LC Edith Wharton : Chez les heureux du monde
Page 2 sur 4 • Partagez
Page 2 sur 4 • 1, 2, 3, 4
Re: LC Edith Wharton : Chez les heureux du monde
ah je suis contente que mon initiative plaise viendez viendez !
Silveradow- Messages : 664
Date d'inscription : 30/12/2016
Age : 31
Localisation : Nomade
Re: LC Edith Wharton : Chez les heureux du monde
Seriez-vous d'accord pour discuter à chaque châpitre du livre ?
ceux qui sont en avance pourrait faire ainsi :
Chapître I :
et en spoiler pour les autres
d'accord ?
ceux qui sont en avance pourrait faire ainsi :
Chapître I :
et en spoiler pour les autres
d'accord ?
_________________
“Lire et aimer le roman d'un salaud n'est pas lui donner une quelconque absolution, partager ses convictions ou devenir son complice, c'est reconnaître son talent, pas sa moralité ou son idéal.”
― Le club des incorrigibles optimistes de Jean-Michel Guenassia
[/i]
"Il n'y a pas de mauvais livres. Ce qui est mauvais c'est de les craindre." L'homme de Kiev Malamud
Bédoulène- Messages : 21152
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 79
Localisation : En Provence
Re: LC Edith Wharton : Chez les heureux du monde
Je suis pas sûre d'avoir compris ?
Silveradow- Messages : 664
Date d'inscription : 30/12/2016
Age : 31
Localisation : Nomade
Re: LC Edith Wharton : Chez les heureux du monde
je voulais dire de discuter du livre au fur et à mesure de notre avancement, pas seulement à la fin de la lecture.
et afin de ne pas divulgâcher mettre notre ressenti en spoiler pour ceux qui avancent plus lentement
et afin de ne pas divulgâcher mettre notre ressenti en spoiler pour ceux qui avancent plus lentement
_________________
“Lire et aimer le roman d'un salaud n'est pas lui donner une quelconque absolution, partager ses convictions ou devenir son complice, c'est reconnaître son talent, pas sa moralité ou son idéal.”
― Le club des incorrigibles optimistes de Jean-Michel Guenassia
[/i]
"Il n'y a pas de mauvais livres. Ce qui est mauvais c'est de les craindre." L'homme de Kiev Malamud
Bédoulène- Messages : 21152
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 79
Localisation : En Provence
Re: LC Edith Wharton : Chez les heureux du monde
bien sûr ! enfin de mon côté, après je commence par Woolf donc j'éviterai ce topic avant de m'y mettre je pense
Silveradow- Messages : 664
Date d'inscription : 30/12/2016
Age : 31
Localisation : Nomade
Re: LC Edith Wharton : Chez les heureux du monde
J'ai lu le premier chapitre, il faut me dire si je dois réserver mes posts pour plus tard !
Selden rencontre fortuitement Lily Bart à la Grande Station Centrale de New-York (on est apparemment au tout début du XXe) ; leur dialogue constitue le chapitre I.
Selden rencontre fortuitement Lily Bart à la Grande Station Centrale de New-York (on est apparemment au tout début du XXe) ; leur dialogue constitue le chapitre I.
On aura compris d’entrée qu’il existe une certaine élite, qui se démarque nettement du tout-venant…« Était-il possible qu’elle fût de la même race ? L’apparence terne et mal dégrossie de cette moyenne humanité féminine fit sentir à Selden quel haut échelon elle occupait dans l’échelle des êtres. »
Il y a là comme un écho de la chambre à soi de Woolf, mais très vite Lily précise qu’il lui faut trouver de l’argent :« Quel délice d’avoir un endroit comme cela tout à soi ! Quelle lamentable chose que d’être une femme ! […]
— On trouve cependant des femmes, dit-il, qui ont adopté le régime privilégié du petit appartement.
— Oui, des gouvernantes… ou des veuves. Mais pas des jeunes filles… pas de pauvres misérables jeunes filles à marier ! »
Elle parle de son « métier », et de ses ennuyeuses obligations.« Et vous n’ignorez pas que je suis très pauvre, et horriblement dispendieuse. J’ai besoin de beaucoup d’argent. »
« Le mariage n’est-il pas votre vocation ? n’est-ce pas pour cela qu’on vous élève toutes ? »
_________________
« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
Tristram- Messages : 15640
Date d'inscription : 09/12/2016
Age : 67
Localisation : Guyane
Re: LC Edith Wharton : Chez les heureux du monde
- Spoiler:
- oui il est certain que Lily Bart est différente et Selden le ressent tout à fait et il est assez psychologue" Elle se tenait en dehors de la foule, qu’elle laissait s’écouler vers le quai ou vers la rue, avec une mine irrésolue qui – Selden le soupçonnait – [u]pouvait masquer un projet très défini. Tout de suite il lui vint à l’esprit qu’elle attendait quelqu’un ; pourtant il ne se rendait pas bien compte pourquoi cette idée l’avait saisi. Il n’y avait rien de changé en Lily Bart ; mais quoi ! il ne la revoyait jamais sans un petit sursaut d’intérêt : elle avait le don de toujours susciter la réflexion ; ses actes les plus simples semblaient le résultat d’intentions qui allaient loin.""Ses réserves l’intéressaient presque autant que ses imprudences : il était si persuadé que les unes et les autres faisaient partie d’un même plan soigneusement élaboré ! En jugeant miss Bart, il avait toujours eu recours à l’argument des causes finales"
combien sont bien choisis les oppositions dans ces phrases
Ah! oui le mariage, lui rappelle Selden et Lily avoue avoir eu cette intention, mais elle avait effrayé la mère du prétendant.
Selden annonce que"ces grandes réunions m’assomment."
— Ah ! moi aussi, s’écria-t-elle.
— Alors pourquoi y allez-vous ?
— Cela fait partie du métier… l’oubliez-vous ? Et puis, si je n’y allais pas, il me faudrait faire le besigue de ma tante, à Richfield Springs.
— Presque aussi ennuyeux que d’épouser Dillworth !
Et tous deux se mirent à rire de bon cœur, tout au plaisir de leur intimité soudaine.""Mais il ne pouvait jamais rester longtemps avec elle sans chercher à découvrir un motif à ses actes, et, comme elle replaçait une première édition de La Bruyère et s’éloignait de la bibliothèque, il commença à se demander où elle voulait en venir."
Lily y songe à se marier bien sur, ce serait l'assurance d'une vie sans souci concernant l'argent.
Percy Gryce serait un bon sujet, même si ennuyeux au possible mais elle l'aborde gentiment dans le train qui les emmène tous deux chez les Trenor."Elle avait l’art de donner de l’assurance aux gens embarrassés, mais elle n’était pas aussi sûre de pouvoir embarrasser ceux qui ont de l’assurance."
Lily continue à s'intéresser à Gryce quitte à s'ennuyer, que ce fut pour son bien."Percy Gryce l’avait assommée tout l’après-midi, – rien que d’y songer semblait réveiller un écho de sa voix monotone, – et pourtant elle ne pouvait l’ignorer le lendemain, il lui fallait poursuivre son succès, se soumettre à plus d’ennui encore, être prête à de nouvelles complaisances, à de nouvelles souplesses, et tout cela dans l’unique espoir que finalement il se déciderait peut-être à lui faire l’honneur de l’assommer à vie."
à suivre
Dernière édition par Bédoulène le Ven 3 Nov - 15:08, édité 1 fois
_________________
“Lire et aimer le roman d'un salaud n'est pas lui donner une quelconque absolution, partager ses convictions ou devenir son complice, c'est reconnaître son talent, pas sa moralité ou son idéal.”
