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Message par Invité Dim 30 Sep - 10:40

Je relis maintenant Extension du domaine de la lutte, c'est drôle de relire son dernier roman puis son premier.
C'est subtil mais on peut y voir une forme de lente déclinaison dans le désenchantement de l'auteur. Bien qu'il soit parti d'un stade déjà très avancé !
Je me demande s'il va encore écrire. En janvier, ça fera 4 ans depuis la sortie de Soumission, il me semble.

Un petit extrait pour la route :

J'ai si peu vécu que j'ai tendance à m'imaginer que je ne vais pas mourir ; il paraît invraisemblable qu'une vie humaine se réduise à si peu de chose ; on s'imagine malgré soi que quelque chose va, tôt ou tard, advenir. Profonde erreur. Une vie peut fort bien être à la fois vide et brève. Les journées s'écoulent pauvrement, sans laisser de trace ni de souvenir ; et puis, d'un seul coup, elles s'arrêtent.

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Message par Tristram Dim 30 Sep - 12:21

Oui, tout est déjà là, et on ne peut pas lui reprocher de manque de cohérence.
« Cette notion de vieillissement et de mort est insupportable à l'individu humain ; dans nos civilisations, souveraine et inconditionnée elle se développe, elle emplit progressivement le champ de la conscience, elle ne laisse rien subsister d'autre. Ainsi, peu à peu, s'établit la certitude de la limitation du monde. Le désir lui-même disparaît ; il ne reste que l'amertume, la jalousie et la peur. Surtout, il reste l'amertume ; une immense, une inconcevable amertume. »
Michel Houellebecq, « Extension du domaine de la lutte »
Avec Houellebecq, le mot-clé est décidément "amertume"...

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« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
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Message par topocl Dim 6 Jan - 11:26

Philippe Lançon dans Le Lambeau a écrit:Sa misogynie, son ironie réactionnaire, tout cela ne me gênait pas : un roman n'est pas un lieu de vertu.

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Message par Tristram Dim 6 Jan - 12:44

Entendu ; je commence donc Sérotonine

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Message par églantine Dim 6 Jan - 20:04

politique - Michel Houellebecq - Page 5 Cvt_se11

Je vous en recopierai d'autres demain mais voilà deux extraits déjà :
  "Il est mauvais que des aimés parlent la même langue, il est mauvais qu'ils puissent réellement se comprendre, qu'ils puissent échanger des mots, car la parole n'a pas pour vocation de créer l'amour, mais la division et la haine, la parole sépare à mesure qu'elle se produit, alors qu'un babillage amoureux, semi linguistique , parler à sa femme ou à son homme comme l'on parlerait à son chien , créé les conditions d'un amour inconditionnel et durable. Si encore l'on pouvait se limiter à des sujets immédiats et concrets-Où sont les clefs du garage? A quelle heure va passer l'électricien ?- ça pourrait encore aller, mais au-delà commence le règne de la désunion, du désamour et du divorce. "        

"Il y eu Kate enfin, la dernière de mes amours de jeunesse , la dernière et la plus grave, après elle on peut dire que ma jeunesse était terminée, je n'ai plus jamais connu ces états mentaux qu'on associe habituellement au mot de "jeunesse", cette insouciance charmante ( ou, au choix, cette dégoûtante irresponsabilité ), cette sensation d'un monde indéfini, ouvert, après elle le réel s'est refermé sur moi définitivement. "
       
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Message par ArenSor Dim 6 Jan - 20:10

Que les chosiennes et chosiens qui n'ont pas encore acheté ou commandé "Sérotonine" lèvent le doigt !
Quoi, je suis tout seul Shocked Very Happy
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Message par églantine Dim 6 Jan - 20:21

Arensor , j'en parlais tellement il ya quelques mois de la sortie en janvier de ce dernier roman mystère de Houellebecq qu'une âme aimante me l'a offert à sa sortie .
Et je n'avais plus du tout envie de le lire avec tout le buzz médiatique comme d'hab ! Réticente et maugréant (ingrate que je suis )je l'ai commencé par "devoir " et je l'ai l lu d'une traite et j'ai "beaucoup aimé" ( Même si l'expression ne convient pas pour parler de ce type de littérature à mon goût ).
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Message par animal Dim 6 Jan - 20:38

non non tu n'es pas tout seul...

