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Daniel Defoe

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Message par Aventin Dim 6 Juin - 18:00

The Life and Strange Surprizing Adventures of Robinson Crusoe

Daniel Defoe - Page 2 Robins10
Publié en 1719, 230 pages envion. Succès mondial depuis trois siècles.

Il m'a semblé une bonne idée (en était-ce une ?) de revenir au texte anglais initial. On y découvre des éléments questionnants, que bien des versions édulcorées ou "Jeunesse" ont passé à profits et pertes.

En 1719 Defoe était un homme politique, plusieurs fois jeté en prison pour dettes et pour positions politiques, il avait été aventurier, commerçant, agent secret, infiltrait les jacobites, trempait dans mainte opération et basses œuvres au nom de sa foi presbytérienne.

Toute cette dimension-là transparaît dans Robinson; ainsi, lorsqu'il prie (et il prie souvent, dans l'édition originale) avec ce côté très accentué des presbytériens s'accusant de celles d'entre leurs propres fautes qui leur paraissent les pires, aux fins d'espérer le pardon, la rémission, la rédemption, sommes-nous surpris de constater qu'au nombre de celles-ci ne figure pas la traite négrière, alors que désobéir à ses parents est une erreur de jeunesse sur laquelle il revient sans cesse.
La dimension Providence (très XVIIIème il est vrai) est particulièrement à l'honneur, c'est je crois -enfin du moins est-ce mon analyse, le sentiment vécu, éprouvé de celle-ci qui maintient Robinson à flot, la tête à peu près claire:
Le personnage de Tom Ayrton, dans L'Île Mystérieuse de Jules Verne, donne certainement une meilleure idée de l'état psychologique ravagé de ceux qui ont été marronés, largués solitaire sur une île déserte.

L'île de Robinson est déserte, humainement parlant, mais se révèle très prodigue.
C'est la solitude extrême qui lui pèse, mais avec vue sur une autre terre ou île: or il ne s'y aventure pas, c'est singulier.
De même il met des années avant de reconnaître complètement l'autre côté de l'île ou le naufrage l'a jeté seul survivant, ce qui est à tout le moins étrange, "on ne peut attendre d'un prisonnier qu'il ne fasse pas le tour de sa propre geôle" comme dit Marguerite Yourcenar (dans l'Œuvre au noir).

L'argent, la position sociale ne sont pas le mal mais le juste fruit de l'ingéniosité et du travail, notion à peu près impossible à comprendre pour la quasi-totalité des autres courants chrétiens (le terrain est très déblayé pour L'Éthique protestante et l'esprit du capitalisme, le fameux ouvrage de Max Weber, presque deux siècles plus tard).  

Également la façon de se comporter en roi ou roitelet, avec ses assujettis, avec une prise de possession de l'île très "seul maître à bord après Dieu" que ce soit avec Vendredi puis son père ou avec les naufragés, est certainement époque, mais à rapprocher des convictions, des engagements politiques de Defoe.

Le seul livre que J-J Rousseau conseillait à Émile d'avoir en bibliothèque, au strict détriment de tous les autres, étonne aussi par la maladresse chronique de Robinson, maladresse que les versions expurgées ont transformé en ingéniosité.
Et la juste compensation de la maladresse est le travail, énorme, celui-ci à mi-chemin entre le rachat et le signe de la Providence.

Enfin, car j'arrête là - je m'en voudrais de trop lire et surtout de commenter sans recul cet énorme succès avec des yeux occidentaux du XXIème siècle - travers plus difficile à éviter encore que les fameux écueils de l'île de Robinson...  

Livre vivant, alerte, tenant bien son lecteur en haleine, même dans sa prime version: celà ça fait trois siècles que des millions de lecteurs en sont convaincus...
J'ai bien apprécié le souci de Defoe de brouiller les cartes, avec utilisation démiurgique de la notion de tempête destructrice: sommes-nous bien dans les Caraïbes, avec des traits d'îles qui font davantage penser aux côtes brésiliennes ou chiliennes ?
Là est une d'entre les petites touches d'un romancier talentueux...

