Nouveaux messagesEdouard Bureau
Page 1 sur 1 • Partagez
Edouard Bureau
par topocl Mer 27 Avr - 14:43
Edouard Bureau
Né en 1992
Né en 1992
Edouard Bureau est né en 1992. Son premier roman, Le lion sans crinière, a été finaliste du prix Joseph Kessel et a obtenu le prix Jean-Claude Brialy du premier roman.
Bibliographie:
- Le lion sans crinière, 2019
- La grande vallée, 2021
Dernière édition par topocl le Ven 29 Avr - 12:35, édité 1 fois
_________________
Etre dans le vent, c'est l'histoire d'une feuille morte.
Flore Vasseur
topocl- Messages : 8414
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 64
Localisation : Roanne
Re: Edouard Bureau
par topocl Mer 27 Avr - 14:45
La Grande Vallée
Sur l’alpage de la Grande Vallée, on partage fromages et eau-de-vie entre amis, les chevriers mènent leur troupeau vers les herbes les plus grasses. Ils rêvent d’étoiles, d’amour et de chansons. Tout n’est que splendeur, ce monde semble immuable…
Et pourtant arrive au village le Grand Batave, un gars du Nord qui prêche le Progrès et la Grande Industrie. S’il séduit les villageois, Merle et La Barbe, les deux chevriers, la vieille sorcière Dania et le peintre-musicien voient bien que c’est la fin d’un temps qu’ils ont aimé. Leur révolte sera terrible, magnifique, déchirante, dans le feu et la neige.
Les chevriers parlent comme des poètes, les biquettes philosophent plaisamment. La beauté des paysages et le silence sont source de ce grand bonheur qui ne veut renoncer à lui-même. Ramuz n’est pas loin.
Un conte, une aventure, un combat.
\Mots-clés : #nature #social
_________________
Etre dans le vent, c'est l'histoire d'une feuille morte.
Flore Vasseur
topocl- Messages : 8414
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 64
Localisation : Roanne
Re: Edouard Bureau
par Armor Mer 27 Avr - 17:29
Une opposition éternelle entre deux façons de voir le monde...
Par contre, sur la photo, c'est Vianney, le frère chanteur de l'auteur. Sur le moment j'ai buggué.
Je te laisse changer. 
Par contre, sur la photo, c'est Vianney, le frère chanteur de l'auteur. Sur le moment j'ai buggué.
Je te laisse changer. _________________
"Et au plus eslevé trone du monde, si ne sommes assis, que sus notre cul." (Michel de Montaigne)
Armor- Messages : 4589
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 43
Localisation : A l'Aise Breizh
Re: Edouard Bureau
par Bédoulène Mer 27 Avr - 23:16
tout pour me plaire, merci topocl !
_________________
“Lire et aimer le roman d'un salaud n'est pas lui donner une quelconque absolution, partager ses convictions ou devenir son complice, c'est reconnaître son talent, pas sa moralité ou son idéal.”
― Le club des incorrigibles optimistes de Jean-Michel Guenassia
[/i]
"Il n'y a pas de mauvais livres. Ce qui est mauvais c'est de les craindre." L'homme de Kiev Malamud
Bédoulène- Messages : 21098
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 79
Localisation : En Provence
animal- Admin
- Messages : 13168
Date d'inscription : 27/11/2016
Localisation : Tours -
Re: Edouard Bureau
par topocl Ven 29 Avr - 12:34
OupsArmor a écrit:Une opposition éternelle entre deux façons de voir le monde...
Par contre, sur la photo, c'est Vianney, le frère chanteur de l'auteur. Sur le moment j'ai buggué.
!_________________
Etre dans le vent, c'est l'histoire d'une feuille morte.
