Jane Smiley

topocl a écrit:

Marie a écrit:Alors, je l'ai lue, cette trilogie! Oui, oui. Je ne résiste pas aux histoires de famille qui durent!

Ca dure moins mais c'est une chouette histoire de famille (et de maison) : tente la maison des Hollandais d'Ann Patchett, Marie !

... Ou Les "Privilèges" de Jonathan Dee. Mais je pense qu'elle a du le lire.

C'est noté, topocl!!
Bix, j'ai encore changé de maison. Je me rapproche plus de ton coin! Ce n'est pasToulouse, mais plus bas!

Marie a écrit:C'est noté, topocl!!
Bix, j'ai encore changé de maison. Je me rapproche plus de ton coin! Ce n'est pasToulouse, mais plus bas!

C'est ça Marie, en gros entre Lavaur, Castelnaudary. On appelle la région Lauragais. C'est le royaume de l'autan, un vent du sud qui ne me veut pas du bien.

Prends une loupe, sinon je ferai mieux !

Après les avis de topocl et de la trop rare Marie, je ne pouvais que réserver le premier tome à la médiathèque...

topocl a fait un commentaire très juste et argumenté de cette trilogie.

je ne dirais donc que le plaisir que j'ai eu à cette lecture ; une écriture équilibrée, agréable et beaucoup de psychologie pour dresser le portait de ces personnages. Cette belle fratrie de personnes aimantes, aimées ou haïes, parfois.

Les relations entre les membres de la famille, les affinités entre les uns et les autres, intergénérationnelles et l'apport des alliances qui renforcent la famille.

Les fratries sont analysées dans leur diversité, notamment la dualité des jumeaux.

Plusieurs strates des situations sociales et économiques : l'agriculture (avec le meilleur et le pire) avec les fermiers Joe et Jesse ;  l'intellectuel avec l'Oncle Henry notamment, le businessman Frank......

Une tranche de l'humanité en bref.

Certains évènements, sociaux ou politiques qui atteignent certains personnages montrent aussi l'âme des USA, sa haine notamment du communisme, le racisme, le poids de la religion,  ses choix vis à vis du reste du monde ; l'industrialisation agricole, l'armement et........ l'écologie qui s'installe à petits pas.



Extraits

Andy parlant de Frank : " Alors vous vous retourniez pour le suivre vers Hayward, et vous vous teniez à ses côtés à ce coin de rue, et quand il inclinait la tête pour vous regarder des pieds à la tête, attendant une éternité pour finir quand même par sourire, ça ne signifiait pas que vous étiez belle, mais que vous aviez une chance, oui, une petite chance de le revoir, de découvrir ce qui se cachait à l’intérieur, et peu importait ce que vous trouviez à la fin, parce que jamais personne au monde ne jetterait sur vous cette lumière, ni n’allumerait comme lui ce brasier en vous"

la ferme et Joe et son fils Jesse :" La main de son père était sèche, fraîche et dure, prête à réparer une machine, planter du maïs, à croire qu’elle ignorait que le reste de son corps était à bout de forces. C’était la main d’un homme bon, qui d’innombrables fois lui avait serré l’épaule, tapoté le dos. Comment mériter un tel père ? Mais il se tut et détourna les yeux. Un jour, il lui dirait tout ça, mais pour l’instant, ça lui faisait peur – et puis ça portait la poisse, ce serait tenter le diable. Il serra la main de son père dans la sienne et déclara : « Je crois que je vais aller voir où en est la météo.
        — Ça pourrait s’améliorer », répondit Joe."

Claire : " Puis la nuit était tombée, quelques étoiles étaient apparues, et une lune aux trois quarts. Elle ne raconta pas ce souvenir à Janet, mais elle pensa alors que l’âge d’or se trouvait en son cœur. Nul ne saurait jamais que son père, Carl, l’horizon infini de l’Iowa, une fournée de biscuits sortant du four, le rire de ses petits-enfants dans la pièce voisine, tout cela avait fait de sa vie un âge d’or. "

Janet et son père :
"Ses sourcils se fronçaient de plus en plus, elle était furieuse – à vingt ans, elle arborait la même expression qu’à la naissance. Il vint vers elle et lui prit les mains. Elle essaya de se dégager, mais il les lui ouvrit : « Regarde, miss Chochotte. Regarde bien les mains d’Arthur, la prochaine fois, et renifle-les aussi, tu verras qu’elles sont couvertes de sang. » Elle s’arracha à lui : « Pourquoi est-ce que je te croirais ? J’ai toujours su que tu étais un connard."

