François Guerrette
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François Guerrette
François Guerrette
Né en 1986
Tout d'abord, je vous donne à lire un extrait de texte d'un libraire publié en 2012 :«La poésie de Guerrette pourrait être décrite comme un mélange inédit de Gérald Godin et de Gilbert Langevin pour son engagement, sa bienveillance et sa tendresse; de Denis Vanier, pour la violence, le choc de certaines images; et de Paul Chamberland, pour son ton souvent prophétique. Paru il y a quelques semaines à peine, Pleurer ne sauvera pas les étoiles s’avère à ce jour le meilleur livre de François Guerrette, son plus maîtrisé, et celui dont je vous recommande le plus chaleureusement la lecture pour aborder son œuvre. Il figure même parmi mes recueils de l’année! Bref, il faut lire, relire et suivre François Guerrette. Parmi les jeunes poètes prometteurs, il fait à mon avis partie de ceux dont nous parlerons encore dans vingt ans.»
Source : https://revue.leslibraires.ca/articles/poesie-et-theatre/francois-guerrette-dans-la-lumiere-du-poete-oracle
À la lumière des cinq recueils que François Guerrette a publiés jusqu'à ce jour, il a été finaliste deux fois du prix Émile-Nelligan et l'a obtenu à sa troisième tentative en 2018 pour Constellation des grands brûlés. Il évolue au niveau doctoral à l'université de Montréal et fait une étude sur Denis Vanier. Il est très engagé en poésie et impliqué dans le milieu (textes et dossiers publiés dans des revues de poésie, groupe affinitaire de poésie, etc.). Il figure parmi une confrérie de poètes que je qualifierais de très sélecte, si nous parlons des hommes qui évoluent en poésie québécoise (à l'instar de David Goudreault, Olyvier Leroux-Picard, Jonathan Lamy, Philippe More et plusieurs autres).
Oeuvres publiées
- Les oiseaux parlent au passé (2009)
- Panique chez les parlants (2010)
- Pleurer ne sauvera pas les étoiles (2012)
- Mes ancêtres reviendront de la guerre (2014)
- Constellation des grands brûlés (2017)
Dernière édition par Armor le Jeu 14 Fév - 11:15, édité 2 fois (Raison : taille de l'image ôté l'italique)
Jack-Hubert Bukowski- Messages : 2490
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Age : 43
Localisation : Montréal
Re: François Guerrette
François Guerrette est l'un des poètes vers qui je reviens. Je le qualifierais même de poète initiatique, au même titre que Geneviève Desrosiers, Daniel Leblanc-Poirier, Shawn Cotton et Maxime Catellier pour les poètes québécois de ma génération. Dans ce premier recueil, nous voyons déjà les promesses qui l'annoncent comme poète accompli.
Dans Les oiseaux parlent au passé, on sent ce souffle prophétique. Je dirais que je l'ai plus senti dans ses premiers recueils (Panique chez les parlants me vient en tête) avant que François Guerrette se révèle dans le recueil de maturité que constitue Pleurer ne sauvera pas les étoiles. La langue poétique québécoise est touffue surtout si on la trouve chez les Poètes de brousse. On dirait même que la maison d'édition et François Guerrette se sont trouvés...
Il y a des extraits saillants dans ce recueil que j'ai retenus pour les fins de l'exercice en gardant à l'esprit que la poésie de François Guerrette est particulièrement combative (je dirais même une déclaration de guerre, pour paraphraser un de ses recueils subséquents).
fièvres sacrées l'orage torride
le repos quantique s'il cache
à travers les décharges électriques et les oiseaux
je reste muet l'émeute aux lèvres
la tête ouverte mémoire à l'air
je pourrais porter des pyramides sur mon dos
(p. 21)
Je sens un fond de contre-culture :
je connais des dieux rouges de bouillir
à force de colère acouphène
le vide est buvard et l'usure
maquillée par la nuit mascara
la tache sur les murs l'aurore
un rien me laverait de vivre
(p. 31)
Très québécois par la manière de concevoir la thématique poétique :
à la craie le sang le ciel au plomb
sous l'angle kaléidoscope
le temps s'effiloche lente chemise
mal tricotée mon ombre cousue
sur la peau des murs j'ai l'air
d'une blessure ouverte sur l'avenir
(p. 46)
En vous parlant de ce souffle prophétique :
ouvrir les yeux c'est ouvrir le feu
un duel dans le crâne l'abeille
irrespirable parmi les cellules
un visage de moteur qui fume ma langue
et la voix de mourir
ne finit jamais de muer
(p. 63)
Encore une fois, je vous invite à lire François Guerrette. Son oeuvre survivra encore quelques générations. Je vous ai parlé sur l'autre forum de la qualité de son travail de poète, du fait qu'il était un tâcheron. On peut déjà le sentir dans ce premier recueil. Il est quand même porté par quelque chose de comment dire, grand, magique? Non, ce ne serait pas approprié de le dire comme critique de poésie, mais il y a quelque chose qui nous amène à nous dépasser dans la langue poétique qu'il emploie.
