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Charles Baudelaire

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Message par Aventin Sam 2 Fév - 18:44

Charles Baudelaire
Né et décédé à Paris, 9 avril 1821 - 31 août 1867

Charles Baudelaire Baudel10

Biographie a écrit:Né à Paris en 1821, Baudelaire perd son père à l'âge de six ans et sa mère se remarie un an plus tard avec le général Aupick. Il refuse cette union et sera toujours en opposition avec ce militaire aux valeurs et aspirations différentes des siennes. Suite à ses études secondaires à Lyon puis au lycée parisien Louis le Grand, il mène une vie marginale et de bohème dans le Quartier latin. C'est alors qu'en 1841, sous la pression de sa famille, il embarque pour les côtes d’Afrique et de l’Orient. Il séjourne à l’île Bourbon et, bien qu’il n’aille pas au terme de son voyage, il en retira un grand nombre d’impressions dont il s’inspirera dans ses œuvres. De retour à Paris en 1842, il écrit ses premiers textes, devient journaliste, critique d’art et littéraire en 1844, et découvre en 1847 l’écrivain américain Edgar Poe qu'il traduit. Cette même année il tombe sous le charme de Marie Daubrun. Celle-ci lui inspira plusieurs poèmes. Un peu plus tard, c’est Mme Sabatier qui occupera ses pensées. Enfin, en 1857, suite à la publication des Fleurs du Mal, il est attaqué en justice et condamné pour immoralité. Très affecté, Baudelaire sombre dans la misère et la maladie. Le poids des dettes s’ajoutant aux souffrances morales, il est frappé en 1866 d’un malaise qui le rendra paralysé et aphasique. Il meurt en 1867.
(Source: Éternels Éclairs, site ici)

Bibliographie sommaire :

  Salon de 1845 (1845) ;
  Salon de 1846 (1846);
  La Fanfarlo (1847), nouvelle ;
  Du vin et du haschisch (1851) ;
  Fusées (1851);
  L’Art romantique (1852) ;
  Morale du joujou (1853, réécrit en 1869) ;
  Exposition universelle (1855) ;
  Les fleurs du Mal (1857) ;
  Le Poème du haschisch (1858) ;
  Salon de 1859 (1859) ;
  Les Paradis artificiels (1860) ;
  La Chevelure (1861) ;
  Réflexions sur quelques-uns de mes contemporains (1861) ;
  Richard Wagner et Tannhäuser à Paris (1861) ;
  Petits poèmes en prose ou Le Spleen de Paris (1869), poème en prose (posthume) ;
  Le Peintre de la vie moderne (1863) ;
  L’œuvre et la vie d’Eugène Delacroix (1863) ;
  Mon cœur mis à nu (1864);
  Curiosités esthétiques (1868) ;
  Lettres ;
  L’Art romantique (1869) ;
  Journaux intimes (1851-1862) ;
  Pauvre Belgique (inachevé).

(source: Wikipedia)

Charles Baudelaire Baudel12


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Message par Aventin Sam 2 Fév - 18:48

(Chacun sa chimère, du recueil Petits poëmes en prose)



Chacun sa chimère


Sous un grand ciel gris, dans une grande plaine poudreuse, sans chemins, sans gazon, sans un chardon, sans une ortie, je rencontrai plusieurs hommes qui marchaient courbés.

Chacun d'eux portait sur son dos une énorme Chimère, aussi lourde qu'un sac de farine ou de charbon, ou le fourniment d'un fantassin romain.

Mais la monstrueuse bête n'était pas un poids inerte; au contraire, elle enveloppait et opprimait l'homme de ses muscles élastiques et puissants; elle s'agrafait avec ses deux vastes griffes à la poitrine de sa monture et sa tête fabuleuse surmontait le front de l'homme, comme un de ces casques horribles par lesquels les anciens guerriers espéraient ajouter à la terreur de l'ennemi.

Je questionnai l'un de ces hommes, et je lui demandai où ils allaient ainsi. Il me répondit qu'il n'en savait rien, ni lui, ni les autres; mais qu'évidemment ils allaient quelque part, puisqu'ils étaient poussés par un invincible besoin de marcher.

Chose curieuse à noter : aucun de ces voyageurs n'avait l'air irrité contre la bête féroce suspendue à son cou et collée à son dos; on eût dit qu'il la considérait comme faisant partie de lui-même. Tous ces visages fatigués et sérieux ne témoignaient d'aucun désespoir; sous la coupole spleenétique du ciel, les pieds plongés dans la poussière d'un sol aussi désolé que ce ciel, ils cheminaient avec la physionomie résignée de ceux qui sont condamnés à espérer toujours.