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Message par Quasimodo Dim 6 Jan - 21:11

Et non. Et rien de ce qui a été dit d'élogieux au Masque ne m'a engagé à le faire.

églantine a écrit:et je l'ai l lu d'une traite et j'ai "beaucoup aimé"
Mais ça, c'est engageant Smile
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Message par Armor Dim 6 Jan - 21:43

Je garde des particules élémentaires un souvenir... exécrable. Mais je me dis que ce souvenir a près de 17 ans et que ça serait une idée de ne pas rester là-dessus.
J'ai récupéré des piles de bouquins récemment, avec dans le tas La carte et le territoire et Soumission. Je les ai mis de côté pour un jour de courage. Very Happy

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Message par Bédoulène Lun 7 Jan - 9:02

mince immangeable les particules élémentaires ? je croyais que c'était une porte d'entrée chez l'auteur

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Message par Tristram Lun 7 Jan - 10:48

J'avais été frappé dans le bon sens, ce fut d'ailleurs ma porte d'entrée, mais peut-être suis-je atypique ?

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Message par églantine Lun 7 Jan - 11:06

Extraits de Sérononine


"La rencontre de deux losers quadragénaires et anciens amants , ça aurait pu être une scène magnifique dans un film français , avec les acteurs appropriés, mettons pour situer Benoît Poelvoorde et Isabelle Huppert. Dans la vie réelle , en avais-je si envie que ça ?"

"Je ne crois pas faire une erreur en comparant le sommeil à l'amour; je ne crois pas me tromper en comparant l'amour à une sorte de "rêve à deux ", avec il est vrai des petits moments de rêve individuel , des petits jeux de conjonctions et de croisements , mais qui permet en tous cas de transformer notre existence terrestre en un moment supportable -qui est en même temps , à vrai dire le seul moyen".

"C'est curieux , cette volonté d'établir un bilan , de se persuader au moment ultime qu'on a vécu ; ou peut_être pas du tout vécu, c'est le contraire qui est affreux et étrange , il est affreux et étrange de penser à tous ces hommes , à toutes ces femmes qui n'ont rien à raconter , qui n'envisagent d'autre destin futur que de se disssoudre dans un vague continuum biologique et technique (parce que c'est technique même lorsque elles ne sont pas destinées à l'engrais , il faut évaluer les taux de potassium et d'azote ) , tous ceux en somme dont la vie s'est déroulée sans incident extérieur , et qui la quittent sans y penser , comme on quitte un séjour de vacances tout juste correct , sans d'ailleurs avoir l'idée d'une destination extérieure , avec juste cette vague intuition qu'il aurait été préférable de ne pas maître , enfin je parle là de la majeure partie des hommes et femmes ."  

 "La nuit , l'étable était un endroit apaisant , le troupeau des trois cents pages produisait une rumeur douce faite de soupirs , de meuglements légers , de mouvements dans la paille -car il y avait de la paille , il s'était refusé à la facilité du caillebotis- , il tenait à produire son fumier pour en recouvrir ses champs , son objectif était vraiment de travailler à l'ancienne . J'eus un moment d'abattement en me souvenant que sur le plan comptable il était foutu, puis quelque chose d'autre advint , les meuglements doux des vaches , l'odeur pas du tout déplaisante du fumier , tout cela me donna brièvement le sentiment peut-être d'avoir une place dans le monde , il ne faut pas exagérer , mais quand même d'appartenir à une sorte de continuum organique de regroupement organique ."