Flore Vasseur
topocl- Messages : 8414
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 64
Localisation : Roanne
Re: Edouard Bureau
par topocl Ven 29 Avr - 13:30
La logeuse s’en amusa : elle savait bien comment traiter le lait, comment le rendre crémeux, les grumeaux se mêlant au petit lait. Jouant avec le cordon de son tablier, elle vit Belej s’éloigner et elle repensa à ses jeunes années. Elle se rappela, plus loin encore dans sa mémoire, ses adieux au hameau et aux destinées sans dessein. A quoi avait-elle renoncé en commençant sa vie solitaire, au juste ? À une existence faussement sédentaire, celle qui prétexte les branches pour couper les racines. Elle préférait sentir le spectacle qui se déroulait devant elle plutôt que de repenser aux bergers qu'elle avait connu dans son village. Évidemment, en voulant chasser cette image, Dania la faisait accourir au galop : « Peuh, se dit-elle, ces fichus pasteurs, cossards comme personne, qui ne connaîtront jamais la joie véritable des pâtures ! Ils étaient laids, leur cœur l’était à pleurer ! Ils faisaient disparaître leurs troupeaux dans des banquets ou bien ils feignaient des imprudences de crevasse. Il dilapidait quelques sous puis montaient à la ville.
« Mais cela, chuchota la vieille solitaire en regardant le Merle et la Barbe affairés sur les pis des bêtes, ils sont d'un autre bois. Ils sont fait de murmures. Ils ont été sculptés par les longues contemplations. Ils ont goûté les crépuscules, ils ont même fondu des aurores dans les brasiers du potron-minet. Ils s'étendent, là, couchés sous les flancs de leurs chèvres. Ils aiment, oh ! ils aiment leur existence râpeuse et âpre mais calme. Qui la leur ôtera ? »
_________________
Etre dans le vent, c'est l'histoire d'une feuille morte.
Flore Vasseur
topocl- Messages : 8414
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 64
Localisation : Roanne
Re: Edouard Bureau
par animal Dim 1 Mai - 19:58
Merci !
Moins tenté ?
Moins tenté ?
_________________
Keep on keeping on...
animal- Admin
- Messages : 13168
Date d'inscription : 27/11/2016
Localisation : Tours -
Re: Edouard Bureau
par topocl Lun 2 Mai - 9:12
Donc bien fait de réclamer!animal a écrit:Moins tenté ?
_________________
Etre dans le vent, c'est l'histoire d'une feuille morte.
Flore Vasseur
topocl- Messages : 8414
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 64
Localisation : Roanne
animal- Admin
- Messages : 13168
Date d'inscription : 27/11/2016
Localisation : Tours -
Re: Edouard Bureau
par Bédoulène Lun 27 Juin - 17:08
j'ai vraiment aimé la Grande Vallée, et le commentaire de topocl est celui que j'aurais aimé faire.
(le beurre à la baratte m'a rappelé des souvenirs d'enfance où j'avais vu dans les Htes Alpes le berger tourner le lait pour faire le beurre et le goûter bien sur)
*De même les chèvres qui mangent même les chapeaux de la fillette qui les abandonnait dans le pâturage !
Et là-bas aussi le progrès a tout bouleversé mais certaines images sont protégées dans ma mémoire !
"Arno arriva à la hauteur de la Barbe et à son tour il contempla : les mamelons dodus, la terre enfoncée, les collines éparses, tout ceci emprisonné dans des parois caillouteuses. Et malgré la disparité des éléments, tout trouvait son harmonie, sans que jamais l’homme n’ait posé sa main sur ces horizons. Les alpages en eux-mêmes formaient comme une immense langue, déroulée dans un défilé qui s’élevait aux extrémités – oui, une langue pareille à celle que déploient les brebis pour faire croître leur agneau, un agneau tout rosi par la tétée goulue et qui avait besoin de la léchouille pour croire un jour de plus à la joie de l’enfance."
" Ah, mon petiot, gémit le vieillard, tu ne saisis pas ce que je te dis, tu n’as pas compris ce que je ressens. Tu es bien jeune. Tu ne sais pas à quoi ressemble la fin d’un monde. Moi non plus, bien sûr. Mais j’ai l’impression que, malgré moi, j’ai toujours su le lire, dans le ventre des brebis, dans la course des oiseaux, dans une branche brisée. Or notre monde se meurt. Il disparaîtra, tu verras, dans des fumées effroyables, dans des ramures arrachées. On soumettra des forêts, on tachera de sang et d’alchimie nos champs. Il ne sera plus l’heure de penser aux airelles, ni au beurre sur une tranche de pain. À cette ère de fin du monde, il faut résister et tout changer, tout, toute notre vie. Car elle s’écoulera même sans nous. Les peintures s’effaceront et les violons auront leur vernis craqué d’être abandonnés. Et les veaux, loin des pis de leur mère… Et les étoiles, ah les étoiles mourront, peux-tu le croire ? Elles disparaîtront, derrière des volutes infinies. Les constellations, tu imagines ?