He was a comely handsome Fellow, perfectly well made; with straight strong Limbs, not too large; tall and well shap’d, and as I reckon, about twenty six Years of Age. He had a very good Countenance, not a fierce and surly Aspect; but
seem’d to have something very manly in his Face, and yet he had all the Sweetness and Softness of an European in his Countenance too, especially when he smil’d.
His Hair was long and black, not curl’d like Wool; his Forehead very high, and large, and a great Vivacity and sparkling Sharpness in his Eyes. The Colour of his Skin was not quite black, but very tawny; and yet not of an ugly yellow nauseous
tawny, as the Brasilians, and Virginians, and other Natives of America are; but of a bright kind of a dun olive Colour, that had in it something very agreeable; tho’ not very easy to describe. His Face was round, and plump; his Nose small, not flat
like the Negroes, a very good Mouth, thin Lips, and his fine Teeth well set, and white as Ivory. After he had slumber’d, rather than slept, about half an Hour, he wak’d again, and comes out of the Cave to me; for I had been milking my Goats, which I had in the Enclosure just by: When he espy’d me, he came running to me, laying himself down again upon the Ground, with all the possible Signs of an humble thankful Disposition, making a many antick Gestures to show it: At last he lays his Head flat upon the Ground, close to my Foot, and sets my other Foot upon his Head, as he had done before; and after this, made all the Signs to me of Subjection, Servitude, and Submission imaginable, to let me know, how he would serve me as long as he liv’d; I understood him in many Things, and let him know, I was very well pleas’d with him; in a little Time I began to speak to him, and teach him to speak to me; and first, I made him know his Name should be Friday, which was the Day I sav’d his Life; I call’d him so for the Memory of the Time;
I likewise taught him to say Master, and then let him know, that was to be my Name; I likewise taught him to say, YES, and NO, and to know the Meaning of them; I gave him some Milk, in an earthen Pot, and let him see me Drink it before him, and sop my Bread in it; and I gave him a Cake of Bread, to do the like, which he quickly comply’d with, and made Signs that it was very good for him.

\Mots-clés : #aventure #colonisation #esclavage #insularite #lieu #nature #solitude
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Message par Tristram Dim 6 Juin - 20:16

Merci Aventin pour cette belle "revisitation", Le Tour de la prison (recueil d'essais de Yourcenar sur des voyages) !
Rien d'étonnant hélas me semble-t-il à ce que l'esclavage ne soit pas questionné dans la société de Defoe, de même que la "culture du travail"...
De tels commentaires apportent beaucoup, notamment ce qu'on aime trouver, ce me semble, en explorant ce forum !

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Message par animal Dim 6 Juin - 22:42

Aventin a écrit:Il m'a semblé une bonne idée (en était-ce une ?) de revenir au texte anglais initial. On y découvre des éléments questionnants, que bien des versions édulcorées ou "Jeunesse" ont passé à profits et pertes.
Merci pour l'extrait qui donne envie d'envisager à son tour la relecture en version originale mais côté traductions (et vo ?) on aurait donc un choix très embarrassant dans les versions ? Daniel Defoe - Page 2 1247285341

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Message par Aventin Lun 7 Juin - 7:17

Merci Tristram, mais voilà, quoi, c'est malin, Embarassed je viens d'achever les kleenex, j'attaque le rouleau de sopalin Daniel Defoe - Page 2 378699333 .
Pour la citation de Marguerite Yourcenar, c'est de mémoire j'avoue, au tout début de L'Œuvre au noir quand Zénon chemine avec son compagnon, il s'écrie cela pour signifier de façon allégorique qu'il faut parcourir le monde, = notre geôle commune.

NB: Animal: je suis loin d'être expert mais en effet les versions, remaniements, textes pseudos "intégraux" pullulent, comme ça se comprend pour un livre à succès ancien, toujours en vogue et libre de droits - et ceci sans même mentionner ce qu'on appelle les robinsonnades. Après peut-être sans doute ai-je eu une drôle d'idée, qui ne s'impose pas forcément, en allant chercher le texte premier en langue originelle.
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Message par animal Lun 7 Juin - 19:31

le côté très mouvant de l'immuable monument en littérature ?