 " Dénué  de désirs come de raisons de vivre ( les deux termes étaient-ils d'ailleurs équivalents , c'était là un sujet difficile , sur lequel je n'avais pas d'opinion bien formée ) , je maintenais le désespoir à un niveau acceptable , on peut vivre en étant désespéré, et même ils se demandent s'ils peuvent se laisser aller à une bouffée d'espoir , enfin ils se posent la question , avant d'y répondre par la négative . Cependant ils persistent , et il s'agit là d'un spectacle touchant ".

"Je maintins longtemps un volatile au centre de ma mire , ce n'était pas une mouette ni un goeland , rien d'aussi célèbre , juste un petit volatile indifférencié,aux longues pattes , que j'avais déjà vu de nombreuses fois sur les plages , un prolétaire des plages en quelque sorte , en vérité un volatile stupide , à l'oeil fixe et méchant , une petite mécanique tueuse qui se déplaçait sur ses longues pattes , dont la démarche mécanique et prévisible ne s'interrogeait que lorsqu'il avait repéré une proie . En lui faisant sauter la tête je pouvais sauver de nombreuses gastéropodes , de nombreux céphalopodes aussi , enfin j'introduisais une petite variation dans la chaîne alimentaire , sans y avoir même d'intérêt , ce sinistre piaf était probablement immangeable .Je devais juste me souvenir que j'étais un homme , un seigneur et maître , l'univers avait été crée à ma convenance par un Dieu juste ."  

 " Les gens n'écoutent jamais les conseils qu'on leur donne et lorsqu'ils demandent des conseils c'est tout à fait spécifiquement afin de ne pas les suivre , afin de se faire confirmer , par une voix extérieure qu'ils se sont engagés dans uns spirale d'anéantissement et de mort , les conseils qu'on leur donne jouent pour eux exactement le rôle du choeur tragique , confirmant au héros u'il a pris le chemin de la destruction et du chaos."    
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Message par Chamaco Lun 7 Jan - 11:37

Je ne l'ai pas et à lire :
"Si encore l'on pouvait se limiter à des sujets immédiats et concrets-Où sont les clefs du garage? A quelle heure va passer l'électricien ?- ça pourrait encore aller, mais au-delà commence le règne de la désunion, du désamour et du divorce. "  
cela ne m'engage pas trop, d'experience je pensais que lorsque deux personnes n'ont plus rien à se dire c'est le commencement de la fin, Mr H prend le contre_pied des idées reçues donc..? ou est il égoïste..? Je n'ai rien lu de lui, je ne le juge pas, je m'interroge, c'est déjà beaucoup...
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Message par Tristram Mar 8 Jan - 15:08

Sérotonine

politique - Michel Houellebecq - Page 5 Szorot10

Présentation Flammarion a écrit:« Mes croyances sont limitées, mais elles sont violentes. Je crois à la possibilité du royaume restreint. Je crois à l’amour » écrivait récemment Michel Houellebecq.
Le narrateur de Sérotonine approuverait sans réserve. Son récit traverse une France qui piétine ses traditions, banalise ses villes, détruit ses campagnes au bord de la révolte. Il raconte sa vie d’ingénieur agronome, son amitié pour un aristocrate agriculteur (un inoubliable personnage de roman – son double inversé), l’échec des idéaux de leur jeunesse, l’espoir peut-être insensé de retrouver une femme perdue.
Ce roman sur les ravages d’un monde sans bonté, sans solidarité, aux mutations devenues incontrôlables, est aussi un roman sur le remords et le regret.

