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Marcel Schwob

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Message par bix_229 Jeu 5 Jan - 18:35

Marcel Schwob (1867-1905)

Marcel Schwob Marcel10

Marcel Schwob, né à Chaville (Hauts-de-Seine) le 23 août 1867 et mort à Paris le 26 février 1905, est un écrivain français — conteur, poète, traducteur, érudit — proche des symbolistes.

Marcel Schwob naît dans une famille de lettrés ; son père était un ami de Théodore de Banville et de Théophile Gautier tandis que sa mère appartenait à une famille d'intellectuels juifs originaires d'Alsace.
Au moment de la naissance de Marcel, la famille Schwob revient d'Égypte où George était chef de cabinet du ministre des Affaires étrangères. Au début de la IIIe République, son père dirige Le Républicain d'Indre-et-Loire. En 1876, il prend à Nantes la direction du quotidien républicain Le Phare de la Loire.

Marcel Schwob obtient plusieurs prix d'excellence durant sa scolarité (version grecque, composition française et anglaise). En 1881, il est envoyé à Paris afin de poursuivre ses études au lycée Louis-le-Grand, où il se liera d'amitié avec Léon Daudet et Paul Claudel. Il développe un don pour les langues et devient rapidement polyglotte. Il découvre Robert Louis Stevenson, qui sera un de ses modèles.

Il échoue au concours d'entrée de l'École normale supérieure, mais est reçu premier à la licence ès lettres en 1888. Il échoue de nouveau à l'agrégation en 1889. Il choisit alors une carrière d'homme de lettres et de journaliste, collaborant au Phare de la Loire, à l’Événement, à l’Écho de Paris. Il dirige le supplément littéraire de ce journal, où il introduit Alfred Jarry en 1894 (Ubu roi, en 1896, lui est dédicacé). Il fréquente Paul Valéry, André Gide, Jules Renard et Colette mais aussi Oscar Wilde.

Il se passionne également pour la linguistique et notamment l'argot, pour le langage des coquillards utilisé par Villon dans ses ballades en jargon : contrairement à l'opinion répandue à l'époque (et qui avait été celle qu'avait développée Victor Hugo dans les Misérables), Schwob considère que l'argot n'est pas une langue qui se crée spontanément, mais qu'il est en réalité un langage artificiel et codé.

Il commence à publier des séries de contes, à la limite du poème en prose, où il crée des procédés littéraires qui seront repris par d'autres ultérieurement. Ainsi Le Livre de Monelle, en 1894, annonce Les Nourritures terrestres d'André Gide (Marcel Schwob lui en voudra pour cela) ; La Croisade des enfants, l'année suivante, annonce William Faulkner dans As I Lay Dying ; Borges aussi lui avouera une grande dette. Plusieurs de ses recueils sont rapidement traduits en anglais, comme Mimes et La Croisade des enfants.

En 1900, il épouse l'actrice Marguerite Moreno, l'amie de Colette. Leur franche camaraderie était un mélange d'humour et de rosserie. La correspondance des deux amants, puis époux, témoigne d'une véritable passion.

La santé de Marcel Schwob est des plus mauvaises. Il termine sa vie en reclus, laissant une œuvre inachevée.
Il meurt d'une grippe le 26 février 1905, à l'âge de trente-sept ans.

Bibliographie :

Étude sur l’argot français (1889)
Cœur double (1891)7
Le Roi au masque d’or (1892)8
Mimes (1893)
Le Livre de Monelle (1894)9
Annabella et Giovanni (1895)
La Croisade des enfants (1896)10
Spicilège (1896)11
Vies imaginaires (1896)12
La Légende de Serlon de Wilton (1899)
La Lampe de Psyché (1903)
Mœurs des diurnales (sous le pseudonyme de Loyson-Bridet) (1903)
Le Parnasse satyrique du XVe siècle (1905)
Il Libro della mia Memoria (inachevé, 1905)

Publications posthumes
François Villon (1912)
Chroniques (1981)
Vie de Morphiel (1985)
Correspondance inédite (1985)
Correspondance Schwob-Stevenson (1992)
Dialogues d'Utopie (2001)
Vers Samoa (2002)
Maua (2009)
Jane Shore (2015), en collaboration avec Eugène Morand

Traductions
William Shakespeare, La Tragique histoire d'Hamlet, traduit de l'anglais par Marcel Schwob et Eugène Morand [1900]
Wilhelm Richter, Les Jeux des Grecs et des Romains (1891)
Daniel Defoe, Heurs et Malheurs de la fameuse Moll Flanders (1895)15
Francis Marion Crawford, Francesca da Rimini (pièce de 1902)
Thomas de Quincey, Les Derniers jours d'Emmanuel Kant, 1986.

