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Federico Garcia Lorca

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Message par Invité Dim 2 Fév - 21:36

La rose
ne cherchait pas l'aurore :
presque éternelle sur sa branche,
elle cherchait autre chose.

La rose
ne cherchait ni science ni ombre :
confins de chair et de songe,
elle cherchait autre chose.

La rose ne cherchait pas la rose.
Immobile dans le ciel
elle cherchait autre chose.

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Message par Tristram Dim 2 Fév - 23:17

Il a vraiment sa tonalité particulière, Lorca, même au travers de la traduction.

_________________
« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
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Message par bix_229 Lun 3 Fév - 0:03

Tristram a écrit:Il a vraiment sa tonalité particulière, Lorca, même au travers de la traduction.
C'est vrai et je l'apprécie, mais parfois il a une certaine tendance à l'emphase.
Je pense à Chant funèbre pour Ignacio Sánchez Mejías.
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Message par Aventin Sam 20 Fév - 7:05

Toujours dans le Romancero gitano:

4ème et dernière partie de Preciosa y el aire a écrit:Preciosa, llena de miedo,
entra en la casa que tiene,
más arriba de los pinos,
el cónsul de los ingleses.

Asustados por los gritos
tres carabineros vienen,
sus negras capas ceñidas
y los gorros en las sienes.

El inglés da a la gitana
un vaso de tibia leche,
y una copa de ginebra
que Preciosa no se bebe.

Y mientras cuenta, llorando,
su aventura a aquella gente,
en las tejas de pizarra
el viento, furioso, muerde.

(traduction proposée, celle de Line Amselem, in Complaintes Gitanes, édition bilingue, publiées chez Allia - 2017)

Preciosa, pleine de peur, entre
dans la demeure que possède
Monsieur le consul des Anglais,
bien au-dessus de la pinède.

Saisis de frayeur à ces cris
trois carabiniers viennent voir,
les bonnets vissés sur la tête,
entourés dans leur capes noires.

L’Anglais propose dans un verre
du lait tiède pour Preciosa,
et une coupe de genièvre
que la Gitane ne boit pas.

Pendant qu’en pleurant elle explique
sa mésaventure à ces gens,
on sent dans les tuiles d’Ardoise
le vent qui mord furieusement.


Entrer dans la demeure du consul comme accomplir un destin d'élévation, mais qu'on pressent tragique.
La borne à la frayeur et aux cris n'en est pas une, ce sont ces inquiétants carabiniers, encapés de noir, comme de mauvais augure, jamais ou si peu souvent du côté des gitans.
Pas loin de penser à une connotation érotique dans la boisson proposée par le consul anglais et que refuse Preciosa.
Jolie correspondance entre les pleurs de Preciosa et le vent qui mord furieusement.


Mots-clés : #poésie
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Message par Invité Dim 14 Mar - 15:38

Grand merci @Aventin pour tes contributions, je pense lire le Romancero gitano dans le texte, très prochainement (d'abord je lis Poésies I, NRF Gallimard), et tes indications devraient m'aider à appréhender cette forme particulière.

Une préface de Lorca, qui nous parle de poésie, ou pas (de vive voix à Gerardo Diego) :

Que te dirais-je de la poésie ? Que dirais-je de ces nuages, de ce ciel ? Les voir, les voir, les voir... et rien de plus. Tu comprendras qu'un poète ne peut rien dire de la Poésie. Laissons cette tâche aux critiques et aux professeurs. Mais ni toi, ni moi, ni aucun poète, nous ne savons ce qu'est la Poésie.
La voici ; regarde. Je porte le feu dans mes mains. Je le comprends et je travaille parfaitement avec lui, mais je ne peux en parler sans littérature. Je comprends toutes les poétiques ; je pourrais en parler si je ne changeais d'opinion toutes les cinq minutes. Je ne sais. Il se peut qu'un jour je me mette à adorer la mauvaise poésie, comme je raffole (comme nous raffolons) aujourd'hui de la mauvaise musique. Je brûlerai le Parthénon une nuit pour le rebâtir le lendemain sans jamais le terminer.
Dans mes conférences, il m'est arrivé de parler de Poésie, mais la seule chose dont je ne puisse rien dire, c'est ma poésie. Non que je sois inconscient de ce que je fais. Au contraire, s'il est vrai que je suis poète par la grâce de Dieu — ou du diable —, il n'est pas moins vrai que je le sais aussi par la grâce de la technique, de l'effort et par la pleine connaissance de ce qu'est un poème.