Humour souvent grinçant et pratiquement incessant, piques et saillies non-stop, en petites touches caractéristiques qui font peut-être tout le sel de l’écriture d’Houellebecq, style d’ailleurs très dense, longues phrases cependant compréhensibles qui maintiennent un cours rapide au récit autobiographique du narrateur :
« …] j’en étais là, homme occidental dans le milieu de son âge, à l’abri du besoin pour quelques années, sans proches ni amis, dénué de projets personnels comme d’intérêts véritables, profondément déçu par sa vie professionnelle antérieure, ayant connu sur le plan sentimental des expériences variées mais qui avaient eu pour point commun de s’interrompre, dénué au fond de raisons de vivre comme de raisons de mourir. »
Houellebecq multiplie à l’envi les provocations, tel que Franco visionnaire commercial, ou racismes et xénophobies divers :
« Francisco Franco, indépendamment d’autres aspects parfois discutables de son action politique, pouvait être considéré comme le véritable inventeur, au niveau mondial, du tourisme de charme, mais son œuvre ne s’arrêtait pas là, cet esprit universel devait plus tard jeter les bases d’un authentique tourisme de masse (qu’on songe à Benidorm ! qu’on songe à Torremolinos ! existait-il dans le monde, durant les années 1960, quoi que ce soit qui puisse y être comparé ?), Francisco Franco était en réalité un authentique géant du tourisme, et c’est à cette aune qu’il finirait par être réévalué, il commençait d’ailleurs à l’être … »

« …] l’Anglais est presque aussi raciste que le Japonais dont il constitue en quelque sorte une version allégée [… »

« …] la Hollande n’est pas un pays c’est tout au plus une entreprise [… »
Tous les questionnements d’actualité semblent apparaître dans ce roman (stress et dépression, mais aussi euthanasie, etc. ; le docteur Azote constitue d’ailleurs un excellent personnage, au cœur de la médicamentation généralisée).
« La plupart consultaient dans le 5e arrondissement de Paris, j’étais resté fidèle pour ma dernière vie, ma vie médicale, ma vraie vie, au quartier de mes études, de ma jeunesse, de ma vie rêvée. Il était logique que je cherche à me rapprocher de mes thérapeutes, mes principaux interlocuteurs désormais. »
Houellebecq est toujours en prise directe avec l’époque ‒ noms de célébrités, marques (commerciales) ‒, ici tout particulièrement avec la destruction du monde rural actuel (l’auteur est ingénieur agronome, comme deux des personnages du livre, le narrateur et son ami, qui a tenté de vivre d’une exploitation agricole en essayant de « faire les choses correctement » ; ambiance L’amour est dans le pré) ; la ruralité condamnée, désespérée n’a qu’une seule alternative, « la ville et son corollaire naturel, la solitude ». Une réserve cependant, concernant la révolte paysanne : les lance-roquettes et fusils d’assaut se font rares dans nos campagnes (et je ne parle même pas des carabines de compétition ou de sniper).
Les relations sexuelles et/ou amoureuses ont toujours autant de place dans son œuvre :
« Nous étions dans la réalité, de ce fait je suis rentré chez moi. J’étais atteint par une érection, ce qui n’était guère surprenant vu le déroulement de l’après-midi. Je la traitai par les moyens habituels. »

« On me reprochera peut-être de donner trop d’importance au sexe ; je ne le crois pas. »
Le credo de l’auteur est d’ailleurs le recours, pour supporter l’existence, au couple à peu près stable (et basé sur le sexe) :
« Je ne crois pas faire erreur en comparant le sommeil à l’amour ; je ne crois pas me tromper en comparant l’amour à une sorte de rêve à deux, avec il est vrai des petits moments de rêve individuel, des petits jeux de conjonctions et de croisements, mais qui permet en tout cas de transformer notre existence terrestre en un moment supportable – qui en est même, à vrai dire, le seul moyen. »

