaque jour je me rends mieux compte que ce n’est qu’en dehors d’elle que l’écrivain peut ressaisir quelque chose de nos impressions, c’est-à-dire atteindre quelque chose de lui-même et la seule matière de l’art.
Proust, Contre Sainte-Beuve
Oh Proust ! Le Contre Sainte-Beuve est dans ma liste de livres à lire très prochainement !!!
Une saine lecture, Antoine ! Il y a la des pages qui anticipent la Recherche et la première version de la "madeleine" qui est, ici, une biscotte.
anagramme- Messages : 1367
Date d'inscription : 12/12/2016
Re: Premières phrases
Il a dû s'apercevoir que la biscotte manquait de moelleux (rien à voir avec la madeleine) ; je ne sais plus qui a dit que Proust avait écrit un seul livre, La recherche (c'était sur France Culture je crois) :
Mais revenons aux incipit, avec un auteur qui mériterait un fil... Promis, si j'en lis encore de lui !« …] pour m'en tenir au point de vue de la composition, j'avais simplement pour passer d'un plan à l'autre, usé non d'un fait, mais de ce que j'avais trouvé plus pur, plus précieux comme jointure, un phénomène de mémoire. »
Marcel Proust, « Contre Sainte-Beuve »
« C’est une histoire vraie, plus ou moins. Tout ce qui touche à la guerre, en tout cas, n’est pas loin de la vérité. »
Kurt Vonnegut Jr., « Abattoir 5 »
_________________
« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
Tristram- Messages : 15596
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Localisation : Guyane
Re: Premières phrases
anagramme a écrit:Antoine8 a écrit:anagramme a écrit:Chaque jour j’attache moins de prix à l’intelligence. Chaque jour je me rends mieux compte que ce n’est qu’en dehors d’elle que l’écrivain peut ressaisir quelque chose de nos impressions, c’est-à-dire atteindre quelque chose de lui-même et la seule matière de l’art.
Proust, Contre Sainte-Beuve
Oh Proust ! Le Contre Sainte-Beuve est dans ma liste de livres à lire très prochainement !!!
Une saine lecture, Antoine ! Il y a la des pages qui anticipent la Recherche et la première version de la "madeleine" qui est, ici, une biscotte.
Je suis ravi que Proust ait migré vers la madeleine, c'est tout de même mille fois mieux qu'une biscotte toute sèche... J'ai m'intéresse beaucoup à Proust depuis quelques mois, j'ai écouté une série d'émissions sur France Culture avec Jacques Darriulat, entre autres, et j'ai adoré. Ensuite j'ai lu Proust et les signes de Deleuze que j'ai également trouvé très éclairant ! Ah là là... Hâte d'avoir plus de temps pour approfondir tout ça !
Et voici une première phrase :
Scarron, Le Roman comique a écrit:Le soleil avait achevé plus de la moitié de sa course et son char, ayant attrapé le penchant du monde, roulait plus vite qu'il ne voulait.
On sent déjà tout le burlesque de l'oeuvre de Scarron dans cet incipit.
Antoine8- Messages : 67
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Age : 27
Localisation : Alsace
Re: Premières phrases
Il est odieux que le monde appartienne aux virtuistes - à des dames aux ombrelles fanées par les climats qui indiquent ce qu' il faut faire ou ne pas faire - car vertu, au premier sens, veut dire découragé. C' est le contraire du virtuisme.
La vertu fume, crache, lance du foutre et assassine.
L' homme est bon, c' est entendu. Bon et sourdement feutré, comme une torride chenille noire dans ses volutes. Bon mais pas philanthrope. Il y a des moments où toutes ces ampoules doivent claquer et toutes ces femmes et toutes ces fleurs doivent obéir.
Il suffit qu' il y ait quelqu' un.
Charles Albert Cingria : Le Canal exutoire. - L' Age d' homme
La vertu fume, crache, lance du foutre et assassine.
L' homme est bon, c' est entendu. Bon et sourdement feutré, comme une torride chenille noire dans ses volutes. Bon mais pas philanthrope. Il y a des moments où toutes ces ampoules doivent claquer et toutes ces femmes et toutes ces fleurs doivent obéir.
Il suffit qu' il y ait quelqu' un.
Charles Albert Cingria : Le Canal exutoire. - L' Age d' homme
bix_229- Messages : 15439
Date d'inscription : 06/12/2016
Localisation : Lauragais
Re: Premières phrases
Ne rien attendre de sensationnel venant de lui. Il pourrait s'appeler Jules ou
Alphonse. Il pourrait s'appeler Georges-Henri. Il est Français comme le Sioux
maquillé est Sioux.
Il ne déteste pas la pluie sur la Bretagne. C'est un bon garçon mais il n'a
franchement rien à faire en Afrique. Il n' y pense meme pas. L'Afrique ?
Il se verrait plus naturellement accoucher de onze chiots.
Il est invité à séjourner et à écrire dans un village du Mali, sur le Niger.
Eric Chevillard : Oreille rouge
La suite ? Oui, au fait...
