Nick Hunt
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Nick Hunt
Globe-trotter, écologiste militant, auteur d’articles de journaux, il est aussi éditeur et co-directeur du Dark Mountain Project pour une écologie radicale, et consultant éditorial de John Murray Press.
Œuvres :
• Walking the Woods and the Water (récit de voyage, 2014)
• Where the Wild Winds Are (récit de voyage, 2017) (Où vont les vents sauvages, Hoëbeke, 2020)
• The Parakeeting of London (“ornithologie gonzo” sur les perruches londoniennes)
• Outlandish (récit de voyage, 2021) (Un palmier en Arctique, Gallimard, 2022)
• Loss Soup and Other Stories (recueil de nouvelles, 2022)
(https://www.nickhuntscrutiny.com/)
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« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
Tristram- Messages : 15935
Date d'inscription : 09/12/2016
Age : 68
Localisation : Guyane
Re: Nick Hunt
Où vont les vents sauvages − Marcher à la rencontre des vents d’Europe des Pennines jusqu’en Provence
Quatre randonnées, quatre marches vers un vent d’Europe, l’helm (nord de l’Angleterre), la bora, le fœhn et le mistral, d’un écrivain voyageur qui s’intéresse à la météo et son rapport aux hommes.
L’helm, seul « vent nommé » du pays :
La bora, vent aride qu’il cherche à partir de Trieste sur le haut plateau karstique de Slovénie puis la côte adriatique et des montagnes de Croatie, passant par des îles (camp de concentration des fascistes italiens, puis allemands et enfin des communistes yougoslaves de Tito) pour atteindre finalement Split – qu'il rencontre enfin, d’abord la bora noire, puis la blanche.
J’ai trouvé étonnant de parler de Trieste sans évoquer Magris ; en fait les références littéraires d’Hunt sont nombreuses, quoique monomaniaques : il ne semble intéressé que par les vents !
Même un mot anglais comme golliwog (poupée de chiffon noire) n’est pas explicité ; j’ai cru comprendre que le pršut est du jambon cru (cf. prosciutto). Il me semble que l’éditeur aurait pu investir davantage dans l’appareil critique de cet ouvrage.
Puis c’est le fœhn, duquel il part à la recherche dans les Alpes suisses et liechtensteinoises. Hunt prépare son excursion sur des cartes :
Parti du lac de Constance et parvenu à celui de Genève en suivant le Rhin, la Reuss et le Rhône, il descend ce dernier avec le mistral dans le dos.
\Mots-clés : #nature #voyage
Quatre randonnées, quatre marches vers un vent d’Europe, l’helm (nord de l’Angleterre), la bora, le fœhn et le mistral, d’un écrivain voyageur qui s’intéresse à la météo et son rapport aux hommes.
L’helm, seul « vent nommé » du pays :
Le récit de la randonnée et les observations attentives d’Hunt alternent avec des commentaires scientifiques, historiques et culturels, allant jusqu’à une approche de Turner, qui « vénérait le pouvoir du climat. »« Seul dans ce lieu déserté, je découvris bientôt ce que les femmes de Kirkland avaient voulu dire en parlant de hurlements et de gémissements. Quelque chose avait dû se modifier dans la qualité de l’air, car le son du paysage changea soudain : par-dessus les souffles en rafales qui explosaient régulièrement à mes oreilles, un mystérieux murmure stagnant comme des distorsions de microphones s’élevait, une sorte de conversation malicieuse entre une dizaine de petites voix accompagnées d’un sifflement qui suggérait des branches et des spirales, des motifs complexes comme tissés dans l’air et sous tout cela, la complainte d’un animal en détresse. »
Il me semble que la traductrice a rendu "aéraulique" par "hydraulique", ce qui, avec d’autres expressions louches, est assez fâcheux. Et c’est sans compter avec les termes non traduits sans explication, comme curricks (sorte de cairns de la région) …« Cette expérience illustrait un point basique, qui me rendrait bien service lors de mes marches : sans la disposition d’esprit nécessaire pour entrevoir un chemin, j’étais incapable de trouver le mien. Sans elle, je me perdais. »
La bora, vent aride qu’il cherche à partir de Trieste sur le haut plateau karstique de Slovénie puis la côte adriatique et des montagnes de Croatie, passant par des îles (camp de concentration des fascistes italiens, puis allemands et enfin des communistes yougoslaves de Tito) pour atteindre finalement Split – qu'il rencontre enfin, d’abord la bora noire, puis la blanche.
