Archéologie

Oui, ça s'est perdu en Iran... Pour l'Inde, je préférerais y aller vivant... Ici, il y a bien les urubus... Ah ! si on pouvait prévoir ! J'aime bien l'idée de me recomposer anonymement parmi les arbres, mais comment m'organiser (pas trop en avance) ?

Le site de Ribemont-sur-Ancre était connu jusqu’au début des années 80 comme un important ensemble monumental s’étendant sur plus de 800 m de long et comprenant un temple, un théâtre, des thermes, des habitats :



Sous cet ensemble fut trouvé le sanctuaire gaulois avec ce qui fut à l’époque appelé le charnier.


Le site gaulois s’étend sur 3 ha. Il y fut trouvé des dizaine de milliers d’ossements humais et des milliers d’armes en fer  

Le plan comprend un enclos quadrangulaire auquel est accolé un enclos trapézoïdal à l’intérieur duquel se trouve une enceinte ovale.


L’enclos quadrangulaire : interprété comme un « trophée » destiné à accueillir les dépouilles des guerriers vaincus.  
Il s’agit d’un espace de presque 50 m de côté, délimité par un large fossé. De part et d’autre de celui-ci ont été construits d’étranges structures en hauteur dans lesquelles étaient placées les dépouilles des guerriers vaincus avec leur habillement et leurs armes ainsi que leurs chevaux. Préalablement les têtes avaient été prélevées par les vainqueurs.


Les restes vont alors subir d’autres manipulations. Des sortes d’autels quadrangulaires creux sont construits avec des membres repliés et alignés par lits superposés.


Situés aux angles de l’enclos, les autels en os surmontent des fosses  cylindriques profondes d’environ 1m. Leur fond est composé d’ossements concassés et brûlés. L’interprétation est celle d’offrande aux divinités chtoniennes alimentées par des restes « fluidifiés ». On estime que la fosse d’un des autels a été comblée avec 200 litres de restes humains !    Le centre de l’enclos semble être occupé par un bois sacré.

Les quelques  150 individus suspendus dans les « pourrissoirs » qui ont échappé au traitement de « fluidification »  se sont finalement décomposés,  membres et armes sont tombés sur le sol où ils furent retrouvés plus de 2000 ans plus tard, les os encore en partie en connexion, les armes ayant gardé leur relation fonctionnelle (épée dans le fourreau encore fixé à sa chaîne de suspension).

Après les cérémonies, l’activité humaine semble disparaître autour de l’enclos sacré qui est enfoui à l’époque d’Auguste.

L’enclos trapézoïdal : interprété comme un hérôon à la gloire des vainqueurs morts. Il couvre une surface d’environ 1 ha. Il abrite en son centre un espace grossièrement cyirculaire délimité par un fossé dont une antenne se dirige vers le Trophée. Cet espace était entouré de palissades hautes d’environ 5m dont les parois en torchis étaient peintes de différentes couleurs et sur lesquelles étaient accrochés des boucliers. Malheureusement, le sols n’ont pas été conservés : ossements et armes ont été retrouvés dans le comblement du fossé.

Les fouilleurs interprètent ce lieu comme une sorte de « garde-manger » solennel. Les guerriers déposés nus sur le sol avec leurs armes étaient dévorés par les oiseaux. Ainsi, les âmes gagnaient un séjour céleste éternel. Seul aménagement notable, une grande fosse constitue probablement une sorte d’autel creux destiné à des offrandes animales ; à côté, un foyer montre que les viandes ont été cuites et probablement consommées en partie. De même, la présence de nombreux tessons de vases de forme haute atteste la pratique de libations.
 
Une cinquantaine de stèles en grès pesant chacune environ 1 t. ont été apportées sur le site et disposées en cercle. Elles étaient destinées probablement à conserver le souvenir des morts et initier un culte de nature héroïque.


L’interprétation générale du site : son caractère militaire ne fait aucun doute. Il s’agit exclusivement d’hommes âgés entre 15 et 40 ans et plutôt de grande taille (env. 1,75 m). Des ossements montrent des traces de blessures par armes, comme ci-dessous, cette colonne vertébrale tranchée par un coup d'épée


D’après le nombre de restes, on peut envisager un affrontement d’environ 5000 hommes. C’est donc une bataille assez gigantesque qui s’est déroulée à Ribemont ou aux environs.