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Message par bix_229 Jeu 5 Jan - 18:42

Ceux qui connaissent Marcel Schwob auraient du mal à comprendre que cet auteur hors norme ne figure pas ici. Et les autres le découvriront avec plaisir.

Cet auteur est l'une des plus étonnantes figures de l'époque, la fin du XIXe siècle. Sa vie fut  marquée par la vie militaire et sa dureté. Par le suicide d' un ami aussi. La mort de "sa chère petite Vise"  aussi, qui lui fera écrire Le Livre de Monelle.

L'écriture fut la grande aventure de sa vie. Avec comme écrivains phares Villon et Stevenson. Sans oublier Shakesaspeare, Baudelaire, De Quincey, Shoppenhauer et quelques autres.

Dans ses Vie imaginaires, on trouvera Empedocle,  dieu supposé, Erostrate, incendiaire, Lucrèce, poète, Petrone romancier, Paolo Uccello, peintre, Katherine la dentellière, fille amoureuse, Poacahontas, princesse, William Phips, chercheur de trésor, Le Capitaine Kyd, pirate, MM. Burke et Hare, assassins...

Son style est inimitable : à la fois précieux, recherché, mais souple, harmonieux, inspiré.
L'érudition formidable qu'il avait se déploya au service d'une imagination fantastique, liée à l'enfance.
La maladie, -la tuberculose- le tua en 1904, à 35 ans. Même en ses derniers jours, rongé de fièvre et de douleurs, il écrivit jusqu' au bout.

McOrlan, Colette, Léautaud, Claudel, Francis Jammes, Gourmont, Toulet lui rendirent hommage.
Et si l'oubli le frappa, il fut réédité dans les années 80 dans la collection 10/18.


