Anise Postel-Vinay
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Re: Anise Postel-Vinay
Vivre
Anise Postel-Vinay a vingt ans lorsque les nazis entrent dans Paris. Elle parvient à intégrer un réseau de résistance et elle est arrêtée par la Gestapo en août 1942. Elle est emprisonnée à la Santé en isolement (le moment le plus difficile de son parcours dit-elle), puis à la prison de Fresnes avant de prendre le train pour le camp de concentration de Ravensbrück. Elle devient l'amie de Germaine Tillion et parvient à sauver Geneviève de Gaulle, la nièce du général.
En commençant la lecture de Vivre, j'ai eu le sentiment d'être en terrain connu et de ne presque plus rien avoir à apprendre sur la déportation (d'autant plus que j'ai lu le livre quasiment ethnographique de Germaine Tillion sur Ravensbrück). Mais plus la lecture de ce témoignage avançait et plus l'émotion m'a submergée.
Car ce que raconte Mme Postel-Vinay dans un récit publié en 2015, c'est bien ce que Semprun appelle le Mal radical.
Je connaissais déjà l'histoire des "lapins", ces polonaises utilisées comme cobayes par un médecin du Reich mais je croyais que ses expériences devaient servir à soigner les soldats blessés sur le front russe. Mme Postel-Vinay contredit cette information et souligne que ces expériences sont le résultat de l'orgueil des médecins et d'une 'simple' concurrence entre deux visions, l'une chirurgicale (Gebhardt) et l'autre aux sulfamides (Morell). Pour départager les deux médecins, il fallait donc en passer par la mutilation et la mort de centaines de femmes…
Voilà ce que nous dit Mme Postel-Vinay. Elle nous dit la perversion dans l'ingéniosité, elle nous dit le raisonnement, le calcul, l'intelligence pour parvenir à l'anéantissement.
Tout était calculé pour nous épuiser, pour entretenir un manque dans chaque domaine : le sommeil, les soins, la nourriture, les vêtements -nous n'avions pas assez de tout cela, mais quand même un peu. Un peu de sommeil, un peu de nourriture, quelques vêtements, une infirmerie. Le calcul consistait à épuiser les détenus, pour qu'ils finissent pas disparaître d'eux-mêmes.
(…)
C'est ce qui était le plus impressionnant dans le nazisme : ce calcul de l'anti-homme. Tout était calculé pour qu'une large partie de la population, qu'elle quelle soit disparaisse -vite ou lentement.
Et si la forme très orale de ce récit de 120 pages, très lapidaire, voire frustrante, a au départ un peu gêné ma lecture, je dois dire que ce relâchement-là est sans doute le seul qui permette d'aller au bout de ce témoignage. Sans cette légèreté de vingt ans, sans cette fraîcheur de jeune femme encore presque jeune fille, ce récit serait illisible, inenvisageable, bien trop intolérable.
Mme Postel-Vinay explique que les mois de détention qu'elle a vécu à l'isolement à Paris ont été les plus durs à supporter et que la vie à Ravensbrück était possible parce qu'elle était avec d'autres femmes, d'autres femmes qu'il fallait soutenir, aider, sauver, cacher, protéger.
Grande et belle leçon à retenir que cette solidarité-là.
Elle dit aussi combien il a été dur à la Libération d'arriver à faire entendre la voix des déporté-e-s, reste aujourd'hui ce récit atroce et nécessaire.
mots-clés : #campsconcentration
shanidar- Messages : 1592
Date d'inscription : 02/12/2016
Re: Anise Postel-Vinay
merci Shanidar pour ton commentaire ; je n'ai pas lu ce livre et je suis sure que ce sujet me toucherait car révoltant, pour toute personne à priori et à fortiori pour les femmes.
(tu mentionnes avec Laure Adler : c'est à dire pour l'écriture ? car alors tu peux le mentionner dans le nom d'auteur)
(tu mentionnes avec Laure Adler : c'est à dire pour l'écriture ? car alors tu peux le mentionner dans le nom d'auteur)
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“Lire et aimer le roman d'un salaud n'est pas lui donner une quelconque absolution, partager ses convictions ou devenir son complice, c'est reconnaître son talent, pas sa moralité ou son idéal.”
― Le club des incorrigibles optimistes de Jean-Michel Guenassia
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"Il n'y a pas de mauvais livres. Ce qui est mauvais c'est de les craindre." L'homme de Kiev Malamud
Bédoulène- Messages : 21461
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 79
Localisation : En Provence
Re: Anise Postel-Vinay
L'éditeur dit : écrit avec la complicité de Laure Adler et Léa Veinstein , je pense que la mère et la fille ont dû uniquement travailler sur la mise en forme du texte...
shanidar- Messages : 1592
Date d'inscription : 02/12/2016
Re: Anise Postel-Vinay
c'est OK pour ton nom alors, merci
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Bédoulène- Messages : 21461
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