Et le cortège passa à côté de moi et s'enfonça dans l'atmosphère de l'horizon, à l'endroit où la surface arrondie de la planète se dérobe à la curiosité du regard humain.

Et pendant quelques instants je m'obstinai à vouloir comprendre ce mystère; mais bientôt l'irrésistible Indifférence s'abattit sur moi, et j'en fus plus lourdement accablé qu'ils ne l'étaient eux-mêmes par leurs écrasantes Chimères.


Rien que le début, pour ne pas outrepasser l'oiseux et l'assommant dans un commentaire qui ne saurait, de toutes façons, être à la hauteur:
Les allitérations en "s" dur sous, ciel, sans (X4) comme une entrée de plain-pied, surtout avec encore une allitération dure "gr" grand, gris, grande et puis... gazon (!) pour reproduire le "g" mais en guise de support cette fois-ci, pour une spondée coulée servie par ce "z" judicieux au milieu des "s" durs - tout l'équilibre de cette phrase introductive repose, à mon humble avis, sur ce mot gazon, magistralement placé.

Le jeu mélodique des "f", des "a" et des "r" dans la seconde phrase mérite qu'on s'y arrête.
Un détail, cette jolie harmonique a peut-être pour clef le fait d'alterner les voyelles et les consonnes qui suivent les "r"   ("[...]Chimère, aussi lourde qu'un sac de farine ou de charbon, ou le fourniment d'un fantassin romain.")

Isolons encore un tout petit dernier échantillon:
"sous la coupole spleenétique du ciel, les pieds plongés [...]" quel rendu, encore, dans les "p"et "pl", et ô combien sonore !
Le thème se retrouve aussi dans le célèbre poème Spleen:
Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle
Sur l'esprit gémissant en proie aux longs ennuis,
Et que de l'horizon embrassant tout le cercle
II nous verse un jour noir plus triste que les nuits;

Pour les amateurs de sens discursif, le poème n'est pas à tiroirs ni à mécanismes compliqués, et c'est là que Baudelaire est un extra-terrestre, il se lit parfaitement d'un jet sans incompréhension notoire; déclamez-le plutôt quand même, pour ne pas passer à côté de l'immense richesse prosodique, c'est à entendre au moins autant, mais peut-être plus encore qu'à lire !





Toiletté d'un message sur Parfum du 31 octobre 2015
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Message par Bédoulène Sam 2 Fév - 20:37

je n'y connais rien dans la structure de la poésie mais je vois bien que tu décortiques l' écriture


Dernière édition par Bédoulène le Dim 3 Fév - 11:34, édité 1 fois

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Message par Invité Dim 3 Fév - 10:58

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Merci pour l'ouverture ...
Ah Les fleurs du mal ... Relectures inlassables pour ma part. drunken

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Message par bix_229 Dim 3 Fév - 15:14

Ne pas oublier Le Spleen de Paris.
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Message par Aventin Dim 3 Fév - 18:18

@Arturo: à orthographier "Les fleurs du Mal", sans majuscule à fleurs et avec majuscule à Mal, Baudelaire y tenait, et nombre d'éditeurs ne l'ont pas respecté (et continuent, encore de nos jours, à ne pas le respecter) - recueil qui, je l'espère, garnira abondamment le fil !

@Bix: Tu as l'œil vigilant, Bix, pour Le Spleen de Paris, au reste je continue, toujours dans Petits poëmes en prose, [donc] paru dans Le Spleen de Paris:

Les bons chiens

C'est à lire ici.

Autant A chacun sa chimère est un poème (et de quelle qualité !) autant, dans Les bons chiens, l'apport prosodique est très faible, quasi-nul. C'est plutôt une mise au point de ce vers quoi Baudelaire aimerait tendre en art poétique:
Arrière la muse académique !, au moins le projet est clair, il est en rupture.
Il est éclairant de se reporter à la lettre à Arsène Houssaye, qui tient lieu d'avant-propos à l'ouvrage (Le Spleen de Paris).

