Réjean Ducharme
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Re: Réjean Ducharme
Dévadé
Le scénario, c’est Intouchables : un jeune défavorisé et sa riche employeuse en fauteuil-roulant. Le narrateur, c’est Bottom le rada : le foireux qui rate tout sans coup férir, un minable qui ne s’ignore pas, « sans dessein, sans allure et sans cœur », uniquement doué pour l’ordure, exclus d’un monde injuste et livré au mal, à la recherche d’une mère satisfaisante parmi les femmes de son entourage, et qui met son orgueil où il peut. En prime, il a « trop de problèmes qui s’arrangent tout de suite avec trop de bière », sa nécessaire « grappe » quotidienne de canettes :
Et, en plus, c’est un vrai recueil de citations !
Le scénario, c’est Intouchables : un jeune défavorisé et sa riche employeuse en fauteuil-roulant. Le narrateur, c’est Bottom le rada : le foireux qui rate tout sans coup férir, un minable qui ne s’ignore pas, « sans dessein, sans allure et sans cœur », uniquement doué pour l’ordure, exclus d’un monde injuste et livré au mal, à la recherche d’une mère satisfaisante parmi les femmes de son entourage, et qui met son orgueil où il peut. En prime, il a « trop de problèmes qui s’arrangent tout de suite avec trop de bière », sa nécessaire « grappe » quotidienne de canettes :
Ironie, souvent grinçante, cependant l’humanité transparaît toujours. Difficile de démêler la part de l’idiome québécois et celle de l’invention verbale, mais c’est véritablement inventif, quoi qu’il en soit (j’ai pensé à Queneau ‒ et même Céline ?!). Les français d’ailleurs ont généralement le bel avantage de nous faire apprécier notre langue trop effacée par l’usage, et là c’est plus vrai que jamais. Ça fuse sans cesse, monologue ou dialogues où la gouaille et le sordide le disputent aux trouvailles de tournure et adages populaires. Avec un penchant assumé pour les assonances :« J’ai couru aux Quatre-Coins, fêter la Saint-Six-Bières. Même si ça couronnait une journée à peine entamée, c’était le temps ou jamais. Car c’est toujours le temps ou jamais ; il se produit seconde après seconde, le miracle qui nous fait échapper à la continuité de notre absence. »
Merci à Bédoulène de m’avoir fait découvrir cet auteur original, qui mérite d’être lu ; je compte d'ailleurs y revenir.« …] je vois à l’air fendant qu’il a qu’il a réglé du même coup le cas du cadeau à Juba… »
« Il n’a pas suffi qu’elle lui fasse la popote, mais encore fallu qu’elle se tape son papotage [… »
Et, en plus, c’est un vrai recueil de citations !
« "Tu ressembles à l’Étranger de Camus en livre de poche."
Elle parle du crotté dessiné sur la couverture, les yeux baissés, les mains enfoncées dans les poches, à attendre que les choses le dépassent. »
« Je tiens à mon moindre statut de carencé hargneux, de nécessiteux de mauvaise volonté ; je le paie assez cher. »
« ‒ Si tu es bien ici, pourquoi tu t’en vas toujours, pourquoi tu restes pas ici ?
‒ Qu’est-ce qu’on ferait à part pas faire l’amour ?... Pas faire l’amour une heure ou deux de temps en temps, comme on fait là, je dis pas. Mais pas faire l’amour toute la journée, jour après jour, je tiendrais pas le coup plus de deux jours ! »
« Si ça finissait toujours aussi mal, toujours mal égal, on finirait par s’habituer, mais ça finit de plus en plus mal, jusqu’à ce que ça finisse une fois pour toutes, dans le mal total. C’est du moins le baratin que je me fais pour me conquérir pendant qua dans le pare-brise épuisé de s’essuyer le jour se lève comme s’il s’était couché sans se laver. Baissant encore un peu la visière sur mes yeux, je vois le fameux rapport entre l’amour et la mort. On ne saisit pas Juba en la touchant ; on la repousse, en profondeur. Elle vous force à creuser, mal, les mains de plus en plus sales, jusqu’à ce que vous vous saisissiez vous-même, par les poignées de votre cercueil. »
« Je sais pas ce qu’elles me trouvent toutes, elles finissent toutes par me le laisser. »
« Tu sais chéri, le jeu des remords mène à un point de non-retour. On finit par faire ce qu’on va regretter pour le regretter, pour alimenter la douleur, le démon en nous qui nous abomine. Ça s’appelle l’enfer. »
« J'ai mal tourné. À dix-huit ans, je rêvais d'être un poids mort, un fardeau, petit peut-être mais qui y tient, de tous ses dérisoires moyens, sans jamais les perdre, comme il y en a tant, amers et timorés, rongés jusqu'au trognon. Je n'avais pas le choix ; j'avais été compté, pesé et jugé bon à rien, aucun jeu de société. Je payais cher ma place qui n'en était pas une, assez chère pour la glorifier, l'occuper comme un trône, ne plus rien devoir à personne, surtout pas des excuses… »
« Il ne nous arrive rien qui ne nous ressemble pas, comme dirait la patronne. »
« Je sers trop à rien, ça me rend masochiste. Te gêne pas pour me maltraiter, ça me stabilise. »
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« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
Tristram- Messages : 15868
Date d'inscription : 09/12/2016
Age : 68
Localisation : Guyane
Re: Réjean Ducharme
merci Tristram, je suis contente que tu aies aimé ! continue la découverte.
Animal cède à la tentation !
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“Lire et aimer le roman d'un salaud n'est pas lui donner une quelconque absolution, partager ses convictions ou devenir son complice, c'est reconnaître son talent, pas sa moralité ou son idéal.”
― Le club des incorrigibles optimistes de Jean-Michel Guenassia
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"Il n'y a pas de mauvais livres. Ce qui est mauvais c'est de les craindre." L'homme de Kiev Malamud
Bédoulène- Messages : 21461
Date d'inscription : 02/12/2016
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