Bruno Dumont
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Re: Bruno Dumont
L'humanité
Pharaon de Winter, le « héros », habite dans la rue du même nom à Bailleul. Normal, il est le descendant du peintre célèbre de la ville, qui a vraiment existé. Pharaon est inspecteur de police. On ne l’attend absolument pas dans cette fonction, tant il semble benêt avec une difficulté d’élocution prononcée. Il est confronté au meurtre sordide d’une fillette violée et tuée sur le chemin de l’école. Pharaon a pour amie sa voisine, Domino, dont il est amoureux. Celle-ci, jeune ouvrière, portée sur la sensualité est la petite amie de Joseph, un chauffeur de car quelque peu vulgaire. Pharaon est amené à accompagner le couple en sortie le soir ou en virée au bord de la mer.
Il peut avoir des comportements étranges, Pharaon, hurlant dans la nature un trop plein de douleur, manifestant des empathies qui paraissent exagérées.
Le second film de Dumont est un vrai chef d’œuvre qui nous emporte des rues tristes de Bailleul aux rivages de la côte d’Opale. Comme dans « La Vie de Jésus » de larges et longs plans sur les paysages, sur les personnages comme pour les interroger au plus profond d’eux-mêmes.
Et il y a cette figure christique qui porte le poids de la douleur et de la violence de l’humanité ; le film tarkovskien de Dumont
Pharaon de Winter, le « héros », habite dans la rue du même nom à Bailleul. Normal, il est le descendant du peintre célèbre de la ville, qui a vraiment existé. Pharaon est inspecteur de police. On ne l’attend absolument pas dans cette fonction, tant il semble benêt avec une difficulté d’élocution prononcée. Il est confronté au meurtre sordide d’une fillette violée et tuée sur le chemin de l’école. Pharaon a pour amie sa voisine, Domino, dont il est amoureux. Celle-ci, jeune ouvrière, portée sur la sensualité est la petite amie de Joseph, un chauffeur de car quelque peu vulgaire. Pharaon est amené à accompagner le couple en sortie le soir ou en virée au bord de la mer.
Il peut avoir des comportements étranges, Pharaon, hurlant dans la nature un trop plein de douleur, manifestant des empathies qui paraissent exagérées.
Le second film de Dumont est un vrai chef d’œuvre qui nous emporte des rues tristes de Bailleul aux rivages de la côte d’Opale. Comme dans « La Vie de Jésus » de larges et longs plans sur les paysages, sur les personnages comme pour les interroger au plus profond d’eux-mêmes.
Et il y a cette figure christique qui porte le poids de la douleur et de la violence de l’humanité ; le film tarkovskien de Dumont
ArenSor- Messages : 3443
Date d'inscription : 02/12/2016
Localisation : Rue du Nadir-aux-Pommes
Re: Bruno Dumont
Coincoin et les z'inhumains
Ou les aventures du commissaire Van der Weyden et de son adjoint Rudy Carpentier. Le premier est bourré de tics, le second fait le mariole en roulant sur deux roues, les deux entament des dialogues hautement surréalistes, même que parfois Rudy a du mal à suivre et traite le discours du commissaire « d’abscons », en essayant de faire comprendre à ce dernier qu’il ne s’agit pas d’une insulte.
Le générique rappelle « Strip-tease », le final exalte les défilés carnavalesques. La série en quatre épisodes diffusée sur Arte se déroule dans l’arrière-pays boulonnais, dans la région des deux caps où il se passe des choses bien étranges, en particulier la chute de bouses de vache géantes venues de l’espace !
Autant dire que règnent ici la démesure, l’absurde, le bouffon et le grotesque. C’est le monde de Bosch et de Brueghel, des kermesses de Rubens et des tavernes de van Ostade, des masques d’Ensor, du théâtre de Ghelderode et des facéties de Marcel Broodthaerts. Toute une tradition qui a marqué ces territoires de Flandres, de Hainaut et du Brabant et qui est ici magnifiquement reprise par Bruno Dumont.
Bien sûr, ce nord a aussi ses côtés sombres : Coincoin, allias Quinquin, est devenu en grandissant un partisan du mouvement politique « Bloc» et le commissaire Van der Weyden déclare que les extraterrestres et migrants sont du vivant… mais pas d’ici !
Une série très jouissive !
"C'est quoi ce bordel, Carpentier ?"
