Pierre Choderlos de Laclos
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Pierre Choderlos de Laclos
Pierre Choderlos de Laclos
(1741-1803)
(1741-1803)
Une naissance médiocre, peu de fortune amenèrent Laclos à choisir le métier des armes. Officier d'artillerie besogneux qui ne trouva pas le champ libre pour ses ambitions, il n'était encore que capitaine en 1769. En garnison à l'île d'Aix et à l'île de Ré, il résolut de « faire un ouvrage qui sortît de la route ordinaire, qui fît du bruit ». Ce livre sera les Liaisons dangereuses, qui parurent en 1782 et qui provoquèrent le scandale. Du moins, leur auteur fit figure de grand personnage dans la société, sans, toutefois, qu'il se déterminât à embrasser la carrière des lettres. S'il se fit remarquer des autorités militaires par sa Lettre à MM. de l'Académie sur l'éloge de Vauban (1786), ce fut pour être envoyé à Toul et y apprendre la discipline. À la veille de la Révolution, il entra au service de Philippe d'Orléans, puis devint membre du club des Jacobins (1790), réorganisa l'artillerie des armées de la République (1792), mais, accusé de complicité avec Dumouriez, fut incarcéré l'année suivante. Il recouvrit la liberté pour faire des expériences sur une de ses inventions, le « boulet creux », mais il fut de nouveau arrêté à la fin de 1793. Libéré après Thermidor, il fut affecté à l'armée du Rhin avec le titre de général de brigade (1800). Il mourut de dysenterie en défendant la ville de Tarente.
source : encyclopédie Larousse
Oeuvres :
Ernestine, opéra-comique, 1777
Les Liaisons dangereuses, 1782
Des Femmes et de leur éducation, 1783
Instructions aux assemblées de bailliage, 1789
Journal des amis de la Constitution, 1790-1791
De la Guerre et de la paix, 1795
Invité- Invité
Re: Pierre Choderlos de Laclos
Bon ... je vous le clame d'emblée, ça va être coton, de vous parler des Liaisons dangereuses. Le principal fait d'armes du Monsieur de Laclos (quelqu'un aurait lu ses autres oeuvres, ça vaut le coup que je craque pour le Pléiade de 1979?).
Je n'ai pas encore fini ma lecture, j'en suis aux deux tiers, à vue de nez. Mais je suis conquis. C'est un des plus grands textes que j'aie pu lire.
Je crois que de connaître la trame via les adaptations ciné est un plus, car ça permet de mieux suivre le déroulé narratif qui est d'une incroyable virtuosité, tant l'auteur varie les angles d'attaque, les épistoliers, et les points de vue.
Que ce soit pour les personnages de Merteuil, et Valmont (ou pour les dindons de la farce), il redouble d'élégance et de finesse pour nous envoûter et nous perdre dans les méandres de ses formules délicieuses subtiles, perverses, et machiavéliques.
Ce sera compliqué de citer, car tout vient à la suite, c'est implacable, on entre dans une mécanique, qui nous broie petit à petit, et qui semble toujours que plus insoutenable, d'une intensité féroce.
Je relève tout de même un passage qui a de quoi faire grincer les dents ?
- Spoiler:
- Lettre CXIII La marquise de Merteuil répond à Valmont :
(...)
Il n'est pas vrai que plus les femmes vieillissent, et plus elles deviennent rêches et sévères . C'est de quarante à cinquante ans que le désespoir de voir leur figure se flétrir, la rage de se sentir obligées d'abandonner des prétentions et des plaisirs auxquels elles tiennent encore, rendent presque toutes les femmes bégueules et acariâtres. Il leur faut ce long intervalle pour faire en entier ce grand sacrifice: mais dès qu'il est consommé, toutes se partagent en deux classes.
La plus nombreuse, celle des femmes qui n'ont eu pour elles que leur figure et leur jeunesse, tombe dans une imbécile apathie, et n'en sort plus que pour le jeu et pour quelques pratiques de dévotion; celle-là est toujours ennuyeuse, souvent grondeuse, quelquefois un peu tracassière, mais rarement méchante. On ne peut pas dire non plus que ces femmes soient ou ne soient pas sévères: sans idées et sans existence, elles répètent, sans le comprendre et indifféremment, tout ce qu'elles entendent dire, et restent par elles-mêmes absolument nulles.
L'autre classe, beaucoup plus rare, mais véritablement précieuse, est celle des femmes qui, ayant eu un caractère et n'ayant pas négligé de nourrir leur raison, savent se créer une existence, quand celle de la nature leur manque, et prennent le parti de mettre à leur esprit les parures qu'elles employaient avant pour leur figure. Celles-ci ont pour l'ordinaire le jugement très sain, et l'esprit à la fois solide, gai et gracieux. Elles remplacent les charmes séduisants par l'attachante bonté, et encore par l'enjouement dont le charme augmente en proportion de l'âge: c'est ainsi qu'elles parviennent en quelque sorte à se rapprocher de la jeunesse en s'en faisant aimer. Mais alors, loin d'être, comme vous le dites, rêches et sévères , l'habitude de l'indulgence, leurs longues réflexions sur la faiblesse humaine, et surtout les souvenirs de leur jeunesse, par lesquels seuls elles tiennent encore à la vie, les placeraient plutôt peut-être trop près de la facilité.