Pour une évidence ne pas oublier que Baudelaire arrive tôt, avant la moitié du XIXème, et ce qu'il a trouvé en poésie:
Hugo bien sûr, avec lequel il entretient une relation d'abord confiante puis distante, Vigny, les romantiques, Gautier, vers lequel il incline...et Aloysius Bertrand, pour lequel il se fend d'un hommage qui réchauffe le cœur dans la lettre à Arsène Houssaye.

De façon générale, la poésie était, disons, éloquente, sinon bavarde.
Voir Hugo, les romantiques, avant eux le pudding la poésie française du XVIIIème où il faut vraiment s'appeler Chénier pour avoir encore quelques feuillets lisibles aujourd'hui, autant de poésie où l'on maçonne du pondéreux, des briques de vers-péplum ...

Baudelaire introduit la concision.
Baudelaire veut du neuf:
L'allégorie des chiens est là-dedans: annonciatrice de cette volonté solitaire d'aller chercher la beauté dans le Mal, accessoirement dans le laid.
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Message par Aventin Dim 10 Fév - 7:21

Une charogne, poème-étendard de cette recherche de l'Art via le Laid. Certes, Baudelaire n'est pas le tout premier à explorer cette voie-là. On pense à Jérôme Bosch, au Gothique en général d'ailleurs, à certaines gargouilles et sculptures ornant nos cathédrales, et à bien d'autres artefacts encore, mais c'est vraiment au Gothique, ainsi qu'au Baroque, qu'à mon humble avis ces vers-là se relient.
 
C'est publié dans Les fleurs du Mal, parmi Spleen et Idéal, poème peut-être composé, sous forme définitive, en 1842 ou 1843.

Une charogne fit partie des poèmes qui firent le plus tordre le nez à la parution, entraînant une réaction violente via une frange de la critique littéraire, l'auteur fut traîné en justice pour Les fleurs du Mal, mais, comme ni le fond ni la forme n'étaient attaquables, Une charogne ne figure pas aux minutes du procès de 1857.

[NB.: La Direction de la Sûreté publique du Ministère de l'Intérieur avait saisi le Parquet pour obtenir le retrait des fleurs du Mal, qui venaient de paraître, pour délit d'outrage à la morale publique. Six mois plus tôt, Flaubert avait été acquitté de la même accusation pour Madame Bovary.
Baudelaire put publier dès le début des années 1860 Les fleurs du Mal, par bribes puis enfin le recueil, et c'est bien là l'important, mais le poète lui-même ne fut pleinement réhabilité que presque un siècle plus tard, en 1949.]  


Une charogne


Rappelez-vous l'objet que nous vîmes, mon âme,
Ce beau matin d'été si doux :
Au détour d'un sentier une charogne infâme
Sur un lit semé de cailloux,

Les jambes en l'air, comme une femme lubrique,
Brûlante et suant les poisons,
Ouvrait d'une façon nonchalante et cynique
Son ventre plein d'exhalaisons.

Le soleil rayonnait sur cette pourriture,
Comme afin de la cuire à point,
Et de rendre au centuple à la grande Nature
Tout ce qu'ensemble elle avait joint ;

Et le ciel regardait la carcasse superbe
Comme une fleur s'épanouir.
La puanteur était si forte, que sur l'herbe
Vous crûtes vous évanouir.

Les mouches bourdonnaient sur ce ventre putride,
D'où sortaient de noirs bataillons
De larves, qui coulaient comme un épais liquide
Le long de ces vivants haillons.

Tout cela descendait, montait comme une vague,
Ou s'élançait en pétillant ;
On eût dit que le corps, enflé d'un souffle vague,
Vivait en se multipliant.

Et ce monde rendait une étrange musique,
Comme l'eau courante et le vent,
Ou le grain qu'un vanneur d'un mouvement rythmique
Agite et tourne dans son van.

Les formes s'effaçaient et n'étaient plus qu'un rêve,
Une ébauche lente à venir,
Sur la toile oubliée, et que l'artiste achève
Seulement par le souvenir.

Derrière les rochers une chienne inquiète
Nous regardait d'un œil fâché,
Épiant le moment de reprendre au squelette
Le morceau qu'elle avait lâché.

- Et pourtant vous serez semblable à cette ordure,
A cette horrible infection,
Étoile de mes yeux, soleil de ma nature,
Vous, mon ange et ma passion !

Oui ! telle vous serez, ô la reine des grâces,
Après les derniers sacrements,
Quand vous irez, sous l'herbe et les floraisons grasses,
Moisir parmi les ossements.