― Le club des incorrigibles optimistes de Jean-Michel Guenassia
[/i]
"Il n'y a pas de mauvais livres. Ce qui est mauvais c'est de les craindre." L'homme de Kiev Malamud
Bédoulène- Messages : 21152
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 79
Localisation : En Provence
Re: LC Edith Wharton : Chez les heureux du monde
Chapitre II, Lily rencontre successivement M. Rosedale, arriviste de race juive qui pourrait la faire chanter, M. Percy Gryce, un candidat au mariage, mais timoré et fort ennuyeux, Mrs. George Dorset, une frivole imbue de sa personne et assez insupportable ; elle nous apprend qu’elle s’est prise de passion pour le jeu (bridge), entraînée par sa situation de "parasite" désargenté de la haute société.
_________________
« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
Tristram- Messages : 15640
Date d'inscription : 09/12/2016
Age : 67
Localisation : Guyane
Re: LC Edith Wharton : Chez les heureux du monde
Je continue, même si je me demande si mes notes postées au fil de la lecture sont adaptées à notre lecture commune.
Chapitre III, Lily évoque son enfance entre un père "effacé" et une mère uniquement préoccupée de luxe.
Chapitre IV, toujours chez les Trenor (Mrs est une « marieuse »), qui l’invitent mais dont elle dépend, Lily continue ses approches de Mr. Gryce, assurée que sa beauté et son habileté vont définitivement le convaincre de l’épouser.
Chapitre V, Selden arrive inopinément, et Lily, qui se sent proche de cet homme libre, cultivé et spirituel, se rapproche de lui.
Le style d’Edith Wharton est soigné, étudié et non dénué d'humour, d’un raffinement conforme à l’évocation de cette société choisie.
Les portraits sont rendus avec justesse, notamment les sensations et sentiments de Lily.
Chapitre III, Lily évoque son enfance entre un père "effacé" et une mère uniquement préoccupée de luxe.
À la mort de ses parents, c’est Mrs. Peniston, sa tante paternelle, qui la recueille ; elle la laisse « entrer en campagne » – sans succès puisque Lily est toujours miss à vingt-neuf ans.« Lily ne se souvenait pas qu’il y eût jamais eu assez d’argent, et, pour quelque raison mal définie, son père semblait toujours responsable de cette insuffisance. »
« …] pour Mrs. Bart ainsi que pour ses connaissances, il y avait une sorte d’héroïsme à vivre comme si l’on était beaucoup plus riche qu’on ne l’était réellement. »
Chapitre IV, toujours chez les Trenor (Mrs est une « marieuse »), qui l’invitent mais dont elle dépend, Lily continue ses approches de Mr. Gryce, assurée que sa beauté et son habileté vont définitivement le convaincre de l’épouser.
Chapitre V, Selden arrive inopinément, et Lily, qui se sent proche de cet homme libre, cultivé et spirituel, se rapproche de lui.
Le style d’Edith Wharton est soigné, étudié et non dénué d'humour, d’un raffinement conforme à l’évocation de cette société choisie.
Chapitre VI, Lily a compromis sa conquête de Gryce.« L’endroit était charmant, et Lily n’était pas insensible à son charme, ni au fait que sa propre présence le rehaussait encore ; mais elle n’était accoutumée à goûter les joies de la solitude qu’en société, et cette combinaison d’une belle jeune fille et d’un site romanesque lui semblait trop parfaite pour être aussi gaspillée. »
Les portraits sont rendus avec justesse, notamment les sensations et sentiments de Lily.
« Une partie de votre habileté consiste à improviser des effets prémédités. »
_________________
« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
Tristram- Messages : 15640
Date d'inscription : 09/12/2016
Age : 67
Localisation : Guyane
Re: LC Edith Wharton : Chez les heureux du monde
d'accord avec toi Tristram
- Spoiler:
- moment important pour Selden et Lily dans leur balade :" Je ne fais pas d’expériences, répliqua-t-il. Ou, si j’en fais, ce n’est pas sur vous, mais sur moi-même. Je ne sais quels seront leurs résultats ; mais si vous épouser en est un, je suis prêt à courir le risque.""Selden continuait à la regarder ; puis il tira de nouveau son étui à cigarettes et en alluma lentement une. Il lui semblait nécessaire, à cet instant, de proclamer, par quelque geste qui lui fût familier, qu’il se possédait parfaitement : il avait un désir presque enfantin de faire voir à sa compagne que, leur vol terminé, il avait atterri sain et sauf"
Lily reçoit les reproches de Mrs Trenor, leur hôtesse"— Parliez-vous sérieusement ? demanda-t-elle, avec un bizarre frémissement de gaieté qu’elle avait peut-être ramassé, en hâte, au milieu d’un stock d’intonations, sans avoir le temps de choisir la note juste.
Selden gouvernait mieux sa voix :
— Pourquoi pas ? répliqua-t-il. Vous voyez, je ne courais aucun risque.
Et, comme elle restait encore debout devant lui, un peu pâle sous la réplique, il ajouta vivement :
— Redescendons !""Tout le monde avait à cœur de vous aider. Même Bertha ne s’est mêlée de rien, il faut le reconnaître, jusqu’à l’arrivée de Lawrence, que vous lui avez enlevé. Après cela, elle avait le droit de se venger : pourquoi diable vous êtes-vous mise en travers de sa route ? Vous connaissez Lawrence Selden depuis des années : pourquoi vous êtes-vous conduite comme si vous veniez de le découvrir ? Si vous aviez une dent contre Bertha, le moment était bien mal choisi pour le montrer : vous auriez pu tout aussi bien régler ce compte après votre mariage !… Je vous avais dit que Bertha était dangereuse. En arrivant ici, elle était dans de détestables dispositions, mais la venue inopinée de Lawrence l’avait mise de bonne humeur, et, si vous l’aviez seulement laissé croire que c’était pour elle qu’il était venu, elle n’aurait jamais eu l’idée de vous jouer un pareil tour… Oh ! Lily, vous ne réussirez jamais à rien, si vous n’êtes pas plus sérieuse ."
la malfaisante Bertha Dorset"— Qu’est-ce que Bertha lui a réellement raconté ?
— Ne me demandez pas : des horreurs !… Il parait qu’elle avait exhumé tous les vieux potins… Oh ! vous savez ce que je veux dire : naturellement, il n’y a rien au fond ; mais je suppose qu’elle a remis à l’ordre du jour le prince Varigliano et lord Hubert… Ah ! il y avait aussi je ne sais quelle histoire d’après laquelle vous auriez emprunté de l’argent au vieux Ned Van Alstyne : est-ce exact ?
— Il est le cousin de mon père, interrompit miss Bart.
— Bien entendu, elle n’a pas soufflé mot de cela… C’est Ned, paraît-il, qui a raconté la chose à Carry Fisher ; et elle, naturellement, l’a racontée à Bertha… Ils sont tous les mêmes, vous savez : ils sont muets pendant des années, et on se croit sauf ; puis, à la première occasion, ils retrouvent toute leur mémoire.
Lily avait pâli ; il y avait de l’âpreté dans sa voix :
— C’était de l’argent que j’avais perdu au bridge chez les Van Osburgh. Je l’ai rendu, naturellement !
— Ah ! cela, ils auront préféré ne pas s’en souvenir ; d’ailleurs, c’était l’idée de la dette de jeu qui effrayait Percy… Oh ! Bertha connaissait bien son homme : elle savait juste ce qu’il fallait lui dire !"