Ce qui est intéressant est de constater que les objets trouvés dans le trophée et dans le hérôon, essentiellement des armes, mais également des fibules,  sont contemporains, mais relèvent de technologies différentes. C’est-à-dire que les armes trouvées dans le trophée sont plus sophistiquées que celles du herôon, celles-ci sont plus archaïques dans leur typologie.

La datation est assez bien établie : l’affrontement a eu lieu vers – 260.

En revanche il est plus délicat d’identifier les guerriers : des pièces en or retrouvés dans le trophée ont été attribués à un peuple péri-armoricain, les Aulerques, dont le centre de gravité est du côté du Mans. Nous savons par ailleurs que le nord de la Gaule est agité au IIIe siècle par l’installation des peuples belges qui viennent s’y établir en plusieurs vagues successives.
L’hypothèse du fouilleur Jean-Louis Bruneaux est donc d’envisager une bataille entre des Armoricains souhaitant conserver le contrôle de l’arrière-pays de la façade maritime et des Belges qui cherchent à s’établir sur le secteur. Les statères Aulerques ayant été trouvé dans le trophée des vaincus, il est logique d’en déduire que la bataille s’est conclue sur leur défaite et la victoire des Belges.

Il faut signaler toutefois que ces interprétations ne satisfont pas tous les archéologues. Les critiques portent sur :
- le fait que les découvertes sont interprétées par des modèles méditerranéens connus surtout par les textes (trophée, herôon, bois sacré etc…)
- l’attribution des monnaies aux Aulerques est controversée. Par ailleurs, certains spécialistes placent l’émission de ces pièces à une époque plus récente (milieu Ier siècle av. J-C.).
En résumé, il se pourrait que l’affrontement ait concerné des populations Belges venues du nord et des populations autochtones installées sur place depuis longtemps.
La suite des études nous fournira peut-être d’autres informations…

Sources : Patrice Arcelin, jean-Louis Bruneaux dans « Cultes en sanctuaires en France à l’Age du fer » Gallia, 60, 2003. Le fouilleur du site de Ribemont, Jean-Louis Bruneaux, est l’auteur de la plupart des photos postées ici
Tahar ben Redjeb « Carte archéologique de la Gaule, Somme »

Que d'os ! et les têtes pourquoi supprimées ?

quelle mise en scène !

un titre sympa mais je ne sais ce que pensera Armor de "la pâtée"

merci Arensor

ArenSor a écrit:

Ce qui est intéressant est de constater que les objets trouvés dans le trophée et dans le hérôon, essentiellement des armes, mais également des fibules,  sont contemporains, mais relèvent de technologies identiques. C’est-à-dire que les armes trouvées dans le trophée sont plus sophistiquées que celles du herôon, celles-ci plus archaïques dans leur typologie.

Est-ce moi qui n'ai pas tout compris, ou bien ne manque- t'il pas une petite négation quelque part ?

Sinon merci, c'est comme toujours passionnant.

Bédoulène a écrit:
un titre sympa mais je ne sais ce que pensera Armor de "la pâtée"

J'en pense que je plains sincèrement ceux qui faisaient des libations à côté de ce drôle d'endroit.
Outre la peine, il devait en falloir, des litres d'alcool, pour supporter les effluves pestilentielles !

Armor a écrit:

ArenSor a écrit:

Ce qui est intéressant est de constater que les objets trouvés dans le trophée et dans le hérôon, essentiellement des armes, mais également des fibules,  sont contemporains, mais relèvent de technologies identiques différentes. C’est-à-dire que les armes trouvées dans le trophée sont plus sophistiquées que celles du herôon, celles-ci sont plus archaïques dans leur typologie.

Est-ce moi qui n'ai pas tout compris, ou bien ne manque- t'il pas une petite négation quelque part ?

Sinon merci, c'est comme toujours passionnant.

Oups ! Heureusement que certains lisent attentivement Merci Armor, je corrige !

oui Armor est très attentive ; ma tête n'était pas bien en place................................comme celles supprimées

J'ai aussi du mal à comprendre : ce sont les vaincus, et/ou envahisseurs, qui avaient la meilleure technologie ?

Tristram a écrit:J'ai aussi du mal à comprendre : ce sont les vaincus, et/ou envahisseurs, qui avaient la meilleure technologie ?

Les vainqueurs : heroon = armes archaïques
Les vaincus : trophée = armes sophistiquées.
@ Bédoulène : il y a un culte des têtes chez les Celtes (exemple plus près de toi: Entremont ou Roquepertuse). Maintenant, il est difficile d'en connaitre la (ou les) significations exactes

C'est ce qu'l me semblait : les vaincus avec l'armement le plus sophistiqué (bizarre) ; c'était les envahisseurs/ attaquants ?

merci pour l'explication Arensor je vais regarder ces lieux !

donc on peut en conclure que les vainqueurs avaient une meilleure stratégie !