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Message par bix_229 Dim 14 Mar - 16:13

Lyrisme et émotion.


L'HOMME BRISÉ

Le vingt-cinq du mois de Juin,
on vint prévenir Amargo ;
Tu peux couper, si tu veux,
les lauriers-blancs de ta cour.
Peins une croix sur ta porte
et mets au-dessous ton nom,
car la ciguë et I'ortie
naîtront bientôt de tes flancs
et des pointes de chaux vive
déchireront tes souliers.
Ce sera dans la nuit noire,
parmi les monts aimantés
où les bœufs de la rivière
boivent des joncs dans leur rêve.
Commande lampes et cloches.
Apprends à croiser les mains
et ä goûter les vents froids
des métaux et des rochers,
Car tu seras dans deux mois
raide mort et enterré.

Une épée de nébuleuse
s'élève au poing de Saint-Jacques
et des flancs du ciel cambré
ruisselle un silence grave.

Le vingt-cinq du mois de Juin
il avait les yeux ouverts
et le vingt-cinq du mois d'Août
il gisait pour les fermer.



Chansons gitanes. - Seghers

Traduction Armand Guibert
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Message par Invité Dim 14 Mar - 16:39

Merci pour le poème, Bix.
Un autre, tiré de ses poèmes de jeunesse, traduction récupérée sur internet, et v-o plus bas :

LE CANTIQUE AU MIEL

Le miel est la parole du Christ
L'or fondu de son amour,
L'au-delà du nectar,
La momie de la lumière du paradis.

La ruche est une chaste étoile,
Un puit d'ambre alimenté au rythme des abeilles,
Le sein des campagnes, tremblant d'arômes et de bourdonnements.

Le miel est l'épopée de l'amour,
La matérialité de l'infini,
L'âme et le sang plaintif des fleurs
Condensés à travers un autre esprit.

Et le miel de l'homme est la poésie
Qui coule de son cœur endolori,
Rayon dont la cire est le souvenir,
Façonnée par l'abeille la plus intime.

Le miel est la bucolique lointaine
Du pasteur, la flûte et les oliviers,
Le frère du gland et du lait
Qui régnaient en l'âge d'or.

Comme le soleil du matin, le miel
A tout le charme de l'été
Et la fraîcheur ancienne de l'automne.
C'est la feuille morte et le blé.

Ô divine liqueur d'humilité
Aussi sereine qu'un vers primitif !

Tu es l'harmonie incarnée
Et la géniale essence du lyrisme
En toi dort la mélancolie,
Le secret du baiser et du cri.

Ô douceur ! Le doux est ton attribut,
Doux comme le ventre des femmes,
Doux comme les yeux des enfants,
Doux comme l'ombre de la nuit,
Doux comme une voix, ou comme un lys.

Soleil qui éclaires les pas
De celui qui porte la peine et la lyre,
Tu équivaux à toutes les beautés,
A la couleur, à la lumière, à la musique.

Ô divine liqueur de l'espérance
Où l'âme et la matière se marient
Dans un équilibre parfait
Comme l'hostie le corps du Christ et sa lumière.

Tu es des fleurs, l'achèvement suprême,
Ô liqueur, en qui leurs âmes s'unissent !
Qui te goûte ne sait qu'il absorbe
L'essence dorée du lyrisme.

EL CANTO DE LA MIEL

La miel es la palabra de Cristo,
el oro derretido de su amor.
El más allá del néctar,
la momia de la luz del paraíso.

La colmena es una estrella casta,
pozo de ámbar que alimenta el ritmo
de las abejas. Seno de los campos
tembloroso de aromas y zumbidos.

La miel es la epopeya del amor,
la materialidad de lo infinito.
Alma y sangre doliente de las flores
condensada a través de otro espíritu.