— Arrête, le coupa Arno, arrête ! Que dis-tu là ! Tu es devenu fou, Josip ! Je sanglote, oui, parce que ce que tu dis est trop affreux ! La mort des étoiles ! Arrête, Josip, arrête !
— Ne te cache pas la vérité, bergerot. À partir d’aujourd’hui, garde ton regard tourné vers les Cent-Maisons, c’est de là-bas que s’abattra le mal. » Josip accéléra le pas et il dépassa le Merle car il ne voulait pas que le petit homme le voie pleurer une nouvelle fois."
"Il comprenait mieux et s’en horrifiait : le Grand Batave vivrait encore, son projet survivrait tant que brûleraient ces féroces encens. Il avait gagné. La Belle Industrie avait remporté la guerre parce que personne, sinon eux, ne l’avait combattue. Tout le monde avait aimé le mètre, la fin de la nielle, le soc profond, tout ce que le Progrès leur avait apporté : les verrières, les fils de fer, les troupeaux contenus dans l’acier d’étables terribles. Personne n’y avait vu la fumée, les toussotements, les ventres stériles. Après ça, comment revenir en arrière ? La Grande Vallée avait disparu.
Le bleu même, déjà mourant aux alentours de Montegora, agonisait au-dessus du cirque : le jour s’en allait, il finissait. Le noir de la nuit arrivait mais sans son beau crépuscule fauve. Il ne s’annonçait pas par le rose et le zinzolin fidèle, mais par le jaune et le soufre, des couleurs qui poussaient un râle par-dessus le soir. C’était ainsi, même les teintes de la fin du jour avaient changé.
La fumée faisait un mur, une palissade si haute que toutes les nues y étaient cachées. C’est dans cette vision opaque que le Merle comprit que les étoiles, dans cette nouvelle nuit, étaient mortes, qu’elles ne brilleraient plus. Il sanglota encore un instant, il s’essuya le nez d’un revers de manche et on partit ailleurs, dans une autre vallée peut-être ou vers les vergers italiens, sans grand espoir. On fredonna en résian des airs qui moururent bientôt."
(le beurre à la baratte m'a rappelé des souvenirs d'enfance où j'avais vu dans les Htes Alpes le berger tourner le lait pour faire le beurre et le goûter bien sur)
*De même les chèvres qui mangent même les chapeaux de la fillette qui les abandonnait dans le pâturage !
Et là-bas aussi le progrès a tout bouleversé mais certaines images sont protégées dans ma mémoire !
"Arno arriva à la hauteur de la Barbe et à son tour il contempla : les mamelons dodus, la terre enfoncée, les collines éparses, tout ceci emprisonné dans des parois caillouteuses. Et malgré la disparité des éléments, tout trouvait son harmonie, sans que jamais l’homme n’ait posé sa main sur ces horizons. Les alpages en eux-mêmes formaient comme une immense langue, déroulée dans un défilé qui s’élevait aux extrémités – oui, une langue pareille à celle que déploient les brebis pour faire croître leur agneau, un agneau tout rosi par la tétée goulue et qui avait besoin de la léchouille pour croire un jour de plus à la joie de l’enfance."
" Ah, mon petiot, gémit le vieillard, tu ne saisis pas ce que je te dis, tu n’as pas compris ce que je ressens. Tu es bien jeune. Tu ne sais pas à quoi ressemble la fin d’un monde. Moi non plus, bien sûr. Mais j’ai l’impression que, malgré moi, j’ai toujours su le lire, dans le ventre des brebis, dans la course des oiseaux, dans une branche brisée. Or notre monde se meurt. Il disparaîtra, tu verras, dans des fumées effroyables, dans des ramures arrachées. On soumettra des forêts, on tachera de sang et d’alchimie nos champs. Il ne sera plus l’heure de penser aux airelles, ni au beurre sur une tranche de pain. À cette ère de fin du monde, il faut résister et tout changer, tout, toute notre vie. Car elle s’écoulera même sans nous. Les peintures s’effaceront et les violons auront leur vernis craqué d’être abandonnés. Et les veaux, loin des pis de leur mère… Et les étoiles, ah les étoiles mourront, peux-tu le croire ? Elles disparaîtront, derrière des volutes infinies. Les constellations, tu imagines ?