Hunt se trouve au long de son périple pris dans le jugo, « variante locale du sirocco », vent du Sud chaud et humide, "malsain", en lutte avec l’air froid et sec du Nord contenu par le relief au-dessus de l’Adriatique.« Une chose énorme flottait dans l’air. »
« C’était moins un bruit qu’une sensation, une chose sans nom avec une énergie propre, qui effaçait la ligne de séparation entre entendre et éprouver ; pour la première fois de ma vie, je compris le son comme une force physique. »
J’ai trouvé étonnant de parler de Trieste sans évoquer Magris ; en fait les références littéraires d’Hunt sont nombreuses, quoique monomaniaques : il ne semble intéressé que par les vents !
Même un mot anglais comme golliwog (poupée de chiffon noire) n’est pas explicité ; j’ai cru comprendre que le pršut est du jambon cru (cf. prosciutto). Il me semble que l’éditeur aurait pu investir davantage dans l’appareil critique de cet ouvrage.
Puis c’est le fœhn, duquel il part à la recherche dans les Alpes suisses et liechtensteinoises. Hunt prépare son excursion sur des cartes :
Comme pour la bora, les autochtones se plaignent d’affections attribuées au foehn (maux de tête, « nervosité », et même « la dépression, l’anxiété et le désespoir suicidaire »). Hunt croise aussi la tramontane et la bise.« Répartie sous forme de vallées nombreuses finement ridées, avec des fractales de chaînes de montagnes violettes qui se ramifiaient et se subdivisaient, la complexité topographique de ce pays me déconcertait une fois de plus ; cela ressemblait moins à un voyage potentiel qu’aux lobes et aux hémisphères d’un cerveau distendu et informe. »
« La topographie rendait la perspective trompeuse. Ce qui semblait une simple balade sur la carte était rallongé par les contours des collines, les kilomètres comprimés comme une information encodée par un circuit imprimé. »
Parti du lac de Constance et parvenu à celui de Genève en suivant le Rhin, la Reuss et le Rhône, il descend ce dernier avec le mistral dans le dos.
Évocation de Van Gogh en Arles :« Le mistral semblait résider à l’intérieur des terres, et pas simplement y passer. »
Traversée de la steppe de la Crau :« Mais ce que son travail au pinceau capte peut-être mieux que tout, c’est le tumulte de l’air. David Abram le formule bien : "Même dans ses autoportraits, l’air n’est jamais calme, autour de Vincent – les coups de pinceau caractéristiques ploient et s’épanchent autour de sa tête comme de l’air en mouvement, que l’on peut même voir s’insinuer dans ses vêtements, dans ses traits. L’air se tord et se répand sous forme de torsades et de tourbillons perturbés, inlassablement." »
« Je m’étais arrêté là de façon relativement simple, parce que le monde, débarrassé de facteurs de complication, était réduit à ses plus simples éléments : il n’y avait que la terre et le ciel, et l’air qui se précipitait entre les deux. »
« Cette vague sèche refluait vers la mer. Je n’étais qu’un rocher de plus pris dans son courant. Pour la première fois depuis que je marchais, je compris – du moins durant une seconde – ce qu’il se passait vraiment autour de mon corps, sous ma peau ; les molécules d’air, qui filaient à toute allure de hautes à de basses pressions avec leur cargaison d’ions chargés, redressaient une balance atmosphérique déséquilibrée. Ce qui paraissait une force violente, déchirante, était en fait le rétablissement de la paix ; ce qui semblait un mouvement déchaîné était une tentative d’atteindre la quiétude.
