Jorge Luis Borges
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Re: Jorge Luis Borges
Le champ qu'embrasse son esprit est bien plus étendu que le mien. Les exaltations que créent la musique et la couleur, paradis interdits à ma nostalgie comme à ma curiosité, lui sont familières ; j'en dirai autant de la Nature : les fleurs, vagues noms intercalés dans les strophes du latin ou du persan, sont pour Silvina, des choses précises, précises et aimées. L'univers que j'habite est opaque parce que purement verbal ; dans le sien interviennent tous les sens et leur délicate diversité.
Livre de préfaces.
Celle dédiée à Silvana Ocampo pour Faits divers de la terre et du ciel.
Comment résister à une telle présentation ?

Invité- Invité
Re: Jorge Luis Borges
Il ajoute :
Beaucoup de belles choses chez Ocampo :[…] moi dont la manière de conter cherche à ne retenir que des éléments essentiels [… »
Jorge Luis Borges, préface à Silvina Ocampo, « Faits divers de la Terre et du Ciel »
« ‒ Les choses monotones sont les plus difficiles à connaître. Nous n’y prêtons pas assez attention parce que nous croyons qu’elles sont toujours pareilles. »
Silvina Ocampo, « L’imposteur », in « Faits divers de la Terre et du Ciel »
_________________
« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
Tristram- Messages : 14941
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Re: Jorge Luis Borges
Oui, et aussi :
Et si tu dis "beaucoup de belles choses chez Ocampo" Tristram, tu ajoutes à la tentation : merci !
Nos amours littéraires ne coïncident pas toujours ; je suis ému par ce qui est épique, Silvina par ce qui est lyrique et élégiaque ; (...) Elle aime aussi le roman d'analyse, genre dont mon indolence accepte mal la lenteur.
Et si tu dis "beaucoup de belles choses chez Ocampo" Tristram, tu ajoutes à la tentation : merci !
Invité- Invité
Re: Jorge Luis Borges
Juste pour confirmer :
« ‒ Noter les événements avant ou après qu’ils arrivent, c’est la même chose : il est plus facile d’inventer que de se souvenir. »
Silvina Ocampo, « Le journal de Porfiria Bernal », in « Faits divers de la Terre et du Ciel »
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« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
Tristram- Messages : 14941
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Re: Jorge Luis Borges
Borges est plutôt particulier, érudit, joueur et invente des univers alternatifs... il a été un devancier. Il était quand même argentin dans l'âme.Nous pouvons noter dans Essai d'autobiographie :
J'ai connu la chance de suivre un cours sur Borges avec une prof qui venait de l'Argentine.
Cette étendue infinie était ce qu'on appelait la pampa et quand j'appris que les ouvriers agricoles étaient des gauchos, comme les personnages d'Eduardo Gutiérrez, cela leur conféra un certain prestige à mes yeux.
J'ai connu la chance de suivre un cours sur Borges avec une prof qui venait de l'Argentine.
Jack-Hubert Bukowski- Messages : 2477
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Localisation : Montréal
Re: Jorge Luis Borges
Je sais que je pratique la bifurcation. Je te remercie, Janis, de t'être prêtée au jeu de citer l'oeuvre de Borges. Le livre des préfaces est en effet intéressant.
De là, je tombe sur cette conférence sur la poésie :
Borges,«La poésie» dans Conférences, extraits p. 91, 92, 96 et 98.
De là, je tombe sur cette conférence sur la poésie :
Emerson dit qu'une bibliothèque est un cabinet magique dans lequel sont enfermés de nombreux esprits enchantés. Ils se réveillent quand on les appelle ; tant qu'on n'ouvre pas un livre, ce livre est, littéralement, géométriquement, un bloc, une chose parmi les choses. Quand on l'ouvre, quand le livre trouve son lecteur, se produit le fait esthétique. Et pour le lecteur lui-même, convient-il d'ajouter, un même livre change puisque nous changeons, puisque nous sommes - pour reprendre ma citation préférée - le fleuve d'Héraclite, puisque selon ce dernier, l'homme d'hier n'est pas l'homme d'aujourd'hui et celui d'aujourd'hui ne sera pas l'homme de demain. Nous changeons sans cesse et l'on peut dire que chaque lecture d'un livre, chaque relecture, chaque souvenir de cette relecture, renouvelle le texte. Le texte est lui aussi le fleuve changeant d'Héraclite.