(Así la miel del hombre es la poesía
que mana de su pecho dolorido,
de un panal con la cera del recuerdo
formado por la abeja de lo íntimo)

La miel es la bucólica lejana
del pastor, la dulzaina y el olivo,
hermana de la leche y las bellotas,
reinas supremas del dorado siglo.

La miel es como el sol de la mañana,
tiene toda la gracia del estío
y la frescura vieja del otoño.
Es la hoja marchita y es el trigo.

¡Oh divino licor de la humildad,
sereno como un verso primitivo!

La armonía hecha carne tú eres,
el resumen genial de lo lírico.
En ti duerme la melancolía,
el secreto del beso y del grito.

Dulcísima. Dulce. Este es tu adjetivo.
Dulce como los vientres de las hembras.
Dulce como los ojos de los niños.
Dulce como las sombras de la noche.
Dulce como una voz. O como un lirio.

Para el que lleva la pena y la lira,
eres sol que ilumina el camino.
Equivales a todas las bellezas,
al color, a la luz, a los sonidos.

¡Oh! Divino licor de la esperanza,
donde a la perfección del equilibrio
llegan alma y materia en unidad
como en la hostia cuerpo y luz de Cristo.

Y el alma superior es de las flores,
¡Oh licor que esas almas has unido!
El que te gusta no sabe que traga
un resumen dorado del lirismo.

Spoiler:

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Message par Invité Lun 15 Mar - 18:09

COEUR NEUF

Mon coeur s'est dépouillé
Comme un serpent de sa peau vieille
Et je la vois entre mes doigts
Pleine d'entailles et de miel.

Les pensers qui nichaient
En tes plis, où sont-ils ?
Et les roses qui embaumaient
Satan et Jésus-Christ ?

Pauvre enveloppe qui étouffais
Mon astre fantastique !
Gris parchemin endolori
Des amours dont je me dépris.

Je vois en toi des embryons de science
Des germes de poème, les vestiges
De mes anciennes innocences
Et de mes secrets romantiques.

T'accrocherai-je aux murs
De mon musée sentimental
Près des froids et obscurs
Lys dormants de mon mal ?

Ou te mettrai-je au haut des pins,
Livre dolent de mes amours,
Pour que tu t'imprègnes des trilles
Du rossignol à l'aurore ?

                            Juin 1918, Grenade (traduction André Bélamich)

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Message par Jack-Hubert Bukowski Lun 26 Avr - 8:52

J'ai lu Polisseur d'étoiles. Disons plutôt effeuillé minutieusement. Je vais vous partager quelques découvertes au cours des prochains jours. Je commence avec quelques poèmes :

«Couleurs»

Au-dessus de Paris
la lune est violette.
Elle devient jaune
dans les villes mortes.
Il y a une lune verte
dans toutes les légendes.
Lune de toile d’araignée
et de verrière brisée,
et par-dessus les déserts
elle est profonde et sanglante.
Mais la lune blanche,
la seule vraie lune,
brille sur les calmes
cimetières de villages.

La version du poème cité plus haut dans Polisseur d'étoiles ne s'écrit pas telle quelle, mais on récupère les versions retranscrites sur le web comme on peut.

« Salomé et la lune »

La lune est une sœur
de Salomé (Dame
qui dans une histoire ancienne
mord une bouche morte.)

Salomé était le couchant.
Un couchant
d’yeux
et de lèvres.

La lune est le perpétuel
couchant.
Soir
continu
et délirant.

L’amour insondable
de Salomé pour l’ours,
ne fut pas dû à sa parole ;
mais parce que sa tête,
méduse du désert,
était une lune noire,
une lune impossible,
enfumée et somnolente.
Salomé est la chrysalide
et la lune le cocon,
chrysalide d’ombre
sous un palais obscur.

La lune tremble sur l’eau,
Salomé tremble sur l’âme.
Oh ! sublime beauté,
vouloir faire d’un baiser
une étoile !

Au milieu du jour
ou dans la nuit obscure
si vous parlez de Salomé
la lune se lèvera.