Ou les aventures du commissaire Van der Weyden et de son adjoint Rudy Carpentier. Le premier est bourré de tics, le second fait le mariole en roulant sur deux roues, les deux entament des dialogues hautement surréalistes, même que parfois Rudy a du mal à suivre et traite le discours du commissaire « d’abscons », en essayant de faire comprendre à ce dernier qu’il ne s’agit pas d’une insulte.
Le générique rappelle « Strip-tease », le final exalte les défilés carnavalesques. La série en quatre épisodes diffusée sur Arte se déroule dans l’arrière-pays boulonnais, dans la région des deux caps où il se passe des choses bien étranges, en particulier la chute de bouses de vache géantes venues de l’espace !
Autant dire que règnent ici la démesure, l’absurde, le bouffon et le grotesque. C’est le monde de Bosch et de Brueghel, des kermesses de Rubens et des tavernes de van Ostade, des masques d’Ensor, du théâtre de Ghelderode et des facéties de Marcel Broodthaerts. Toute une tradition qui a marqué ces territoires de Flandres, de Hainaut et du Brabant et qui est ici magnifiquement reprise par Bruno Dumont.
Bien sûr, ce nord a aussi ses côtés sombres : Coincoin, allias Quinquin, est devenu en grandissant un partisan du mouvement politique « Bloc» et le commissaire Van der Weyden déclare que les extraterrestres et migrants sont du vivant… mais pas d’ici !
Une série très jouissive !
"C'est quoi ce bordel, Carpentier ?"
ArenSor- Messages : 3443
Date d'inscription : 02/12/2016
Localisation : Rue du Nadir-aux-Pommes
Re: Bruno Dumont
Waouh.ArenSor a écrit:Autant dire que règnent ici la démesure, l’absurde, le bouffon et le grotesque. C’est le monde de Bosch et de Brueghel, des kermesses de Rubens et des tavernes de van Ostade, des masques d’Ensor, du théâtre de Ghelderode et des facéties de Marcel Broodthaerts. Toute une tradition qui a marqué ces territoires de Flandres, de Hainaut et du Brabant et qui est ici magnifiquement reprise par Bruno Dumont.
Voilà qui aurait raison de mes dernières réticences, si réticences il y avait !
Quasimodo- Messages : 5461
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 29
Re: Bruno Dumont
J'ai visionné 2/4 épisodes de la mini-série, waouh effectivement, beau travail d'ethnologue !
Aussi satires, des forces de l’ordre, des politiques, des médias, et d’autres.
Mme Leleu a écrit:C'est qui qu'a mis son zigounet din sa pimprenelle ?
Là, c'est la vraie chose, pas des nunucheries comme en Provence ou en Bretagne, non, le vrai terroir, bien profond...L'inspecteur Carpentier, puis le commandant a écrit:- Comment voulez-vous qu'y savent ?
- Y comprend pas, je parle pourtant bien le français, hein ?
Aussi satires, des forces de l’ordre, des politiques, des médias, et d’autres.
Coincoin a écrit:Bin on a été coller des affiches, et là y’a les flics qui nous collent au cul.
Les prêtres a écrit:On comprend pas qu'est-ce que vous disez, mon commandant.
_________________
« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
Tristram- Messages : 16022
Date d'inscription : 09/12/2016
Age : 68
Localisation : Guyane
Re: Bruno Dumont
Twentynine palms
2003
Bruno Dumont délaisse son Nord de prédilection pour les grands espaces américains, précisément la ville de Twentynine Palms en Californie et le désert Mojave aux paysages d’une sidérante beauté. Un jeune couple parcourt ces chaos de roches en repérage photo. Les deux se font l’amour avec violence, se parlent, mais sans communiquer vraiment. On fait parfois de sales rencontres dans ces lieux solitaires et l’humiliation peut conduire à l’horreur pure.
C’est un peu une sorte de thriller dans lequel l’angoisse est constamment présente dans les longs plans contemplatifs du paysage. On sent qu'on va vers une catastrophe, sans comprendre comment et pourquoi.
Le film est un bel hommage également à Antonioni, maître de l’incommunicabilité dans le couple et à « Zabriskie point » tourné dans des lieux proches.
Excellente interprétation avec l’inoubliable et regrettée Katerina Golubeva.