Je viens de regarder une emission, en replay aussi, sur Arte, elle concerne Petra, c'etait passionnant.

là

Nadine a écrit:Je viens de regarder une emission, en replay aussi, sur Arte, elle concerne Petra,  c'etait passionnant.

là

Je regarde aussi.
C' est stupéfiant comme la plupart des monuments anciens, déjà sur le plan de la réalisation.
Mais, comme tu as du le remarquer, la main d'oeuvre était surexploitée et constamment en danger de mort.
ça a beaucoup changé depuis ?

Tu as vu le système hydraulique, un truç de ouf tout de même... Oui la main d'oeuvre , ça devait ençhainer au delà des individus....

https://www.scienceshumaines.com/art-parietal-nouvelles-hypotheses_fr_39889.html
Où l'on apprend que, le comparatisme ethnographique étant proscrit, le totémisme revient cependant comme hypothèse d'explication...

Pompéi : on nous a trompés !

Il est convenu que l'éruption du Vésuve s'est produite le 24 août 79. En faisait foi une lettre de Pline le Jeune à l'empereur Trajan :"9e jour avant les calendes de septembre".
Or, les fouilles, qui ont été reprises à Pompéi, ont permis la découverte d'un graffiti, probablement écrit par un ouvrier. Je vous épargne la transcription en latin, mais on peut traduire par "Il s'est bâfré" Ben oui, on est très terre à terre et pas très éloigné des graffiti de chiottes. . L'intéressant est que l'individu en question a daté son bon repas : 17 octobre.



Il faut dire qu'on avait déjà pas mal de doutes avant cette découverte. On a trouvé notamment à Pompéi des fruits d'automne calcinés, on s'est rendu compte également que les vendanges étaient terminées lors de la catastrophe et que le chanvre avait été récolté. De plus, la trouvaille d'une monnaie mentionnant une salutation à l'empereur Titus était forcément postérieure au mois d'août 79.
Alors qu'en est-il ? L'hypothèse la plus probable est qu'un moine copiste du Moyen-Age, fatigué, ou s'en fichant complètement, a confondu les calendes de septembre et de novembre...
Alors, vous me direz, qu'est-ce-que cela change ? Pas grand chose à vrai dire, c'est comme-ci, à l'avenir on parlait de l'attentat du 11 juillet contre les Twin towers !
N'empêche, je ne peux m'empêcher de penser à cet individu qui s'en est fichu plein la panse en octobre 72. Etait-il encore à Pompéi une semaine plus tard ? probable...
C'est aussi cela l'Histoire : une empathie avec un illustre inconnu qui a vécu il y a pratiquement deux millénaires
(information provenant du site "sciences et avenir")

J'ai vu passer cette information ! Je suis contente que tu traduises, ça donne effectivement un regard tellement plus empathique.. cet homme avait une très belle graphie.

merci Arensor !

Et bienvenue aux cousins dont on ne savait rien !

Homo Luzonensis c'est joli comme petit nom, croyez-vous que quand on se connaîtra mieux on pourra l'appeler Lulu ?

merci pour l'info Aventin !

acheté aujourd'hui : "Sapiens, une brève histoire de l'humanité" de Yuval Noah Harari chez Albin Michel, un bouquin de près de 600 pages
4° de couverture :
"Il y a 100 000 ans, la Terre était habitée par au moins six espèces différentes d'hominidés. Une seule a survécu. Nous, les Homo Sapiens.

Comment notre espèce a-t-elle réussi à dominer la planète ? Pourquoi nos ancêtres ont-ils uni leurs forces pour créer villes et royaumes ? Comment en sommes-nous arrivés à créer les concepts de religion, de nation, de droits de l'homme ? À dépendre de l'argent, des livres et des lois ? À devenir esclaves de la bureaucratie, des horaires, de la consommation de masse ? Et à quoi ressemblera notre monde dans le millénaire à venir ?

Véritable phénomène d'édition, traduit dans une trentaine de langues, Sapiens est un livre audacieux, érudit et provocateur. Professeur d'Histoire à l'Université hébraïque de Jérusalem, Yuval Noah Harari mêle l'Histoire à la Science pour remettre en cause tout ce que nous pensions savoir sur l'humanité : nos pensées, nos actes, notre héritage... et notre futur."