Où le vent va-t-il, en réalité ? Où commence et où finit-il ? Il voyage, mais il n’arrive jamais, il erre partout et nulle part. Nous nageons dans une mer invisible d’atomes. Chercher à savoir où un souffle particulier termine son parcours et où un autre l’entame revient à vouloir voir l’endroit où deux océans se rejoignent. De ce point de vue, les vents sont différents des marches, pour lesquelles les fins et les débuts constituent des frontières fondamentales. Et pourtant, d’un autre point de vue, les vents sont comme les marcheurs. Ces derniers sont attirés dans le vaste monde – pas tant poussés dans le dos, qu’aspirés par les mystérieux vides de compréhension qui les attendent plus loin –, mais bien souvent sans être conscients des pressions qui les contraignent. Ils voyagent d’un endroit à l’autre dans l’attente que ces pressions s’équilibrent. Jusqu’à ce qu’ils gagnent une plaine assombrie. Et atteignent la quiétude. »
\Mots-clés : #nature #voyage
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Tristram- Messages : 15935
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Re: Nick Hunt
bons vents ?
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“Lire et aimer le roman d'un salaud n'est pas lui donner une quelconque absolution, partager ses convictions ou devenir son complice, c'est reconnaître son talent, pas sa moralité ou son idéal.”
― Le club des incorrigibles optimistes de Jean-Michel Guenassia
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"Il n'y a pas de mauvais livres. Ce qui est mauvais c'est de les craindre." L'homme de Kiev Malamud
Bédoulène- Messages : 21657
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Re: Nick Hunt
Un palmier en Arctique – Voyages imaginaires à travers l’Europe
Quatre voyages en Europe donc, mais transportant Hunt dans d’autres espaces comme dans le passé plus ou moins lointain : dans la toundra arctique résiduelle en Écosse, dans la Białowieża de Pologne et Biélorussie, dernière forêt « vierge » européenne, dans « Tabernas, l’unique désert de notre continent », en Andalousie, et dans la steppe hongroise venue d’Eurasie.
Les balades sont étoffées de considérations géographiques et historiques qui confinent à la vulgarisation scientifique, généralement très intéressantes, mais dont on pourrait questionner la validité (j’ai repéré quelques erreurs, dues à la traduction peut-être).
Rennes, bisons, bouquetins, chevaux, les totems des quatre biomes périphériques d’Europe, rappellent les migrations dans l’espace et le temps des eaux, plantes, animaux et êtres humains, ces vastes changements toujours en cours – avec l'accélération anthropique actuelle qui rend le proche avenir incertain.
On trouve dans ce livre nombre de mots et de noms, qui participent à l’étrangeté des lieux visités.
\Mots-clés : #ecologie #nature #voyage
Quatre voyages en Europe donc, mais transportant Hunt dans d’autres espaces comme dans le passé plus ou moins lointain : dans la toundra arctique résiduelle en Écosse, dans la Białowieża de Pologne et Biélorussie, dernière forêt « vierge » européenne, dans « Tabernas, l’unique désert de notre continent », en Andalousie, et dans la steppe hongroise venue d’Eurasie.
Les balades sont étoffées de considérations géographiques et historiques qui confinent à la vulgarisation scientifique, généralement très intéressantes, mais dont on pourrait questionner la validité (j’ai repéré quelques erreurs, dues à la traduction peut-être).
Rennes, bisons, bouquetins, chevaux, les totems des quatre biomes périphériques d’Europe, rappellent les migrations dans l’espace et le temps des eaux, plantes, animaux et êtres humains, ces vastes changements toujours en cours – avec l'accélération anthropique actuelle qui rend le proche avenir incertain.