2003
Bruno Dumont délaisse son Nord de prédilection pour les grands espaces américains, précisément la ville de Twentynine Palms en Californie et le désert Mojave aux paysages d’une sidérante beauté. Un jeune couple parcourt ces chaos de roches en repérage photo. Les deux se font l’amour avec violence, se parlent, mais sans communiquer vraiment. On fait parfois de sales rencontres dans ces lieux solitaires et l’humiliation peut conduire à l’horreur pure.
« En Europe, on vit dans des espaces très réduits, notre mental vient de là. Aux Etats-Unis, les espaces sont d’une immensité qui, pour un européen, crée un véritable choc, provocant des sensations totalement étonnantes.
Des sensations de peur, dues à cette immensité. En même temps, le désert a un impact méditatif qui m’intéressait sans que j’ai envie pour cela de faire un film méditatif mais surtout un film qui contienne une énergie, une violence. « Twentynine Palms » a plutôt été construit sur cette sensation de peur, une peur abstraite car il n’y a pas de raison d’avoir peur. C’est pourquoi le film repose sur un suspense qui se base sur la banalité. »
C’est un peu une sorte de thriller dans lequel l’angoisse est constamment présente dans les longs plans contemplatifs du paysage. On sent qu'on va vers une catastrophe, sans comprendre comment et pourquoi.
Le film est un bel hommage également à Antonioni, maître de l’incommunicabilité dans le couple et à « Zabriskie point » tourné dans des lieux proches.
Excellente interprétation avec l’inoubliable et regrettée Katerina Golubeva.
ArenSor- Messages : 3443
Date d'inscription : 02/12/2016
Localisation : Rue du Nadir-aux-Pommes
Re: Bruno Dumont
Episode 3/4 de la saison 1 de Coincoin :
_ C'est compliqué les filles.
_ C'est plutôt les garçons qui sont trop simples.
La fin du monde humain...
La mort humaine...
Les Noirs qui immigrent sur les routes sans permis...
_________________
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Tristram- Messages : 16022
Date d'inscription : 09/12/2016
Age : 68
Localisation : Guyane
Re: Bruno Dumont
Tristram a écrit:La fin du monde humain...
La mort humaine...
Les Noirs qui immigrent sur les routes sans permis...
Ouais c'est l'Apocalypse Carpentier, l'Apocalypse ! la fin de l'humain.
ArenSor- Messages : 3443
Date d'inscription : 02/12/2016
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Re: Bruno Dumont
Hadewijch
2009
Le nom du film me semblait avoir une sonorité moyen-orientale. Normal, sachant qu’il y était question du Djihad. Et bien pas du tout, Hadewijch est le nom d’une mystique flamande du 13e siècle auteure de lettres, poèmes réflexions dans lesquelles elle clame son amour de Dieu.
Pour Bruno Dumont, Hadewijch est une jeune fille bien de notre temps, qui vient de se faire renvoyer du couvent car les religieuses la trouvent trop exaltée : excès de mortifications, de pénitences, marquent un amour de soi plus que de Dieu, la place d’Hadewijch est dans le monde et non dans le cloître.
La jeune fille va donc revenir chez ses parents à Paris. Elle y rencontre un groupe de jeunes de banlieue dont l’un la présente à son frère qui anime un groupe de réflexion sur l’Islam.
Bruno Dumont, ancien professeur de philo qui ne cache pas son athéisme, découvre avec ce film la mystique, sujet qu’il développera dans « Hors-Satan ».
Un bonus présente une interview de Dumont qui éclaire singulièrement le film et plus généralement la démarche du réalisateur depuis « La Vie de Jésus ». Il déclare que la mystique lui a permis de faire coïncider les contraires : une jeune fille qui proclame son amour de Dieu et de l’humanité et qui en vient à tuer des gens, le rapprochement est difficilement explicable par la philosophie ou la moralité, mais cela ne pose aucun problème dans la rhétorique mystique.
Dumont nous dit encore que la mystique présente une démarche semblable à sa recherche esthétique : chercher l’invisible dans le visible. «Si je filme une pelouse, ce n’est pas la pelouse qui m’intéresse, mais ce qui se trouve au-delà de la pelouse ; libre au spectateur d’y trouver quelque chose … ou rien ».
Voilà certainement pourquoi je suis si sensible et si intéressé par le cinéma de Dumont : les longs plans-séquences sur les paysages, les êtres, les visages, qui cherchent à montrer plus que le paysage ou le visage. C’était déjà toute la démarche d’un Tarkovski.