[...]
La poésie, c'est la rencontre du lecteur avec le livre, la découverte du livre. Il y a une autre expérience esthétique, c'est le moment, très étrange aussi, où le poète conçoit l'oeuvre, où il découvre ou invente l'oeuvre. En latin, comme on sait, les mots «inventer» et «découvrir» sont synonymes. Tout cela concorde avec la doctrine platonicienne qui dit qu'inventer, que découvrir, c'est se souvenir. Francis Bacon ajoute que si apprendre c'est se souvenir, ignorer c'est savoir oublier ; tout est déjà là, il nous faut simplement le voir.
Quand j'écris quelque chose, j'ai la sensation que ce quelque chose préexiste. Je pars d'un concept général, j'ai plus ou moins le début et la fin, puis je découvre peu à peu les parties intermédiaires ; mais je n'ai pas l'impression de les inventer, je n'ai pas l'impression qu'elles dépendent de mon libre arbitre ; les choses sont ainsi. Elles sont ainsi, mais elles sont cachées et mon devoir de poète est de les découvrir.
[...]
Certaines personnes sont peu sensibles à la poésie ; elles se consacrent, en général, à l'enseigner. Personnellement je crois être sensible à la poésie et je crois ne l'avoir jamais enseignée, je n'ai pas enseigné à aimer tel ou tel texte : j'ai appris à mes étudiants à aimer la littérature, à voir en elle une forme de bonheur. Je suis presque incapable d'une pensée abstraite, vous avez dû remarquer que je m'appuie constamment sur des citations ou des souvenirs. Plutôt que de parler de poésie dans l'abstrait, ce qui est une forme de l'ennui ou de la paresse, nous pourrions prendre deux textes en espagnol et les étudier. [...]
Borges,«La poésie» dans Conférences, extraits p. 91, 92, 96 et 98.
Jack-Hubert Bukowski- Messages : 2477
Date d'inscription : 04/12/2016
Age : 41
Localisation : Montréal
Re: Jorge Luis Borges
Il m'a fallu un peu de temps pour réellement apprécier Borges, mais je me régale de son érudition désormais. Pas encore lu Le livre de préfaces, mais je l'ai.
Et si c'est encore un livre qui en appelle plein d'autres...
Et si c'est encore un livre qui en appelle plein d'autres...

Invité- Invité
Re: Jorge Luis Borges
Le Rapport de Brodie : Jorge Luis Borges. - Gallimard
Les deux armes savaient combattre — mieux que les hommes qui étaient ici leurs instruments — et elles combattirent bien cette nuit-là. Elles s’étaient cherchées longtemps par les longs chemins de la province, et elles avaient fini par se rencontrer, alors que leurs gauchos n’étaient plus que poussière. Dans le sommeil de leur acier veillait une rancœur humaine. Les choses durent plus que les hommes. Qui peut savoir si cette histoire est terminée, qui peut savoir si ces armes ne se retrouveront pas un jour ?
"Il est beaucoup question dans ces onze brèves nouvelles de duels et de coups de couteau. Entre gauchos ou des mauvais garçons qui gardent leurssecrets ou leur part d'ombre.
Et les armes parfois, une mémoire.
Des récits brefs et sans un mot de trop. Un modèle concision revendiquée par l'auteur. Qui s'inspire de certaines nouvelles tardives de Kipling.
Borges aimait aussi beaucoup Stevensoo. J'aurais plutot pensé à lui.
« En 1885 Kipling avait commencé, à Lahore, une série de brefs récits, écrits de façon simple, dont il allait faire un recueil en 1890. Beaucoup d'entre eux – In the House of Sudhoo, Beyond the Pale, The gate of the Hundred Sorrows – sont de laconiques chefs-d'œuvre ; je me suis dit un jour que ce qu'avait imaginé et réussi un jeune homme de génie pouvait, sans outrecuidance, être imité par un homme au seuil de la vieillesse et qui a du métier. Cette pensée a eu pour résultat le présent volume que mes lecteurs jugeront. »
J. L. Borges.
Dernière édition par bix_229 le Ven 6 Nov - 16:23, édité 5 fois
bix_229- Messages : 15439
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Re: Jorge Luis Borges
La rencontre, dans Le Rapport de Brodie !
