Annie Ernaux
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Re: Annie Ernaux
Le vrai lieu
entretiens avec Michelle Porte
Un livre sans doute bon marché, que j'ai reçu à Noel, à ma grande joie, court et très très plaisant à arpenter.
Pas trop envie de citer, mais c'est inspirant, confortant, pertinent, Pour un déjà conquis c'est du miel.
Tiens, @Eglantine, toi qui bloques un peu, je te conseille cette entrée. je parie que tu ne seras pas laissée démunie, mais nourrie , par ce détour.
entretiens avec Michelle Porte
Un livre sans doute bon marché, que j'ai reçu à Noel, à ma grande joie, court et très très plaisant à arpenter.
Pas trop envie de citer, mais c'est inspirant, confortant, pertinent, Pour un déjà conquis c'est du miel.
Tiens, @Eglantine, toi qui bloques un peu, je te conseille cette entrée. je parie que tu ne seras pas laissée démunie, mais nourrie , par ce détour.
Nadine- Messages : 4866
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 48
Re: Annie Ernaux
(Enfin me semble que tu souhaites y revenir après une expérience mitigée, ayant trouvé une propension au masochisme, je crois, chez l'auteur, tu as , de mémoire, lu le livre qui parle d'une passion, pleine d'attente. Mais je suis pas sûre de devoir me fier à ma mémoire. je me trompe ? )
Nadine- Messages : 4866
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 48
Re: Annie Ernaux
La Place
Extraits :
Faut que je réfléchisse à partir de là, avec en tête, déjà, la figure de l'entomologiste littéraire, distant et froid, occupé à disséquer le comportement de ses semblables...
Et le choix de l'écriture plate pour dire que ce sont les lettres qui la font passer d'un monde à l'autre...
Tout l'inverse, me semble-t-il, de ce que l'on goûte avec le premier roman d'Anne Pauly, Avant que j'oublie, où l'auteur peut incarner des émotions à travers une simple liste d'objets ayant appartenu à son père, et dit, aussi, avec intensité, l'ambivalence de ses sentiments vis-à-vis de cet ancien alcoolique invivable...
Peut-être que la différence tient dans le fait qu'Anne Pauly décrit un environnement modeste pour mieux cerner son père quand Annie Ernaux évoque son père pour mieux exposer le milieu ouvrier ?
Extraits :
Naturellement, aucun bonheur d'écrire, dans cette entreprise où je me tiens au plus près des mots et des phrases entendues, les soulignant parfois par des italiques. Non pour indiquer un double sens au lecteur et lui offrir le plaisir d'une complicité, que je refuse sous toutes ses formes, nostalgie, pathétique ou dérision. Simplement parce que ces mots et ces phrases disent les limites et la couleur du monde où vécut mon père, où j'ai vécu aussi. Et l'on n'y prenait jamais un mot pour un autre.
Puisque la maîtresse me "reprenait", plus tard j'ai voulu reprendre mon père, lui annoncer que "se parterrer" ou "quart moins d'onze heures" n'existaient pas. Il est entré dans une violente colère. Une autre fois : "Comment voulez-vous que je ne me fasse pas reprendre, si vous parlez mal tout le temps !" Je pleurais. Il était malheureux. Tout ce qui touche au langage est dans mon souvenir motif de rancœur et de chicanes douloureuses, bien plus que l'argent.
La politesse entre parents et enfants m'est demeurée longtemps un mystère. J'ai mis aussi des années à "comprendre" l'extrême gentillesse que des personnes bien éduquées manifestent dans leur simple bonjour. J'avais honte, je ne méritais pas tant d'égards, j'allais jusqu'à imaginer une sympathie particulière à mon endroit. Puis je me suis aperçue que ces questions posées avec l'air d'un intérêt pressant, ces sourires, n'avaient pas plus de sens que de manger bouche fermée ou de se moucher discrètement.
Conviction profonde que le savoir et les bonnes manières étaient la marque d'une excellence intérieure, innée.
Au loin, j'avais épuré mes parents de leurs gestes et de leurs paroles, des corps glorieux. J'entendais à nouveau leurs façon de dire "a" pour "elle", de parler fort. Je les retrouvais tels qu'ils avaient toujours été, sans cette "sobriété" de maintien, ce langage correct, qui me paraissaient maintenant naturels. Je me sentais séparée de moi-même.
Il me conduisait de la maison à l'école sur son vélo. Passeur entre deux rives, sous la pluie et le soleil.
Faut que je réfléchisse à partir de là, avec en tête, déjà, la figure de l'entomologiste littéraire, distant et froid, occupé à disséquer le comportement de ses semblables...
Et le choix de l'écriture plate pour dire que ce sont les lettres qui la font passer d'un monde à l'autre...
Tout l'inverse, me semble-t-il, de ce que l'on goûte avec le premier roman d'Anne Pauly, Avant que j'oublie, où l'auteur peut incarner des émotions à travers une simple liste d'objets ayant appartenu à son père, et dit, aussi, avec intensité, l'ambivalence de ses sentiments vis-à-vis de cet ancien alcoolique invivable...