Alphonse. Il pourrait s'appeler Georges-Henri. Il est Français comme le Sioux
maquillé est Sioux.
Il ne déteste pas la pluie sur la Bretagne. C'est un bon garçon mais il n'a
franchement rien à faire en Afrique. Il n' y pense meme pas. L'Afrique ?
Il se verrait plus naturellement accoucher de onze chiots.
Il est invité à séjourner et à écrire dans un village du Mali, sur le Niger.
Eric Chevillard : Oreille rouge
La suite ? Oui, au fait...
bix_229- Messages : 15439
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Localisation : Lauragais
Re: Premières phrases
Queneau, Le Chiendent« La silhouette d’un homme se profila ; simultanément, des milliers. Il y en avait bien des milliers. Il venait d’ouvrir les yeux et les rues accablées s’agitaient, s’agitaient les hommes qui tout le jour travaillèrent. La silhouette indiquée se dégagea du mur d’une bâtisse immense et insupportable, un édifice qui paraissait un étouffement et qui était une banque. Détachée du mur, la silhouette oscilla bousculée par d’autres formes, sans comportement individuel visible, travaillée en sens divers, moins par ses inquiétudes propres que par l’ensemble des inquiétudes de ses milliers de voisins. Mais cette oscillation n’était qu’une apparence ; en réalité, le plus court chemin d’un labeur à un sommeil, d’une plaie à un ennui, d’une souffrance à une mort. »
_________________
« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
Tristram- Messages : 15596
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Age : 67
Localisation : Guyane
Re: Premières phrases
Wang Lung était magicien et haissait l' Empereur , il aimait à travers une distance
révérencieuse, l' Impératrice.
Il convoitait une pierre d' aimant sibérienne, un renard bleu ; il caressait aussi le
projet de monter sur le trone.
De pouvoir ainsi, par alliance de son sang et de la Coutume, transformer sa camelote, ses baguettes et ses colombes enchantées, en fragiles et friables tiges
de nard et ne nids de colombes sauvages.
José Lezama Lima : Le Jeu des décapitations. - Seuil
révérencieuse, l' Impératrice.
Il convoitait une pierre d' aimant sibérienne, un renard bleu ; il caressait aussi le
projet de monter sur le trone.
De pouvoir ainsi, par alliance de son sang et de la Coutume, transformer sa camelote, ses baguettes et ses colombes enchantées, en fragiles et friables tiges
de nard et ne nids de colombes sauvages.
José Lezama Lima : Le Jeu des décapitations. - Seuil
bix_229- Messages : 15439
Date d'inscription : 06/12/2016
Localisation : Lauragais
Re: Premières phrases
Le Postier, Bukowski :
Pas si peinard que ça en fait, bien sûr...
Ça a commencé par erreur.
C’étaient les fêtes de Noël et j’avais appris par le pochard en haut de la côte, qui faisait le coup à chaque Noël, qu’ils embauchaient carrément n’importe qui, alors j’y suis allé et sans avoir le temps de réaliser je me suis retrouvé avec une sacoche en cuir sur le dos à cavaler comme bon me semblait. Parlez d’un boulot, que je pensais. Peinard !
Pas si peinard que ça en fait, bien sûr...
Re: Premières phrases
"Certains mots sont probablement aptes à changer le monde, ils ont le pouvoir de
nous consoler et de sécher nos larmes.
Certains mots sont des balle de fusil, d' autres des notes de violon. Cerains sont
capables de faire fondre la glace qui nous enserre le coeur et il est meme possible
de les dépecher comme des cohortes de sauvetage quand les jours sont contraires.
Jon Kalman Stefansson : Entre ciel et terre.
nous consoler et de sécher nos larmes.
Certains mots sont des balle de fusil, d' autres des notes de violon. Cerains sont
capables de faire fondre la glace qui nous enserre le coeur et il est meme possible
de les dépecher comme des cohortes de sauvetage quand les jours sont contraires.
Jon Kalman Stefansson : Entre ciel et terre.
bix_229- Messages : 15439
Date d'inscription : 06/12/2016
Localisation : Lauragais
Re: Premières phrases
Deux incipit de Jim Harrison, à deux novellas de la fin des années 90 :
Evidemment, quand ça commence comme ça !...
« À Westwood, Chien Brun reconnut un nuage qu’il avait vu maintes années auparavant, à plus de trois mille kilomètres vers l’est, près de Fayette, sur la Big Bay De Noc. »
En route vers l'ouest
« Le danger de la civilisation, c’est bien sûr qu’on risque de bousiller sa vie en conneries. »
La Bête que Dieu oublia d'inventer
Evidemment, quand ça commence comme ça !...
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Tristram- Messages : 15596
Date d'inscription : 09/12/2016
Age : 67
Localisation : Guyane
Re: Premières phrases
Pas mal la seconde le matin quand on se lève pour aller au bureau...
_________________
Keep on keeping on...
Re: Premières phrases
Et tu as réussi à me faire rire au réveil !
