Au fil de nos lectures
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Re: Au fil de nos lectures
Topocl!!!le Panda a écrit:C'est amusant et imagé non
Le panda lit Kate Atkinson et trouve cela -attends je relis- "amusant et imagé".
Oufti.
C'est pas ma fin du monde, certes, mais...
Marie- Messages : 653
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Re: Au fil de nos lectures
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Re: Au fil de nos lectures
Et voilà qu'il se retrouvait maintenant à Los Angeles, au volant d'un Hussar Hotspur à six roues et à vingt couches de polish appliquées à la main. Le Hussar était en réalité un Land Rover blindé capable de faire du cent quarante sur un direct, à condition d'en trouver un ouvert et d'avoir le temps d'accélérer. Hernandez, son superviseur, disait qu'on ne pouvait pas faire confiance à un Anglais pour fabriquer quelque chose de beaucoup plus grand qu'un chapeau, surtout si on voulait que ça marche quand on en avait besoin. Il disait que Sécur-Intens aurait dû acheter son matériel aux Israéliens ou, à tout le moins, aux Brésiliens, et qu'on n'avait pas besoin d'un Ralph Lauren pour créer un tank.
Rydell n'avait pas d'opinion sur la question. Mais ce boulot de peinture le dépassait vraiment. Ce qu'ils voulaient, sans doute, c'était que les gens pensent à ces gros camions de la Poste, couleur de papier d'emballage, et en même temps au style de décoration que l'on trouvait dans les églises du culte épiscopal. Pas trop de dorures sur le logo. De la retenue, en quelque sorte.
Les gens qui travaillaient au poste de lavage étaient en grande partie des émigrés d'origine mongole, arrivés de fraîche date, qui avaient du mal à trouver de meilleurs emplois. En travaillant, ils fredonnaient d'une drôle de manière, à partir de la gorge, et Rydell aimait bien entendre ça. Il n'arrivait pas à comprendre comment ils faisaient pour produire des bruits pareils. Cela ressemblait au chant d'une grenouille verte, mais avec deux sons en même temps.
Ils étaient maintenant en train d'astiquer les rangées de boutons chromés, au bas du véhicule, qui servaient de support aux grilles anti-émeutes. Le chrome n'était là que pour faire bien. Les camions anti-émeutes, à Knoxville, étaient électrifiés, mais avec un système de ruissellement qui les maintenait mouillés, et ça faisait beaucoup plus mal.
- Signe ici, lui dit le chef d'équipe, un black, peu causant nommé Anderson; il était étudiant en médecine dans la journée, et on avait toujours l'impression qu'il avait deux nuits de sommeil à rattraper.
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Re: Au fil de nos lectures
Trois heures du mat'.
Se faire un café dans le noir, juste un coup de lampe-torche pour verser l'eau bouillante.
Le rêve matinal enregistré qui s'efface derrière d'autres paupières, panache sombre d'un cargo cubain - qui s'efface avec l'horizon qu'il parcourt sur l'horizon gris de l'esprit.
Trois heures du mat'.
Laisse hier se redisposer autour de toi en images plates et schématiques. Ce que t'as dit, ce qu'elle a dit, pendant que tu la regardais remballer, appeler le taxi.
T'as beau les retourner dans tous les sens, elles recomposent le même circuit imprimé, convergence d'hiéroglyphes vers un même composant central : toi, debout sous la pluie, et qui gueules après le taxi.
La pluie était acide et âcre, couleur de pisse, presque. Le chauffeur t'as traité de connard ; t'as dû en plus payer double tarif. Elle avait trois valises. Derrière son respirateur et ses lunettes, le type avait l'air d'une fourmi. Il est parti sous la pluie en pédalant comme un malade. Elle ne s'est pas retournée.
La dernière vision que tu gardes d'elle, c'est cette fourmi géante, qui t'adresse un geste obscène.
Réveil alternatif en deux étapes ? extrait de Fragments de rose en hologramme de Gibson.
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Re: Au fil de nos lectures
qui les expédie aux quatre coins du monde.
On ne les imagine pas au repos.
Meme chez eux, ils voyagent.
Par contre attendre d' eux un honnète récit de voyage, tel qu' on peut l' imaginer est hors de question.
Leurs récits de voyage à eux sont des digressions fantasques autour du voyage ou pas. C' est selon leur humeur.
L' autre caractéristique est leur humour constant -ou presque- qui fait les délices de ceux qui l' apprécient.
Et le désespoir des autres.
Exemple concret, dès le début de Méroé d' Olivier R.
"J' ai été, avant d' etre quoi que ce soit, un fils : ça arrive à tout le monde, mais tout le monde n' en tire
pas les les memes conséquences.