Article paru dans le N° 042
   Janvier-Février 2003
   par Benoît Broyart
   *
Figure du symbolisme, cet esthète érudit était un conteur formidable et original, attiré par le bizarre et le merveilleux. Ses chef-d'oeuvres enfin réunis, modèles de la forme courte.
   Marcel Schwob (1867-1905) fut un esprit cultivé et curieux, un homme inscrit dans son temps, inclassable, pris entre deux siècles, avec cette sensibilité propre à son époque qui allie subtilité et goût pour le fantastique, délicatesse et attirance pour la bizarrerie. Auteur, journaliste, préfacier de Stevenson et de Rachilde, traducteur de Shakespeare et de Defoe, Schwob fut un acteur majeur de la vie littéraire de l'entre-deux siècles. Ami de Claudel et de Léon Daudet, il fréquenta Renard, Gide ou Wilde. Cet homme de grande culture, fasciné par l'oeuvre de François Villon, est mort à 37 ans, des suites d'une longue et terrible maladie, calmée à la morphine. Difficile de considérer que ce grand blessé aura trouvé le temps de polir autant de textes. Le volume ici publié en contient en effet plus de 150.
   L'ouvrage rassemble l'essentiel de l'oeuvre. Sylvain Goudemare, auteur d'une biographie remarquée Marcel Schwob ou les Vies imaginaires (Le Cherche Midi, 2000) en a établi l'édition. Les textes sont livrés dans leur ordre de parution et le volume comprend deux sections. La première, consacrée aux oeuvres de fiction, contient Coeur double, Le Roi au masque d'or, Mimes, Le Livre de Monelle, La Croisade des enfants, Vies imaginaires, L'Étoile de bois et les contes parus dans l'Écho de Paris. La seconde regroupe les études et essais : Spicilège et Variations sur l'argot principalement. À cela s'ajoutent des introductions éclairantes et quelques notes.
   Ce qui frappe, c'est la diversité des tons et des formes courtes employés par l'écrivain pour contenter son appétit de narration. En effet, si l'on considère Coeur double par exemple, premier recueil publié, on reste admiratif devant un tel talent de caméléon. Marcel Schwob est-il grave ou léger? L'écrivain est-il un fabuliste ou un affabulateur? À l'instar de Borges, on ne sait jamais si l'écrivain fait preuve d'une érudition étonnante ou s'il bluffe son lecteur, l'emportant dans une sphère ou l'histoire rejoint le désir d'histoires, où tout est mêlé, brisé, recyclé.
   Schwob expérimente, multiplie les voix, s'attachant à créer aussi des formes inédites. Mimes est à ce titre un recueil captivant. L'écrivain, avec une modernité qui conserve tout son sens aujourd'hui, donne la parole à une succession de personnages qui monologuent. Le texte court rejoint ici le poème en prose, tant la langue est à la fois dépouillée et sophistiquée : "Cette lampe à mèche neuve brûle de l'huile fine et claire en face de l'étoile du soir. Le seuil est jonché par les roses que les enfants n'ont pas emportées. Les danseuses balancent les dernières torches qui étendent vers l'ombre leurs doigts de feu."
   Le Livre de Monelle, composé avant et après la disparition brutale de la maîtresse de Schwob, porte en filigrane le deuil de l'écrivain. La figure mythique de Monelle y donne un sens à la création qu'on pourrait facilement appliquer à toute l'oeuvre de Schwob : "Et pour imaginer un nouvel art, il faut briser l'art ancien. Et ainsi l'art nouveau semble une sorte d'iconoclastie./ Car toute construction est faite de débris, et rien n'est nouveau en ce monde que les formes./ Mais il faut détruire les formes."
   Disposer de l'essentiel de l'oeuvre de Schwob en un volume permet de prendre le pouls d'un écrivain de toutes les narrations. C'est pourquoi on se dit que forcément, il parlera à tout le monde, que chacun pourra y trouver son compte. Malheureusement, c'est pour les mêmes raisons que l'écrivain continuera sans doute d'habiter la marge, parce qu'il se révèle insaisissable, d'une certaine façon. Impossible de trouver un tiroir où ranger un esprit si ouvert. L'oeuvre est fantastique, historique, philosophique, humoristique même : "Je fus d'autant plus étonné de lui trouver une tête de mort que je l'avais positivement reconnu à sa façon de cligner de l'oeil gauche." (Coeur double).
   Sa force réside incontestablement dans une incroyable capacité à être tout cela à la fois, ou plutôt, dans cette capacité à être tout cela successivement, avec un goût prononcé pour les changements de climats."
"Le Matricule des anges"

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Message par Tristram Ven 8 Déc - 0:59

« La vie n’est pas dans le général, mais dans le particulier ; l’art consiste à donner au particulier l’illusion du général. »
Marcel Schwob, préface à « Cœur double »

« Le rire est probablement destiné à disparaître. On ne voit pas bien pourquoi, entre tant d'espèces animales éteintes, le tic de l'une d'elles persisterait. Cette grossière preuve physique du sens qu'on a d'une certaine inharmonie dans le monde devra s'effacer devant le scepticisme complet, la science absolue, la pitié générale et le respect de toutes choses. Rire, c'est se laisser surprendre par une négligence des lois : on croyait donc à l'ordre universel et à une magnifique hiérarchie de causes finales ? Et quand on aura attaché toutes les anomalies à un mécanisme cosmique, les hommes ne riront plus. On ne peut rire que des individus. Les idées générales n'affectent pas la glotte. Rire, c'est se sentir supérieur. »
Marcel Schwob, « Le rire » in « Spicilège »

_________________
« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
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Message par topocl Ven 8 Déc - 8:26

Lesquels as-tu lus, bix?

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Etre dans le vent, c'est l'histoire d'une feuille morte.
Flore Vasseur
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Message par bix_229 Ven 8 Déc - 15:50

Le Livre de Monelle, Vie imaginaires, Spicilèges et puis j' ai grapillé.
A le lire et malgré son érudition, il semble avor été inspiré par les Fioretti
de St François d' Assise.
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Message par bix_229 Ven 8 Déc - 15:56

Quelques citations extraites de Il Libro della mia memoria.



Le Souvenir d'un Livre.