Qu'est-ce que j'ai gagné ?
Qu'est-ce que j'ai gagné ?
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Tristram- Messages : 14941
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Re: Jorge Luis Borges
Rien. Tu as, comme toujours, puisé dans ta besace à citations.Tristram a écrit:La rencontre, dans Le Rapport de Brodie !
Qu'est-ce que j'ai gagné ?
bix_229- Messages : 15439
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Re: Jorge Luis Borges
Eeeeh non : Borges, je le connais par cœur.
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Tristram- Messages : 14941
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Re: Jorge Luis Borges
Bix toi aussi tu aimes bien citer !

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"Prendre des notes, c'est faire des gammes de littérature Le journal de Jules Renard
"Il n'y a pas de mauvais livres. Ce qui est mauvais c'est de les craindre." L'homme de Kiev Malamud
Bédoulène- Messages : 20016
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Re: Jorge Luis Borges
La plupart des oeuvres ont besoin pour rester actiuelles et vivantes d'etre retraduites.
C'est ce qu'on fait pour Cervnates, Dante, Shkespeare ou Lowry, et on a raison.
C'est vrai qu'on a du mal parfois. Quand on a, comme moi, découvert le Volcan de
Lowry, on hésite parfois à tenter une nouvelle traduction.
lMais quand ùeme je partage l'iopinion d'un critique de "En attendant Godot"
"la lecture de Jorge Luis Borges en France continue à pâtir d’une traduction qui fixe la réception
du texte dans un académisme désuet. Il faut absolument le retraduire."
C'est ce qu'on fait pour Cervnates, Dante, Shkespeare ou Lowry, et on a raison.
C'est vrai qu'on a du mal parfois. Quand on a, comme moi, découvert le Volcan de
Lowry, on hésite parfois à tenter une nouvelle traduction.
lMais quand ùeme je partage l'iopinion d'un critique de "En attendant Godot"
"la lecture de Jorge Luis Borges en France continue à pâtir d’une traduction qui fixe la réception
du texte dans un académisme désuet. Il faut absolument le retraduire."
bix_229- Messages : 15439
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Re: Jorge Luis Borges
Poèmes d’amour

Anthologie bilingue dont le fil conducteur (plutôt ténu) est l’amour, et où l’on retrouve entr’autres le goût de Borges pour les listes hétéroclites où se rencontrent en disparate voulue des voisins de la machine à coudre et du parapluie ducassiens, proches donc du surréalisme.
\Mots-clés : #poésie

Anthologie bilingue dont le fil conducteur (plutôt ténu) est l’amour, et où l’on retrouve entr’autres le goût de Borges pour les listes hétéroclites où se rencontrent en disparate voulue des voisins de la machine à coudre et du parapluie ducassiens, proches donc du surréalisme.
On retrouve aussi ses fascinations pour les tigres, les labyrinthes, les miroirs et d’autres objets symboliques comme les monnaies, un atlas.La veille
Des milliers de particules de sable,
Des fleuves qui ignorent le repos, la neige
Plus délicate qu’une ombre, légère
Ombre d’une feuille, le placide
Rivage de la mer, l’écume momentanée,
Les anciens chemins du bison
Et de la flèche fidèle, un horizon
Et un autre, les rizières et la brume,
Le sommet, les minéraux dormants,
L’Orénoque, l’inextricable jeu
Que tissent la terre, l’eau, l’air, le feu,
Les lieues d’animaux soumis,
Écarteront ta main de la mienne,
Mais aussi la nuit, l’aube, le jour...
On retrouve surtout son tour d'esprit, sa forme de pensée, son goût du paradoxe et de l'antinomie ; voici des extraits de La joie, avec les premiers et derniers vers :L’or des tigres
On his blindness
Indigne des astres et de l’oiseau
Qui fend l’azur profond, devenu secret,
De ces lignes qui sont l’alphabet
Organisé par d’autres et du marbre grave
Et son linteau que mes yeux déjà usés
Égarent dans leur pénombre, des invisibles
Roses et des silencieuses
Multitudes d’or et de rouges
Je suis, mais pas des Mille Nuits et Une
Qui ouvrent des mers et des aurores dans mon ombre
Ni de Walt Whitman, cet Adam qui nomme
Les créatures vivantes sous la lune,
Ni des dons blancs de l’oubli
Ni de l’amour que j’espère et n’appelle pas.