On peut parler d'un moment fort dans la poésie de Garcia Lorca. Je termine ensuite avec un poème bref pour ce premier ensemble tiré de «Suites».


« Balançoire »

La fille va sur la balançoire
Du nord au sud
Du sud au nord

Sur la parabole
Tremblote une étoile rouge
Sous toutes les étoiles.
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Message par Jack-Hubert Bukowski Lun 26 Avr - 8:55

En vous citant ce dernier poème, nous revenons peut-être à un registre plus familier de la poésie de Garcia Lorca :

« Gacela » de la mort obscure


Je veux dormir le sommeil des pommes,
Et m’éloigner du tumulte des cimetières.
Je veux dormir le sommeil de cet enfant
Qui voulait s’arracher le cœur en pleine mer.

Je ne veux pas que l’on me répète que les morts ne perdent pas leur sang ;
Que la bouche pourrie demande encor de l’eau.
Je ne veux rien savoir des martyres que donne l’herbe,
Ni de la lune avec sa bouche de serpent
Qui travaille avant que l’aube naisse.

Je veux dormir un instant,
Un instant, une minute, un siècle ;
Mais que tous sachent bien que je ne suis pas mort ;
Qu’il y a sur mes lèvres une étable d’or ;
Que je suis le petit ami du vent d’ouest ;
Que je suis l’ombre immense de mes larmes.

Couvre-moi d’un voile dans l’aurore,
Car elle me lancera des poignées de fourmis,
Et mouille d’une eau dure mes souliers
Afin que glisse la pince de son scorpion.

Car je veux dormir le sommeil des pommes
Pour apprendre un sanglot qui de la terre me nettoie ;
Car je veux vivre avec cet enfant obscur
Qui voulait s’arracher le cœur en pleine mer.


Traduit de l’espagnol par Claude Couffon et Bernard Sesé
in « Anthologie bilingue de la poésie espagnole »,
Editions Gallimard (La Pléiade), 1995
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Message par Jack-Hubert Bukowski Mar 27 Avr - 11:13

Tiré de Poèmes variés dans Polisseur d'étoiles :

«Voix»
Étalage

Nos voix
Ressemblent
À une forêt de féériques
Langues de belle-mère
Terminées par des plumes
D'idées.

Lombrics avec anneaux
De paroles
Et virus
De regards.

Colonnes de ciment
Métaphysique.
Ô voix professorale!
Parmi des brouillards de points
de suspension.

Il y a des voix qui ressemblent
À des gris phallus érigés
Et d'autres qui sont tachées
De boue.
Il y en a certaines qui mouillent
Comme des langues de chien
Et il y a la voix qui se défait
Dans le silence.
La voix, aile de mouche.
Des vieillards.

La voix toute trouée
De la prostituée
Et la voix de cosmétique
Des curés
Sont des fils avec lesquels brode
La chouette.

Rose bleue de paroles!
La voix de la fillette.
Flot de moire!
La voix de l'aïeule.

Il y a des voix poulpes
Et taupes.
D'autres
Comme des cous
De colombes.

Et il y a la voix plèbe
Rauque et noire,
Toute pleine de dents
De femme.

Quant aux autres,
Messieurs,
On peut les trouver
À peu de frais
Dans le bric-à-brac
Des voix.


[Tout brigand que tu es]

Tout brigand que tu es
je t'aime à ma façon.

Toi, petit rat de mer.
Moi, gitan de la montagne.

Vive la palme d'Égypte
parmi coquillages et drapeaux!

Alberti, tendre oiseau,
citron de la citronneraie.
Federico, fleur offerte à tous
dans le sombre roncier.

Tout brigand que tu es
je t'aime à ma façon.
Jack-Hubert Bukowski
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Message par Jack-Hubert Bukowski Mer 5 Mai - 11:09

Je vous propose un dernier long poème :

« Panorama aveugle de New York »

Si ce ne sont les oiseaux
couverts de cendre,
si ce ne sont les gémissements qui frappent aux fenêtres
de la noce,
ce seront les délicates créatures de l’air
qui feront jaillir le sang neuf dans l’obscurité inextinguible.
Mais non, ce ne sont pas les oiseaux,
parce que les oiseaux sont en passe d’être des bœufs.
Ce peuvent être des roches blanches avec l’aide de la lune,
et ce sont toujours des jeunes filles blessées
avant que les juges ne soulèvent le voile.