Le souvenir de la première fois où on a lu un livre aimé se mêle étrangement au souvenir du lieu et au souvenir de l'heure et de la lumière. Aujourd'hui comme alors, la page m'apparaît à travers une brume verdâtre de décembre, ou éclatante sous le soleil de juin, et, près d'elle, de chères figures d'objets et de meubles qui ne sont plus. Comme, après avoir longtemps regardé une fenêtre, on revoit, en fermant les yeux, son spectre transparent à croisières noires, ainsi la feuille traversée de ses lignes s'éclaire, dans la mémoire, de son ancienne clarté. L'odeur aussi est évocatrice. Le premier livre que j'eus me fut rapporté d'Angleterre par ma gouvernante. J'avais quatre ans. Je me souviens nettement de son attitude et des plis de sa robe, d'une table à ouvrage placée vis-à-vis de la fenêtre, du livre à couverture rouge, neuf, brillant, et de l'odeur pénétrante qu'il exhalait entre ses pages : une odeur âcre de créosote et d'encre fraîche que les livres anglais nouvellement imprimés gardent assez longtemps. De ce livre je reparlerai plus tard : j'y ai appris à lire. Mais son odeur me donne encore aujourd'hui le frisson d'un nouveau monde entrevu, et la faim de l'intelligence. Encore aujourd'hui je ne reçois pas d'Angleterre un livre nouveau que je ne plonge ma figure entre ses pages jusqu'au fil qui le broche, pour humer son brouillard et sa fumée, et aspirer tout ce qui peut rester de ma joie d'enfance.


3
Le livre et le lit.

Lire dans son lit est un plaisir de sécurité intellectuelle mêlée de bien-être. Mais il change de nature avec l'âge.
Souvenez-vous de la page la plus intéressante du gros roman que vous dévoriez après coucher, le soir, vers quinze ans, dans le moment où elle se brouille, s'assombrit, s'efface, tandis que la bougie brûlée à fond crépite, palpite bleue dans le bougeoir et s'éteint. Je m'éveillais le matin avant cinq heures pour tirer de leur cachette sous mon traversin les petits livres à cinq sous de la Bibliothèque Nationale. C'est là que j'ai lu les Paroles d'un croyant de Lamennais, et l'Enfer de Dante. Je n'ai jamais relu Lamennais ; mais j'ai l'impression d'un terrible souper de sept personnages (si j'ai bonne mémoire) où résonnait comme un son de fer fatal, que je reconnus plus tard dans un conte de Poe. Je mettais le petit livre sur l'oreiller pour recevoir la première pauvre lumière du jour ; et, couché sur le ventre, le menton soutenu par les coudes, j'aspirais les mots. Jamais je n'ai lu plus délicieusement. Il n'y a pas longtemps que j'ai essayé, un soir, de reprendre ma vieille position de cinq heures. Elle m'a paru insupportable.

Une charmante dame slave se plaignait un jour devant moi de n'avoir jamais trouvé la position « idéale » pour lire. Si on s'assied à une table, on ne se sent pas en « communion » avec le livre ; si on s'en approche, la tête entre les mains, il semble qu'on s'y noie, dans une sorte d'afflux sanguin. Dans un fauteuil, le livre pèse vite. Au lit, sur le dos, on prend froid aux bras ; souvent la lumière est mauvaise ; il y a de la gêne pour tourner les pages et, sur le côté, la moitié du livre échappe : ce n'est plus la véritable possession.

Voilà pourtant où il faut se résoudre. « C'est détestable pour les yeux », disent les bonnes gens. Ce sont de bonnes gens qui n'aiment point lire.
Seulement l'âge diminue le plaisir de l'acte défendu où on ne sera pas surpris, et de la sécurité où toutes les audaces de la fantaisie peuvent danser à l'aise. Restent la solitude douillette et tiède, le silence de la nuit, la dorure voilée que donne sous la lampe aux idées et aux meubles luisants l'approche du sommeil, la joie sûre d'avoir à soi, près de son coeur, le livre qu'on aime. Quant à ceux qui lisent au lit, « contre l'insomnie », ils me font l'effet de pleutres, admis à la table des dieux et qui demanderaient à prendre le nectar en pilules.



In Le Livre de Monelle, Spicilège, l' étoile de bois, Il Libro delle memoria. - 10/18
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Message par Tristram Ven 8 Déc - 16:13

Il me semble que c'est Alberto Manguel, dans Une histoire de la lecture, qui insiste aussi sur la position "couché sur le ventre" pour les lectures d'enfance.

