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Maurice Chappaz

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Message par animal Ven 2 Déc - 13:26

Maurice Chappaz (1916-2009)

nature - Maurice Chappaz  Chappa10

Né à Lausanne, aîné des dix enfants de l'avocat Henri Chappaz et neveu du Conseiller d'Etat Maurice Troillet, Maurice Chappaz passe son enfance à Martigny et à l'Abbaye du Châble, dans la maison familiale de sa mère. Il fait ses classes à l'abbaye de Saint-Maurice, où il obtient une maturité classique.

Dès 1937 il entreprend à Lausanne des études de droit, qu'il abandonne en 1940 pour s'inscrire à Genève à la faculté des lettres. La même année, Un homme qui vivait couché sur un banc lui vaut le Prix de la «Suisse Romande». Gustave Roud et Charles-Ferdinand Ramuz l'encouragent. La mobilisation de 1939-45 met un terme définitif à ses études. Durant cette période, Chappaz découvre sa vocation littéraire. En 1947 il épouse S. Corinna Bille, avec qui il aura trois enfants. Pour gagner de quoi vivre, il travaille dans les vignes de son oncle à Fully, puis sur le chantier de la Grande Dixence en qualité d'assistant géomètre entre 1955 e il 1957. De 1959 à 1971, il collabore au mensuel «Treize étoiles». En 1979, à la mort de S. Corinna Bille, il s'établit au Châble. Il se remarie en 1992, et vit entre Le Châble, Veyras et le Vallon de Réchy. Défenseur acharné du patrimoine naturel et de la vie traditionnelle du Valais, il a en outre beaucoup voyagé : Entre 1969 et 1990 il a visité la Laponie, le Népal, le Tibet, le Monte Athos, la Russie, Abidjan, la Chine, le Liban, la Norvège, le Québec et New York.

Il a reçu de nombreuses distinctions littéraires, parmi lesquelles le Prix Lambert en 1953, le Prix de l'Etat du Valais pour l'ensemble de son ouvre en 1985, le Grand Prix Schiller et la Bourse Goncourt de poésie en 1997. En 2001, l'ambassadeur de France à Berne l'a décoré Commandeur de l'Ordre des Arts et des Lettres, consacrant la dimension francophone et internationale de son ouvre. Les manuscrits et une riche documentation autour de Maurice Chappaz et S. Corinna Bille sont déposés aux Archives Littéraires Suisses à Berne.

Parmi les nombreuses publications à son sujet, (par Jean-Paul Paccolat, Christophe Carraud notamment) on peut signaler plus récemment: Philippe Jaccottet, Pour Maurice Chappaz (Montpellier, Fata Morgana, 2006) ; l'ouvrage collectif Per Maurice Chappaz (a cura di Flavio Catenazzi e Alessandra Moretti Rigamonti, Locarno, Dadò, 2006). Plusieurs documentaires de télévision lui ont été consacrés, en particulier ceux de Mürra Zabel ( Wallis : ein verlorenes Biotop , 1988; Poesie und Politik , 1998), Bertil Galland ( Plans-fixes , n° 1014, 1997), Jean-Noël Christiani e Jérôme Meizoz ( Les hommes-livres: Maurice Chappaz , Arte/INA, 2001). En 2006 la Radio suisse romande a publié un cd-audio, avec des interviews et des lectures tirées de ses archives ( Maurice Chappaz: un figure, une voix ).
source : culturactif.ch