Miss Bart sait qu'elle est belle, trop certainement :"Plus complètement qu’aucune autre manifestation de la richesse, elles (les perles) symbolisaient la vie vers laquelle elle aspirait le plus, la vie d’isolement dédaigneux et raffiné où chaque détail aurait le fini d’un joyau, et dont l’ensemble serait l’harmonieuse monture de sa beauté rare, merveilleux joyau elle-même."
Lily apprend qu'Evie Osburgh va certainement se marier avec Percy Gryce, elle voit cela comme un nouvel échec.
Mr Gus Trenor gère l'argent de Lily et en paiement (car il faut toujours payer, en aide de toutes sortes) de convaincre sa femme Judy d'inviter Mr Rosedale (qui intéresse Gus, car il gagne beaucoup dans ses placements)
à Bellomont.
nouvelle rencontre lors d'une réception entre Selden et Miss Bart"— Ah ! dit-elle, j’envie à Gerty ce pouvoir qu’elle a de revêtir de romanesque tous nos vilains et prosaïques arrangements ! Je ne suis jamais parvenue à reconquérir ma propre estime depuis le jour où vous m’avez montré la pauvreté et l’insignifiance de mes ambitions.
A peine eut-elle prononcé ces paroles qu’elle en vit clairement toute la maladresse. Il semblait que ce fût son destin de toujours apparaître à son désavantage devant Selden.
— Je croyais, au contraire, répliqua-t-il légèrement, avoir servi à vous prouver que rien n’était plus important pour vous que ces ambitions-là.
C’était comme si le vif courant de son être avait été subitement arrêté par un obstacle qui la refoulait sur elle-même. Elle le regarda avec découragement, – tel un enfant blessé ou effrayé : son « moi » réel, que Selden avait la faculté de faire surgir des profondeurs, était si peu accoutumé à marcher seul !
Cet appel désespéré toucha en lui, comme toujours, une fibre secrète. Peu lui eût importé de découvrir que sa présence augmentait l’éclat de la jeune fille ; mais ce coup d’œil jeté sur un état d’âme crépusculaire où lui seul avait accès semblait l’isoler, une fois de plus, dans un monde à part avec elle.
— Au moins, vous ne pouvez pas penser de moi plus de mal que vous n’en dites ! s’écria-t-elle avec un rire tremblant."
Selden a découvert la vraie Lily !
_________________
“Lire et aimer le roman d'un salaud n'est pas lui donner une quelconque absolution, partager ses convictions ou devenir son complice, c'est reconnaître son talent, pas sa moralité ou son idéal.”
― Le club des incorrigibles optimistes de Jean-Michel Guenassia
[/i]
"Il n'y a pas de mauvais livres. Ce qui est mauvais c'est de les craindre." L'homme de Kiev Malamud
Bédoulène- Messages : 21152
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 79
Localisation : En Provence
Re: LC Edith Wharton : Chez les heureux du monde
Chapitre VIII, Lily utilise Mr Trenor pour placer son « tout petit revenu personnel » et sortir de son endettement auprès de fournisseurs.
Malgré des doutes suite à ses échecs, Lily a « confiance dans sa beauté, dans son pouvoir, dans l’ensemble des capacités qui l’appelait à une destinée brillante », c'est-à-dire échapper à la « médiocrité » et vivre dans les plaisirs du luxe. Elle affirme toujours son credo élitiste et sa confiance en son destin supérieur (évidemment mérité, comme prédestiné) :
Chapitre XI, Mrs. Peniston est avertie des potins sur Lily.
Chapitre XIV, Selden dîne chez sa cousine Gerty (Miss Farish est une pauvre femme, pleine d’empathie, mais évidemment rejetée par la société), ne songeant qu’à Lily, qui arrive après son départ.
Chapitre XV, les maladresses de Lily continuent de l’entraîner vers la déchéance ; Mr. Rosedale lui apprend qu’il entend l’épouser (et Edith Wharton précise qu’il agit selon « sa race », une forme de prédestination en quelque sorte).
Chapitre XVI, désillusionné, Selden part pour l’Europe… et rencontre Lily sur la Riviera, invitée dans une croisière.
Malgré des doutes suite à ses échecs, Lily a « confiance dans sa beauté, dans son pouvoir, dans l’ensemble des capacités qui l’appelait à une destinée brillante », c'est-à-dire échapper à la « médiocrité » et vivre dans les plaisirs du luxe. Elle affirme toujours son credo élitiste et sa confiance en son destin supérieur (évidemment mérité, comme prédestiné) :
Chapitre IX, une femme de ménage vend à Lily des lettres de Mrs Dorset à Selden. Bonheur d’expression (j’aurais peut-être mis "émanant" pour « exhalant ») :« Aux yeux de miss Bart, comme aux yeux de sa mère, se résigner à la médiocrité était un signe évident de bêtise ; et il y avait des moments où, consciente du don qu’elle possédait de paraître et d’être exactement ce que réclamait l’occasion, elle avait presque le sentiment que c’était par choix que d’autres jeunes filles étaient laides et inférieures. Certainement personne n’était obligé de confesser la résignation à son sort au point où la confessaient, par sa couleur destinée à « faire de l’usage », la robe de Gerty Farish, et l’air abattu de son chapeau : il est presque aussi sot de laisser deviner par vos vêtements que vous vous savez laide que de proclamer par eux que vous vous croyez belle. »
Chapitre X, Trenor presse Lily, et elle est l’objet de ragots.« Elle ne pouvait se voir ailleurs que dans un salon, exhalant de l’élégance comme une fleur exhale son parfum. »
Chapitre XI, Mrs. Peniston est avertie des potins sur Lily.
Chapitre XII, Lily, qui fréquente des milieux plus équivoques (avec des soupçons d’immoralité, comme le divorce, et où tentent de s’infiltrer des parvenus), triomphe dans un tableau vivant qui la met habilement en valeur, séduisant notamment Selden.« C’était horrible à une jeune fille de permettre qu’on parlât d’elle ; si peu fondées que fussent les accusations, elle était à blâmer d’y avoir donné lieu. »
Chapitre XIII, Trenor tente d’abuser Lily (il a investi beaucoup d’argent en elle, sans rétribution), et se retient à temps.« Trenor s’était marié jeune, et, depuis son mariage, ses rapports avec les femmes n’avaient rien de ces bavardages sentimentaux qui se replient l’un sur l’autre comme les sentiers d’un labyrinthe : il fut d’abord déconcerté, puis irrité, de se voir toujours ramené au même point de départ, et Lily sentit que peu à peu elle n’était plus maîtresse de la situation. »
Chapitre XIV, Selden dîne chez sa cousine Gerty (Miss Farish est une pauvre femme, pleine d’empathie, mais évidemment rejetée par la société), ne songeant qu’à Lily, qui arrive après son départ.
Chapitre XV, les maladresses de Lily continuent de l’entraîner vers la déchéance ; Mr. Rosedale lui apprend qu’il entend l’épouser (et Edith Wharton précise qu’il agit selon « sa race », une forme de prédestination en quelque sorte).
Chapitre XVI, désillusionné, Selden part pour l’Europe… et rencontre Lily sur la Riviera, invitée dans une croisière.
« Ça, c’est Lily, tout entière, vous savez : elle travaille comme un nègre à préparer le terrain et à faire les semailles ; puis, le jour où elle doit récolter la moisson, elle se lève trop tard ou elle court à un pique-nique. »
_________________
« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
Tristram- Messages : 15640
Date d'inscription : 09/12/2016
Age : 67
Localisation : Guyane
Re: LC Edith Wharton : Chez les heureux du monde
Chapitre XVII, sur le yacht, Lily est accusée par son « amie » Bertha Dorset d’avoir des vues sur son mari George.
Chapitre XIX, Lily rentre à New York où sa tante vient de décéder, et de la déshériter.
