Richard Flanagan
Des Choses à lire :: Lectures par auteurs :: Écrivains d'Océanie (Australie, Nouvelle-Zélande, Polynésie)
Richard Flanagan
Richard Flanagan, né en 1961 à Longford en Tasmanie, est un écrivain australien.
Descendant de condamnés irlandais (« "convicts" ») déportés en Tasmanie au XIXe siècle, Richard Flanagan naît dans une famille modeste dans la ville minière de Rosebery et quitte l'école à seize ans pour travailler dans le bush. Il entre finalement à l'université de Tasmanie dont il est diplômé en 1982 puis obtient une bourse pour l'université d'Oxford en tant que boursier Rhodes.
Revenu dans son pays et passionné par le monde sauvage, il participe en canoë à des expéditions sur les rivières de Tasmanie. Très vite il se consacre à l'écriture et les paysages de son île natale inspireront d'ailleurs fortement ses romans, qu'il s'agisse de la côte ouest de la Tasmanie et Macquarie Harbour Penal Station (Gould's Book of Fish), de la Franklin River (Death of a River Guide) ou des Central Highlands (The Sound of One Hand Clapping).
Après des publications documentaires comme A terrible beauty : history of the Gordon River country (1985), The Rest of the World is Watching: Tasmania and the Greens ( 1990) ou Codename Iago: The Story of John Friedrich (1991) et des travaux de journaliste, il se lance dans l'écriture romanesque.
En 1994, son premier roman Death of a River Guide (A contre-courant, France, Flammarion 2000) le fait connaître, et en 1997, son second roman The Sound of One Hand Clapping (Dispersés par le vent, France - Flammarion 2002) ,récompensé par l'"Australian Booksellers Book of the Year Award" et le "Vance Palmer Prize for Fiction", est un succès avec plus de 150 000 exemplaires exemplaires vendus en Australie.
Richard Flanagan vit avec sa famille dans son pays natal et continue à écrire également des articles sur la Tasmanie dans la presse australienne, non sans susciter des controverses.
Œuvres en français
À contre-courant, 2000 (Death of a River Guide, 1994)
Dispersés par le vent, 2002 (The Sound of One Hand Clapping, 1997)
Le Livre de Gould, 2005 (Gould's Book of Fish, 2001)
La Fureur et l’Ennui, 2008 (The Unknown Terrorist, 2007)
Désirer, 2010 (Wanting, 2008)
La Route étroite vers le Nord lointain, 2016 ( The Narrow Road to the Deep North, 2013)
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Etre dans le vent, c'est l'histoire d'une feuille morte.
Flore Vasseur
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Re: Richard Flanagan
On peut voir là un magistral roman de guerre, une guerre qu'on ne connait pas , en plus, entre Australiens et Japonais et qui finit dans un camp de l'horreur, les Australiens prisonniers au service du culte de l'Empereur, lequel consiste à construire une voix ferrée impossible dans la jungle, la fameuse "Route étroite vers le Nord lointain". Le point de vue des Japonais alterne avec celui des Australiens, confrontant deux mondes imperméables mêlés par la force des choses.
On peut y voir l'histoire d'un homme qui se sent imposteur, respecté comme soldat , comme chef, comme mari, et comme amant alors qu'il n'est qu'une façade devant un gouffre béant.
On peut y voir une histoire d'amour pleine de lumière et de jeunesse, réjouissant envol égoïste de deux êtres, et que la vie, le temps et le hasard cassent impitoyablement.
Flanagan mêle ombre et lumière, force et boue, amour et amertume. Ses personnages sont d'une complexité déroutante, ils en sont d'une proximité extrême, pétris dans leurs contradictions, changés par les épreuves et le temps qui, tout à la fois, estompe, et ravive tout.
Flanagan n' a pas froid aux yeux, dense, sans détour, intense tant dans la description de la haine que de l'amour, de l'avilissement que de l'amitié, de la violence que de la tendresse.