Bibliographie

Les Grandes Journées de printemps, 1944
Grand Saint-Bernard, 80 photographies d'Oscar Darbellay, 1953
Testament du Haut-Rhône, 1953 : Page 1
Le Valais au gosier de grive, 1960 : Page 1
Les Géorgiques
Chant de la Grande Dixence, 1965 : Page 1
Un homme qui vivait couché sur un banc, 1966
Office des morts, 1966
Tendres Campagnes, 1966
Verdures de la nuit, 1966
Le Match Valais-Judée, [2e éd.], dessins d'Étienne Delessert, 1969
La Tentation de l'Orient : lettres autour du monde, 1970
La Haute route, suivi du Journal des 4 000, 1974
Lötschental secret : les photographies historiques d'Albert Nyfeler, ill. d'A. Nyfeler, Lausanne, 1975
Les Maquereaux des cimes blanches, 1976 : Page 1
Portrait des Valaisans : en légende et en vérité, [5e éd.], 1976
Adieu à Gustave Roud, avec Philippe Jaccottet et Jacques Chessex, 1977
Pages choisies : avec un inédit, 1977
Poésie, préface de Marcel Raymond, 1980
À rire et à mourir : récits, paraboles et chansons du lointain pays, 1983
Les Maquereaux des cimes blanches, précédé de La Haine du passé, 1984
Journal des 4000, ill. de Claire Colmet Daâge, 1985
Le Livre de C, [nouv. éd. revue], 1987
Le Garçon qui croyait au paradis, récit, 1989
La Veillée des Vikings, récits, 1990
Les Idylles
Journal de l'année 1984 : écriture et errance, 1996
La Tentation de l'Orient : lettres autour du monde, M. Chappaz et Jean-Marc Lovay, 1997
Bienheureux les lacs, ill. de Gérard Palézieux, 1998
Partir à vingt ans, préf. de Jean Starobinski, 1999
Évangile selon Judas, récit, 2001
Le Voyage en Savoie : du renard à l'eubage, photos et réal. graphique Matthieu Gétaz, 2001
À-Dieu-vat !, entretiens avec Jérôme Meizoz, Sierre, 2003
La Pipe qui prie & fume, avec 26 reprod. de monotypes de Pierre-Yves Gabioud, 2008
Journal Intime d'un Pays, Maurice Chappaz, 2011
Orphées noirs, Leo Frobenius et Maurice Chappaz, 2006
Hors de l'Eglise, pas de salut, 2007

Correspondance
Le Gagne-pain du songe : correspondance 1928-1961, M. Chappaz et Maurice Troillet, 1991
Se reconnaître poète ? : correspondance 1935-1953, M. Chappaz et Gilbert Rossa, 2007
Autour de liberté à l'aube. Correspondance 1967-1972, Alexandre Voisard et Maurice Chappaz, 2010
Jours fastes. Correspondance 1942-1979.



màj le 12/11/2017



Une très grosse impression récente pour un auteur à côté duquel on peut passer. Une écriture puissante, riche, de la détermination. Ca me fait plaisir d'ouvrir ce fil comme premier fil d'auteur ici.

Je vais aller à la pêche aux anciens avis...

mots-clés : #nature #poésie #politique


Dernière édition par animal le Dim 13 Aoû - 16:27, édité 2 fois
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Message par animal Ven 2 Déc - 13:29


Chant de la Grande Dixence suivi de Le Valais au gosier de grive

Les deux textes sont en lien avec la construction de la Grande Dixence (version courte : Les eaux de 35 glaciers sont captées et remplissent les ouvrages d'accumulation. Le bassin hydrologique mesure 375 km2.). Chappaz, poète, à néanmoins travailler deux ans sur ces chantiers et les nombreux kilomètres de mines/tunnels qui sillonnent l'intérieur de la montagne pour détourner les nombreux cours d'eaux.

Le Valais au gosier de grive a initialement été publié en premier mais a en fait été rédigé après le Chant de la Grande Dixence. L'édition Babel/Actes Sud les propose donc dans l'ordre d'écriture et le choix est assez pertinent pour le lecteur égaré.

La Grande Dixence j'avais entendu parlé et entrevu des images des tunnels surtout et je savais que c'était immense. Chappaz j'avais entendu parlé, je savais qu'il était poète et écrivain suisse connu... mais je pensais en trouver plus facilement. Toujours est-il que ces deux textes seront ma porte d'entrée.