Alors, ô ma beauté ! dites à la vermine
Qui vous mangera de baisers,
Que j'ai gardé la forme et l'essence divine
De mes amours décomposés !

Le vous (=la femme) dés l'entame (rappelez-vous), puis parsemant le poème - l'interlocutrice passive à laquelle il est adressé une demande qui implique fortement, pour ne pas dire plus (l'interlocutrice, et le lecteur aussi ?).



Le tourbillon des temps est incroyable:
L'imparfait, au beau rendu révolu, juste après le rappelez d'ouverture (présent, [comme] initial) il y en a une succession qui donne la clef de la scansion, languide, ce qui est renforcé par le choix de non redoubler un verbe (Ouvrait, rayonnait, regardait, bourdonnaient, sortaient, coulaient, descendait, montait, s'élançait, vivait, rendait, s'effaçaient, n'étaient, regardait...).

Pimentant ce coulé de l'imparfait, un plus-que-parfait (avait joint), un passé simple de brièveté (vous crûtes), plus-que-parfait du subjonctif (on eût dit) , le présent illustratif, posant bien le geste à nouveau  (Agite et tourne), ou l'intention (l'artiste achève), c'est au présent qu'il parle -enfin un peu- de lui, un plus-que-parfait de l'indicatif (avait lâché), puis le futur: serez, doublé, premier verbe doublé, attention c'est vous serez (=la femme dont je parlais plus haut), puis irez, puis mangera, verbes coupés d'un impératif (dites):

On a envie de dire ouf !
Quel inventaire !
Qui joue autant avec la conjugaison en une cinquantaine de vers (49 exactement si je compte bien) ?

Idem, sans dissonance aucune, les rimes sont très rarement ré-utilisées (on trouve toutefois lubrique-cynique, puis, à assez de distance, musique-rythmique), une rime de répétition (comme une vague - un souffle vague).

La construction du poème constitue un échafaudage visant à édifier la strophe finale. Baudelaire à tout le mois outrancier, voir exerçant un chantage sur l'interlocutrice-"vous" ? ? Pourtant ses compagnes d'alors, Jeanne Duval en tête, étaient loin de se refuser à lui...

"Vous" est mortelle - c'est le souvenir qu'en conservera, et qu'en composera, le poète qui a une chance d'immortalité.
C'est une caractéristique importante du credo de Baudelaire en poésie, une caractéristique où se mêlent idéalisme et dandysme:
Caractéristique qui conduit à ne pas douter que ce qui a été créé par l'[son]Esprit ne saurait être périssable, même si l'auteur -contradiction- en doute parfois:
Par exemple s'opposent les strophes:
 
Les formes s'effaçaient et n'étaient plus qu'un rêve,
Une ébauche lente à venir,
Sur la toile oubliée, et que l'artiste achève
Seulement par le souvenir.

et la dernière, en particulier le vers

Que j'ai gardé la forme et l'essence divine

Pourtant c'est bien cette notion d'immortalité de l'acte artistique qu'il convient d'entendre, j'en suis persuadé, à l'appui cette note ampoulée et bancale de l'auteur, mais qui traduit bien ses intentions, que l'on trouve dans Mon cœur mis à nu:

Toute idée est, par elle-même, douée d'une vie immortelle, comme une personne.
Toute forme, créée par l'homme, est immortelle. Car la forme est indépendante de la matière, et ce ne sont pas les molécules qui constituent la forme.
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Message par Bédoulène Dim 10 Fév - 8:23

du décortiquage minutieux par le choix des temps - conjugaison - qui apportent sens.

merci Aventin !

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Message par Nadine Dim 10 Fév - 20:21

La charogne était peut être celle d'un homme.
J'ai parfois eue mal à aimer mon chéri et me dire que tout ce bel apparat devait s'éteindre, rien de tel qu'aimer pour craindre la mort. De l'autre, et de soi même. C est un beau poème. Plus jeune je le trouvais dur parce qu'il parlait de cet écart des entrailles comme une femme qui s'offre, et puis depuis j'ai bien vu que c'était le poème de la peur.