Et un plus révélateur de ce dont je parle plus haut :
Lettre CXV, Valmont s'adresse à Merteuil
(...)
Que n'aurai-je pas fait pour ce Danceny? J'aurai été à la fois son ami, son confident, son rival et sa maîtresse! Encore, en ce moment, je lui rends le service de le sauver de vos liens dangereux; oui, sans doute, dangereux, car vous posséder et vous perdre, c'est acheter un moment de bonheur par une éternité de regrets.
Invité- Invité
Re: Pierre Choderlos de Laclos
Parfois imité, jamais égalé !
bix_229- Messages : 15439
Date d'inscription : 06/12/2016
Localisation : Lauragais
Re: Pierre Choderlos de Laclos
Mais vous êtes jaloux, et la jalousie ne raisonne pas. Hé bien! je vais raisonner pour vous.
Ou vous avez un rival, ou vous n'en avez pas. Si vous en avez un, il faut plaire pour lui être préféré; si vous n'en avez pas, il faut encore plaire pour éviter d'en avoir. Dans tous les cas, c'est la même conduite à tenir: ainsi, pourquoi vous tourmenter? pourquoi, surtout, me tourmenter moi-même? Ne savez- vous donc plus être le plus aimable? et n'êtes-vous plus sûr de vos succès? Allons donc, Vicomte, vous vous faites tort. Mais, ce n'est pas cela; c'est qu'à vos yeux, je ne vaux pas que vous vous donniez tant de peine. Vous désirez moins mes bontés que vous ne voulez abuser de votre empire. Allez, vous êtes un ingrat. Voilà bien, je crois, du sentiment! et pour peu que je continuasse, cette Lettre pourrait devenir fort tendre; mais vous ne le méritez pas.
Et pan, dans les dents !
Invité- Invité
Re: Pierre Choderlos de Laclos
Choderlos m'a happé, j'ai été obligé de me plonger avec passion jusqu'à la fin, ça faisait longtemps que je n'avais pas tant accroché avec un bouquin.
Le verrou, 1776, par Fragonard.
source Théâtre contemporain.
Le verrou, 1776, par Fragonard.
On rapprochera le Verrou de la scène du viol de Cécile par Valmont. Dans le Verrou, la scène oscille entre badinage amoureux et scène de viol. Le tableau est riche en symboles : la pomme posée sur la table, la cruche à terre et les fleurs éparses sont autant de symboles de la vertu mise à mal. Le titre oriente également le spectateur puisque l'expression « faire sauter le verrou » est une expression imagée désignant le viol.
source Théâtre contemporain.
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Re: Pierre Choderlos de Laclos
Je découvre enfin ce fil, alors que Les liaisons dangereuses est peut-être à mes yeux le texte où l'on trouve le plus beau français.
« Ah ! Si Magdeleine était ainsi, elle dût être bien plus dangereuse pénitente que pécheresse. »
Choderlos de Laclos, « Les liaisons dangereuses », Lettre LXIII
« On s’ennuie de tout, mon Ange, c’est une loi de la Nature ; ce n’est pas ma faute.
Si donc je m’ennuie aujourd’hui d’une aventure qui m’a occupé entièrement depuis quatre mortels mois, ce n’est pas ma faute.
Si, par exemple, j’ai eu juste autant d’amour que toi de vertu, et c’est sûrement beaucoup dire, il n’est pas étonnant que l’un ait fini en même temps que l’autre. Ce n’est pas ma faute.
Il suit de là, que depuis quelque temps je t’ai trompée : mais aussi, ton impitoyable tendresse m’y forçait en quelque sorte ! Ce n’est pas ma faute.
Aujourd’hui, une femme que j’aime éperdument exige que je te sacrifie. Ce n’est pas ma faute.
Je sens bien que te voilà une belle occasion de crier au parjure : mais si la nature n’a accordé aux hommes que la constance, tandis qu’elle donnait aux femmes l’obstination, ce n’est pas ma faute.
Crois-moi, choisis un autre amant, comme j’ai fait une autre maîtresse. Ce conseil est bon, très bon ; si tu le trouves mauvais, ce n’est pas ma faute.
Adieu, mon ange, je t’ai prise avec plaisir, je te quitte sans regret : je te reviendrai peut-être. Ainsi va le monde. Ce n’est pas ma faute. »
Choderlos de Laclos, « Les liaisons dangereuses », Lettre CXLI
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« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
Tristram- Messages : 15610
Date d'inscription : 09/12/2016
Age : 67
Localisation : Guyane
Re: Pierre Choderlos de Laclos
Ben t'étais où quand j'ai créé le fil ?
Merci pour les extraits.
Merci pour les extraits.
Invité- Invité
Re: Pierre Choderlos de Laclos
J'ai besoin d'éblouissement et de retrouver des émotions littéraires fortes... Tout ce que je lis me semble insipide et sans saveur.
Voilà un chemin tout tracé peut-être... Merci !
Voilà un chemin tout tracé peut-être... Merci !
églantine- Messages : 4431
Date d'inscription : 02/12/2016
Localisation : Savoie
Re: Pierre Choderlos de Laclos
Oui églantine, c'est un livre fabuleux, et je ne partais pas convaincu !
Quasimodo- Messages : 5461
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 28
Des Choses à lire :: Lectures par auteurs :: Écrivains européens francophones
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