Lillian avait prévue un hommage à sa tante Eloise lors du sien
"« Je vous remercie d’honorer avec moi la mémoire d’Eloise Mary Vogel Silber, qui fut peut-être communiste mais ne défendit jamais ni Staline, ni même Lénine, et encore moins Mao Tsé-Toung. Si elle avait grandi dans l’un de ces pays, et non en Iowa, on l’aurait mise à mort très tôt car jamais elle n’hésitait à dire la vérité, quelles que soient les gens qui l’écoutaient. Elle rendait fou beaucoup de monde, dont le comité des activités non américaines de Californie. Lorsque Eloise dut témoigner, non seulement elle reconnut adhérer à certaines idées, mais elle ne cessa de répéter : “Oui, j’avais une bonne opinion du Parti communiste allemand. Pas vous ?” Elle fut très honnête aussi en déclarant que même s’ils la jetaient en prison, elle ne parlerait de personne excepté d’elle-même et de son défunt mari et, quand ils lui demandèrent des précisions sur lui, elle répondit : “Il fut tué par les Allemands parce que cette ordure de Mountbatten avait décidé de tester ses projets d’invasion à Dieppe.” J’aimais ma tante Eloise, et sa vie est la preuve que des gens animés de bonnes intentions peuvent avoir des idées différentes. Elle quitta le parti, sauva ma nièce Janet, et toute sa vie elle réfléchit au bien et au mal. Merci de vous joindre à moi pour honorer sa mémoire, qui que vous soyez. » Arthur embrassa la feuille de papier, la replia et la glissa dans sa poche de poitrine. À la dernière ligne, Debbie sut que sa mère avait prévu avec exactitude qui serait présent à son enterrement et qu’elle avait l’intention d’avoir le dernier mot. Tante Andy se tamponna les yeux, oncle Frank sourit et son père tapota à nouveau le cercueil. Puis il les remercia tous d’être venus."

Oups, et dire que je n'ai toujours pas terminé mon commentaire...
Le passage entre Janet et son père était en effet très fort. Tout un monde qui s'écroule en quelques phrases...

c'était pendant leur voyage à Paris !

j'avais commenté plus longuement, mais oublié de le faire en brouillon et oups envolé.

le tien sera donc un bon complément.

Chouette que le plaisir se partage! Armor, on t'attend de pied ferme !

Après avoir eu bien des peines à rédiger quelque chose, je pose finalement ici mon ressenti sur la trilogie de Jane Smiley.


Un siècle américain, c’est La petite maison dans la prairie… Mais pour les grands. Et ne vous y trompez pas : j’ai dévoré, dans ma folle jeunesse, les quelques 8 tomes qui composent cette fameuse petite maison. Enfin bref, ça n’est pas le sujet. Il n’empêche, ça commence bigrement pareil, avec luxe de détails sur le quotidien sans grandes aspérités d’une famille de fermiers de l’Iowa dans les années 20.
La narration se partage entre les différents protagonistes, si bien qu’au début, en sus de la vie d’agriculteurs des jeunes parents, nous avons droit aux balbutiements vocaux et mentaux de bébé Franck. Et c’est… lent. A tel point que j’avoue avoir songé à abandonner, entre le bébé tout étonné de faire areuh le père qui reste pendant plus d’une page planté devant sa haie à se demander s’il va ou non la tailler...
Si j’ai persévéré, c’est bien sûr grâce à l’enthousiasme de topocl, que je ne voyais pas s’ennuyer ferme pendant 1800 pages, mais aussi, j’avoue, grâce au charme insidieux de l’écriture qui m’avait déjà bien accrochée, mine de rien. Donc un conseil : si, comme moi, vous trouvez le début quelque peu poussif, attendez de passer le bébé. Ensuite les horizons s’élargissent et ça devient… eh bien, assez addictif, en fait.