— Arrête, le coupa Arno, arrête ! Que dis-tu là ! Tu es devenu fou, Josip ! Je sanglote, oui, parce que ce que tu dis est trop affreux ! La mort des étoiles ! Arrête, Josip, arrête !
— Ne te cache pas la vérité, bergerot. À partir d’aujourd’hui, garde ton regard tourné vers les Cent-Maisons, c’est de là-bas que s’abattra le mal. » Josip accéléra le pas et il dépassa le Merle car il ne voulait pas que le petit homme le voie pleurer une nouvelle fois."
"Il comprenait mieux et s’en horrifiait : le Grand Batave vivrait encore, son projet survivrait tant que brûleraient ces féroces encens. Il avait gagné. La Belle Industrie avait remporté la guerre parce que personne, sinon eux, ne l’avait combattue. Tout le monde avait aimé le mètre, la fin de la nielle, le soc profond, tout ce que le Progrès leur avait apporté : les verrières, les fils de fer, les troupeaux contenus dans l’acier d’étables terribles. Personne n’y avait vu la fumée, les toussotements, les ventres stériles. Après ça, comment revenir en arrière ? La Grande Vallée avait disparu.
Le bleu même, déjà mourant aux alentours de Montegora, agonisait au-dessus du cirque : le jour s’en allait, il finissait. Le noir de la nuit arrivait mais sans son beau crépuscule fauve. Il ne s’annonçait pas par le rose et le zinzolin fidèle, mais par le jaune et le soufre, des couleurs qui poussaient un râle par-dessus le soir. C’était ainsi, même les teintes de la fin du jour avaient changé.
La fumée faisait un mur, une palissade si haute que toutes les nues y étaient cachées. C’est dans cette vision opaque que le Merle comprit que les étoiles, dans cette nouvelle nuit, étaient mortes, qu’elles ne brilleraient plus. Il sanglota encore un instant, il s’essuya le nez d’un revers de manche et on partit ailleurs, dans une autre vallée peut-être ou vers les vergers italiens, sans grand espoir. On fredonna en résian des airs qui moururent bientôt."
_________________
“Lire et aimer le roman d'un salaud n'est pas lui donner une quelconque absolution, partager ses convictions ou devenir son complice, c'est reconnaître son talent, pas sa moralité ou son idéal.”
― Le club des incorrigibles optimistes de Jean-Michel Guenassia
[/i]
"Il n'y a pas de mauvais livres. Ce qui est mauvais c'est de les craindre." L'homme de Kiev Malamud
Bédoulène- Messages : 21098
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 79
Localisation : En Provence
Re: Edouard Bureau
par topocl Lun 27 Juin - 20:16
Ravie de ce passage de flambeau, Bédoulène !
_________________
Etre dans le vent, c'est l'histoire d'une feuille morte.
Flore Vasseur
topocl- Messages : 8414
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 64
Localisation : Roanne
Re: Edouard Bureau
par Bédoulène Mar 28 Juin - 13:16
J'espère que d'autres Chosiens voudrons bien découvrir "la Grande Vallée" !
_________________
“Lire et aimer le roman d'un salaud n'est pas lui donner une quelconque absolution, partager ses convictions ou devenir son complice, c'est reconnaître son talent, pas sa moralité ou son idéal.”
― Le club des incorrigibles optimistes de Jean-Michel Guenassia
[/i]
"Il n'y a pas de mauvais livres. Ce qui est mauvais c'est de les craindre." L'homme de Kiev Malamud
Bédoulène- Messages : 21098
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 79
Localisation : En Provence
Des Choses à lire :: Lectures par auteurs :: Écrivains européens francophones
Sujets similairesPage 1 sur 1
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum|
|
|