Georges Picard
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Georges Picard
Georges Picard
(Né à Paris en 1945)
(Né à Paris en 1945)
Fils d'ouvrier, il fut abandonné par sa mère et recueilli par l'organisation de secours aux enfants de déportés et orphelins juifs (OSE) qui s'occupe aussi des familles juives démunies. Il grandit chez son père, un ouvrier, qui lui donne le goût des classiques: Montaigne, Rousseau, Nerval, Balzac et Dostoïevski. Il suit des études de philosophie. Ayant adhéré aux Jeunesses communistes dans les années 1960, il rejoint les groupes maoïstes en mai 1968. Peu après, pour rejoindre le « peuple en lutte », il s'embauche dans une usine de sardines à Lorient, en Bretagne. Viennent alors plusieurs petits boulots dans le milieu de l’édition. Devenu « athée en politique », il entre comme journaliste au magazine 60 millions de consommateurs. Depuis la fin des années 80, Georges Picard est l'auteur d'une quinzaine de livres, romans et essais, sobrement écrits et remarqués par leur qualité de style. Décidant de sacrifier sa vie sociale pour s'engager en littérature, il est décrit par Paul-François Paoli dans le Figaro comme l'anachorète du XVe arrondissement.
Œuvre
• Brèves Nouvelles du monde, 1986.
• Variations sur le réel, 1988 (réédité par Corti en 2009).
• Histoire de l’illusion, 1993.
• De la connerie, 1994 (essai).
• Du malheur de trop penser à soi, 1995.
• Le Génie à l'usage de ceux qui n’en ont pas, 1996.
• Tout m'énerve, 1997.
• Pour les yeux de Julie, 1998.
• Petit Traité à l’usage de ceux qui veulent toujours avoir raison, 1999.
• Le Vagabond approximatif, 2001 (essai).
• Crème de crimes, 2002.
• Tous fous, 2003.
• Le Bar de l'insomnie, 2004 (roman).
• Du bon usage de l'ivresse, 2005.
• Tout le monde devrait écrire, 2006.
• Mais dans quel monde vivez-vous, 2007.
• Le Philosophe facétieux, 2008.
• Journal ironique d'une rivalité amoureuse, 2009.
• L'Humoriste, 2010.
• L'Hurluberlu ou la philosophie sur un toit, 2012.
• Penser comme on veut, 2014.
• Merci aux ambitieux de s'occuper du monde à ma place, 2015.
• Le sage des bois, 2016.
• Cher lecteur, 2017.
ArenSor- Messages : 3428
Date d'inscription : 02/12/2016
Localisation : Rue du Nadir-aux-Pommes
Re: Georges Picard
Petit traité à l'usage de ceux qui veulent toujours avoir raison
Un écrivain dont on parle peu et c’est dommage. La raison en est peut-être dans le choix d’un éditeur, José Corti, de grande qualité, mais qui reste tout de même assez confidentiel.
Georges Picard renoue avec brio et bonheur avec un genre qui a largement contribué à la gloire des Lettres françaises avant la Révolution, quelque peu oublié par la suite. Je parle bien sûr des moralistes qui se sont succédé de Montaigne à Rivarol. Georges Picard a hérité de ces écrivains la clarté d’un style précis et élégant, sans fioritures inutiles, mais faisant usage de toutes les subtilités de la langue. Comme il se doit, il s’agit de réflexions de quelques pages, faisant preuve d’une observation perspicace de l’attitude de nos contemporains dont il démasque dans ce cas précis, la mauvaise foi, la contradiction, la bêtise et autre travers. C’est plein d’humour, mais également d’humanité sous des dehors quelquefois « vachards ». Tout cela pourrait se résumer dans ce qu’il était convenu de qualifier « d’esprit français ». J’ai sélectionné un petit florilège qui peut-être vous donnera envie …
Et les dernières phrases :
Un écrivain dont on parle peu et c’est dommage. La raison en est peut-être dans le choix d’un éditeur, José Corti, de grande qualité, mais qui reste tout de même assez confidentiel.