Chapitre XX, Lily, exclue de son cercle, passe à une autre coterie, le « clan des Gormer ».
Chapitre XXII, Lily se rapproche de Rosedale, qui s’étonne qu’elle n’use pas des lettres compromettantes qu’elle détient pour contrecarrer l’influente (car très riche) Bertha Dorset, qui la tient à l’écart de sa société habituelle, mais elle refuse de l’épouser.
Chapitre XVIII, le scandale est évité, mais Lily sauve à peine les « apparences », et doit partir.« L’invitation des Dorset à les accompagner en Europe était arrivée comme pour la libérer miraculeusement de difficultés accablantes ; et, grâce à la faculté qu’elle possédait de se renouveler dans de nouveaux décors, et d’oublier les cas de conscience aussi facilement que les milieux où le problème s’était posé, le simple changement de lieu lui semblait, non pas seulement un ajournement, mais bien une solution de ses ennuis. Les complications morales n’existaient pour elle que là même où elles s’étaient produites ; Lily n’avait pas l’intention de les négliger ou de les ignorer, mais ces complications perdaient leur réalité du moment que, par-derrière, le fond changeait. Lily n’aurait pas pu demeurer à New York sans rendre à Trenor l’argent qu’elle lui devait ; pour s’acquitter de cette dette odieuse, elle aurait été jusqu’à envisager un mariage avec Rosedale ; mais le fait accidentel d’avoir mis l’Atlantique entre elle et ses obligations avait suffi pour les faire diminuer jusqu’à perte de vue, comme des bornes milliaires qu’elle aurait dépassées en voyageant. »
Chapitre XIX, Lily rentre à New York où sa tante vient de décéder, et de la déshériter.
Chapitre XX, Lily, exclue de son cercle, passe à une autre coterie, le « clan des Gormer ».
Chapitre XXI, Lily hésite entre Rosedale et George Dorset, qui tous deux la veulent pour femme.« Si peu qu’elle fût dans le ton de leur milieu, son incomparable souplesse mondaine, sa longue habitude de s’adapter à autrui sans permettre que sa propre ligne en fût altérée, son habile maniement de tous les instruments polis de son métier, lui avaient conquis une place importante dans la coterie des Gormer. »
Chapitre XXII, Lily se rapproche de Rosedale, qui s’étonne qu’elle n’use pas des lettres compromettantes qu’elle détient pour contrecarrer l’influente (car très riche) Bertha Dorset, qui la tient à l’écart de sa société habituelle, mais elle refuse de l’épouser.
_________________
« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
Tristram- Messages : 15640
Date d'inscription : 09/12/2016
Age : 67
Localisation : Guyane
Re: LC Edith Wharton : Chez les heureux du monde
Désolée, je lis tranquillement en solitaire avant de vous rejoindre quand j'aurai terminé pour avoir une vue d'ensemble et donc la possibilité d'exprimer mon jugement en discussion avec vous.
Pinky- Messages : 477
Date d'inscription : 28/11/2021
Re: LC Edith Wharton : Chez les heureux du monde
C'est bien aussi de figer ses ressentis au fil de la lecture, ça permet de voir l'évolution de sa perception, et ses erreurs ! Je pensais que Trevor avait vraiment aidé Lily en jouant à la bourse, pas en lui donnant indirectement de l'argent ; je voyais Rosedale derrière cette opération, je me suis trompé !
_________________
« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
Tristram- Messages : 15640
Date d'inscription : 09/12/2016
Age : 67
Localisation : Guyane
Re: LC Edith Wharton : Chez les heureux du monde
j'ai retrouver la phrase où l'auteure parle de la race de Rosedale et pourquoi tu parles de "prédestination"
" L’idée qu’elle devait s’amadouer plus tard détermina Rosedale à se lever docilement, un peu rouge de ce succès inespéré, habitué d’ailleurs par la tradition de sa race à accepter ce qu’on lui concédait, sans hâte malséante de presser les gens pour obtenir davantage."
j'avais aussi relevé ton dernier extrait car il est caractéristique de son tempérament et explique de fait sa situation d'échec.
" L’idée qu’elle devait s’amadouer plus tard détermina Rosedale à se lever docilement, un peu rouge de ce succès inespéré, habitué d’ailleurs par la tradition de sa race à accepter ce qu’on lui concédait, sans hâte malséante de presser les gens pour obtenir davantage."
j'avais aussi relevé ton dernier extrait car il est caractéristique de son tempérament et explique de fait sa situation d'échec.
- Spoiler:
- Lily vit donc sur le yacht des Dorset, elle s'occupe de Mr Dorset à la demande de sa femme Bertha qui elle batifole avec le jeune poète Ned Silverton. C'est ce qu'explique Mme Fisher à Selden( tandis qu'elle use de ses connaissances et son habileté au profit du couple Bry)."Nous savons tous que c’est pour cela que Bertha a emmené Lily. Quand Bertha veut se donner du bon temps, il faut qu’elle occupe George. J’avais cru d’abord que Lily jouerait sérieusement, cette fois, mais le bruit court que Bertha est jalouse de ses succès ici et à Cannes, et je ne serais pas étonnée s’il y avait rupture, un de ces jours. La seule sauvegarde de Lily, c’est que Bertha a besoin d’elle… oh ! terriblement besoin… L’affaire Silverton est dans la période aiguë : il devient nécessaire de détourner l’attention de George continuellement ou presque. Et je dois avouer que Lily la détourne, en effet : je suis convaincue qu’il l’épouserait demain, s’il découvrait quelque tort de Bertha. Mais vous le connaissez : il est aussi aveugle que jaloux ; et, naturellement, le rôle actuel de Lily est de lui maintenir le bandeau sur les yeux. Une femme adroite saurait tout juste le moment où il conviendrait de l’arracher ; mais Lily n’est pas adroite, au moins, de cette façon-là, et, quand George ouvrira les yeux, elle s’arrangera probablement pour ne pas être dans son champ visuel."
Lily est admirée comme toujours et appréciée par la princesse royale de Macédoine et Lady Skiddaw à la jalousie de Bertha.
Selden retourne sur Nice, il fuit la présence de Lily."Dans les tréfonds de son cœur, il n’était pas fâché d’esquiver toute probabilité de retrouver miss Bart. Si complètement qu’il se fût détaché d’elle, il n’arrivait pas encore à la considérer comme un simple cas mondain : or, envisagée sous un angle plus personnel, elle n’était pas précisément pour lui un rassurant sujet d’étude. Le hasard d’une rencontre ou simplement la mention répétée de son nom ramènerait sa pensée dans des régions qu’il s’était résolument interdites ; au contraire, s’il parvenait à l’exclure entièrement de sa vie, la vertu d’impressions nouvelles et variées, qui n’auraient aucun rapport avec elles, achèverait bientôt l’œuvre de séparation. La conversation de Mrs. Fisher avait, il est vrai, agi dans ce sens-là ; mais ce traitement était trop pénible pour être choisi de plein gré, alors qu’on avait en réserve des remèdes plus doux ; et Selden croyait pouvoir compter sur lui-même pour en revenir graduellement à juger avec sang-froid miss Bart, pourvu seulement qu’il ne la vît pas."
Mais il la rencontre et la trouve changée :"Et tout à coup, tandis que Selden notait les délicates nuances par où elle s’harmonisait avec son entourage, il lui vint à l’esprit que ce manège si adroit supposait une situation vraiment désespérée. Elle était tout près de quelque chose, – telle était l’impression qui lui restait : il croyait la voir en équilibre au bord d’un précipice, le pied gracieusement avancé pour bien montrer qu’elle ne savait point que le sol lui manquât…"
Bertha partie avant de la réception donne RV à la gare à Lily et Mr Dorset son mari, mais en fait George Dorset et Miss Bart voyageront seuls dans le train, Bertha n'étant pas là à la station, comme prévue.