Flanagan sait que les hommes sont malheureux, et vivent dans un monde inhospitalier où ils cherchent à survivre, chacun à sa façon. Ils savent en saisir la sensualité par tous leurs sens, lumières, odeurs, brises. Ils se raccrochent à quelques valeurs-phares qui ne les empêchent pas de souffrir, ni de mourir. Mais quelques moments à sauver, grâce auxquels ils essaient de sauver les meubles, et cela les rend profondément aimables.
Flanagan a une capacité extraordinaire, à côté de moments et gestes d'intimité subtile, à décrire des scènes d'anthologie, des moments d'exception , des mouvements de groupe dans toute leur puissance
Il a aussi une écriture passionnée, brûlante, alternativement légère ou sombre, troublante.
La Route étroite vers le Nord lointain est un livre puissant , multiple, sans concessions.
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Flore Vasseur
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Re: Richard Flanagan
La route étroite vers le Nord lointain
Les éléments de la recette "grand livre anglophone du moment" sont trop apparents, c'est un fait. L'alternance des personnages, les histoires de c... ouple plus quelques scènes choc ça plonge en terrain connu et implique aussi certaines répétitions dans la première partie du livre.
A côté de ça la recette éprouvée contribue théoriquement à la lisibilité, que dis-je à la tourne-page-ibilité de l'ouvrage, et ça marche dans l'ensemble.
Heureusement tout de même, il n'y a pas que la recette, il y a le dosage qui est certes un poil forcé sur le sinistre mais difficile de faire autrement compte tenu du sujet. Les camps de prisonniers japonais dans lesquels les captifs étaient aux travaux forcés dans des conditions effrayantes ça ne faisait pas rêver dans Le pont de la rivière Kwaï ou dans Furyo et ça ne fait toujours pas rêver ! Historiquement on apprendra ou pas des petites choses (moi c'est l'engagement hors d'Asie qui m'a surpris !) en plus du romanesque de base ça ne décrirait pas encore tout à fait le bouquin.
Portons donc notre attention sur la tonalité mélancolique amère avec un soupçon d'espérance qui caractérise beaucoup des personnages. Des personnages qui aussi établis qu'ils en aient l'air sont généralement au-dedans d'eux-mêmes beaucoup moins assurés et se laissent entraîner par le monde qui les entourent vers des ratages et perdre un temps au moins, ou plus, l'amour qui leur serait nécessaire. C'est cliché dit comme ça mais à force de retours et avec le renfort d'un jeu du temps ça vaut plus !
Et puis les retours et le jeu du temps on le retrouve avec la disparition de certains motifs qu'il s'agisse de la culture littéraire ou de certains personnages secondaires. Plusieurs fossés se creusent autour de la guerre, l'avant et l'après et entre les personnages qui se perdent plus loin dans ce moment perdu pendant lequel ils auraient pu ou du ramer dans l'autre sens, vers leurs semblables... L'autre point positif c'est de plonger dans cette problématique quelques représentants de l'autre camp : des officiers japonais qui se refont une vie et une identité morale, un coréen qui ne trouvera jamais sa place et surtout l'écriture de l'histoire, mensongère ou pratique qui ne peut convenir à ceux qui ont vécu des événements impartageables qui disparaissent à toute vitesse.
Sur ces sujets là aussi il accroche bien sans trop donner l'impression de surcharger la barque.
Ce n'est pas la lecture du millénaire mais une bonne surprise moi qui avait des doutes sur la forme obligée de l'exercice et suite aux avis tièdes qui allaient dans ce sens. Efficace (au moins avec mon rythme de lecture modéré sur la première partie), plus ambitieux et intéressant qu'attendu et laissant quelques réflexions pas mal tournées qui sonnent raisonnable ou juste.
Plutôt bonne pioche donc en ce qui me concerne.