Georges Picard renoue avec brio et bonheur avec un genre qui a largement contribué à la gloire des Lettres françaises avant la Révolution, quelque peu oublié par la suite. Je parle bien sûr des moralistes qui se sont succédé de Montaigne à Rivarol. Georges Picard a hérité de ces écrivains la clarté d’un style précis et élégant, sans fioritures inutiles, mais faisant usage de toutes les subtilités de la langue. Comme il se doit, il s’agit de réflexions de quelques pages, faisant preuve d’une observation perspicace de l’attitude de nos contemporains dont il démasque dans ce cas précis, la mauvaise foi, la contradiction, la bêtise et autre travers. C’est plein d’humour, mais également d’humanité sous des dehors quelquefois « vachards ». Tout cela pourrait se résumer dans ce qu’il était convenu de qualifier « d’esprit français ». J’ai sélectionné un petit florilège qui peut-être vous donnera envie …
« Seuls, les naïfs peuvent croire qu’une discussion vise à résoudre un problème ou à éclaircir une question difficile. En réalité, sa seule justification est d’éprouver la capacité des participants à désarçonner leur adversaire. L’enjeu n’est pas de vérité, mais d’amour-propre. Le beau parleur l’emporte sur le bafouilleur, le téméraire sur le timide, le fonceur sur le scrupuleux. Etre de bonne foi équivaut à additionner les handicaps, le scrupule s’ajoutant à la circonspection pour alourdir la langue. Qu'est-ce que la bonne foi ? Une conduite d’échec, un véritable suicide… »
« Les querelles de ménage évoluent dans la surenchère, du desserrement de frein initial, quand la bile commence à s’échauffer, jusqu’au dévalement fou, accélérateur bloqué au plancher, sang-froid et lucidité par-dessus-bord. Généralement, les premières répliques se chevauchent avec une vivacité de moins en moins contrôlée, sous-tendues par le désir ulcéré de part et d’autre d’avoir très vite le dernier mot. On notera que la qualité dialectique de ce type d’échanges est tout à fait marginale, les arguments ne pouvant se répondre puisque ceux qui les profèrent ne s’écoutent pas. »
« La dérision est tactiquement recommandable à ceux qui éprouvent de la difficulté à aligner logiquement plus de deux arguments. Elle n’est pas fatigante et elle fait rire. En outre, vous paraîtrez toujours plus profond avec un bon mot qu’avec un mauvais discours, voire qu’avec un discours excellent, qui a toutes les chances d’être, pour cela même, jugé prétentieux. Les orateurs barbants ont compris le truc : les plus malins concluent généralement sur un bon mot censé racheter le reste, prouvant ainsi que l’humour est aussi la politesse des gens ennuyeux. »
« Il y a deux façons de disqualifier quelqu’un : le traiter d’imbécile ou d’intellectuel….
Se faire traiter « d’intellectuel » est infamant dans certains milieux. Cela revient à prendre en pleine figure les accusations de coupeur de cheveux en quatre et de masturbateur frénétique, les deux activités ne semblant pas incompatibles à ceux qui ne s’y sont pas essayé. Au jeu des définitions, l’intellectuel pourrait se voir synthétiquement désigné comme « masturbateur de cheveux en quatre », soit une sorte de jongleur compliqué ou d’éleveur de puces savantes se livrant à une activité improbable à des fins égoïstes. Telle est la moindre des imputations, la pire flirtant dangereusement avec des sous-entendus de parachutiste, assimilant les fonctions cérébrales à une espèce de sodomie mollassonne. Quiconque traite autrui « d’intellectuel » est mûr pour le traiter un jour de « pédé » ou de « gouine mal baisée ». Il est bon de le savoir, afin d’obliger les accusateurs à assumer leurs pulsions fascistes »
« Les foules n’aiment pas les perdants : ce n’est pas qu’elles soient cruelles, mais la défaite les démoralise. Elles ne s’animent que par la colère, la peur ou l’enthousiasme. »
« J’ai connu des personnes habiles à impressionner les publics naïfs auxquelles elles servaient des citations d’auteurs et des titres d’ouvrages rares comme autant de canapés de caviar et de foie gras. »
« Quelle candeur de croire que l’intelligence est la capacité de découvrir des vérités ! Si c’était le cas, la plupart des philosophes seraient des sots ! Un esprit vif et complexe s’intéresse moins aux résultats de ses cogitations qu’à leur intensité et à leur beauté intrinsèque. Jugés sur leurs conclusions, Platon ne serait qu’une sorte de poète et Hegel un mauvais scrutateur de l’universel. Malebranche ne vaudrait pas un clou. Freud ou Heidegger feraient rire ! Ont-ils raison, ont-ils tort, ces génies de la réflexion en eau profonde ? On sent bien que la question ainsi posée ne mérite pas une réponse plus définitive que celle de Diderot se demandant à propos de l’homme : est-il bon ? est-il méchant ? »