Et difficile d'accès. Chant de la Grande Dixence, réflexion en prose aux multiples références bibliques et culturelles locales à de quoi déstabiliser. Ramuz j'arrive un peu à suivre, un certain contexte valaisan de la terre rude, de la pauvreté, de la religion et des immigrations aussi, le reste plus difficile. Et la prose justement ne facilite pas la tâche. Travaillée mais avec des évocations qui restent muettes, presque trop imagée. Lecture difficile. Les nombreux thèmes resserrés vers un sens peuvent aussi entrainer au vertige humain, culturel, politique, artistique intimement lié à un engagement profond. Chappaz néanmoins déroule son hymne méditatif aux hommes, les travailleurs fous et parfois sacrifiés de cette entreprise plus grande que l'homme, plus grande que la montagne, plus grande que... et hymne au pays, au sol, à la nature, aux femmes. C'est emmêlé. Brut. La confrontation d'une réflexion ouvrière avec une dimension mystique qu'on doit pouvoir dire résolument catholique.

Par là le vertige d'une deuxième naissance moderne. L'homme qui a tout dépassé, et reste perdu et sacrifié (accidents et maladies respiratoires dues au travail dans les galeries), renait cependant, une sorte d'impossible seconde naissance d'après la mort d'un pays en tant que tel (un Valais agricole avec ses richesses particulières et son milieu irremplaçable).

On sent mais on ne sait pas. Et on redoute un peu le passage au Valais au gosier de grive. Que peut-il se passer avec ce surplus d'images, cette abondance, ne risque-t-on pas le trop, l'excès. Et en arrière plan cette question de la place de Chappaz comme grand homme des lettres suisses. Lui qui raconte sa redécouverte, que l'on découvre par cette redécouverte...

Dans  Valais au gosier de grive encore des images et références nombreuses qui m'échappent... mais quelle force, et quelle précision. Avec une direction plus précise, cette méditation musculeuse semble s'épurer, les images s'imposent. Une force célébrée. Pas celle de la montagne, pas celle du travailleur, pas celle du paysan, mais la force d'un tout et d'une croyance, et avec cette notion de perte sans retour possible à l'ancien. Très particulier avec une sans doute rare question de la foi nouée ainsi avec la modernité, ou l'après de cette modernité, l'après de son accomplissement. Troublant. Sublime aussi sans doute. Presque tout s'articule dans ce chant de l'infime simplicité et de l'infime amour à la dimension "biblique" (quelque chose d'un rapport au temps repris à sa source "maintenant" malgré sa linéarité connue).

Il y a des défauts aussi qui sont racontés, pas tous avec tendresse d'ailleurs, mais les plus importants, les plus simples ne sont pas rejetés. Et ce sentiment de renaissance possible. Énigmatique, puissant, enivrant... Marquant, singulier. Et je ne m'y attendais pas. Pas de cette façon et pas sous cette forme que je ne soupçonnais pas pouvoir être aussi forte.

Difficile, en néophyte égaré, d'en parler. Je vous encourage chaudement à tenter l'expérience. Je suis impressionné et tellement "incapable". Si vous lisez ces textes il ne faudra sans doute pas avoir d'attentes et vous aurez de toute façon autre chose.
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Message par animal Ven 2 Déc - 13:30

Un entretien "global" à lire : culturactif.ch

Oui, et c'est l'adieu à ma propre poésie, telle qu'elle était. Cela va même plus loin qu'un adieu à la civilisation paysanne. C'est l'adieu à ma propre poésie. J'ai cru en somme à une gratuité possible à l'intérieur d'un certain monde harmonieux, et ma poésie s'est branchée sur une gratuité qui devenait toujours plus difficile à vivre personnellement. C'est un adieu, et c'est pour ça qu'à la fin du livre, il y a ce qui pouvait être amer…j'avais conscience d'une réussite poétique, d'avoir créé une teinte, et en même temps d'un échec social, du point de vue très direct, disons de situation. J'avais pu, avec l'enfance que j'avais eue, l'amour que j'avais reçu, avec Corinna, des enfants qui étaient nés, j'avais pu en somme avoir le paradis au bout des doigts et puis ça s'était volatilisé et il fallait rentrer à l'usine. Pour presque faire son devoir d'homme, il fallait devenir un esclave industriel. J'avais un ami qui me parlait toujours de la Dixence, André Guex, journaliste. Je me suis dit après "Allons, essayons, on verra bien". Et alors évidemment j'ai eu une chance immense parce que j'ai admiré à tous points de vue ce que j'ai vu, et puis mes patrons sont devenus tout naturellement mes meilleurs amis et là passionnés par l'écriture, sans écrire. C'était des géomètres italiens. C'est comme si on disait "Vous allez être en prison" et puis on vous conduit au contraire dans un magnifique parc.
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Message par animal Ven 2 Déc - 13:30

extrait du Chant de la Grande Dixence :