En arrière-plan des démêlés intimes des personnages il y a, bien sûr, l’histoire de l'Amérique : la seconde guerre mondiale, le maccarthysme, la guerre froide et la crainte d’un conflit atomique qui l’accompagne ; plus récemment, la guerre d’Irak et l’irruption du dérèglement climatique. Les enjeux du siècle, marqués par une course à la technologie qui révèle peu à peu ses limites, s’accompagnent d’un bouleversement dans la conception même de la vie : au sens du devoir et à l’existence routinière des anciens succède le désir d’accomplissement et de sensations fortes des générations suivantes. La vie d'agriculteur n'est plus vécue comme une obligation et certains optent pour des carrières aux antipodes : monde universitaire, frisson des services secrets, vie d'artiste ou bien ors et mirages du rêve américain...

Malgré le côté monumental de l’oeuvre, il faut accepter de suivre Jane Smiley dans ce que ses décisions ont de parfois frustrant : par exemple lorsqu’elle choisit de négliger des personnages auxquels on s’était attaché, ou de « bâcler » en quelques lignes un épisode qui nous paraissait crucial, avant de le faire suivre d’une éclipse de 3 ans … Son écriture, à la fois précise et elliptique, donne à ses personnages, y compris principaux, un côté insaisissable assez indescriptible. Je dois ainsi avouer qu’après 3 tomes passés en leur compagnie, les psychés de Franck et Andy m’étaient toujours passablement hermétiques…

Pour peu que l’on se laisse porter, ce siècle américain présage de belles heures de lecture. Je l'ai néanmoins terminé avec un sentiment doux amer : en effet, après quelques longueurs, le rythme s’accélère dans le final, accumulant les évènements dramatiques au détriment de la crédibilité qui faisait jusqu’ici la force du roman. Le pessimisme ambiant qui s’installe alors dénote avec la lente sérénité des débuts. Des contrastes certainement volontaires, mais trop outranciers pour que j’y adhère pleinement.
J’ai donc refermé le dernier tome, selon moi en deçà des précédents, avec des enthousiasmes et des frustrations. Il m’a de toute évidence manqué quelque chose pour être pleinement conquise ; pour autant, cette trilogie figurera incontestablement parmi mes lectures marquantes de 2021.

Merci topocl pour la découverte !

Voilà en tout cas une œuvre qui, pour être volumineuse à l'ère de twitter, amène des commentaires affutés... J'hésiterais presque !

Armor n'a pas apprécié le langage et les pensées des BB, personnellement j'ai trouvé que le caractère des enfants se révélait dès le plus jeune âge.

Ah, mais exactement! moi j'ai trouvé ça extrêmement intense, la vie quotidienne vue à travers l’œil d'un bébé! Le bébé est une personne qui a droit de s'exprimer autant que les adultes!
Décidément nos ressentis sont différents!
Par contre à mon sens aussi le premier tome est le meilleur, le plus original.

Et pour le moment, je réfléchis à quelle ânerie je pourrais dire pour achever de décider tristram.

Je reste dans l'attente d'arguments décisifs.

topocl a écrit:Ah, mais exactement! moi j'ai trouvé ça extrêmement intense, la vie quotidienne vue à travers l’œil d'un bébé! Le bébé est une personne qui a droit de s'exprimer autant que les adultes!

Ah mais au début l'idée m'a paru originale, et ça m'a bien plu. Je ne dénie pas aux bébés le droit de s'exprimer, hein. Mais par la suite j'ai trouvé que ça traînait en longueur, d'autant plus qu'il ne se passait pas grand-chose non plus du côté des parents. Le souci n'était pas tant "bébé Franck" que le rythme d'ensemble. (Quand j'ai parlé de la trilogie à ma libraire, j'ai appris qu'elle avait abandonné pour ces mêmes raisons.)

Tristram a écrit:Je reste dans l'attente d'arguments décisifs.

1 -

Tristram a écrit:OK, je le note pour une prochaine réincarnation, lorsque l'espérance de vie aura triplé.

Argument complètement fallacieux pour un type qui lit un livre par jour (car là, cela compte pour trois livres).

2- Si tu aimes, tu seras trop heureux de dire : topocl avait raison. Si tu n'aimes pas tu seras trop heureux de dire : comme toujours topocl dit n'importe quoi.

3- THE argument décisif : de toute façon, je m'en fous complètement, que tu le lises ou pas .

Je prends bonne note !

Tristram, tu y trouveras de quoi taquiner topocl, c'est un bon argument, non ?

Pas besoin de 1800 pages pour ça !

sur ! sur !

mais je pensais dans le cadre de la lecture là !