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Message par bix_229 Ven 8 Déc - 16:20

Sur Monelle, je m' autorise à reproduire le commentaire de Coli sur son blog.
Parce qu' il est beau et inspiré et qu' il est récent.

Marcel Schwob 25595_a2526
colimasson   03 août 2015


Et si Marcel Schwob était une femme, qui serait-il ? Sans doute bien cette Monelle sortie de l'ombre, prostituée qu'on imagine bien bavarder dans une chambre sinistre avec Emil Cioran par exemple, lorsqu'elle ne prêche pas son étrange parole à Marcel Schwob. Monelle, prophétesse modeste et obscure pour les temps à venir, s'exprime en aphorismes qui n'ont rien de naturel, et qui séduisent pour cette raison même. Monelle s'exprime pour la maïeutique de l'homme nouveau. Monelle n'a pas peur de la contradiction et enseigne que ce qui ressemble à un oxymore pour l'homme ordinaire est la logique de l'homme de demain. Pour seul exemple, citons ce célèbre passage :

« Pense dans le moment. Toute pensée qui dure est contradiction.
Aime le moment. Tout amour qui dure est haine.
Sois sincère avec le moment. Toute sincérité qui dure est mensonge.
Sois juste envers le moment. Toute justice qui dure est injustice.
Agis envers le moment. Toute action qui dure est un règne défunt. »

Monelle n'a pas peur non plus d'associer les grands inconciliables : l'ombre et la lumière, l'enfance et la maturité, la vie et la mort : les pôles contraires s'abolissent non pas dans la fusion, mais dans l'indifférence, eût égard à cet absolu de l'univers qui se fout strictement de notre existence. Et Monelle, que le narrateur aura rencontré pendant quelques éclatantes minutes, retourne aussitôt dans son univers sordide. A sa place apparaissent une lignée de petites soeurs dont chacune décline, sous la forme du conte, un état d'inachèvement de Monelle. L'égoïste, la voluptueuse, la perverse, la déçue, la sauvage, la fidèle, la prédestinée, la rêveuse, l'exaucée, l'insensible et la sacrifiée sont autant de modalités d'un même personnage. Elles traduisent la rencontre d'un instantané du personnage avec un instantané du monde. Ces soeurs sont tout ce que Monelle a été, ou aurait pu devenir si elle avait bénéficié du nombre de vies suffisant. Et Monelle réapparaît, plus lointaine que jamais, capturée seulement par le regard du narrateur que cette rencontre fait vriller d'une douce folie. Ici, Monelle se dévoile à la tête d'une communauté qui érige le syndrome de Peter Pan en vertu : immaturité et folie sont de moindres illusions face à l'illusion sérieuse de la réalité :

« Parmi nous, personne ne souffre et personne ne meurt : nous disons que ceux-là s'efforcent de connaître la triste vérité, qui n'existe nullement. Ceux qui veulent connaître la vérité s'écartent et nous abandonnent.
Au contraire, nous n'avons aucune foi dans les vérités du monde ; car elles conduisent à la tristesse.
Et nous voulons mener nos enfants vers la joie.
Maintenant les grandes personnes pourront venir vers nous, et nous leur enseignerons l'ignorance et l'illusion. »

Monelle apparaît, disparaît, se métamorphose et revient sous d'autres formes. Ce qu'elle dit et fait dire au narrateur ne veut rien dire : on peut ouvrir ce livre un jour et y lire ce qu'on a envie d'entendre mais le lendemain, on trouvera un contenu un peu différent, travaillé de l'intérieur par l'action du temps, cette étonnante porosité étant permise par la prose poétique et imagée de Marcel Schwob, entièrement dévolu à son projet de rendre gloire comme il le convient à sa divine Monelle.
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Message par bix_229 Ven 8 Déc - 16:48

Quelques impressions fugaces sur Monelle.


Je dirai simplement que j' ai lu ce livre il y a bien longtemps et que Monelle, tel un fantome léger, m' accompagne encore. En compagnie d' Aurelia de Nerval et quelques autres fantasmes féminin et littéraires.


D' ailleurs, on peut dire que [b]Schwob,
comme Nerval, - Stendhal ou De Quincey - n' oublia jamais la femme aimée dans sa jeunesse et il transcenda ce fantome sous la forme d' un poème symboliste.
Quoique..., le symbolisme était finissant, et Schwob se moquait d' etre décadent.
Il avait en tete, en plus de ses souvenirs personnels, des contes populaires, des chroniques d' antan, Shakespeare et Stevenson et tant d' autres...
Et surtout, il passait sans cesse de l'  imaginaire au réél. C' est la clé de toute son oeuvre.
C' est pourquoi Monelle se prete à bien d' interprétations.