On trouve dans ce livre nombre de mots et de noms, qui participent à l’étrangeté des lieux visités.
Après les ramblas (wadis, oueds), les bad-lands :« Est-il possible de ressentir de la solastalgie – cette douleur existentielle causée par les changements environnementaux – pour une ère glaciaire que personne n’a jamais connue et située à une distance temporelle inimaginable ? Le romancier Gregory Norminton a inventé un autre mot : l’archaïostalgie, « une nostalgie douloureuse du passé », ou encore l’antéanthropostalgie, « une nostalgie de l’époque précédant l’existence de l’homme ». Le climatologue Mark Goldthorpe suggère la télestalgie, « nostalgie de ce qui est éloigné dans le temps et dans l’espace », ainsi que la terrancholie ou « mélancolie terrestre ». Le Dictionary of Obscure Sorrows, un recueil en ligne de « termes nouvellement créés pour désigner des émotions étrangement fortes », contient anemoia, la « nostalgie d’un temps que vous n’avez jamais connu ». Quant au mot allemand Fernweh, il signifie un désir douloureux pour le lointain, tandis que Sehnsucht remplit les interstices entre l’envie et la nostalgie. »
« Des murs de boue s’élèvent de part et d’autre, renvoyant la chaleur réfractée ; leur texture est semblable à de la chair craquelée ou aux voies métaboliques d’un cerveau desséché. Il y a différentes gammes de formes répétitives qui ressemblent à des coquilles de patelles, des éventails alluviaux créés par des sédiments rejetés par le haut, puis déposés en formant des angles pyramidaux identiques de repos. L’effet combiné est fractal, presque psychédélique. »
« Tabernas n’est pas uniquement le seul désert d’Europe, mais aussi sa plus grande zone de mal país (les autres sont les calanchi d’Italie et les calanques du sud de la France). Le désert est le climat et les bad-lands la topographie. Le terme est à la fois culturel – synonyme de hors-la-loi, d’esclaves en fuite et de tribus récalcitrantes – et géologique : « une région marquée par une sculpture érosive complexe, une végétation clairsemée et des collines aux formes fantastiques », selon la définition du dictionnaire. Avec leurs étranges répliques et leurs silhouettes tordues et torturées en forme de buttes et de tourelles, de champignons à l’équilibre précaire et de phallus contorsionnés, ces bad-lands évoquent un sentiment de profonde bizarrerie ; une telle architecture doit certainement être l’œuvre non pas d’un dieu amoureux de l’ordre, mais d’une main diabolique, voire démente. Ces paysages se caractérisent par des flèches irrégulières et effilées appelées cheminées des fées ou hoodoos, que l’on trouve dans les régions érodées de l’Utah à la Cappadoce. De manière révélatrice, le mot hoodoo dériverait de « vaudou », une association (dans l’esprit des chrétiens, du moins) avec des forces surnaturelles malveillantes et la malchance. C’est une version topographique de « Là résident des monstres ». »
« Les graminées sont, à certains égards, les colons les plus efficients au monde, et certainement les végétaux colonisateurs les plus efficaces. […]
Environ douze mille espèces d’herbes couvrent plus d’un tiers de la surface terrestre de la planète. […]
Le blé, l’avoine, le seigle, le riz, le millet, le maïs, le teff, le sorgho et la canne à sucre sont tous des herbes domestiquées ; une douzaine de souches de Poaceae nourrissent aujourd’hui plus des neuf dixièmes de la population mondiale. »
\Mots-clés : #ecologie #nature #voyage
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Re: Nick Hunt
me tente bien, merci Tristram
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― Le club des incorrigibles optimistes de Jean-Michel Guenassia
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"Il n'y a pas de mauvais livres. Ce qui est mauvais c'est de les craindre." L'homme de Kiev Malamud
Bédoulène- Messages : 21657
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