Le cinéma de Dumont est non pas contemplatif, mais fait du réel un envers d’une autre face, une face qui pourrait être la plus belle part de notre humanité, celle de la transcendance, de la poésie. C’est un cinéaste qui interroge, pose des questions, parfois dérange, gratte où ça fait mal. Est-il inutile par les temps qui courent de tenter de montrer à des spectateurs pourquoi et comment une jeune fille d’un couvent catholique peut être amenée au Djihad ?
2009
Le nom du film me semblait avoir une sonorité moyen-orientale. Normal, sachant qu’il y était question du Djihad. Et bien pas du tout, Hadewijch est le nom d’une mystique flamande du 13e siècle auteure de lettres, poèmes réflexions dans lesquelles elle clame son amour de Dieu.
Pour Bruno Dumont, Hadewijch est une jeune fille bien de notre temps, qui vient de se faire renvoyer du couvent car les religieuses la trouvent trop exaltée : excès de mortifications, de pénitences, marquent un amour de soi plus que de Dieu, la place d’Hadewijch est dans le monde et non dans le cloître.
La jeune fille va donc revenir chez ses parents à Paris. Elle y rencontre un groupe de jeunes de banlieue dont l’un la présente à son frère qui anime un groupe de réflexion sur l’Islam.
Bruno Dumont, ancien professeur de philo qui ne cache pas son athéisme, découvre avec ce film la mystique, sujet qu’il développera dans « Hors-Satan ».
Un bonus présente une interview de Dumont qui éclaire singulièrement le film et plus généralement la démarche du réalisateur depuis « La Vie de Jésus ». Il déclare que la mystique lui a permis de faire coïncider les contraires : une jeune fille qui proclame son amour de Dieu et de l’humanité et qui en vient à tuer des gens, le rapprochement est difficilement explicable par la philosophie ou la moralité, mais cela ne pose aucun problème dans la rhétorique mystique.
Dumont nous dit encore que la mystique présente une démarche semblable à sa recherche esthétique : chercher l’invisible dans le visible. «Si je filme une pelouse, ce n’est pas la pelouse qui m’intéresse, mais ce qui se trouve au-delà de la pelouse ; libre au spectateur d’y trouver quelque chose … ou rien ».
Voilà certainement pourquoi je suis si sensible et si intéressé par le cinéma de Dumont : les longs plans-séquences sur les paysages, les êtres, les visages, qui cherchent à montrer plus que le paysage ou le visage. C’était déjà toute la démarche d’un Tarkovski.
Le cinéma de Dumont est non pas contemplatif, mais fait du réel un envers d’une autre face, une face qui pourrait être la plus belle part de notre humanité, celle de la transcendance, de la poésie. C’est un cinéaste qui interroge, pose des questions, parfois dérange, gratte où ça fait mal. Est-il inutile par les temps qui courent de tenter de montrer à des spectateurs pourquoi et comment une jeune fille d’un couvent catholique peut être amenée au Djihad ?
ArenSor- Messages : 3443
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Re: Bruno Dumont
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Tristram- Messages : 16022
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Re: Bruno Dumont
Jeanne
2019
Chronologie un peu bouleversée en raison de la sortie de ce film sur les écrans en septembre dernier. « Jeanne » est la suite de « Jeannette » que je n’ai pas vu mais que je vais m’empresser de visionner en DVD.
Le film est une étrange rencontre, totalement improbable, entre des phrases de Charles Péguy échangées par des acteurs non professionnels, une musique électro-acoustique et des chants de Christophe (textes toujours de Péguy) et une jeune actrice de 12 ans incarnant Jeanne d’Arc.
Le miracle est que ce curieux assemblage fonctionne parfaitement !
Le film est une superbe mise en valeur du drame de Charles Péguy « Jeanne d’Arc », écrit
en 1897. « Jeannette » illustrait la première partie « A Domremy » ; « Jeanne », les deux suivantes : « Les Batailles » et « Rouen ». Plus précisément le récit commence au siège de Paris, c’est-à-dire à l’époque des premières défaites, des défections de compagnons d’armes et du roi, du doute. S’ensuivent la capture et la condamnation.
Amateurs de reconstitutions historiques, vous risquez d’être déçus. Là n’est pas le but de Bruno Dumont : le décor est dunaire et la prison de Jeanne est un blockhaus du mur de l’Atlantique ! Il y a tout de même de beaux passages spectaculaires comme une danse des chevaux caparaçonnés au rythme des tambours.