Tout le monde comprend la douleur qui est liée à la mort,
mais la vraie douleur n’est pas présente dans l’esprit.
Elle n’est pas dans l’air ni dans notre vie
ni sur ces terrasses pleines de fumée.
La véritable douleur qui tient éveillées les choses
est une petite brûlure infinie
dans les yeux innocents des autres systèmes.

Un vêtement abandonné pèse tellement sur les épaules
que bien souvent le ciel les regroupe en âpres troupeaux ;
et celles qui meurent en couches savent, à leur dernière
heure,
que tout bruit sera pierre et toute trace, élancement.
Nous, nous ignorons que la pensée a des faubourgs
où le philosophe est dévoré par les Chinois et les chenilles
et certains enfants idiots ont trouvé dans les cuisines
de petites hirondelles avec des béquilles
qui savaient prononcer le mot amour.

Non, ce ne sont pas les oiseaux.
Ce n’est pas un oiseau qui exprime la trouble fièvre de
la lagune
ni l’ardent désir de meurtre qui nous oppresse à chaque
instant
ni la métallique rumeur de suicide qui nous anime
chaque matin :
c’est une capsule d’air où nous fait mal le monde entier,
c’est un petit espace vivant à l’unisson fou avec la lumière,
c’est une échelle indéfinissable où nuages et roses oublient
les cris incohérents qui grouillent dans le débarcadère
du sang.
Moi maintes fois je me suis perdu
en cherchant la brûlure qui tient éveillées les choses
et je n’ai guère trouvé que des marins échoués sur les
parapets
et de petites créatures du ciel ensevelies sous la neige.
Mais la véritable douleur était sur d’autres places
où les poissons cristallisés agonisaient à l’intérieur des
troncs,
des places de ciel étranger pour les antiques statues
indemnes
et pour la tendre intimité des volcans.

Il n’y a pas de douleur dans la voix. Existent seulement
les dents,
mais des dents qui se tairont, isolées par le satin noir.
Il n’y a pas de douleur dans la voix. Ici existe seulement
la Terre.
la Terre avec ses portes de toujours
qui mènent à la rougeur des fruits.
Jack-Hubert Bukowski
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Message par Jack-Hubert Bukowski Lun 17 Mai - 11:04

Federico Garcia Lorca écrivait aussi de la poésie en prose :

«Jeu de dames»

Les cinq dames d'une cour emplie de couleur et de poésie,
amoureuses toutes cinq d'un jeune homme mystérieux
qui est venu à elles depuis de lointaines terres. Elles
l'entourent, l'encerclent et se voilent mutuellement leur
amour. Mais le jeune homme ne prend pas garde à elles.
Il se promène dans le jardin et séduit la fille du jardinier,
jeune fille à la peau brûlée et dépourvue de toute
beauté, bien que sans laideur, il est vrai. Les autres dames
l'entourent et comprennent ce qui se passe et, indignées,
tentent de tuer la jeune brûlée, mais lorsqu'elles arrivent
celle-ci est déjà morte, un sourire aux lèvres et emplie
de lumière et d'un parfum exquis. Sur un banc du jardin
elles trouvent un papillon qui s'envole et les habits
du jeune homme.

Federico Garcia Lorca, Une colombe si cruelle. Poèmes en prose et autres textes, p. 105.
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Message par Bédoulène Mar 18 Mai - 8:55

drunken

_________________
“Lire et aimer le roman d'un salaud n'est pas lui donner une quelconque absolution, partager ses convictions ou devenir son complice, c'est reconnaître son talent, pas sa moralité ou son idéal.”
― Le club des incorrigibles optimistes de Jean-Michel Guenassia



[/i]
"Il n'y a pas de mauvais livres. Ce qui est mauvais c'est de les craindre." L'homme de Kiev Malamud
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