Peut-être que la différence tient dans le fait qu'Anne Pauly décrit un environnement modeste pour mieux cerner son père quand Annie Ernaux évoque son père pour mieux exposer le milieu ouvrier ?
Louvaluna- Messages : 1678
Date d'inscription : 19/03/2017
Re: Annie Ernaux
Si je te comprends bien Louvaluna, tu ne sais pas trop quoi en penser ?
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Etre dans le vent, c'est l'histoire d'une feuille morte.
Flore Vasseur
topocl- Messages : 8431
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 64
Localisation : Roanne
Re: Annie Ernaux
Je ne sais pas si Ernaux à un objectif social (ou politique), mais il est certain (pour moi) que son univers plat est insondablement maussade.
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« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
Tristram- Messages : 15643
Date d'inscription : 09/12/2016
Age : 67
Localisation : Guyane
Re: Annie Ernaux
Je n'y suis pas très sensible non plus. La Place est le premier livre que j'aie lu d'elle, et sans doute le dernier, à moins que quelque chosien éclairé me convainque d'en ouvrir un deuxième.
Quasimodo- Messages : 5461
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 28
Re: Annie Ernaux
Attention, je me fais sans doute mal comprendre : son univers est, disons, maussade, mais son style (ou l'absence, pour exagérer et même avoir tort) me plaît. Autrement dit, le thème est "ennuyeux", l'expression intéressante.
L'écrivaine a une grande valeur à mes yeux, pour la façon dont elle présente les choses ; il faut que j'y retourne faire un tour. (C'est déjà loin, et cette écriture neutre ne reste pas en mémoire _ déjà que...)
L'écrivaine a une grande valeur à mes yeux, pour la façon dont elle présente les choses ; il faut que j'y retourne faire un tour. (C'est déjà loin, et cette écriture neutre ne reste pas en mémoire _ déjà que...)
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Tristram- Messages : 15643
Date d'inscription : 09/12/2016
Age : 67
Localisation : Guyane
Re: Annie Ernaux
Ah oui, il y a méprise.
En l'occurrence c'est une pure question de goût : ce n'est tout simplement pas pour moi (La Place).
En l'occurrence c'est une pure question de goût : ce n'est tout simplement pas pour moi (La Place).
Quasimodo- Messages : 5461
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 28
Re: Annie Ernaux
J'ai programmé L’atelier noir (pour quand j'aurai une liseuse !)
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Tristram- Messages : 15643
Date d'inscription : 09/12/2016
Age : 67
Localisation : Guyane
Re: Annie Ernaux
Effectivement. Une fois le livre refermé, je me suis dis, elle dit des choses intéressantes, Annie Ernaux, il y a des expériences et des analyses qui me parlent, mais la forme est une sorte d'anesthésie qui me convient moyen, mais pas sans intérêt, non plus, cela dit, comme le souligne Tristram, et c'est à cela que je réfléchis... Avec l'idée, quand même, que son choix de l'écriture plate sert tout à fait son propos. Autrement dit, un style, sans "poésie du souvenir" ni "dérision jubilante", qui reflète sa perception du milieu qu'elle expose à travers la figure de son père. Un univers qui semble anesthésier la pensée, justement. Et une espèce de loyauté, aussi, pourquoi pas ? Ne pas trop jongler avec les mots, éviter les figures acrobatiques, afin de ne pas trahir davantage ces gens - ses parents - qui n'ont pas une excellente maîtrise de la langue et se taisent, parfois, juste parce qu'ils ont conscience de cela, différence qu'ils vivent comme une infirmité sociale... Peut-être.topocl a écrit:Si je te comprends bien Louvaluna, tu ne sais pas trop quoi en penser ?
Pour rendre compte d'une vie soumise à la nécessité, je n'ai pas le droit de prendre d'abord le parti de l'art, ni de chercher à faire quelque chose de "passionnant", ou d'"émouvant".
Comment un homme né dans une bourgeoisie à diplômes, constamment "ironique", aurait-il pu se plaire en compagnie de braves gens, dont la gentillesse, reconnue de lui, ne compenserait jamais à ses yeux ce manque essentiel : une conversation spirituelle. Dans sa famille, par exemple, si l'on cassait un verre, quelqu'un s'écriait aussitôt, "n'y touchez pas, il est brisé !" (Vers de Sully Prud'homme).
Louvaluna- Messages : 1678
Date d'inscription : 19/03/2017
Re: Annie Ernaux
Ah, tiens, oui, excellente piste, je suis sûre d'avoir noté ce titre quelque part, mais où ?... Bon, sans importance, je renote !Tristram a écrit:J'ai programmé L’atelier noir (pour quand j'aurai une liseuse !)