Lily raconte cela à Mrs Fisher :
"— Vous dites que Bertha n’a jamais paru ?… Mais alors comment diable est-elle rentrée ?
— Oh ! par le train suivant, je suppose : il y avait deux trains supplémentaires, à cause de la fête… En tout cas, je sais qu’elle est saine et sauve à bord du yacht, bien que je ne l’aie pas encore vue, mais avouez que ce n’est pas ma faute ! conclut Lily.
— Pas votre faute que Bertha n’ait pas paru ?… Ma pauvre enfant, pourvu seulement que ce ne soit pas vous qui payiez cela ."
et Lily le paiera en effet ; Bertha et Ned ont "râté tous les trains, ont du prendre une voiture mais le seul cheval était boiteux donc Bertha est rentrée à bord de la Sabrina à 7 heures du matin, George était sur le pont du yacht.
Evidemment Bertha tourne la situation de la soirée précédente à son avantage, c'est Lily qui aurait du les attendre à la gare, à quelle heure que ce fut.
Lily réclame à Selden sa présence auprès de George Dorset.
Tous sont conviés à un repas au restaurant, y compris Selden."Mais ce qui le frappa surtout, c’était la manière dont elle se distinguait, par cent nuances indéfinissables, des personnes qui abondaient le plus dans son propre style. C’était précisément dans une pareille compagnie, – la fine fleur et la parfaite expression de l’état où elle aspirait, – que les différences ressortaient plus saisissantes : sa grâce ravalait l’élégance des autres femmes, comme le subtil à-propos de ses silences rendait leurs bavardages plus sots. La tension de ces dernières heures avait restitué à son visage cette éloquence plus profonde dont Selden depuis quelque temps regrettait l’absence, et la bravoure des paroles qu’elle lui avait dites flottait encore dans sa voix et dans ses yeux. Oui, elle était incomparable : c’était le seul mot qui convînt ; et il pouvait donner d’autant plus libre cours à son admiration qu’il y demeurait si peu de sentiment personnel."
A la fin du repas quand tous regagne leur hôtel ou yacht la voix de Bertha Dorset s'élève :
— Miss Bart ne retourne pas sur le yacht, dit-elle d’une voix singulièrement distincte
Mr Dorset proteste en vain !"Miss Bart, durant ce rapide échange de paroles, était demeurée admirablement calme et droite, légèrement isolée du groupe qui se tenait avec embarras autour d’elle. Elle avait pâli sous le choc de l’insulte, mais la décomposition des visages environnants ne se reflétait pas sur le sien. Par la vertu de son sourire dédaigneux, elle semblait soulevée hors de la portée de son adversaire, et ce ne fut qu’après avoir bien fait sentir à Mrs. Dorset la distance qui les séparait qu’elle se retourna pour tendre la main à son hôtesse.
— Je dois rejoindre la duchesse demain, dit-elle, et il m’a semblé plus commode de rester à terre, cette nuit."
Elle fait appel à Selden une fois de plus :" Selden la vit risquer un coup d’œil sur les visages des autres femmes. Elle lut leur incrédulité dans leur regard détourné, comme dans la muette bassesse des hommes réfugiés derrière elles, et pendant une misérable demi-seconde, il la sentit trembler sur le bord du désastre. Puis, se tournant vers lui d’un geste aisé, avec la pâle bravoure de son sourire retrouvé :
— Cher monsieur Selden, dit-elle, vous avez promis de me mettre en voiture…"
Selden insiste pour que Stepney qui est tout de même son cousin accepte qu'elle passe la nuit chez eus. Le lendemain Lily part à Londres chez la Duchesse.
Lily retourne chez elle en apprenant la mort de sa tante Mrs Péniston. A l'ouverture du testament, Grâce Stepney est l'héritière, Lily recevra 10 000 dollars : le montant de sa dette envers Mr Trenor.
Mrs Péniston avaiat appris la rupture avec Mrs Dorset et l'avait mis au détriment de Lily." Elle savait qu’elle avait été impitoyablement sacrifiée à la résolution prise par Bertha Dorset de reconquérir son mari, et, quoique ses relations personnelles avec Dorset n’eussent pas dépassé la bonne camaraderie, elle s’était parfaitement rendu compte, dès le début, que son rôle dans cette affaire était, comme l’avait brutalement défini Carry Fisher, de distraire de sa femme l’attention de Dorset. C’était pour cela qu’elle était là ; c’était le prix qu’elle avait accepté de payer pour trois mois de luxe, loin de tout souci. Son habitude de regarder résolument les faits en face, dans les rares moments où elle faisait son examen de conscience, ne lui permettait de jeter aucun faux jour sur la situation. Elle avait pâti de la fidélité même avec laquelle elle avait exécuté sa clause dans ce contrat tacite, mais d’aucune façon la clause ne lui faisait honneur, et elle la voyait maintenant dans toute la laideur de l’insuccès."
A partir de là c'est la descente pour Lily, après avoir quitté son poste chez Mrs Hacht, comme le lui suggérait Selden qui avait eu connaissance de la vie de la Dame, Lily travailla, sans succès chez une chapelière réputée. Puis ses maigres revenus l'obligèrent à louer dans une pension. Elle rencontre Rosedale et s'épanche sur ses soucis et elle serait même prête à accepter un mariage avec Rosedale qui lui a à plusieurs reprises dit vouloir à ses côtés une femme comme elle. Mais quand arrivé au bout de ses forces, elle lui dit consentir à être sa femme c'est lui qui ne le souhaite plus. Il faut qu'elle soit acceptée à nouveau par Bertha Dorset et là il pourra l'épouser pas avant. Il ne veut pas perdre ses chances et être rejeté par la côterie des mondains.
Lily éprouve le besoin de voir Selden, il pourra la réconforter."— Une fois… deux fois… vous m’avez offert une chance de m’évader de ma vie, et je l’ai refusée… refusée, parce que j’étais lâche. Ensuite j’ai vu mon erreur… j’ai vu que je ne pourrais jamais être heureuse avec ce qui m’avait satisfaite auparavant. Mais il était trop tard : vous m’aviez jugée… j’ai compris. Il était trop tard pour le bonheur… mais pas trop tard pour trouver une aide dans la pensée même de ce que j’avais manqué… C’est de cette pensée seule que j’ai vécu : ne me l’ôtez pas maintenant !… Même dans mes pires moments, cette pensée a été comme une petite lumière au milieu des ténèbres. Il y a des femmes qui sont assez fortes pour valoir quelque chose par elles-mêmes ; moi, j’avais besoin d’être soutenue par votre foi en moi. Sans vous, j’aurais peut-être pu résister à une grande tentation, mais les petites m’auraient abattue… Et puis, je me rappelais… je me rappelais que vous m’aviez dit qu’une pareille vie ne pourrait jamais me satisfaire ; et je ne m’avouais pas sans honte qu’elle me satisfaisait… Voilà ce que vous avez fait pour moi… voilà ce dont je voulais vous remercier. Je voulais vous dire que je n’ai jamais oublié, et que j’ai essayé… essayé de toutes mes forces…"une lecture qui m'a beaucoup plus, les mots de l'auteure sont d'une justesse, d'une maîtrise, d'une intelligence remarquables, j'avais déjà apprécié mes précédentes lectures d'ailleurs."— Vous rappelez-vous ce que vous m’avez dit un jour ? que vous ne pouviez m’aider qu’en m’aimant ? Eh bien… vous m’avez ¡limée, un moment, et cela m’a aidée. Cela m’a toujours aidée. Mais ce moment est passé… C’est moi qui l’ai laissé passer. Et il faut continuer à vivre. Adieu.