mots-clés : #poésie
Dernière édition par Bédoulène le Jeu 14 Fév - 10:14, édité 1 fois (Raison : ajout de la miniature #)
Jack-Hubert Bukowski- Messages : 2490
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Age : 43
Localisation : Montréal
Re: François Guerrette
merci Jack pour ce commentaire, ton ressenti argumenté !
les titres des livres attirent
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Bédoulène- Messages : 21639
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Re: François Guerrette
Panique chez les parlants (2010) :
J'ai lu ce recueil de François Guerrette à une époque où j'étais boulimique de poésie. J'ai pris le temps de relire le recueil et d'analyser ses propositions. Il parle aux Sourds de par la manière qu'il aborde ces vers :
Il fait sans doute référence à l'autobiographie Le cri de la mouette rédigée par l'actrice française sourde Emmanuelle Laborit. D'autre part, nous pouvons lire plus loin dans le recueil :
François Guerrette donne sa pleine mesure comme poète dans ce recueil :
Le recueil est subdivisé en 4 suites poétiques. «Panique chez les parlants» est le sous-titre d'une de ces suites. Cette suite se conclut par ces vers :
Dans «Carnet Molotov», nous pouvons sentir le fond d'une critique sociale :
Je vous laisse sur le poème qui me semble le plus signalétique de la trame de ce recueil :
J'ai récupéré une partie des citations que j'avais faite dans mon analyse antérieure du recueil sur Parfum.
J'ai lu ce recueil de François Guerrette à une époque où j'étais boulimique de poésie. J'ai pris le temps de relire le recueil et d'analyser ses propositions. Il parle aux Sourds de par la manière qu'il aborde ces vers :
une mouette obèse au fond de la voix
tes cris sont les matériaux de l'orage
sur des corps appris par coeur l'odeur nerveuse
des copinages entre proies éblouies
pendant l'espace et le sang des autres
la chute des goélands tatoués sur ta langue
il fait nuit de peaux-rouges à la chasse
raconte-moi les chacals sans parler
Extrait, p. 27
Il fait sans doute référence à l'autobiographie Le cri de la mouette rédigée par l'actrice française sourde Emmanuelle Laborit. D'autre part, nous pouvons lire plus loin dans le recueil :
je parle épave et sauvetage à la fenêtre
debout sur une jambe un serpent de profil
un blasphème à l'oreille nuageuse des sourds
je demande pardon sur le bout des os
une peau pour les peuples cherchant l'abattoir
au galop sur de longs tambours sismographes
les prières de mantes religieuses en extase
je veux boire l'horizon filigrane l'avaler
communion mortelle au sommet je veux jouir
et périr éolien de flagrantes rechutes
p. 67
François Guerrette donne sa pleine mesure comme poète dans ce recueil :
notre héritage la peur ma langue
je proviens d'oiseaux dans les déchets
les corbeaux de ma race ont soif de s'échouer
sur l'écorce lépreuse des corps les tam-tam
ondoyant dans la pure terreur combien d'esclaves
où s'achèvent le troupeau les promesses
les prières des peuples sans écriture
je raconte des éclairs aux poignets nos portraits
dans la cage à nerfs une image insoluble
p. 42
Le recueil est subdivisé en 4 suites poétiques. «Panique chez les parlants» est le sous-titre d'une de ces suites. Cette suite se conclut par ces vers :
dans l'encre macère le sang perdu
sur nos épaules un cadeau le malheur
les tournesols infertiles pour des siècles
et des siècles je dis la nuit récidive
le viol intraveineux des mots le passage
des verbes en cage dans la vie primordiale
je sais notre chance semble belle de loin
mais l'amour demeure un cancer en voyage
ne tirez pas je viens en ami
p. 53.
Dans «Carnet Molotov», nous pouvons sentir le fond d'une critique sociale :
comment jouir emmuré le rêve ailleurs
mon reflet comme un faux alibi au milieu
des familles propageant le néant matériel
je vois le maniement des âmes voutées
les faux prophètes enseignant aux écoliers dopés
à mourir en beauté le torse élastique et attendre
la douleur idéale avant de penser
je cherche le ton qu'il faut pour renier
l'expansion sacrée des libres cobayes
mon espèce à la recherche de ses miettes
p. 62
Je vous laisse sur le poème qui me semble le plus signalétique de la trame de ce recueil :
les routes manquent pour insulter le paysage
des bergers endormis au volant des siècles
je crache une eau noire à la prose des vitrines
une couronne en plastique sur les âmes je veux
nos alphabets comme les bibelots à genoux
en attendant les grands attentats mammifères
mes sourires sont des billots mouillés
je laisse les photos survivre à ma place
me révéler hara-kiri de l'intérieur je veux
mourir tendrement d'usines à la tête
p. 48
J'ai récupéré une partie des citations que j'avais faite dans mon analyse antérieure du recueil sur Parfum.
Jack-Hubert Bukowski- Messages : 2490
Date d'inscription : 04/12/2016
Age : 43
Localisation : Montréal
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