« L’esprit philosophique, je le rappelle à ceux qui l’auraient oublié ou ne l’auraient jamais su, opère toujours en gants blancs avec un masque immaculé sur le visage pour éviter la contamination d’idées trop particulières. Aussi, sa déontologie lui fait-elle un devoir de rester neutre, en évitant de choisir entre deux champions, chacun défendant sa thèse avec la certitude d’avoir raison. Arbitre objectif qui n’arbitre rien, la Philosophie n’a pas d’autre choix que d’entériner la parfaite égalité de droits des deux revendications contradictoires. En Philosophie, il n’y a pas de perdant, tout le monde a raison. »
« Lorsqu’une discussion ne tourne pas à notre avantage, il reste, en dernier ressort, à placer une statistique. Les médecins de Molière avaient le grec et le latin ; nous avons les statistiques et les sondages. Jadis, la pédanterie était éloquente, désormais elle est sèche et scientifique. Une courbe montant ou descendant dans le sens de notre opinion fait plus pour notre cause que trois heures de bavardage. »
« La plupart des contemporains, abrutis d’informations, ont l’oreille dure et l’intelligence lourde. Il est devenu difficile de se faire entendre sans porte-voix. Il est à peu près impossible d’être remarqué sans faire les pieds au mur. Les arguments trop finement calibrés n’ont aucune chance de porter : ce sont des pépins de raisin en lieu et place de boulets de canon…
Pour être dans l’esprit du temps, qu’il soit clair qu’il faut écrire et parler simple, rapide, direct et gros. »
Et les dernières phrases :
« Dans le conflit qui nous intéresse, il ne peut y avoir qu’un vainqueur. Sous prétexte que le l’abstention lui donne des droits, le lecteur a toujours le dernier mot contre l’auteur aspirant à ses suffrages. C’est équitable. La vanité qui pousse à publier se voit rabrouer par la vanité critique qui pousse à juger ce qui a été lu, et à juger afin de se donner l’illusion de la supériorité sur un individu assez présomptueux pour prétendre nous occuper deux ou trois heures durant. »
ArenSor- Messages : 3428
Date d'inscription : 02/12/2016
Localisation : Rue du Nadir-aux-Pommes
Re: Georges Picard
Merci ArenSor pour ces nombreux extraits. Je note cet auteur. Les titres de sa bibliographie sont très attractifs : Tout m'énerve me parle tout particulièrement, Merci aux ambitieux de s'occuper du monde à ma place m'amuse beaucoup et mon esprit s'emballe déjà avec L'hurluberlu ou la philosophie sur un toit.
Louvaluna- Messages : 1682
Date d'inscription : 19/03/2017
Re: Georges Picard
merci Arensor, je trouve la bio de cet auteur intéressante et les extraits bien parlant.
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“Lire et aimer le roman d'un salaud n'est pas lui donner une quelconque absolution, partager ses convictions ou devenir son complice, c'est reconnaître son talent, pas sa moralité ou son idéal.”
― Le club des incorrigibles optimistes de Jean-Michel Guenassia
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"Il n'y a pas de mauvais livres. Ce qui est mauvais c'est de les craindre." L'homme de Kiev Malamud
Bédoulène- Messages : 21642
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 79
Localisation : En Provence
Re: Georges Picard
Damned je suis démasqué.« J’ai connu des personnes habiles à impressionner les publics naïfs auxquelles elles servaient des citations d’auteurs et des titres d’ouvrages rares comme autant de canapés de caviar et de foie gras. »
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« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
Tristram- Messages : 15927
Date d'inscription : 09/12/2016
Age : 68
Localisation : Guyane
Re: Georges Picard
Ceux qui veulent toujours avoir raison? Mais c'est à offrir quasi au monde entier...!
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Etre dans le vent, c'est l'histoire d'une feuille morte.
Flore Vasseur
topocl- Messages : 8546
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 64
Localisation : Roanne
Re: Georges Picard
C'est vrai que j'aimerais avoir raison (au moins une fois, rien qu'une...)
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« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
Tristram- Messages : 15927
Date d'inscription : 09/12/2016
Age : 68
Localisation : Guyane
Re: Georges Picard
Merci à toi, Arensor, d'avoir ouvert ce fil.
Je suis en train de lire Le sage des bois, de cet auteur. Et le début est plutôt prometteur. De l'humour avec un personnage plein d'autodérision, qui se fait disciple de Thoreau sans trop réellement y croire ?
Dans son milieu estudiantin parisien, il saoule ses comparses avec des citations du maître, et veut les convaincre de son futur mode de vie d'ermite, et essaie en même temps de se convaincre lui-même.
Je suis en train de lire Le sage des bois, de cet auteur. Et le début est plutôt prometteur. De l'humour avec un personnage plein d'autodérision, qui se fait disciple de Thoreau sans trop réellement y croire ?
Dans son milieu estudiantin parisien, il saoule ses comparses avec des citations du maître, et veut les convaincre de son futur mode de vie d'ermite, et essaie en même temps de se convaincre lui-même.
Invité- Invité
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