Je ne suis pas sur de comprendre moi-meme ce que je viens d' écrire."
Méroé, p. 11
bix_229- Messages : 15439
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Localisation : Lauragais
Re: Au fil de nos lectures
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“Lire et aimer le roman d'un salaud n'est pas lui donner une quelconque absolution, partager ses convictions ou devenir son complice, c'est reconnaître son talent, pas sa moralité ou son idéal.”
― Le club des incorrigibles optimistes de Jean-Michel Guenassia
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"Il n'y a pas de mauvais livres. Ce qui est mauvais c'est de les craindre." L'homme de Kiev Malamud
Bédoulène- Messages : 21642
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Re: Au fil de nos lectures
Il tient un journal qui constitue non seulement sa façon de résister,
mais au delà, un document essentiel pour essayer de comprendre
ce que furent ces années sur lesquelles une chappe de plomb
s' est abattue sur la France.
Il vit en solitaire, mais ne peut s' empecher de noter :
"Depuis trois mois je vivais seul face à la guerre, pas meme face à moi-meme.
Je commence à comprendre que la solitude dissout le "moi", plutot qu' elle ne
le cristallise.
Les premiers jours, elle est héroique, bientot elle n' est plus qu' un faisceau
d' habitudes. Tout s' éloigne du moi et le moi s' éloigne de lui-meme.
Je veux bien qu' à pousser plus loin la solitude on atteigne à un très haut
état de méditation. Mais je me méfie. On a très vite fait d' appeler méditation
le demi-sommeil."
Léon Werth : Déposition, Journal 1940-1944. - Viviane Hamy
bix_229- Messages : 15439
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Re: Au fil de nos lectures
ArenSor- Messages : 3428
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Re: Au fil de nos lectures
- Il voit tellement tout en rose, disait Mlle Rivier... Avec lui, on dirait vraiment qu'il n'y a qu'à tourner un bouton électrique. C'est fou ce qu'il est plein d'assurance et d'enthousiasme, ce type-là... Un enthousiasme presque sans mesure, portatif...
Je sens que ça va me plaire !
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Re: Au fil de nos lectures
J'ai particulièrement goûté le portrait du Pavarotti de l'époque :
Il avait de ces pâleurs splendides qui donne quelque chose de la majesté des arbres aux races ardentes du Midi. Sa taille vigoureuse était prise dans un pourpoint de couleur brune; un petit poignard ciselé lui battait sur la cuisse gauche, et il roulait des regards langoureusement en découvrant ses dents blanches. On disait qu'une princesse polonaise, l'écoutant un soir chanter sur la plage de Biarritz, où il radoubait des chaloupes, en était devenue amoureuse. Elle s'était ruinée à cause de lui. Il l'avait plantée là pour d'autres femmes, et cette célébrité sentimentale ne laissait pas que de servir à sa réputation artistique. Le cabotin diplomate avait même soin de faire toujours glisser dans les réclames une phrase poétique sur la fascination de sa personne et la sensibilité de son âme. Un bel organe, un imperturbable aplomb, plus de tempérament que d'intelligence et plus d'emphase que de lyrisme, achevaient de rehausser cette admirable nature de charlatan, où il y avait du coiffeur et du toréador.
Quasimodo- Messages : 5461
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 29
Re: Au fil de nos lectures
Quoi qu' il arrive et meme si la Frane était débarrassée de l' Allemagne
et de Vichy, le peuple ne demandera pas de comptes à ses journaux.
Une civilisation est à créer où la morale moyenne jugera le mensonge,
comme elle juge l' assassinat.
15 octobre 1941
Les lettres de dénonciation pullulent. Les imposteurs ont encore fait,
hier, à la gare, une belle capture, une femme qui transportait six oeufs.
Une moitié de la France moucharde l' autre.
Mais le plus étonnant, c' est que la partie mouchardée ne semble éprouver
ni colère ni dégout, ni indignation envers la partie mouchardante.
5 novembre 1941
Un maonde nazifié... Quoi serait changé ?
Rien, sauf l' essentiel, l' invisible essentiel.
Les ingénieurs feraient des ponts, les médecins des diagnostics.
Je l' ai bien vu à Lyon. Les gens qui ont un métier "absorbant" ne se
sont pas encore apeçus qu' ils vivaient en plein nazisme.
Et ceux-là et les autres, combien de fois par jour, combien
de fois par jour, combien de fois par an pensent-ils à la pensée.