Elle posa son autre main sur la sienne, et ils se regardèrent l’un l’autre avec une sorte de solennité, comme s’ils se trouvaient en présence de la mort. Quelque chose, en vérité, gisait mort entre eux : l’amour qu’elle avait tué en lui et qu’elle ne pouvait plus rappeler à la vie. Mais quelque chose vivait entre eux, et s’élançait en elle comme une flamme impérissable : c’était l’amour que l’amour de cet homme avait éveillé, la passion de son âme, à elle, pour la sienne, à lui."
Rosedale lui a fait remarquer qu'elle avait entre les mains (les lettres de Bertha à Selden) de quoi obliger Mrs Dorset à l'accepter, mais faire cela ce serait impliquer Selden et Lily ne le veut pas, elle ne veut pas le sacrifier pour son avenir.
Aussi alors qu'elle est chez Selden à se chauffer devant le feu :"Elle s’agenouilla sur le tapis, devant le foyer, tendant les mains vers la braise. Étonné par le changement soudain de sa voix, il rassembla machinalement une poignée de bois dans le panier et la jeta sur le feu. Ce faisant, il remarqua la maigreur de ses mains contre la lueur montante des flammes. Il vit aussi, sous les lignes lâches de sa robe, comme les angles saillaient ; il se rappela longtemps, par la suite, comme les jeux rougeâtres de la flamme aiguisaient la dépression de ses narines, approfondissaient le noir des ombres qui des pommettes gagnaient les yeux. Elle resta là, agenouillée, quelques moments, en silence ; – un silence, qu’il n’osait rompre. – Quand elle se leva, il crut voir qu’elle retirait quelque chose de son corsage et qu’elle le laissait tomber dans le feu ; mais à peine s’il remarqua le geste alors. Ses facultés semblaient en léthargie, et il tâtonnait encore à la recherche du mot qui romprait le sortilège.
Elle alla vers lui et posa les mains sur ses épaules.
— Adieu, dit-elle.
Et, comme il se penchait vers elle, elle effleura de ses lèvres le front de Selden."
Lily est tellement épuisée par le manque de sommeil qui l'affecte depuis plusieurs mois qu'elle use de drogue pour dormir, malgré la mise en garde du pharmacien de ne pas augmenter la dose.
Le lendemain de sa visite Selden se lève heureux il sait à présent quel mot il voulait dire à Lily."Neuf heures était une heure matinale pour faire une visite, mais Selden n’en était plus à se préoccuper de ces rites conventionnels. Il ne savait qu’une chose, c’est qu’il lui fallait voir Lily Bart tout de suite : il avait trouvé le mot qu’il voulait lui dire, et ce mot ne pouvait attendre. Il était étrange qu’il ne lui fût pas venu aux lèvres plus tôt, que lui, Selden, eût laissé partir Lily, la veille au soir, sans être capable de le prononcer. Mais qu’importait, maintenant qu’un jour nouveau avait lui ? Ce n’était pas un mot de crépuscule, c’était un mot du matin."
Mais à la porte de Lily, Gertry est là, elle l'entraîne dans la chambre de Lily qui git de son dernier sommeil. Le docteur dira qu'il s'agit d'une erreur, et il leur laisse un moment pour faire ce qu'ils veulent dans la chambre. Selden trouve le carnet de compte de Lily et les deux lettres dont l'une à Mr Trenor, qui le contrarie, mais il ne peut en connaître le sujet. Il repousse toutes les médisances faites à Lily."Il voyait que toutes les conditions de la vie avaient conspiré à les tenir séparés, puisque son propre détachement des puissances matérielles qui l’avaient gouvernée, elle, avaient accru ses exigences morales et lui avaient rendu plus difficile de vivre et d’aimer sans esprit critique. Mais du moins il l’avait aimée, il avait été disposé à risquer son avenir sur la foi qu’il avait en elle, et, si le destin avait voulu que l’heure favorable passât sans qu’ils pussent la saisir, il voyait maintenant que, pour tous deux, cette heure était sauve dans la ruine de leurs existences.
C’était cet amour d’une heure, ce triomphe fugitif sur eux-mêmes, qui les avait gardés de l’atrophie et de l’extinction ; qui, chez elle, s’était tourné vers lui dans toutes ses luttes contre l’influence du milieu, et, chez lui, avait maintenu vivante la foi qui le ramenait repentant et réconcilié à son chevet.
Il s’agenouilla et se pencha sur elle, épuisant jusqu’à la lie ce dernier moment ; et, dans le silence, passa entre eux le mot qui éclaircissait tout."
Il y de la légèreté dans la force de son écriture.
merci à toi Silveradow d'avoir ouvert cette LC et merci à ceux qui y participent.
Dernière édition par Bédoulène le Lun 6 Nov - 9:44, édité 2 fois
_________________
“Lire et aimer le roman d'un salaud n'est pas lui donner une quelconque absolution, partager ses convictions ou devenir son complice, c'est reconnaître son talent, pas sa moralité ou son idéal.”
― Le club des incorrigibles optimistes de Jean-Michel Guenassia
[/i]
"Il n'y a pas de mauvais livres. Ce qui est mauvais c'est de les craindre." L'homme de Kiev Malamud
Bédoulène- Messages : 21152
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 79
Localisation : En Provence
Re: LC Edith Wharton : Chez les heureux du monde
Merci pour toutes ces impressions qui donnent envie de se replonger dans le roman. Je garde un beau souvenir de la précision sensible de l'écriture d'Edith Wharton.
Avadoro- Messages : 1400
Date d'inscription : 07/12/2016
Age : 38
Re: LC Edith Wharton : Chez les heureux du monde
Chapitre XXIII, Gerty et Selden (et Mrs. Fisher, ainsi que Rosedale) souhaitent toujours aider Lily.
Chapitre XXV, après ce nouvel échec, Lily fabrique des chapeaux chez une célèbre modiste, et commence à se droguer.
Chapitre XXVIII, Lily rencontre une jeune femme qu’elle aida, et son enfant.
Chapitre XXIX, Lily abuse de la drogue.
Lecture achevée, j'attends les autres lecteurs pour en discuter !
Chapitre XXIV, Lily est devenue la secrétaire de Mrs. Norma Hatch, divorcée venue « de l’Ouest » pour se lancer dans le monde, « trop jeune, trop riche et trop crédule ».« Gerty souriait maintenant de son rêve d’autrefois : la rénovation de son amie par l’adversité. Elle comprenait clairement que Lily n’était pas de ceux auxquels la privation enseigne le peu d’importance de ce qu’ils ont perdu. »
« Vous croyez que nous vivons des riches, plutôt qu’avec eux : et c’est vrai, dans un sens… mais c’est un privilège que nous avons à payer ! Nous mangeons leurs dîners, nous buvons leurs vins, nous fumons leurs cigarettes, nous nous servons de leurs voitures, de leurs loges à l’Opéra et de leurs wagons particuliers… oui, mais nous avons une taxe à payer pour chacun de ces luxes. L’homme la paye, cette taxe, en donnant de gros pourboires aux domestiques, en jouant aux cartes au-delà de ses moyens, par des fleurs, des cadeaux, et bien d’autres choses qui sont chères ; la jeune fille, elle, la paye par des pourboires et par le jeu aussi… eh ! oui, j’ai dû me remettre au bridge… et en allant chez les meilleures couturières, en ayant toujours exactement la robe qu’il faut pour chaque circonstance, et en se gardant toujours fraîche, exquise et amusante ! »
Chapitre XXV, après ce nouvel échec, Lily fabrique des chapeaux chez une célèbre modiste, et commence à se droguer.