Comme il l’avoue lui-même, le réalisateur se fichait de Jeanne d’Arc, personnage qu’il a «découvert» en lisant Péguy. Ce n’est donc pas la Jeanne de l’histoire, mais la Jeanne vue par Péguy qui est au cœur du film. Là, auteur et réalisateur s’épaulent mutuellement. La scansion poétique de la phrase de Péguy donne force et profondeur au film qui en retour met pleinement en valeur la poésie de l’auteur.
Jeanne est donc une fillette, choix judicieux car il marque la jeunesse et l’innocence de l’héroïne. Caractères qui se doublent d’une détermination farouche. La « gamine » ne cède rien face à la casuistique de ses juges et la réplique est souvent cinglante : «Vous n’en saurez pas un mot : cela ne vous regarde pas. ».
Film d’une grande profondeur spirituelle, magnifique hommage à la poésie de Charles Péguy, « Jeanne » est à voir absolument !
2019
Chronologie un peu bouleversée en raison de la sortie de ce film sur les écrans en septembre dernier. « Jeanne » est la suite de « Jeannette » que je n’ai pas vu mais que je vais m’empresser de visionner en DVD.
Le film est une étrange rencontre, totalement improbable, entre des phrases de Charles Péguy échangées par des acteurs non professionnels, une musique électro-acoustique et des chants de Christophe (textes toujours de Péguy) et une jeune actrice de 12 ans incarnant Jeanne d’Arc.
Le miracle est que ce curieux assemblage fonctionne parfaitement !
Le film est une superbe mise en valeur du drame de Charles Péguy « Jeanne d’Arc », écrit
en 1897. « Jeannette » illustrait la première partie « A Domremy » ; « Jeanne », les deux suivantes : « Les Batailles » et « Rouen ». Plus précisément le récit commence au siège de Paris, c’est-à-dire à l’époque des premières défaites, des défections de compagnons d’armes et du roi, du doute. S’ensuivent la capture et la condamnation.
Amateurs de reconstitutions historiques, vous risquez d’être déçus. Là n’est pas le but de Bruno Dumont : le décor est dunaire et la prison de Jeanne est un blockhaus du mur de l’Atlantique ! Il y a tout de même de beaux passages spectaculaires comme une danse des chevaux caparaçonnés au rythme des tambours.
Comme il l’avoue lui-même, le réalisateur se fichait de Jeanne d’Arc, personnage qu’il a «découvert» en lisant Péguy. Ce n’est donc pas la Jeanne de l’histoire, mais la Jeanne vue par Péguy qui est au cœur du film. Là, auteur et réalisateur s’épaulent mutuellement. La scansion poétique de la phrase de Péguy donne force et profondeur au film qui en retour met pleinement en valeur la poésie de l’auteur.
Jeanne est donc une fillette, choix judicieux car il marque la jeunesse et l’innocence de l’héroïne. Caractères qui se doublent d’une détermination farouche. La « gamine » ne cède rien face à la casuistique de ses juges et la réplique est souvent cinglante : «Vous n’en saurez pas un mot : cela ne vous regarde pas. ».
Film d’une grande profondeur spirituelle, magnifique hommage à la poésie de Charles Péguy, « Jeanne » est à voir absolument !
ArenSor- Messages : 3443
Date d'inscription : 02/12/2016
Localisation : Rue du Nadir-aux-Pommes
Re: Bruno Dumont
Vu comme ça (pas le film, pas encore vu), il n'y aurait pas un petit côté Greta Thunberg (je sais, effets et méfaits de l'info) ? Sinon, je vais essayer de voir Jeannette d'abord.
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Tristram- Messages : 16022
Date d'inscription : 09/12/2016
Age : 68
Localisation : Guyane
Re: Bruno Dumont
Jeannette, l'enfance de Jeanne d'Arc
2017
Le côté comédie musicale impose d'entrée le décalage de l'histoire, une distanciation théâtrale entretenue par la "prose musicale" de Péguy, l'amateurisme des acteurs, évidemment la bande-son électro-pop-rock-rap (sans parler de Domrémy dans les dunes de Côte d'Opale _ beaux paysages d'ailleurs).
Mais le genre me laisse un peu dubitatif, les aspects nationaliste et catholique du texte peut-être, enfin, tout cela est censé montrer le spirituel (dans les deux sens du terme)...