Celui qui embrasse une femme est Adam. La femme est Ève.
Tout a lieu pour la première fois.
[…]
Les livres de la bibliothèque n’ont pas de lettres. Elles surgissent quand je les ouvre.
En feuilletant l’atlas je projette la forme de Sumatra.
[…]
Rien n’est si ancien sous le soleil.
Tout a lieu pour la première fois mais d’une façon éternelle.
Celui qui lit mes mots les invente à mesure.
\Mots-clés : #poésie
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Tristram- Messages : 14941
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Re: Jorge Luis Borges
merci Tristram pour commenter ces ves
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"Prendre des notes, c'est faire des gammes de littérature Le journal de Jules Renard
"Il n'y a pas de mauvais livres. Ce qui est mauvais c'est de les craindre." L'homme de Kiev Malamud
Bédoulène- Messages : 20016
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Re: Jorge Luis Borges
Histoire universelle de l'infamie / Histoire de l'éternité

Histoires tirées de faits réels, réécritures, Histoire de la pensée (sur l’Infini, sur l’Éternel retour), diverses réflexions, philosophiques ou littéraires, critique d’un roman policier ou encore celle de traditions poétiques (Les Sagas Islandaises ― les différentes traductions des Mille et une nuits en Occident)… Ce qui frappe dans ce double corpus, c’est son hétérogénéité ; à la fois dans la totalité du livre, mais aussi au sein dans son deuxième ensemble de textes (Histoire de l’éternité). Mais cette hétérogénéité est d’un certain côté, apparente. Tout est lié sur deux axes parallèles : l’infamie / l’éternité (ou l’infini), donc. Le jeu de miroirs que ce parallélisme sous-tend me fascine ; non seulement on n’a pas l’impression que les deux ensembles sont indépendants l’un de l’autre, mais on a bien celle de passer continuellement de l’un à l’autre. Le livre de Borges se décompose en répétitions, reflets, équivalences, impostures, traductions, réécritures : toutes ces variantes composent in fine un tout organique. D’un autre côté, il subsiste une hétérogénéité formelle (et elle subsistera toujours, dans ce genre d’ouvrage). On pourrait arguer que quel que soit le registre (celui du conte, de la rétrospective historique ou de l’argumentation) cela ne change rien, ou rien d’important. Mais si, précisément à cause d’un excès de formalisme chez Borges et chez d’autres écrivains (qui a au mieux suscité mon admiration, mais jamais de passion). Mais tout ceci ne diminue en rien la valeur de l’ouvrage, fort d’une richesse intellectuelle et de vues très pertinente sur la littérature. Peut-être mon livre préféré de Borges, malgré les adorateurs de Fictions…

Histoires tirées de faits réels, réécritures, Histoire de la pensée (sur l’Infini, sur l’Éternel retour), diverses réflexions, philosophiques ou littéraires, critique d’un roman policier ou encore celle de traditions poétiques (Les Sagas Islandaises ― les différentes traductions des Mille et une nuits en Occident)… Ce qui frappe dans ce double corpus, c’est son hétérogénéité ; à la fois dans la totalité du livre, mais aussi au sein dans son deuxième ensemble de textes (Histoire de l’éternité). Mais cette hétérogénéité est d’un certain côté, apparente. Tout est lié sur deux axes parallèles : l’infamie / l’éternité (ou l’infini), donc. Le jeu de miroirs que ce parallélisme sous-tend me fascine ; non seulement on n’a pas l’impression que les deux ensembles sont indépendants l’un de l’autre, mais on a bien celle de passer continuellement de l’un à l’autre. Le livre de Borges se décompose en répétitions, reflets, équivalences, impostures, traductions, réécritures : toutes ces variantes composent in fine un tout organique. D’un autre côté, il subsiste une hétérogénéité formelle (et elle subsistera toujours, dans ce genre d’ouvrage). On pourrait arguer que quel que soit le registre (celui du conte, de la rétrospective historique ou de l’argumentation) cela ne change rien, ou rien d’important. Mais si, précisément à cause d’un excès de formalisme chez Borges et chez d’autres écrivains (qui a au mieux suscité mon admiration, mais jamais de passion). Mais tout ceci ne diminue en rien la valeur de l’ouvrage, fort d’une richesse intellectuelle et de vues très pertinente sur la littérature. Peut-être mon livre préféré de Borges, malgré les adorateurs de Fictions…
Dreep- Messages : 1456
Date d'inscription : 08/12/2016
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Re: Jorge Luis Borges
Mon préféré serait plutot L'Auteur et autres textes, moins cérébral, et plus sensible.