Rien à voir, en somme, avec Audiberti et son "montagne d'ossements enveloppés, caverne de peau, caverne où naissent les animaux" qui chante à sa manière la femme sexuelle, sans l'humilité même de se sentir son égale.
J'ai entendu une suite d'émissions sur Baudelaire qui m'a surprise, l'année dernière, des podcasts sur France Culture. Bon sang, jamais j'aurais cru qu'il galère autant en sa vie personnelle, sans cela. Sa graphie, sa pensé&e semblent si fortes. C'est vrai. jamais je n'aurais cru qu'il soit balloté durement entre son allégeance à une mère exigeante et son amante . Il a tout bonnement dû se justifier tout le long, auprès de sa maman, batailler. Alors que son écrit est de pleine assurance. Chapeau. Où le verbe prend tout son sens créateur et ses valeurs maîeutiques.
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Message par Jack-Hubert Bukowski Mer 13 Fév - 9:06

Puisqu'on parle de Baudelaire et que je trouvais que la poésie en prose se prêtait bien à la trame du fil, je vous propose «Les Foules» :

Il n'est pas donné à chacun de prendre un bain de multitude : jouir de la foule est un art ; et celui-là seul peut faire, aux dépens du genre humain, une ribote de vitalité, à qui une fée a insufflé dans son berceau le goût du travestissement et du masque, la haine du domicile et la passion du voyage.

Multitude, solitude : termes égaux et convertibles pour le poète actif et fécond. Qui ne sait pas peupler sa solitude, ne sait pas non plus être seul dans une foule affairée.

Le poète jouit de cet incomparable privilège, qu'il peut à sa guise être lui-même et autrui. Comme ces âmes errantes qui cherchent un corps, il entre, quand il veut, dans le personnage de chacun. Pour lui seul, tout est vacant ; et si de certaines places paraissent lui êtres fermées, c'est qu'à ses yeux elles ne valent pas la peine d'être visitées.

Le promeneur solitaire et pensif tire une singulière ivresse de cette universelle communion. Celui-là qui épouse facilement la foule connaît des jouissances fiévreuses, dont seront éternellement privés l'égoïste, fermé comme un coffre, et le paresseux, interné comme un mollusque. Il adopte comme siennes toutes les professions, toutes les joies et toutes les misères que la circonstance lui présente.

Ce que les hommes nomment amour est bien petit, bien restreint et bien faible, comparé à cette ineffable orgie, à cette sainte prostitution de l'âme qui se donne tout entière, poésie et charité, à l'imprévu qui se montre, à l'inconnu qui passe.

Il est bon d'apprendre quelquefois aux heureux de ce monde, ne fût-ce que pour humilier un instant leur sot orgueil, qu'il est des bonheurs supérieurs au leur, plus vastes et plus raffinés. Les fondateurs de colonies, les pasteurs de peuples, les prêtres missionnaires exilés au bout du monde, connaissent sans doute quelque chose de ces mystérieuses ivresses ; et, au sein de la vaste famille que leur génie s'est faite, ils doivent rire quelquefois de ceux qui les plaignent pour leur fortune si agitée et pour leur vie si chaste.

La condition du poème, de la foule et des multitudes existentielles, telle est la proposition du texte. Il y a bien sûr une condition flâneuse qui y point. On peut y ressentir la trace de Gustave Le Bon, même si le résultat obtenu est différent, à tel point qu'on en parle encore de nos jours...
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Message par Tristram Mer 11 Sep - 2:52

Je suis même parvenu à manquer l'ouverture du fil de l'écrivain le plus déterminant (pour moi)_ heureusement que je ne suis pas modo...
Aventin a écrit:"Les fleurs du Mal", sans majuscule à fleurs et avec majuscule à Mal
Tu peux documenter ? Ici, par exemple, https://fr.wikipedia.org/wiki/Discussion:Les_Fleurs_du_mal, à "Titre", on met une majuscule à "fleurs" ; bon, depuis Bush et son Mal absolu, je tiens moins à cette majuscule du "Mal"...
Sinon, je voulais signaler cette émission https://www.franceculture.fr/emissions/les-nouveaux-chemins-de-la-connaissance/l-ivresse-poetique-14-baudelaire (peut-être une de celles qu'indique Nadine ?), et où pour une fois j'ai trouvé quelques points de vue originaux (comme le rapprochement avec Proust). Mais il est vrai qu'ils ne manquent guère, Baudelaire paraissant inépuisable.

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Message par Tristram Mer 13 Nov - 22:38


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Message par Bédoulène Mer 13 Nov - 22:44

merci pour le lien Tristram ; interdit le poème des bijoux pour obscénité (?)

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Message par Tristram Mer 13 Nov - 22:46

Oui, de mémoire une des six épaves sur lesquelles, ado, je me suis précipité avec une morbide volupté pour alimenter mes troubles rêveries...