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Message par animal Mer 24 Nov - 21:28

Daniel Defoe - Page 2 Confia10

Les Chemins de fortune, Histoire générale des plus fameux pyrates II - Le grand rêve flibustier

Même recette que dans le premier volume : les histoires de pirates s’enchaînent des Bermudes à Madagscar, en mer mais aussi sur Terre. Avec force ruse et souvent avec une implacable violence : meurtre, esclavage, enrôlement de force,... la vie est rude. Le châtiment aussi remarquez. Entre corde, bastonnade et noyade on a l'embarras du choix.

Et sur des fonds très exotiques il y a cette brutalité individuelle tout autant que de sociétés européennes et américaines et tribales. En effet c'est souvent que l'on voit nos pirates du moment louer leurs services dans des guerres de voisinage en échange de provisions ou d'esclaves.

Et si ça se passe aussi à terre c'est qu'au delà du rêve de la fortune rapide il y a outre celui d'un peu plus d'équité (déjà présent dans le premier volume) celui de se poser à un moment, de mener une vie plus ou moins ranger que ce soit outre mer dans sur une terre d'asile ou plus près de leurs points de départ.

Différentes personnalités et différentes façon de diriger, de "gérer", rapport de force mais aussi utopie de justice participative, il s'agit bien d'une occasion de décliner des sociétés alternatives et potentiellement plus légitimes ? Et rien de simple dans tout ça, en cause la violence en arrière plan, forcée par les circonstances mais pas toujours.

De l'aventure et de l'édifiant donc mais pas seulement "nègres" ou noirs, traite ou affranchissement des esclaves, meurtre ou dépôt raisonnablement dépouillé et en lieu sûr... autre embarra du choix dans ces histoires.

En prime une stupéfiante description de Mogadiscio au tout début du XVIIIè siècle qui couvre habitat, rites et pouvoir (avec ses apparences).

Beaucoup de choses donc et cette profondeur trouble qui fait facilement passer la pilule de la redondance des faits et le drôle de point d'interrogation de l'aspect très condensé des histoires relatés. Beaucoup des pirates et autres passés en revue ont déjà été aperçus dans une histoire précédente.

Bref (ou pas pour les 350 pages du livre), rapport à l'étranger, au commerce, à la société humaine dans plusieurs de ses échelles, un livre étonnant et détonnant qui prend quelques précautions pour délivrer mille choses !

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Message par Quasimodo Mer 24 Nov - 22:11

Hé, mais ça a l'air chouette ! J'étais passé à côté du premier commentaire et je ne savais même pas qu'il avait écrit ça, Defoe Daniel Defoe - Page 2 378699333
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Message par animal Mer 24 Nov - 22:16

C'est zarbi de lire du XVIIIè mais ça vaut son détour. pirat

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Message par animal Jeu 25 Nov - 6:19

Pour rebondir sur le premier commentaire qui était une récup', ça faisait longtemps que ce deuxième volume attendait dans les étagères. Je crois que c'est une remarque de @gilux sur je ne sais plus quel fil qui me l'a fait sortir ?

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Message par bix_229 Jeu 25 Nov - 14:58

Je me demande pourquoi il a fallu autant de temps pour attribuer le livre à Defoe et non à un
pseudo capitaine Johnson.
On trouve d'ailleurs toujours en vente l'Histoire des pirates sous le nom de Johnson.
Je m'interesse depuis longtemps à l'histoire des pirates, j'ai lu plusieurs livres qui ne faisaient pas
état de l'attribution certaine à Defoe.
En tout cas, pour ceux qui s'interesseraient à cette étrange confrérie, je conseille le livre de Gilles
Lapouge : Les Pirates.
On pourra voir toute une ligné pitoresque de brutes sanglantes et d'autres qui furent des utopistes
libertaires à Madagascar.
Mais est-ce certain ? Daniel Defoe - Page 2 2441072346


Dernière édition par bix_229 le Jeu 25 Nov - 15:06, édité 1 fois (Raison : aiaient)
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Message par bix_229 Jeu 25 Nov - 15:17

Ce que j'écrivais sur le sujet :

Parmi tous les révoltés, les pirates m'ont toujours paru les plus absolus.
Individus tournant le dos radicalement la cité, la société et ses lois ; la famille et le passé.