« Le monde extérieur était dur, impitoyable aux faibles, il ne tenait presque jamais ses promesses, et l’amour restait la seule chose en laquelle on puisse encore, peut-être, avoir foi. »
Mais la faute de l’échec revient finalement aux hommes :
« Les hommes en général ne savent pas vivre [par opposition aux femmes], ils n’ont aucune vraie familiarité avec la vie, ils ne s’y sentent jamais tout à fait à leur aise, aussi poursuivent-ils différents projets, plus ou moins ambitieux plus ou moins grandioses c’est selon, en général bien entendu ils échouent et parviennent à la conclusion qu’ils auraient mieux fait, tout simplement, de vivre, mais en général aussi il est trop tard. »
Sérotonine est une analyse sociale :
« …] l’argent n’avait jamais récompensé le travail, ça n’avait strictement rien à voir, aucune société humaine n’avait jamais été construite sur la rémunération du travail, et même la société communiste future n’était pas censée reposer sur ces bases, le principe de la répartition des richesses était réduit par Marx à cette formule parfaitement creuse : « À chacun selon ses besoins », source de chicaneries et d’ergotages sans fin si par malheur on avait tenté de la mettre en pratique, heureusement cela ne s’était jamais produit, dans les pays communistes pas davantage que dans les autres, l’argent allait à l’argent et accompagnait le pouvoir, tel était le dernier mot de l’organisation sociale. »
Mais aussi métaphysique :
« Toute chose existe, demande à exister, ainsi des situations s’assemblent, parfois porteuses de puissantes configurations émotives, et une destinée finit par s’accomplir. »
Incarnation de l’époque, notre héros demeure prostré sur son lit devant la télé, dans une petite chambre d’hôtel ou un studio exigu :
« Je n’avais plus guère d’espoir d’être heureux, mais j’ambitionnais encore d’échapper à la démence pure et simple. »

« Il y avait un vide-ordures, ce qui je crois m’a définitivement séduit ; en utilisant le vide-ordures d’une part, et de l’autre le nouveau service de livraison de l’alimentaire mis en place par Amazon, je pouvais atteindre à une autonomie presque parfaite. »

« Dénué de désirs comme de raisons de vivre (les deux termes étaient-ils d’ailleurs équivalents ? c’était là un sujet difficile, sur lequel je n’avais pas d’opinion bien formée), je maintenais le désespoir à un niveau acceptable, on peut vivre en étant désespéré, et même la plupart des gens vivent comme ça, de temps en temps quand même ils se demandent s’ils peuvent se laisser aller à une bouffée d’espoir, enfin ils se posent la question, avant d’y répondre par la négative. Cependant ils persistent, et il s’agit là d’un spectacle touchant. »
A ce propos, l’auteur/ narrateur éprouve une certaine empathie pour les gens de peu, impuissants à changer quoi que ce soit au monde (à moins que ce soit de l’autoapitoiement, et ne pouvoir trancher prouve peut-être son art d’écrivain).
Dans le compte-rendu de cet effondrement psychologique, on prend quand même le temps d’une petite pointe au fondateur de la psychanalyse :
« Le reste des programmes était plus indistinct, je m’enivrais lentement, zappant avec modération, avec l’impression dominante de passer d’une émission culinaire à l’autre, les émissions culinaires s’étaient multipliées dans des proportions considérables – alors que l’érotisme, dans le même temps, disparaissait de la plupart des chaînes. La France, et peut-être l’Occident tout entier, était sans doute en train de régresser au stade oral, pour le dire dans les termes du guignol autrichien. »
Houellebecq décrit de l’intérieur la particularité française en ce début de XXIe, le malaise existentiel, le désenchantement, l’absence de sens, et je me demande si on peut rapprocher œuvre comme auteur de ce constat dans Sciences humaines (https://www.scienceshumaines.com/l-optimisme-ca-s-apprend_fr_40314.html) :
« …] "la France accuse un sévère retard dans les compétences sociocomportementales", cette capacité des individus à surmonter les obstacles, à adopter une attitude positive orientée vers la résolution de problèmes ou encore à travailler en équipe. »
La foi religieuse d’Houellebecq m’a un peu surpris (sans parler de la fin christique) :
« Dieu est un scénariste médiocre, c’est la conviction que presque cinquante années d’existence m’ont amené à former, et plus généralement Dieu est un médiocre, tout dans sa création porte la marque de l’approximation et du ratage, quand ce n’est pas celle de la méchanceté pure et simple, bien sûr il y a des exceptions, il y a forcément des exceptions, la possibilité du bonheur devait subsister ne fût-ce qu’à titre d’appât, enfin je m’égare revenons à mon sujet qui est moi, ce n’est pas qu’il soit spécialement intéressant mais c’est mon sujet. »
Comme a dit Églantine (et je vote pour le rapatriement de ses avis sur ce fil), ce n’est pas un livre de ceux qu’on peut aimer (comme d’ailleurs tous ceux de Houellebecq), au sens de chérir (à moins d’être assez atteint soi-même), ni sans doute un chef-d’œuvre, mais il a toute sa place dans la littérature d’interpellation provocatrice et de témoignage ; en tout cas, il mérite d’être lu.
« Leur offre sportive cependant m’intéressait moins, je m’en rendis compte au bout de quelques semaines, je vieillissais c’était normal je devenais moins sportif. Il demeurait cependant, dans le bouquet SFR, bien des pépites, sur le plan culinaire en particulier, je devenais maintenant un bon vieux gros bonhomme, un philosophe épicurien pourquoi pas, qu’est-ce qu’Épicure avait d’autre en tête, au juste ? En même temps un quignon de pain rassis et un filet d’huile d’olive c’était un peu limité, il me fallait des médaillons de homard et des Saint-Jacques avec leurs petits légumes, j’étais un décadent moi, pas un pédé rural grec. »