C' est pourquoi aussi, je dirai prudemment que Schwob a connu une jeune ouvrière prostituée. Il l' aima vraiment beaucoup et ce, d' autant plus, qu' elle mourut prématurément.
Ce que je ressens dans mon souvenir, c' est celui d' une jeune fille plus qu' étrange. Fantasque.
Morte ou vivante, selon l' occurrence. Légère et généreuse mais ambivalente -et mieux ou pire.
Bref un personnage que l' imaginaire peut réinventer à son gré
A condition de le vouloir.

Pour terminer, une phrase de Paul Léautaud sur Monelle

"C' est l' histoire, souvent obscure, d' une petite prostituée sententieuse, soeur de la fille que rencontra, sous le Palais Royal, le jeune Bonaparte, et de la pauvre Anne sans feu ni lieu qui
secourut un soir Thomas de Quincey, défaillant dans une rue d' Oxford."

On pourrait ajouter une autre fille, Maggie, dite Claire, une jeune prostituée que Stevenson  rencontra et voulut épouser. En tout cas, Stevenson ne cachait pas cet épisode de sa vie.

Peut etre le ton et le style vous paraitront un peu datés et désuets. Les souvenirs, c' est comme tout ce qu' on aime, on les enchante !
[/b]



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Message par Tristram Ven 8 Déc - 17:01

Ah, les premières empreintes de la vie...
« Elle avait une candeur froide, et vivait parmi les fleurs et les miroirs. […] Elle désirait s’aimer elle-même : mais l’image des miroirs avait une frigidité calme et lointaine, et l’image des étangs était morne et pâle, et l’image des rivières fuyait en tremblant. […] Mais elle ne craignait pas son image, puisque jamais elle ne s’était rencontrée, sinon candide et voilée, non cruelle et voluptueuse, elle-même pour elle-même. »
Marcel Schwob, « Le livre de Monelle », II, « Les sœurs de Monelle », « L’Insensible »

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Message par ArenSor Ven 8 Déc - 17:26

bix_229 a écrit:Quelques impressions fugaces sur Monelle.


Je dirai simplement que j' ai lu ce livre il y a bien longtemps et que Monelle, tel un fantome léger, m' accompagne encore. En compagnie d' Aurelia de Nerval et quelques autres fantasmes féminin et littéraires.


D' ailleurs, on peut dire que [b]Schwob,
comme Nerval, - Stendhal ou De Quincey - n' oublia jamais la femme aimée dans sa jeunesse et il transcenda ce fantome sous la forme d' un poème symboliste.
Quoique..., le symbolisme était finissant, et Schwob se moquait d' etre décadent.
Il avait en tete, en plus de ses souvenirs personnels, des contes populaires, des chroniques d' antan, Shakespeare et Stevenson et tant d' autres...
Et surtout, il passait sans cesse de l'  imaginaire au réél. C' est la clé de toute son oeuvre.
C' est pourquoi Monelle se prete à bien d' interprétations.

C' est pourquoi aussi, je dirai prudemment que Schwob a connu une jeune ouvrière prostituée. Il l' aima vraiment beaucoup et ce, d' autant plus, qu' elle mourut prématurément.
Ce que je ressens dans mon souvenir, c' est celui d' une jeune fille plus qu' étrange. Fantasque.
Morte ou vivante, selon l' occurrence. Légère et généreuse mais ambivalente -et mieux ou pire.
Bref un personnage que l' imaginaire peut réinventer à son gré
A condition de le vouloir.

Pour terminer, une phrase de Paul Léautaud sur Monelle

"C' est l' histoire, souvent obscure, d' une petite prostituée sententieuse, soeur de la fille que rencontra, sous le Palais Royal, le jeune Bonaparte, et de la pauvre Anne sans feu ni lieu qui
secourut un soir Thomas de Quincey, défaillant dans une rue d' Oxford."

On pourrait ajouter une autre fille, Maggie, dite Claire, une jeune prostituée que Stevenson  rencontra et voulut épouser. En tout cas, Stevenson ne cachait pas cet épisode de sa vie.