bix_229- Messages : 15439
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Re: Jorge Luis Borges
Fictions

Le jardin aux sentiers qui bifurquent
Dans le prologue de cette première partie, Borges évoque plaisamment la genèse de la foudroyante concision de ses textes brefs, synopsis de livres non écrits :
Illustration exemplaire de cette proposition liminaire, cette histoire commence comme Bioy Casarès et Borges découvrent un exemplaire d’une encyclopédie comportant un article interpolé concernant Uqbar, une énigmatique contrée inconnue. Chez Borges, le livre n’est jamais loin (constante qu’on retrouve chez Lovecraft) ; il découvre incidemment un tome d’une encyclopédie d’Uqbar, fruit d’une mystérieuse organisation – ce procédé lui permet d’évoquer succinctement un monde utopique, univers idéal et métaphorique, esquissé en matière de philosophie, de linguistique, de géométrie, de littérature, et surtout de métaphysique portant sur le temps et l’espace. Hypothèses paradoxales qui fécondent l’imaginaire :
L’approche d’Almotasim
Borges nous présente le « premier roman policier écrit par un natif de Bombay City », une quête aventureuse en Inde :
Comme le texte précédent, une parodie de critique littéraire (Borges est toujours facétieux) :
La loterie à Babylone
Encore une présentation bibliographique (« des notes sur des livres imaginaires » comme il est spécifié dans le prologue), prétexte à un catalogue de synopsis.
Le jardin aux sentiers qui bifurquent
C’est le nom du livre-labyrinthe (mis en abyme dans une histoire policière et d’espionnage) :
Funes ou la mémoire
Irénée Funes est un Uruguayen dont la perception et la mémoire devinrent infaillibles lorsqu’il fut rendu infirme par un cheval.
La forme de l’épée
Cicatrice d’une infamie…
Thème du traître et du héros
Toujours en Irlande pendant la lutte contre l’Angleterre, la mort shakespearienne d’un traître héroïque.
La mort et la boussole
Enquête de Lönnrot (à la Dupin) sur l’assassinat d’un talmudiste, apparemment en rapport avec le « Tetragrammaton », « Nom Absolu » de Dieu. Le « problème des morts symétriques et périodiques » se révèle en fait un traquenard.
Le miracle secret
Affres d’un juif condamné à mort par les Allemands entrés dans Prague ; Dieu lui accorde un sursis d’un an pour terminer son drame en vers – stase où il travaille de mémoire.
Article sur un certain Nils Runeberg qui publia la thèse que Judas fit le sacrifice nécessaire de son âme – et que c’est lui l’incarnation divine.
Martin Fierro le gaucho meurt en duel au couteau contre le frère du nègre qu’il a tué.
Ses adeptes ne sont ni les gitans ni les juifs, et son secret est dans leur rite.
Le Sud
Juan Dahlmann (petit-fils d’un bibliothécaire et d’un héros militaire), à peine rétabli d’une septicémie due à une blessure au front, part pour son estancia dans le Sud en lisant les Mille et Une Nuits, lorsqu’il est provoqué pour un duel au couteau, dont il ne sait pas se servir, acceptant sa mort à l’hôpital, suite à une distorsion temporelle.