« Je tiens beaucoup, à ce stade de l’argumentation, à remplacer « jeunes filles en fleurs » par « jeunes chattes humides » ; cela contribuera me semble-t-il à la clarté du débat, sans nuire à sa poésie (qu’y a-t-il de plus beau, de plus poétique, qu’une chatte qui commence à s’humidifier ? Je
demande qu’on y songe sérieusement, avant de me répondre. Une bite qui entame son ascension verticale ? Cela pourrait se soutenir. »

« Avons-nous cédé à des illusions de liberté individuelle, de vie ouverte, d’infini des possibles ? Cela se peut, ces idées étaient dans l’esprit du temps ; nous ne les avons pas formalisées, nous n’en avions pas le goût ; nous nous sommes contentés de nous y conformer, de nous laisser détruire par elles ; et puis, très longuement, d’en souffrir. »

mots-clés : #actualité


Dernière édition par Armor le Mar 8 Jan - 22:45, édité 3 fois (Raison : Réduction image + pose des hashtags)

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Message par Bédoulène Mar 8 Jan - 22:18

merci Tristram, je te fais confiance pour Il mérite d'être lu.

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Message par églantine Jeu 10 Jan - 17:16

Chamaco a écrit:Je ne l'ai pas et à lire :
"Si encore l'on pouvait se limiter à des sujets immédiats et concrets-Où sont les clefs du garage? A quelle heure va passer l'électricien ?- ça pourrait encore aller, mais au-delà commence le règne de la désunion, du désamour et du divorce. "  
cela ne m'engage pas trop, d'experience je pensais que lorsque deux personnes n'ont plus rien à se dire c'est le commencement de la fin, Mr H prend le contre_pied des idées reçues donc..? ou est il égoïste..? Je n'ai rien lu de lui, je ne le juge pas, je m'interroge, c'est déjà beaucoup...
Ah c'est un sujet sans réponse .
Probablement que tout existe .
Mais si je me suis arrêtée à cette phrase , c'est que ça me parle .
Je suis de moins en moins sûre que les mots , le langage verbal , cette forme de communication soit le meilleur pour enraciner les liens . Je suis de moins en moins sûre que l'échange , et le partage passent principalement par ce vecteur , c'est juste selon moi un support , et souvent traître et défectueux .
Et puis , est-il besoin d'avoir les mêmes idées ou même avoir envie de les confronter à celles de l'autre pour "aimer" ( enfin puisqu'il faut bien employer un mot ...) .
...........
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Message par topocl Jeu 10 Jan - 17:23

Ah, cela touche un truc qui revient souvent chez moi; l'irritation quand on parle de couples "qui n'ont rien à se dire", alors que pour des amis, par exemple, c’est plutôt le truc suprême, se comprendre sans avoir besoin de mot, le silence comme lien. Ce "rien à se dire", parfois ne cache-t'il pas l'entente suprême qui n'a pas besoin de mots? Que sait-on de la communication entre les êtres?
Enfin, pas toujours, je vous l'accorde.