   Nous désirons tous un peu de force. En la désirant, on broie. Ma pire vision peut-être est, en marge du travail, celle des vieux des cantines aux têtes de suicidés, lugubres, édentés, éreintés par la combativité, les invalides devant leurs tranches de gâteaux et leurs tasses de café car ils ne peuvent plus boire de vin. Or le vin c'est la marihuana, l'opium, la coca la plus saine.
   Personne n'est méprisable. Je voudrais aller au fond des choses, gratter le mur visible, les barrages sous toutes leurs formes. S'il s'agit d'une épreuve, la sagesse et la bonté sortent aussi de nous, les tâcherons. Chacun succombe, chacun résiste mystérieusement, différemment à la Grande Dixence, ce poème de la force. Un corps est en train d'enfanter, une foule se rassemble derrière les quelques pionniers aux lampes. Je la sens derrière leurs épaules quand ils remontent vers les trous de montagnes s'encourageant, se moquant et flairant ce qui leur manque. Les forceurs de rivières ! Notre société leur réserve plus d'abîmes que les chantiers ou les glaciers.
   N'ayons pas peur de la juger. Elle tente tout le monde avec ses lumières, ses ambitions, ses fausses promesses. Elle entraîne chacun dans une extraordinaire course vers le progrès avec l'idée que les pierres se changeront en pains et que les hommes seront des patrons, seront des rois de quelque chose. Nous rétablissons, nous affermissons une prédestination sociale, il s'agit de s'y plier, d'être un rouage, d'être obéissant jusqu'à la mort. Quelle passion ! J'ai découvert l'amitié entre tous, de chacun pour chacun. Mais pour cela il faut aussi être contre les œuvres. Croyez-vous que la vie intérieure du plus faible manœuvre compte plus que les énormes barrages ?
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Message par animal Ven 2 Déc - 13:31

et un court extrait du Valais au gosier de grive, ce n'est qu'une partie d'un des poèmes/chants ? :

Beauté des bassins de Babel :
algèbre pure,
digestion des étoiles comme un kilo de cerises
ou une cuillerée de beurre dans nos viscères.

Cruauté de Babel :
au chaos vont tous les objets
qui n'ont pas en eux du verre ou de l'acier ;
et à chacun, cette énigme
de l'utile et du forçat.


Dernière édition par animal le Sam 11 Nov - 22:40, édité 1 fois
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Message par animal Ven 2 Déc - 13:32

je ne sais pas trop si ce qui me passe par la tête tient la route mais je partage. le rapprochement entre le Chant de la Grande Dixence de Chappaz, le duo en fait avec le Valais au gosier de grive, avec le prédécesseur, le Chant de notre Rhône de Ramuz, figure incontournable du paysage littéraire local (et plus si affinités). Quarante années entre les textes.

Ramuz suit le fleuve depuis sa source pour revendiquer une culture et s'attache au travail de la vigne.

La Grande Dixence capte avant de les lui restituer des eaux destinées au Rhône et le travail est autre, et les travailleurs ne sont pas tant les locaux que les voisins invités et souvent de plus loin que la Savoie, travailleurs immigrés pour travail difficile, ou locaux sans le sous.

La partie de Chappaz est plus sombre, d'une autre époque aussi, d'un avènement de la modernité qui implique peut-être de poser à nouveau la question. Dans le fond la réponse est peut-être identique : le travail, l'humanité, une part de rêve et d'accomplissement malgré la perte de (pays d'origine, une forme de vie simple aux contraintes différentes, plus simples justement ?) comme fondation avec le passage du travail de la terre, de façon différente avec le chantier mais quand même, et puis une lumière au bout du tunnel. 