\Mots-clés : #fantastique

Le jardin aux sentiers qui bifurquent
Dans le prologue de cette première partie, Borges évoque plaisamment la genèse de la foudroyante concision de ses textes brefs, synopsis de livres non écrits :
Tlön, Uqbar, Orbis Tertius« Délire laborieux et appauvrissant que de composer de vastes livres, de développer en cinq cents pages une idée que l’on peut très bien exposer oralement en quelques minutes. Mieux vaut feindre que ces livres existent déjà, et en offrir un résumé, un commentaire. »
Illustration exemplaire de cette proposition liminaire, cette histoire commence comme Bioy Casarès et Borges découvrent un exemplaire d’une encyclopédie comportant un article interpolé concernant Uqbar, une énigmatique contrée inconnue. Chez Borges, le livre n’est jamais loin (constante qu’on retrouve chez Lovecraft) ; il découvre incidemment un tome d’une encyclopédie d’Uqbar, fruit d’une mystérieuse organisation – ce procédé lui permet d’évoquer succinctement un monde utopique, univers idéal et métaphorique, esquissé en matière de philosophie, de linguistique, de géométrie, de littérature, et surtout de métaphysique portant sur le temps et l’espace. Hypothèses paradoxales qui fécondent l’imaginaire :
Il suffit de parcourir l’article Wikipédia consacré à ce texte pour mesurer tout ce qu’il contient (notamment en germe).« Une des écoles de Tlön en arrive à nier le temps ; elle raisonne ainsi : le présent est indéfini, le futur n’a de réalité qu’en tant qu’espoir présent, le passé n’a de réalité qu’en tant que souvenir présent. Une autre école déclare que tout le temps est déjà révolu et que notre vie est à peine le souvenir ou le reflet crépusculaire, et sans doute faussé et mutilé, d’un processus irrécupérable. »
« Dans les régions les plus anciennes de Tlön, le dédoublement d’objets perdus n’est pas rare. Deux personnes cherchent un crayon ; la première le trouve et ne dit rien ; la seconde trouve un deuxième crayon non moins réel, mais plus conforme à son attente. Ces objets secondaires s’appellent hrönir et sont, quoique de forme disgracieuse, un peu plus longs. […]
Dans Tlön les choses se dédoublent ; elles ont aussi une propension à s’effacer et à perdre leurs détails quand les gens les oublient. Classique est l’exemple d’un seuil qui subsista tant qu’un mendiant s’y rendit et que l’on perdit de vue à la mort de celui-ci. Parfois des oiseaux, un cheval, ont sauvé les ruines d’un amphithéâtre. »
L’approche d’Almotasim
Borges nous présente le « premier roman policier écrit par un natif de Bombay City », une quête aventureuse en Inde :
Pierre Ménard, auteur du Quichotte« On entrevoit déjà le sujet général : l’insatiable recherche d’une âme à travers les reflets délicats qu’elle a laissés sur d’autres âmes : d’abord la trace ténue d’un sourire ou d’un mot ; vers la fin, les splendeurs diverses et croissantes de la raison, de l’imagination et du bien. À mesure que les hommes interrogés ont connu de plus près Almotasim, leur portion de divinité est plus grande ; il est entendu cependant qu’ils ne sont que des miroirs. »
Comme le texte précédent, une parodie de critique littéraire (Borges est toujours facétieux) :
Confidence de l’écrivain nîmois sur la genèse de son projet :« Il ne voulait pas composer un autre Quichotte – ce qui est facile – mais le Quichotte. Inutile d’ajouter qu’il n’envisagea jamais une transcription mécanique de l’original ; il ne se proposait pas de le copier. Son admirable ambition était de reproduire quelques pages qui coïncideraient – mot à mot et ligne à ligne — avec celles de Miguel de Cervantès. »
Les ruines circulaires« Mon souvenir général du Quichotte, simplifié par l’oubli et l’indifférence, peut très bien être équivalent à la vague image antérieure d’un livre non écrit. »
N’être qu’apparence, rêve d’un rêveur, cf. Le Rêve du papillon, de Tchouang-Tseu… L’énoncé est particulièrement dense, caractéristique borgésienne qui me ravit.« Le dessein qui le guidait n’était pas impossible, bien que surnaturel. Il voulait rêver un homme : il voulait le rêver avec une intégrité minutieuse et l’imposer à la réalité. »
La loterie à Babylone
La bibliothèque de Babel« Désormais, les acheteurs de rectangles numérotés avaient la double chance de gagner une certaine somme ou de payer une amende parfois considérable. »
Examen de l’œuvre d’Herbert Quain« L’univers (que d’autres appellent la Bibliothèque) [… »
« …] la Bibliothèque est une sphère dont le centre véritable est un hexagone quelconque, et dont la circonférence est inaccessible. »
« …] il n’y a pas, dans la vaste Bibliothèque, deux livres identiques. De ces prémisses incontroversables il déduisit que la Bibliothèque est totale, et que ses étagères consignent toutes les combinaisons possibles des vingt et quelques symboles orthographiques (nombre, quoique très vaste, non infini), c’est-à-dire tout ce qu’il est possible d’exprimer, dans toutes les langues. Tout : l’histoire minutieuse de l’avenir, les autobiographies des archanges, le catalogue fidèle de la Bibliothèque, des milliers et des milliers de catalogues mensongers, la démonstration de la fausseté de ces catalogues, la démonstration de la fausseté du catalogue véritable, l’évangile gnostique de Basilide, le commentaire de cet évangile, le commentaire du commentaire de cet évangile, le récit véridique de ta mort, la traduction de chaque livre en toutes les langues, les interpolations de chaque livre dans tous les livres. »
Encore une présentation bibliographique (« des notes sur des livres imaginaires » comme il est spécifié dans le prologue), prétexte à un catalogue de synopsis.