Peut etre le ton et le style vous paraitront un peu datés et désuets. Les souvenirs, c' est comme tout ce qu' on aime, on les enchante !
[/b]



Marcel Schwob Monell10

Paul Léautaud qui était ami du couple Schwob - Moreno et qui était friand de potins plus ou moins croustillants raconte dans son journal que la belle Moreno se languissait car son époux était incapable de la contenter. Effectivement Schwob était de santé fragile et mourut quelques années après leur mariage
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Message par Hanta Ven 6 Sep - 15:55

Le livre de Monelle

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Je n'ai hélas strictement rien compris et je suis resté totalement en dehors de cet ouvrage. Je dis "hélas" car je sais que l'oeuvre est objectivement de qualité, que l'auteur est un grand auteur mais je suis resté totalement hermétique. Je n'ai pas compris le propos, je n'ai pas compris la structure du livre et si le style est plaisant et abouti il ne m'a pas touché.
C'est le genre de lecture qu'on ne peut évaluer. Car l'on a coutume de penser que si le livre ne touche pas alors c'est lui qui échoue et non le lecteur. Mais quand un ouvrage possède des qualités qui ont été décelées par des lecteurs avertis et que soi même nous sommes exclus de cette trouvaille c'est que le moment n'était pas bon.  Et en effet je n'ai malheureusement pas passé un bon moment.
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Message par bix_229 Ven 6 Sep - 16:12

Dommage Hanta. Mais ce n'est pas grave du tout !
Schwob fait partie de ces écrivains étranges et poétiques qui déconcertent un peu.
Parce qu'il a peu d'équivalents, si j'ai cité De Quincey ou encore Nerval, c'est juste
pour établir une forme de comparaison.
Mais ce qu'a écrit Coli est une approche très belle.
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Message par Quasimodo Ven 6 Sep - 16:37

Depuis La croisade des enfants, je suis tout acquis à Marcel Schwob, d'autant plus que je redoutais de le trouver affecté, salonnard, tels que sont la plupart des écrivains fin-de-siècle décrits par Léon Daudet et Jules Renard.
Je lirai certainement Le livre de Monelle.
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Message par Tristram Mar 28 Avr - 22:49

« J’aime beaucoup Schwob depuis des années, pionnier dans ce genre qui s’est spécialisé dans le mélange d’invention et de faits historiques réels et qui, au siècle dernier, a influencé des auteurs comme Borges, Bolaño, Sophie Calle et Pierre Michon. »
Enrique Vila-Matas, « Mac et son contretemps », 19

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« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
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Message par Quasimodo Mer 29 Avr - 0:40

C'est drôle, j'ai justement relu ce matin quelques pages de La croisade des enfants.
Entre temps j'ai découvert Michon, mais pas les Vies minuscules (auxquelles la citation fait référence j'imagine). La perspective d'une lecture croisée Schwob-Michon me paraît assez séduisante !
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Message par Tristram Mer 29 Avr - 2:54

Le rapprochement me paraît capillotracté (ce qui peut cependant donner du piquant au "croisement"), à moins que l'on n'intègre quantité d'autres auteurs dans la définition (là, c'est pratiquement l'autofiction, comme on l'appelle depuis pas si longtemps ; mais, si on regarde bien, dans ce bon vieux fantastique, il y a déjà aussi du réel _ et tutti quanti).
Perso, j'ai tellement goûté les Vies minuscules qu'il a éclipsé les suivants, et j'aime bien m'imaginer Schwob rayonnant tranquille dans son quant-à-soi _ mais je suppose que l'important, c'est qu'on les lise.

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Message par Quasimodo Jeu 30 Avr - 14:10

Tristram a écrit:Le rapprochement me paraît capillotracté (ce qui peut cependant donner du piquant au "croisement")
Précisément, d'ailleurs les deux (Vies imaginaires et Vies minuscules) sont dans ma LAL, ça me suffit bien !
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Message par Jack-Hubert Bukowski Sam 2 Mai - 8:13

Merci de nous rappeler Schwob, Quasimodo. Et merci, Bix, d'avoir introduit son fil. J'ai l'impression qu'il est quelqu'un d'important à lire dans un parcours de lecteur... j'ose espérer qu'il réussira mieux que Nerval à me captiver... Wink
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