Un peu de la même façon il s'agit aussi d'une histoire, d'une voix qui se démarque du mythe plus officiel qui voisine (la vigne d'un côté doit être un mythe, la réussite technique et une certaine imperméabilité de la neutralité de l'autre). On est pourtant loin du mime littéraire, comme en empruntant la pelle du voisin un autre trou peut être creuser.

Je ne sais pas si d'avoir lu Ramuz en premier aurait orienter mon approche, peut-être que le barrage de La Grande Dixence, difficile d'accès pour moi, m'aurait lavé la tête...

Les deux sont puissants, les deux sont intéressants et les différences ne font que renforcer l'intérêt.
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Message par animal Ven 2 Déc - 13:32

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Testament du Haut-Rhône suivi de Les Maquereaux des cimes blanches

Et quelques citations de la presse datant de la sortie des Maquereaux...

Cette fois aussi j'ai apprécié l'association de deux textes de formes différentes. Le Testament est plus développé et est en prose poétique alors que Les Maquereaux est une suite de poèmes en vers libres.

Mais il n'y a pas que la forme qui change. Le Testament lourd en référence et allusions tant bibliques que valaisannes se révèle comme un puissante nostalgie prophétique. Une tonalité biographique assez sombre qui évite les repères temporels pour mieux faire appel à la nature, aux végétaux, aux oiseaux, à la terre. Il s'agit aussi de retours insistants, d'enfance, de gestes atemporels oubliés et d'une présence érémitique qui vient pourtant recouper le cours du monde, de la ville, de la société. Avec une préférence pour les marges tout de même. Extrêmement écrit, précis, immédiat, riche en symboles qui se passent d'explications, c'est un texte fort. Stupéfiant même. Son ton particulier pourrait susciter des réticences mais pour ma part j'ai très rapidement l'impression, qui s'est répétée, que ça faisait partie de ce que j'ai lu de mieux écrit en français. Enfin, de mieux ce n'est pas la manière de le dire. L'évidence que ça ne peut pas être autrement ? Et pourtant c'est sacrément dense.

Et donc ça fonctionne, c'est beaucoup de sensations et d'interrogations qui vous reviennent en pleine poire, avec ce plaisir d'une écriture sublime.

En pleine poire qui s'applique bien aussi à ces "maquereaux des cimes blanches". Rien d'abstrait là-dedans, la poésie est pamphlet. Rage, désespoir, appel, et visions de fin et de renaissance pour dénoncer la construction de la montagne, l'industrialisation, la perte de croyance et de nature. A souligner tout de suite que ce conservatisme, si on veut, chez Chappaz est très ouvert aux influences extérieures, aux gens. Mais pas aux magouilles, à la spéculation et à des valeurs dont il hurle le mensonge.

Une approche de la poésie qui n'oublie pas les petites fleurs mais ne sent pas le renfermé ou la douceur du salon. L'oiseau de malheur (compliment) ne manque pourtant pas d'amour. Avoir publié les deux dans le même livre permet de mieux sentir la motivation, l'enracinement de la conviction de Chappaz mais aussi la pluralité de son travail. Et là encore ça pose son pesant de questions. Effet dévastateur qui lui a valu injures et menaces, pas que mais la violence des extraits de presse laisse songeur (une pensée aussi pour Chessex).

Dévastateur.