(message téléporté).
mots-clés : #campsconcentration #deuxiemeguerre #social
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Re: Richard Flanagan
Maria Magdalena Svevo s'agenouilla et, de ses mains grossières de femme de peine, avec une serpillière, elle se mit en devoir de récurer le sang et les eaux de la naissance qui n'avait pas encore pénétré dans le plancher et dont les marques, songea-t-elle, méditative, figuraient comme les archives d'une vie humaine, un registre maculé de taches décolorées, sang, vin, sperme, urine et matières fécales, autant de traces de la marche de la vie, depuis la naissance jusqu'à la jeunesse, et de là vers l'amour, la maladie et la mort. Maria Magdalena Svevo frottait, et ma mère, elle, observait les va-et-vient de son dos rond et large, demi-lune argentée par la lumière de l'autre lune, pleine, qui baignait la chambre de ma naissance de sa lumière paisible.
Dans l'immédiat, j'occupe apparemment peu de place au sein des événements qui bouillonnent à l'intérieur de mon champ de vision, mais aussi peut-être les éléments les plus éloignées de notre pensée consciente sont-ils les plus essentiels à ce que nous sommes. En tout cas, j'en connais qui formuleraient ça comme ça. Harry, lui, aurait dit ceci : si vous voulez suivre un match de foot, ne regardez pas le gros de la mêlée, mais les joueurs échappés sur les bords du terrain
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Flore Vasseur
topocl- Messages : 8545
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Re: Richard Flanagan
Le thème central est assez classique, si ce n’est archi vu et rebattu : enceinte sans père pour son enfant, Sonja revient sur les lieux douloureux de son enfance, comprend l’énigme de la disparition de sa mère, se réconcilie avec son père, un homme jadis alcoolique et violent.
Les thèmes secondaires sont beaucoup plus originaux, mais malheureusement peu approfondis : les émigrés ayant fui les atrocités de l’Europe centrale pendant la guerre et leur impossible adaptation en Tasmanie, leur exploitation à la construction de gigantesques barrages hydroélectriques.
Un style assez ronflant, des leitmotivs, une certaine exaltation des émotions m’ont éloignée de cette histoire un peu longue et prévisible qui, pour moi, n’a pas su saisir l’extraordinaire pour épicer l’ordinaire.
Dernière édition par topocl le Lun 25 Mai - 11:30, édité 1 fois
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topocl- Messages : 8545
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Re: Richard Flanagan
Ça, c'est du pain bénit pour Tristramtopocl a écrit:à la constriction de gigantesques barrages hydroélectriques.
Quasimodo- Messages : 5461
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Re: Richard Flanagan
Bon, ceci dit je vais corriger.
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topocl- Messages : 8545
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Re: Richard Flanagan
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« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
Tristram- Messages : 15922
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Re: Richard Flanagan
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« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
Tristram- Messages : 15922
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Re: Richard Flanagan
Dans un déroulé qui sort du chronologique pour s’attacher au lien entre les événement,s Richard Flanagan évoque le sort de son père prisonnier de guerre pendant 4 terribles années au Japon (sujet de l’excellent La Route étroite vers le Nord lointain ), la bombe atomique : l’idée fictive qu’en a construite HG Wells (longuet), l’aspect historique et scientifique de son élaboration, le largage et les conséquences locales, morales et mondiales, et sa vie de jeune homme puis d’homme du Xxème-XXième siècle au sein d’une famille aimante, marquée par tous ces événements, par des faits devenus souvenirs plus ou moins fiables, et aussi par la noyade à laquelle il a échappé à l’âge de 21 ans.
Tout cela est une image personnelle de notre monde, où le disparate du texte cache une cohérence de vécu et de pensée.
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Flore Vasseur
topocl- Messages : 8545
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Re: Richard Flanagan
merci topocl (il est dans ma pal)
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“Lire et aimer le roman d'un salaud n'est pas lui donner une quelconque absolution, partager ses convictions ou devenir son complice, c'est reconnaître son talent, pas sa moralité ou son idéal.”
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Bédoulène- Messages : 21622
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