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Message par Tristram Jeu 10 Jan - 17:48

Ce passage m'avait aussi interpellé ; j'ai tout de suite pensé au mythe de Babel, et au paradoxe du langage qui sert à masquer la pensée (ci-dessous une petit florilège récolté en ligne il y a un certain temps)
« La parole a été donnée au commun des mortels pour communiquer leurs pensées, mais aux sages pour la déguiser. »
Robert South (1634 – 1716)

« La parole a été donnée à l'homme pour déguiser sa pensée. »
Edward Young (1683 – 1765)

« La parole a été donnée à l'homme pour dissimuler la pensée. »
Charles Maurice, prince de Talleyrand-Périgord (1754 – 1838)

« Elle lui dit un autre jour qu’elle gagerait qu'il avait deviné tout seul ce grand principe : que la parole a été donnée à l’homme pour cacher sa pensée. »
Stendhal, « Armance » (1827)

« La parole a été donnée à l’homme pour cacher sa pensée. »
Stendhal, « Le Rouge et le Noir » (1831)

« La langue ment à la parole et la parole à la pensée. »
Adam Mickiewicz (1798 – 1855)

« La parole a été donnée à l'homme pour déguiser sa pensée. (Talleyrand)... Ou encore pour en masquer le vide. »
Alfred Capus (1857 – 1922)

« Ce que nous avons été capables d’observer dans cette voie privilégiée par laquelle une personne s’exprime en tant qu’Ego : c’est précisément cela – Verneinung – le déni.
Nous avons appris à être sûr que lorsque quelqu’un dit « ce n’est pas ainsi » c’est parce que c’est ainsi ; et quand il dit « ce n’est pas cela que je veux dire », il dit vraiment. Nous savons reconnaître l’hostilité sous-jacente dans les énoncés les plus altruistes ; le courant homosexuel latent ressenti dans la jalousie, la tension du désir caché dans l’horreur professée de l’inceste ; nous avons noté qu’une indifférence manifeste peut masquer un intense intérêt secret. Quoique dans le traitement, nous ne rencontrions pas d’emblée l’hostilité furieuse que de telles interprétations provoquent, nous sommes néanmoins convaincus que nos recherches justifient l’épigramme du philosophe disant que le langage fut donné à l’homme pour cacher ses pensées. Notre vue est que la fonction essentielle de l’Ego est très proche d’une méconnaissance systématique de la réalité à laquelle les analystes français se réfèrent en parlant de psychose. »
Lacan, « Some reflections on the ego » (1951)

_________________
« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
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Message par églantine Jeu 10 Jan - 17:52

Tristram a écrit:Sérotonine

»


La foi religieuse d’Houellebecq m’a un peu surpris (sans parler de la fin christique) :
« Dieu est un scénariste médiocre, c’est la conviction que presque cinquante années d’existence m’ont amené à former, et plus généralement Dieu est un médiocre, tout dans sa création porte la marque de l’approximation et du ratage, quand ce n’est pas celle de la méchanceté pure et simple, bien sûr il y a des exceptions, il y a forcément des exceptions, la possibilité du bonheur devait subsister ne fût-ce qu’à titre d’appât, enfin je m’égare revenons à mon sujet qui est moi, ce n’est pas qu’il soit spécialement intéressant mais c’est mon sujet. »

J'ai pensé comme toi Tristam en un premier temps .
Mais par la suite je me dis que c'est plutôt dans une suite logique des choses .
Houellebecq ne perdrait pas son temps à écrire des trucs aussi sordides , juste pour le plaisir gratuit de se vautrer dans la crasse du monde et nous la jeter en pleine figure . Il cherche .A sa façon .
Et que cherche-t-on tous autant que nous sommes ?
La réponse qui ne viendra jamais .
Seule la foi peut nous apaiser et combler "la part manquante" .
Je pense  qu'il y a une part de mystique dans cet auteur dès qu'on gratte le vernis cynique .Enfin , à  mon avis .
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