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Message par Invité Mar 4 Aoû - 18:06

Il n'y a de long ouvrage que celui qu'on n'ose pas commencer. Il devient cauchemar.
Fusées.

Je comprends bien qu'on déserte une cause pour savoir ce qu'on éprouvera à en servir une autre.
Mon coeur mis à nu.

Être un homme utile m'a toujours paru quelque chose de bien hideux.
Cité par Sartre dans son essai sur le poète.

... ce que je sens, c'est un immense découragement, une sensation d'isolement insupportable... une absence totale de désirs, une impossibilité de trouver un amusement quelconque. Le succès bizarre de mon livre, et les haines qu'il a soulevées m'ont intéressé un peu de temps, et puis après cela je suis retombé.
Lettre à sa mère.

Hugo-Sacerdoce a toujours le front penché ; — trop penché pour rien voir, excepté son nombril.
Fusées.
Spoiler:
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Message par Bédoulène Mer 5 Aoû - 8:31

j'aime le premier extrait !

il est dur pour Hugo, non ?

merci Arturo

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Message par Invité Mer 5 Aoû - 11:27

Il est relativement gentil là avec Hugo, par rapport à ce qu'il balance sur Sand puis sur la Belgique. Charles Baudelaire 1390083676

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Message par Bédoulène Mer 5 Aoû - 15:39

un extrait pour voir la férocité ? Wink

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“Lire et aimer le roman d'un salaud n'est pas lui donner une quelconque absolution, partager ses convictions ou devenir son complice, c'est reconnaître son talent, pas sa moralité ou son idéal.”
― Le club des incorrigibles optimistes de Jean-Michel Guenassia



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Message par bix_229 Mer 5 Aoû - 15:54

On connait Baudelaire, enfin on croit le connaitre, mais qui lit comme Arturo, autre chose
que Les Fleurs du mal, sera surpris.
Notamment Le Spleen de Paris ou la Correspondance et divers autres textes.

- L'air est plein du frisson des choses qui s'enfuient.



.................................................................................

- l faut être toujours ivre, tout est là ; c'est l'unique question. Pour ne pas sentir l'horrible fardeau du temps qui brise vos épaules et vous penche vers la terre, il faut vous enivrer sans trêve.

Mais de quoi ? De vin, de poésie, ou de vertu à votre guise, mais enivrez-vous !

Et si quelquefois, sur les marches d'un palais, sur l'herbe verte d'un fossé, vous vous réveillez, l'ivresse déjà diminuée ou disparue, demandez au vent, à la vague, à l'étoile, à l'oiseau, à l'horloge ; à tout ce qui fuit, à tout ce qui gémit, à tout ce qui roule, à tout ce qui chante, à tout ce qui parle, demandez quelle heure il est. Et le vent, la vague, l'étoile, l'oiseau, l'horloge, vous répondront, il est l'heure de s'enivrer ; pour ne pas être les esclaves martyrisés du temps, enivrez-vous, enivrez-vous sans cesse de vin, de poésie, de vertu, à votre guise.



......................................................................................................................

L'ÉTRANGER

- Qui aimes-tu le mieux, homme énigmatique, dis? ton père, ta mère, ta sœur ou ton frère?
- Je n'ai ni père, ni mère, ni sœur, ni frères.
- Tes amis?
- Vous vous servez là d'une parole dont le sens m'est rester jusqu'à ce jour inconnu.
- Ta patrie?
- J'ignore sous quelle latitude elle est située.
- La beauté?
- Je l'aimerais volontiers, déesse et immortelle.
- L'or?
- Je le hais comme vous haïssez Dieu.
- Eh! qu'aimes-tu donc, extraordinaire étranger?
- J'aime les nuages... les nuages qui passent... là-bas... là-bas... les merveilleux nuages!
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Message par Tristram Mer 5 Aoû - 16:29

La lecture (surprenante) d’œuvres contemporaines comme le pamphlet Pauvre Belgique et ses épigrammes Amoenitates Belgicae démontre à l'envi comme un grand esprit peut s'aveugler et chuter lorsqu'il extrapole à partir de son expérience personnelle _ mais la diatribe n'est qu'un recueil de notes, ce ramassis n'a été publié que posthumément, sans qu'on sache si l'auteur l'envisageait seulement _, et Baudelaire en portait autant au crédit de la France...

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« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
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