Chapitre XXVI, Lily perd encore cette dernière ressource.« Une fois de plus, elle était sortie d’une position équivoque à temps pour sauvegarder son respect d’elle-même, mais trop tard pour se justifier devant le public. »
Chapitre XXVII, troisième rencontre cruciale avec Selden, encore un de leurs poignants échecs, et Lily renonce définitivement à utiliser les lettres de Bertha Dorset.« Puisqu’elle avait été élevée pour être purement décorative elle pouvait à peine se blâmer de n’avoir pu servir à aucune fin pratique ; mais cette découverte ruina l’illusion consolante qu’elle avait de sa capacité universelle. »
« Des tendances héréditaires combinées avec sa première éducation avaient fait d’elle le produit hautement spécial qu’elle était : un organisme aussi peu apte à subsister hors de son milieu étroit qu’une anémone de mer détachée de son rocher. Elle avait été façonnée pour être un ornement délicieux : pour quelle autre fin la nature arrondit-elle le pétale de rose ou peint-elle la gorge du colibri ? Était-ce sa faute si la mission purement décorative est moins facile à remplir avec harmonie parmi les êtres qui vivent en société que dans le monde de la nature ? Était-ce sa faute s’il peut arriver que cette mission soit traversée par des nécessités matérielles ou compliquée par des scrupules moraux ? »
Chapitre XXVIII, Lily rencontre une jeune femme qu’elle aida, et son enfant.
Chapitre XXIX, Lily abuse de la drogue.
Lecture achevée, j'attends les autres lecteurs pour en discuter !
_________________
« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
Tristram- Messages : 15640
Date d'inscription : 09/12/2016
Age : 67
Localisation : Guyane
Re: LC Edith Wharton : Chez les heureux du monde
merci Tristram, nous en discuterons
_________________
“Lire et aimer le roman d'un salaud n'est pas lui donner une quelconque absolution, partager ses convictions ou devenir son complice, c'est reconnaître son talent, pas sa moralité ou son idéal.”
― Le club des incorrigibles optimistes de Jean-Michel Guenassia
[/i]
"Il n'y a pas de mauvais livres. Ce qui est mauvais c'est de les craindre." L'homme de Kiev Malamud
Bédoulène- Messages : 21152
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 79
Localisation : En Provence
Re: LC Edith Wharton : Chez les heureux du monde
Je donne mon commentaire avant de vous lire et de discuter avec vous
Pinky- Messages : 477
Date d'inscription : 28/11/2021
Re: LC Edith Wharton : Chez les heureux du monde
Chez les heureux du monde
Le livre s’ouvre avec Selden, le jeune avocat que Lily Barth, la jeune fille de déjà 29 ans, rencontre à la gare. Celui-ci l’invite chez lui, sans qu’elle se rende compte de cela peut avoir d’inconvenant, en ce début du XXe siècle à New York. La rencontre qu’elle fait de Rosedale, propriétaire juif du Benedict cet immeuble qui semble réservé aux jeunes hommes célibataires, est un premier élément de l’emprise que ce dernier pourra exercer sur elle.
Le décor est planté par Wharton lorsqu’elle oppose l’allure de Lily à cette des autres femmes qu’elle croise :
L’ entrevue chez Selden est fondamentale car elle va clore pratiquement l’ouvrage comme une boucle qui se referme pour attester de la permanence d’un amour que les deux protagonistes ont tout fait pour mener à l’échec. Un intérieur simple, des livres, une cheminée, rien du faste des maisons de campagne où l’on joue au bridge, où se nouent et dénouent les intrigues.
La destinée de Lily est celle d’une jeune fille plus toute jeune qui navigue de réunions mondaines en voyage sur la côte d’Azur, toujours aux frais de ses hôtes mais qu’il faut honorer par tes parties de bridge où l’on joue de l’argent et par des tenues coûteuses. Lily ne peut pas faire face à toutes ces dépenses ; elle finit par faire appel à Gus Trenor qui lui promet des gains substantiels à la Bourse ; cette dépendance à l’argent de Trenor l’éloigne de son amie Judy, épouse de celui-ci. Une autre épouse Bertha Dorset l’utilise pour « occuper » son mari et le distraire de ses infidélités mais quand ces arrangements sont dévoilés, c’est Lily qui en paie les conséquences. Dans cette société assez corsetée, Lily est l’attraction agréable grâce à son physique, à son élégance, pressée par les maris, tolérée ou instrumentalisée par les épouses. Elle est aussi courtisée par Rosedale qui, fort de ce qu’il sait d’elle, voudrait l’épouser pour parfaire son entrée dans le monde mais peu à peu la disgrâce de Lily pose problème.
En effet, Lily hébergée par sa tante est finalement déshéritée par celle-ci lorsqu’elle apprend que sa nièce est aux abois à cause de ses dettes de jeu. Ce sont deux femmes très dissemblables qui viennent à son secours ; Carry Fisher, la multi divorcée, libre de mœurs et souvent encore admise dans la bonne société et Gerty Farish qui vit sobrement et milite dans son association d’aide aux femmes en difficulté. Il faut y ajouter Nettie, une de ces femmes que Lily a aidée et qui la recueille dans la rue à la fin du livre.
L’intrigue qui est une satire sans appel de la société « des gens heureux » de New York au début du XXe siècle est aussi la tragédie d’un amour impossible entre Selden et Lily, enfermée dans son goût du luxe et de l’ostentation et incapable de se fixer une conduite au-delà de quelques heures.
On perçoit par toutes petites touches, l’attirance et l’affection qui les lient et les obstacles qui les séparent
Revient sans cesse l’idée du conditionnement par l’éducation qu’ont reçu les uns et les autres.
On peut se demander pourquoi E. Wharton donne au bébé de Nettie une telle importance, une sorte d’ancrage pour l’éternelle vagabonde qu’était Lily qui avait navigué ou peut-être erré dans une société d’adultes qui se rencontrent se divertissent et où les enfants, s'ils existent, n’y ont pas leur place.
Un livre dense, parfois très implicite dans les lieux fréquentés mais aussi parfois trop explicite quant à la satire de cette société d’oisifs. J’avais en tête Portrait de femme de James où la sympathie va à l’héroïne du roman alors qu’on est assez vite irrité par Lily, femme frivole que l’on finit par plaindre, victime de son milieu, de son éducation, de son aveuglement.
Comme James, cela pose la question de l’éducation des filles des milieux aisés mais aussi la responsabilité des unes et des autres pour s’extraire de ces conditionnements.
Le livre s’ouvre avec Selden, le jeune avocat que Lily Barth, la jeune fille de déjà 29 ans, rencontre à la gare. Celui-ci l’invite chez lui, sans qu’elle se rende compte de cela peut avoir d’inconvenant, en ce début du XXe siècle à New York. La rencontre qu’elle fait de Rosedale, propriétaire juif du Benedict cet immeuble qui semble réservé aux jeunes hommes célibataires, est un premier élément de l’emprise que ce dernier pourra exercer sur elle.