XXVII

Capitale du désert

Les oiseaux de proie se partagent
le champ de bataille en hommes d'affaires
ayant traversé le désert
où discutent les nouveaux brins d'herbes.
Si j'étais là, j'écouterais le silence.
Et il y a des millions d’œufs
ainsi que de petits ciels
dans les cavernes fraîches.
Pourquoi suis-je heureux ?
Je suis aussi une bête,
je suis aussi un paradis.
Les files d'hommes entrant à l'usine
comme au lasso
tentaient de prendre les derniers jeunes gens - eux les hirsutes.
Et les ouvriers s'appuyaient aux guichets
tels des faucons apprivoisés
avec un capuchon qui tombait sur l’œil.
C'est alors qu'il y eut la grande crise
que je souhaitais :
ces catastrophes, ces famines,
abondances et errances.
Promoteur décidé du ciel bleu,
un des rapaces très chevalier du moyen âge
sur une borne fontaine
dit à un chat
qui flânait dans la ville empoisonnée
par le travail :
"Ils ont tous crevé sans religion."
Les montagnes à midi
sont comme de la boue bleue, de l'air pétri.
Moi j'entends les âmes qui tintent.
Évangile du désert
où pérorent les coquelicots.
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Message par Mordicus Ven 2 Déc - 14:45


(Faudra pas oublier sa femme aussi. Célèbre. Corinna Bille. Jamais rien lu de l'un ou l'autre en fait. Je sais, je sais... Et Ramuz aussi. Je sais !)
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Message par animal Ven 2 Déc - 14:50

C'est dans les projets Corinna Bille. Et Alice Rivaz, l'as-tu lue ?

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Message par Mordicus Ven 2 Déc - 14:56


Oui bon ça va hein... Tu vas pas me sortir tous les Grands Noms que je devrais avoir lus (alors que je suis qu'une sale Pastèque qui aime les Zaméwicains)
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Message par animal Ven 2 Déc - 15:15

Si t'en as d'autres des noms...

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Message par Nadine Ven 2 Déc - 22:00

Animal , tu mets Chappaz pour me dire que si on lis Ramuz bah ça suffit pas ? Twisted Evil
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Message par animal Sam 3 Déc - 0:54

le tout c'est de prendre son temps. ce genre de lecture peut "provoquer son bon moment" je pense mais la petite impulsion qui suggère que c'est le moment ça ne se remplace pas non ?

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Message par topocl Sam 3 Déc - 8:56

Bon, animal, je me dis que si tu as commencé avec Chappaz, c'est peut-être qu'il faudrait que j'envisage de m'y mettre. Tu me conseillerais lequel pour démarrer?

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Message par animal Sam 3 Déc - 9:22

je vais avoir des problèmes moi. What a Face

l'un ou l'autre. peut-être la Grande Dixence ?

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Message par topocl Sam 3 Déc - 9:24

Ben ça pourrait se faire en 2017... peut-être!

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Message par Hanta Dim 16 Avr - 11:38

Chant de la Grande Dixence :

nature - Maurice Chappaz  Frezf10

Un très court récit, autobiographique semble t-il, et très complexe.
La lecture n'est pas aisée car le style poétique en prose est jalonné par un vocabulaire peu actuel et il faut donc se concentrer pour se rappeler le sens de certains mots, découvrir le sens d'autres termes propres à la culture montagnarde ou suisse. De plus, il existe énormément de référence culturelles et spirituelles directement inspirées du christianisme ce qui m'a donné le loisir de faire quelques recherches, n'étant pas très imprégné de religion.

il n'empêche que le style est superbe, subtile mais sans sophistication inutile, avec un art de la ponctuation maîtrisé. C'est un récit qui selon moi se lit à haute voix pour suivre le rythme des phrases convenablement.

Mais ce n'est pas uniquement un très joli emballage, c'est également une description d'une nature vivante, une description que j'ai trouvé plus romantique que naturaliste, un rapport amoureux (érotique parfois) aux hommes, aux amis, aux camarades d'infortune. C'est un rapport au souvenir aussi, à l'inoubliable des relations mais aussi du passé de cette région.

C'est complexe mais cela vaut le coup, très clairement.



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Message par animal Dim 16 Avr - 11:40

(youpi).

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Message par Hanta Dim 16 Avr - 12:54

Oui vraiment félicitations car on a des univers littéraires différents et tu ne te trompes jamais.
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Message par animal Dim 16 Avr - 18:01

Merci ! Mais Chappaz si probablement peu lu (de ce côté de la montagne en tout cas ?) c'est du solide. (et il me manque aussi un gros paquet de références... ).

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