Léon Werth : Déposition, Journal 1940-44
bix_229- Messages : 15439
Date d'inscription : 06/12/2016
Localisation : Lauragais
Re: Au fil de nos lectures
XY de l'identité masculine d'Elisabeth Badinter
Elle est maladroite parfois dans son expression mais il y a de bons moments.
Pia- Messages : 135
Date d'inscription : 08/12/2016
Age : 56
Localisation : Utrecht
Re: Au fil de nos lectures
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"Il n'y a pas de mauvais livres. Ce qui est mauvais c'est de les craindre." L'homme de Kiev Malamud
Bédoulène- Messages : 21642
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 79
Localisation : En Provence
Re: Au fil de nos lectures
Gabriel Josipovici, Moo Pak a écrit:(...)
Il existe un pays quelque part, dit-il, quelque part entre le cynisme et l'idéalisme, qui attend qu'on l'explore. C'est un immense pays. Incroyablement varié et beau. On se réveille et on pense savoir comment y entrer. Et puis on s'assied à son bureau et la route disparaît. On se retrouve avec les vieux clichés. Les vieux échecs. La dignité humaine, dit-il. Voilà ce qu'il nous faut défendre. Mais y a-t-il quelque chose de plus ridicule qu'un homme qui insiste sur sa dignité ? Non, dit-il, nous ne pouvons la défendre qu'en étant ce que nous sommes, en faisant ce que nous avons à faire et qui est en nous. Il faut que le corps soit épuisé, dit-il, si l'esprit livre ce qu'il a en lui à livrer. Il faut parfois marcher jusqu'à l'épuisement, dit-il, et puis se relever, rentrer chez soi, s'asseoir sur sa chaise et se remettre au travail. Naturellement, dit-il, la plupart du temps cela n'a aucun effet, on est assis sur sa chaise et on est tellement fatigué qu'on finit par s'endormir. Mais au moins ainsi on se donne une possibilité, alors que si on reste chez soi toute la journée il n'y a aucune possibilité. Ce parc est le plus agréable de Londres, dit-il quand nous nous assîmes sur la terrasse avec nos cafés. Ce n'est pas le plus beau, Hyde Park est le plus beau. Ce n'est pas le plus varié, Hampstead Heath est le plus varié. Mais c'est le plus agréable, le plus charmant. Malamud a dit que ce n'était qu'au moment de ses tout derniers livres qu'il s'est mis à écrire sur son propre monde, dit-il, jusqu'alors il avait écrit, sans s'en rendre compte, sur le monde de son père. Mais c'est tout naturel. Nous pensons tous à la vie comme étant la vie qu'ont vécu nos parents, parce que nous sommes tous des imitateurs par nature et nous ne voyons pas ce que les autres n'ont pas vu avant nous, même quand nous l'avons directement sous le nez. Alors, dit-il, à la fin de notre vie, si nous avons de la chance, nous disons tout à coup : Ainsi, ceci est ma vie, ma vie à moi, voilà ce qu'elle a été, voilà ce qu'elle est. Mais même cet aperçu doit provenir de nos parents, dit-il, doit provenir du passé. Je pense aux grands parcs dans les villes comme à des lieux appartenant au monde de mes parents, dit-il, ou même à celui de mes grands-parents, le monde de l'Europe d'avant la Première Guerre mondiale. Nous avons l'impression, dit-il, que si nous parvenons à vivre la vie de nos grands-parents, alors, d'une manière étrange, nous vivons vraiment. Ce qui se passe à notre propre époque ne paraît pas réel, pas réellement réel. Nous sentons que nous devrions en laisser la description aux journalistes qui en rendent compte, ce n'est pas ce que nous pensons être essentiel, durable.
(...)
(Et une pensée encore pour Bernard Hoepffner...)
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Re: Au fil de nos lectures
Nadine- Messages : 4882
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 49
Re: Au fil de nos lectures
Nous remplissions nos oisivetés scolaires de films nationaux, allemands et même hongrois, la crème de l'Axe. Le gag de sonoriser un raid aérien avec la chevauchée des Walkyries, dont on parle aujourd'hui comme d'une nouveauté vietnamienne, était utilisée dans une séquence de Stukas en piqué, j'en suis plus que certain !
Guido Ceronetti, Petit enfer de Turin
Plus vache que je ne l'imaginais, savamment indirect mais art de la formule. Étrange lecture qui fait des ponts dans le temps.
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Re: Au fil de nos lectures
Roland Dorgelès, Les croix de boisComme l'homme est dur, malgré ses cris de pitié, comme la douleur des autres lui semble légère, quand la sienne n'y est pas mêlée !
... de saison paradoxale ?
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Re: Au fil de nos lectures
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Bédoulène- Messages : 21642
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Age : 79
Localisation : En Provence
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