Le décor est planté par Wharton lorsqu’elle oppose l’allure de Lily à cette des autres femmes qu’elle croise :
Mais en quelques pages l’auteur annonce aussi les menaces qui rodent : les années qui passent à se déplacer entre lieu de villégiature et résidence d’été où elle est invitée, la réputation à préserver alors que le moindre faux pas est sans recours pour une jeune fille.« sa tête animée se détachant sur les tons obscurs de la foule, était plus en relief que dans une salle de bal : sous le chapeau sombre et le voile, elle retrouvait le teint de jeune fille, pur et lisse, qu’elle commençait à perdre après onze années de veilles et de danse ininterrompues….Il [Selden]la conduisit à travers la foule des petites gens retour de congé ; ils dépassèrent des filles au teint blême, coiffées de chapeaux absurdes, et des femmes à poitrine plate, qui se battaient avec des paquets et des éventails en feuille de palmier. Était-il possible qu’elle fût de la même race ? »
L’ entrevue chez Selden est fondamentale car elle va clore pratiquement l’ouvrage comme une boucle qui se referme pour attester de la permanence d’un amour que les deux protagonistes ont tout fait pour mener à l’échec. Un intérieur simple, des livres, une cheminée, rien du faste des maisons de campagne où l’on joue au bridge, où se nouent et dénouent les intrigues.
La destinée de Lily est celle d’une jeune fille plus toute jeune qui navigue de réunions mondaines en voyage sur la côte d’Azur, toujours aux frais de ses hôtes mais qu’il faut honorer par tes parties de bridge où l’on joue de l’argent et par des tenues coûteuses. Lily ne peut pas faire face à toutes ces dépenses ; elle finit par faire appel à Gus Trenor qui lui promet des gains substantiels à la Bourse ; cette dépendance à l’argent de Trenor l’éloigne de son amie Judy, épouse de celui-ci. Une autre épouse Bertha Dorset l’utilise pour « occuper » son mari et le distraire de ses infidélités mais quand ces arrangements sont dévoilés, c’est Lily qui en paie les conséquences. Dans cette société assez corsetée, Lily est l’attraction agréable grâce à son physique, à son élégance, pressée par les maris, tolérée ou instrumentalisée par les épouses. Elle est aussi courtisée par Rosedale qui, fort de ce qu’il sait d’elle, voudrait l’épouser pour parfaire son entrée dans le monde mais peu à peu la disgrâce de Lily pose problème.
En effet, Lily hébergée par sa tante est finalement déshéritée par celle-ci lorsqu’elle apprend que sa nièce est aux abois à cause de ses dettes de jeu. Ce sont deux femmes très dissemblables qui viennent à son secours ; Carry Fisher, la multi divorcée, libre de mœurs et souvent encore admise dans la bonne société et Gerty Farish qui vit sobrement et milite dans son association d’aide aux femmes en difficulté. Il faut y ajouter Nettie, une de ces femmes que Lily a aidée et qui la recueille dans la rue à la fin du livre.
L’intrigue qui est une satire sans appel de la société « des gens heureux » de New York au début du XXe siècle est aussi la tragédie d’un amour impossible entre Selden et Lily, enfermée dans son goût du luxe et de l’ostentation et incapable de se fixer une conduite au-delà de quelques heures.
« L’invitation des Dorset à les accompagner en Europe était arrivée comme pour la libérer miraculeusement de difficultés accablantes ; et, grâce à la faculté qu’elle possédait de se renouveler dans de nouveaux décors, et d’oublier les cas de conscience aussi facilement que les milieux où le problème s’était posé, le simple changement de lieu lui semblait, non pas seulement un ajournement, mais bien une solution de ses ennuis. Les complications morales n’existaient pour elle que là même où elle s’était produites ; Lily n’avait pas l’intention de les négliger ou de les ignorer, mais ces complications perdaient de leur réalité du moment que, par derrière le fond changeait. »
« Il n’y avait rien eu dans son éducation qui pût développer en elle une force morale un peu persévérante : ce qu’elle souhaitait et elle sentait qu’elle y avait droit, c’était une situation où l’attitude la plus noble serait la plus aisée. »
On perçoit par toutes petites touches, l’attirance et l’affection qui les lient et les obstacles qui les séparent
« Ce n’était pas à l’heure blafarde du désenchantement qu’il s’était réellement détaché d’elle, mais bien maintenant qu’il la voyait définitivement séparée de lui par la netteté d’un choix qui semblait démentir les différences mêmes qu’il avait senties en elle. Il lui apparaissait pleinement, ce choix dont elle se contentait : la stupide cherté de la nourriture et la voyante sottise de la conversation, une liberté de langage qui n’atteignait jamais l’esprit, et une liberté d’action qui ne s’élevait jamais jusqu’au roman. »
« Si l’on n’était pas soi-même une partie de la routine fixée pour la saison, on se balançait hors de toute sphère, dans le vide absolu de la non-existence mondaine. Lily, malgré tous ses rêves mal satisfaits, n’avait jamais réellement conçu la possibilité de graviter autour d’un autre centre. »
« Bien qu’elle gardât le ton égal d’une conversation légère, la question était formulée de façon à rappeler à Selden qu’on ne lui demandait pas ses bons offices ; et, pour un moment, il en fut arrêté. Leur situation était de celles qui ne peuvent s’éclaircir que par une explosion soudaine de sentiment ; et toute leur éducation et leurs habitudes d’esprit rendaient impossible une pareille explosion. Le calme de Selden sembla plutôt se durcir en résistance et celui de miss Bart en brillante surface d’ironie, tandis qu’ils se faisaient face, postés aux coins opposés d’un des sofas éléphantins de Mrs Hatch. »
Revient sans cesse l’idée du conditionnement par l’éducation qu’ont reçu les uns et les autres.
Illusion que son charme suffirait pour la combler indéfiniment.« Puisqu’elle avait été élevée pour être uniquement décorative elle pouvait à peine se blâmer de n’avoir pu servir à aucune fin pratique ; mais cette découverte ruina l’illusion consolante qu’elle avait de sa capacité universelle ».
On peut se demander pourquoi E. Wharton donne au bébé de Nettie une telle importance, une sorte d’ancrage pour l’éternelle vagabonde qu’était Lily qui avait navigué ou peut-être erré dans une société d’adultes qui se rencontrent se divertissent et où les enfants, s'ils existent, n’y ont pas leur place.
Ce que l’on retrouve lorsqu’elle s’endort à jamais :« Tout d’abord le fardeau qu’elle portait dans ses bras lui sembla plus léger qu’un nuage rose ou qu’un boule de duvet ; mais, comme elle continuait à le tenir le poids augmenta, s’enfonça plus profond, et la pénétra d’une étrange faiblesse, comme si l’enfant entrait en elle et devenait une partie d’elle-même »
« Elle se dressa de nouveau toute froide et tremblante : un moment, il lui sembla qu’elle avait lâché l’enfant. Mais non…elle se trompait…la tendre pression du petit corps était encore là, contre elle ; la chaleur recouvrée circula de nouveau dans ses veines, elle y céda, s’y plongea, s’endormit ».
Un livre dense, parfois très implicite dans les lieux fréquentés mais aussi parfois trop explicite quant à la satire de cette société d’oisifs. J’avais en tête Portrait de femme de James où la sympathie va à l’héroïne du roman alors qu’on est assez vite irrité par Lily, femme frivole que l’on finit par plaindre, victime de son milieu, de son éducation, de son aveuglement.
Comme James, cela pose la question de l’éducation des filles des milieux aisés mais aussi la responsabilité des unes et des autres pour s’extraire de ces conditionnements.
Pinky- Messages : 477
Date d'inscription : 28/11/2021
Page 2 sur 4 • 1, 2, 3, 4
Des Choses à lire :: Discussions autour des livres :: Nos Lectures Communes
Sujets similaires
» Edith Wharton
» Nicolas Delisle-L'Heureux
» Edith Sheffer
» A l'écoute du monde !
» Edith Pargeter (Ellis Peters)
» Nicolas Delisle-L'Heureux
» Edith Sheffer
» A l'écoute du monde !
» Edith Pargeter (Ellis Peters)
Page 2 sur 4
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
|
|