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Tristram- Messages : 15596
Date d'inscription : 09/12/2016
Age : 67
Localisation : Guyane
Re: Premières phrases
"Que peut-on savoir d'un homme aujourd'hui?", demandait Sartre. Ses biographies critiques ne cessent de m'inspirer mais la réponse est nécessairement humble concernant une aristocrate du XII° siecle"
Pascale Fautrier dans Hildegarde de Bingen, un secret de naissance"
Pascale Fautrier dans Hildegarde de Bingen, un secret de naissance"
Chamaco- Messages : 4287
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 77
Localisation : Corse du sud
Re: Premières phrases
Flannery O'Connor, incipit de Tardive rencontre avec l'ennemi dans le recueil Les braves gens ne courent pas les rues« Le général Sash avait cent quatre ans. Il vivait avec sa petite-fille, Sally Poker Sash, qui en avait soixante-deux ; tous les soirs, elle s'agenouillait et demandait au Ciel qu'Il prête vie au général jusqu'au jour où elle recevrait son diplôme de fin d'études à l'Université. Le général se moquait du diplôme comme de sa première chemise ; par contre, il était absolument certain de tenir jusqu'à la cérémonie. Au fil des ans, vivre était devenu une telle habitude que tout autre état lui semblait inconcevable. »
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Tristram- Messages : 15596
Date d'inscription : 09/12/2016
Age : 67
Localisation : Guyane
Re: Premières phrases
En écrivant ceci, je tremble.
Je tremble parce que c' est l' hiver dans la cabane où j' écris, ce nid à rats sans
fenetre ni chauffage.
Je tremble parce que je m' apprète à révéler, sans pudeur et sans rien dissimuler,
les chers secrets de ma vallée, les lieux et les choses que je connais, qui m' ont
été confiées par elle - la vallée du Yaak.
Lorsqu' on écrit un roman, une nouvelle, on pénètre un espace, un sanctuaire pareil
à un autre monde.
On y perd tout controle, et lorsqu' on ressort de ce lieu qu' on a habité et désigné
par l' écriture, c' est animé d' une énergie nouvelle et d' une vision neuve des choses.
On a touché du doigt un mystère.
C' est magique. Il n' y a pas d' autre mot pour qualifier cela, pas d' autre moyen de
l' expliquer.
... Ce livre est autre chose. C' est un livre source, un manuel, une arme du coeur.
... Ma vallée est en feu, elle est en flammes. Voilà plus de vingt ans qu' elle se
consume.
Ces récits, ce plaidoyer pour sa survie... c' est tout ce que je sais faire.
Rick Bass : Le Livre de Yaak. - Gallmeister/Totem
Je tremble parce que c' est l' hiver dans la cabane où j' écris, ce nid à rats sans
fenetre ni chauffage.
Je tremble parce que je m' apprète à révéler, sans pudeur et sans rien dissimuler,
les chers secrets de ma vallée, les lieux et les choses que je connais, qui m' ont
été confiées par elle - la vallée du Yaak.
Lorsqu' on écrit un roman, une nouvelle, on pénètre un espace, un sanctuaire pareil
à un autre monde.
On y perd tout controle, et lorsqu' on ressort de ce lieu qu' on a habité et désigné
par l' écriture, c' est animé d' une énergie nouvelle et d' une vision neuve des choses.
On a touché du doigt un mystère.
C' est magique. Il n' y a pas d' autre mot pour qualifier cela, pas d' autre moyen de
l' expliquer.
... Ce livre est autre chose. C' est un livre source, un manuel, une arme du coeur.
... Ma vallée est en feu, elle est en flammes. Voilà plus de vingt ans qu' elle se
consume.
Ces récits, ce plaidoyer pour sa survie... c' est tout ce que je sais faire.
Rick Bass : Le Livre de Yaak. - Gallmeister/Totem
bix_229- Messages : 15439
Date d'inscription : 06/12/2016
Localisation : Lauragais
Re: Premières phrases
This good old Hemingway in 50 000 $._ Et toi, Jack, ça va ? lui répondis-je.
_________________
« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
Tristram- Messages : 15596
Date d'inscription : 09/12/2016
Age : 67
Localisation : Guyane
Re: Premières phrases
haha, en première phrase c'est pas mal c'est sûr...
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Keep on keeping on...
Re: Premières phrases
Après sa mort, il revenait. Toujours.
Charles Lewinsky : Melnitz. - Grasset
Charles Lewinsky : Melnitz. - Grasset
bix_229- Messages : 15439
Date d'inscription : 06/12/2016
Localisation : Lauragais
Re: Premières phrases
Lorsque j'étais très jeune et possédé du besoin d'être toujours ailleurs, les gens mûrs m'assuraient que la maturité me guérirait de cette démangeaison. Quand les ans me déclarèrent mûr, on m'assura encore que l'âge ferait son oeuvre. Puis l'on m'affirma que ma fièvre se calmerait avec le temps. Et, à présent que j'ai cinquante-huit ans, sans doute est-ce de la sénilité que viendra le remède. Jusqu'ici, rien n'y a fait.
John Steinbeck, Voyage avec Charley.
Invité- Invité
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