2017
Le côté comédie musicale impose d'entrée le décalage de l'histoire, une distanciation théâtrale entretenue par la "prose musicale" de Péguy, l'amateurisme des acteurs, évidemment la bande-son électro-pop-rock-rap (sans parler de Domrémy dans les dunes de Côte d'Opale _ beaux paysages d'ailleurs).
Mais le genre me laisse un peu dubitatif, les aspects nationaliste et catholique du texte peut-être, enfin, tout cela est censé montrer le spirituel (dans les deux sens du terme)...
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« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
Tristram- Messages : 16022
Date d'inscription : 09/12/2016
Age : 68
Localisation : Guyane
Re: Bruno Dumont
Je n'ai pu y aller dans ma ville finalement. Bon. (Au "Jeanne")
Nadine- Messages : 4883
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 49
Re: Bruno Dumont
Je te rejoins ...
J'avoue que là c'était très moyennement réussi !
églantine- Messages : 4431
Date d'inscription : 02/12/2016
Localisation : Savoie
Re: Bruno Dumont
Jeannette, l'enfance de Jeanne d'Arc
2017
On pourrait penser que Jeannette est la première partie de "Jeanne" puisque ces deux films suivent le drame de Péguy "Jeanne d'Arc" (avec des incursions dans "Le mystère de la charité"). Toutefois, la forme cinématographique est radicalement différente. "Jeannette" est une comédie musicale, musique de IGORRR et chorégraphie de Découflé, ce que n'est pas "Jeanne". J'ai trouvé que l'osmose était parfois quasi-parfaite amenant à des scènes étonnantes : au départ, la danse avec les deux jeunes mendiants et à la fin, la Partance. En revanche, lors de moments d'intensité dramatique, rencontre avec madame Gervaise dédoublée, ou apparition de la triade, sainte Marguerite, sainte Catherine et saint Michel, on frôle le ridicule.
C'est donc pour moi un film plus expérimental et moins abouti que "Jeanne".
Ces deux films ont eu le mérite de me faire redécouvrir la beauté de la poésie de Péguy
2017
On pourrait penser que Jeannette est la première partie de "Jeanne" puisque ces deux films suivent le drame de Péguy "Jeanne d'Arc" (avec des incursions dans "Le mystère de la charité"). Toutefois, la forme cinématographique est radicalement différente. "Jeannette" est une comédie musicale, musique de IGORRR et chorégraphie de Découflé, ce que n'est pas "Jeanne". J'ai trouvé que l'osmose était parfois quasi-parfaite amenant à des scènes étonnantes : au départ, la danse avec les deux jeunes mendiants et à la fin, la Partance. En revanche, lors de moments d'intensité dramatique, rencontre avec madame Gervaise dédoublée, ou apparition de la triade, sainte Marguerite, sainte Catherine et saint Michel, on frôle le ridicule.
C'est donc pour moi un film plus expérimental et moins abouti que "Jeanne".
Ces deux films ont eu le mérite de me faire redécouvrir la beauté de la poésie de Péguy
ArenSor- Messages : 3443
Date d'inscription : 02/12/2016
Localisation : Rue du Nadir-aux-Pommes
Re: Bruno Dumont
Vous avez vu sans doute, sur Arte, en replay, il y a une bonne pelletée de ses films disponibles depuis un mois ou deux.
Je crois que son ton est trop bousculant pour la petite précieuse que je suis, Arensor je m'abstiens d'y aller voir malgré la grande estime que je porte à tes intérêts. J'ai par contre trouvé qu'il serait dommage que l'on passe à côté de cette quasi-rétrospective offerte sur un plateau pour qui a internet et un écran d'ordi correct par ignorance de ce lien.
Pour vous servir
https://www.arte.tv/fr/videos/RC-021397/le-cinema-de-bruno-dumont/
Je crois que son ton est trop bousculant pour la petite précieuse que je suis, Arensor je m'abstiens d'y aller voir malgré la grande estime que je porte à tes intérêts. J'ai par contre trouvé qu'il serait dommage que l'on passe à côté de cette quasi-rétrospective offerte sur un plateau pour qui a internet et un écran d'ordi correct par ignorance de ce lien.
Pour vous servir
https://www.arte.tv/fr/videos/RC-021397/le-cinema-de-bruno-dumont/
Nadine- Messages : 4883
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Age : 49
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