Le jardin aux sentiers qui bifurquent
C’est le nom du livre-labyrinthe (mis en abyme dans une histoire policière et d’espionnage) :
Artifices« Dans toutes les fictions, chaque fois que diverses possibilités se présentent, l’homme en adopte une et élimine les autres ; dans la fiction du presque inextricable Ts’ui Pên, il les adopte toutes simultanément. Il crée ainsi divers avenirs, divers temps qui prolifèrent aussi et bifurquent. De là, les contradictions du roman. »
Funes ou la mémoire
Irénée Funes est un Uruguayen dont la perception et la mémoire devinrent infaillibles lorsqu’il fut rendu infirme par un cheval.
La forme de l’épée
Cicatrice d’une infamie…
Thème du traître et du héros
Toujours en Irlande pendant la lutte contre l’Angleterre, la mort shakespearienne d’un traître héroïque.
La mort et la boussole
Enquête de Lönnrot (à la Dupin) sur l’assassinat d’un talmudiste, apparemment en rapport avec le « Tetragrammaton », « Nom Absolu » de Dieu. Le « problème des morts symétriques et périodiques » se révèle en fait un traquenard.
Le miracle secret
Affres d’un juif condamné à mort par les Allemands entrés dans Prague ; Dieu lui accorde un sursis d’un an pour terminer son drame en vers – stase où il travaille de mémoire.
Trois versions de Judas« Il découvrit que les cacophonies pénibles qui avaient tant alarmé Flaubert sont de pures superstitions visuelles : des faiblesses et des inconvénients du mot écrit, non du mot sonore… »
Article sur un certain Nils Runeberg qui publia la thèse que Judas fit le sacrifice nécessaire de son âme – et que c’est lui l’incarnation divine.
La fin« Il commence habilement par détacher la superfluité de l’acte de Judas. Il fait observer (comme Robertson) que pour identifier un maître qui prêchait journellement à la synagogue et qui faisait des miracles devant des foules de milliers d’hommes, point n’était besoin de la trahison d’un apôtre. Cependant, elle eut lieu. Il est intolérable de supposer une erreur dans l’Écriture ; il est non moins intolérable d’admettre un fait fortuit dans le plus précieux événement de l’histoire du monde. Ergo, la trahison de Judas n’a pas été fortuite ; elle fut un fait préfixé qui a sa place mystérieuse dans l’économie de la rédemption. »
Martin Fierro le gaucho meurt en duel au couteau contre le frère du nègre qu’il a tué.
La secte du Phénix« Il existe une heure de la soirée où la prairie va dire quelque chose. Elle ne le dit jamais. Peut-être le dit-elle infiniment et nous ne l’entendons pas, ou nous l’entendons, mais ce quelque chose est intraduisible comme une musique… »
Ses adeptes ne sont ni les gitans ni les juifs, et son secret est dans leur rite.
Le Sud
Juan Dahlmann (petit-fils d’un bibliothécaire et d’un héros militaire), à peine rétabli d’une septicémie due à une blessure au front, part pour son estancia dans le Sud en lisant les Mille et Une Nuits, lorsqu’il est provoqué pour un duel au couteau, dont il ne sait pas se servir, acceptant sa mort à l’hôpital, suite à une distorsion temporelle.
Labyrinthes, jeux de miroirs et rêves – toujours aussi vertigineux à la relecture !« Aveugle pour les fautes, le destin peut être implacable pour les moindres distractions. »
\Mots-clés : #fantastique
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« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
Tristram- Messages : 14941
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Des Choses à lire :: Lectures par auteurs :: Écrivains d'Amérique Centrale, du Sud et des Caraïbes
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