Il y a quelque chose de dangereux, voire d’impudique, à dévoiler ainsi les traces d’un corps à corps avec l’écriture. Mais, en publiant ces pages, j’ai voulu porter témoignage de celle-ci, telle qu’elle se vit au jour le jour, dans la solitude.
Louvaluna- Messages : 1678
Date d'inscription : 19/03/2017
Re: Annie Ernaux
La place
Quelques mois après avoir réussi son CAPES, qui consacrait sa réussite à échapper à la prédestination sociale de ce milieu sans culture, Annie Ernaux a perdu son père. C’est l’occasion de reprendre le récit de la vie de celui-ci, avec un parti-pris revendiqué de distance, de blancheur…
Et bien on peut dire que Annie Ernaux a parfaitement réussi son coup, dans l’établissement de cette distance entre elle et moi. J’ai ressenti cela comme sec, plat, jusqu’à la limite du convenu.
A vrai dire, si je veux lire un ouvrage sociologique, je vais plutôt dans le rayon essais que dans celui de l’autofiction.
Quelques mois après avoir réussi son CAPES, qui consacrait sa réussite à échapper à la prédestination sociale de ce milieu sans culture, Annie Ernaux a perdu son père. C’est l’occasion de reprendre le récit de la vie de celui-ci, avec un parti-pris revendiqué de distance, de blancheur…
Et bien on peut dire que Annie Ernaux a parfaitement réussi son coup, dans l’établissement de cette distance entre elle et moi. J’ai ressenti cela comme sec, plat, jusqu’à la limite du convenu.
A vrai dire, si je veux lire un ouvrage sociologique, je vais plutôt dans le rayon essais que dans celui de l’autofiction.
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Flore Vasseur
topocl- Messages : 8431
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 64
Localisation : Roanne
Re: Annie Ernaux
Jugement un peu hatif.
Il est vrai que le livre est en effet sec et un peu schématique. Mais il s'agit là d'un apprentissage
dans le domaine de l'écriture. Et depuis, Ernaux a beaucoup progressé et elle est parvenue à interesser tout en observant un certain recul par rapport à son sujet et une sobriété qu'on apprécie ou pas.
Y compris sur des sujets brulants comme la sexualité (la sienne) comme dépendance et adiction.
Je pense que les expériences traumatisantes du début de sa vie ont provoqué sa manière et
son style.
Il est vrai que le livre est en effet sec et un peu schématique. Mais il s'agit là d'un apprentissage
dans le domaine de l'écriture. Et depuis, Ernaux a beaucoup progressé et elle est parvenue à interesser tout en observant un certain recul par rapport à son sujet et une sobriété qu'on apprécie ou pas.
Y compris sur des sujets brulants comme la sexualité (la sienne) comme dépendance et adiction.
Je pense que les expériences traumatisantes du début de sa vie ont provoqué sa manière et
son style.
bix_229- Messages : 15439
Date d'inscription : 06/12/2016
Localisation : Lauragais
Re: Annie Ernaux
A propos de La place, Ernaux chez Pivot.
bix_229- Messages : 15439
Date d'inscription : 06/12/2016
Localisation : Lauragais
Re: Annie Ernaux
Ce n'est aucun jugement, c'est un ressenti (j'ai utilisé ce mot d'ailleurs), et à mon rythme à moi.bix_229 a écrit:Jugement un peu hatif.
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Flore Vasseur
topocl- Messages : 8431
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 64
Localisation : Roanne
Re: Annie Ernaux
Je connajs ce genre de réponse (je l'utilise partois), maistopocl a écrit:Ce n'est aucun jugement, c'est un ressenti (j'ai utilisé ce mot d'ailleurs), et à mon rythme à moi.bix_229 a écrit:Jugement un peu hatif.
Ressenti # jugement ?
Dr Freud
bix_229- Messages : 15439
Date d'inscription : 06/12/2016
Localisation : Lauragais
Re: Annie Ernaux
Il est pour moi évident qu'un ressenti peut être fort différent d'un jugement !?
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Tristram- Messages : 15643
Date d'inscription : 09/12/2016
Age : 67
Localisation : Guyane
Re: Annie Ernaux
Bix, tu pourrais lire Les mots sont des fenêtres (ou bien ce sont des murs) de Marshall B. Rosenberg, la bible de la communication non-violente. C'est tout à fait volontairement que j'avais choisi le mot "ressenti" de façon à bien faire comprendre que ce que je disais n'engageait que moi. Il n' y a aucune malignité là-dedans.
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Flore Vasseur
topocl- Messages : 8431
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 64
Localisation : Roanne
Re: Annie Ernaux
D’ailleurs Tristram me soutient, ce qui mérite quand même d'être souligné.
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Flore Vasseur
topocl- Messages : 8431
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 64
Localisation : Roanne
Re: Annie Ernaux
Bof, les deux sont subjectifs. Ensuite, on dècide...ou pas...
bix_229- Messages : 15439
Date d'inscription : 06/12/2016
Localisation : Lauragais
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