L'histoire de la piraterie est celle d'une folie aussi ancienne que la navigation, meme s
leur age d'or est le 16e siècle. Une folie si absolue qu'elle nous fait encore rever et frémir
au delà des clichés et des individus.
Peut etre parce que c'est une folie sombre, sans gaité et surtout sans espoir.

Aux cotés de brutes sanguinaires comme Low ou Kid, on voit des utopistes comme Misson, pirate français et fils de gentilhomme, révant d'un univers égalitariste parfait et aboutissant aux pires catastrophes. Toutes les utopies sont meurtrières, on ne le sait que trop désormais.
D'autres, cherchent des justifications morales malgré le crime ou à l'opposé, souhaitent une contre société vouée à Satan.

Leur point commun c'est la mer, et le navire est le centre de cet univers liquide. Le pirate fuit le temps et l'histoire. Ou du moins, en a t'il l'illusion.

Leur bateau constitue lui-meme une société close et bien réglée. Mais hors du bateau, les règles s'inversent et aussi la morale...
Un monde sans femmes. On en connait pourtant deux qui parvinrent à se faire accepter, mais après s'etre d'abord travesties en hommes...

Une des étrangetés qui les rassemblent est leur manière de dilapider
le plus rapidement possible le butin qu'ils ont conquis de la façon la plus risquée. De la partager, ou de l'ensevelir et de l'oublier. Songez un peu à tous ces trésors cachés ici ou là...

Autre besoin encore, la fete et l'orgie, sans doute en réaction contre les régles, mais aussi la destruction de tout ce qui fut construit, édifié, amassé par d'autres.

L'intimité constante qu'ils ont avec la mort est une de leur force en cas d'abordage ou de pillage.
Ce n'est pas un hasard, s'ils hissent souvent un pavillon noir à tete de mort...
On est sidérés quand on constate que quelques poignées d'hommes enragés et à pied, ont pris d'assaut au 16e siècle, des villes comme Cartagena, en Colombie... Et se sont attaquées à bien d'autres...
Aparemment, ils ne craignaient pas la mort, mais n'allaient pas jusqu'à se sacrifier comme les terroristes actuels.

Rapatrié.
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Message par Tristram Dim 9 Avr - 13:20

Journal de l'Année de la Peste

Daniel Defoe - Page 2 Journa13

Le narrateur, un négociant londonien fort pieux et curieux, fait un compte rendu précis de la grande peste de 1665-1666. On sent la patte de journaliste de l’auteur dans ce roman historique, aussi documenté que le témoignage qu’il prétend être (il y a même plusieurs tableaux de chiffres).
L’épidémie n’est pas aussi "égalitaire" qu’on le penserait : ceux qui n’ont pas de biens doivent endosser les taches les plus exposées : garde-malades, « corbeaux » (qui enlevaient les pestiférés soit pour les porter à l’hôpital, soit pour les enterrer), etc.
Malgré ses louanges de la gestion des autorités municipales, l’auteur dénonce une certaine imprévoyance.
« Jamais, sûrement, cité de cette grandeur et de cette importance ne fut surprise dans un aussi parfait état d’impréparation à pareille épreuve, qu’il s’agisse de mesures civiles ou religieuses. C’était, en vérité, comme si l’on n’avait eu aucun avertissement, que l’on ne se fût attendu à rien, que l’on n’eût rien eu à craindre, de sorte que l’on se trouva vraiment devant un minimum de mesures publiquement prises. »
Il leur fait également grief de n’avoir pas abusé de leurs ressources pour secourir les plus démunis.
« En tout cas, la majorité des pauvres ou des familles qui vivaient précédemment de leur travail ou du petit commerce subsistaient à présent par la charité, et si certains chrétiens à l’âme charitable et bien disposée n’avaient fourni des sommes considérables pour leur venir en aide, la cité n’aurait certainement pas pu se maintenir. »
À l’évocation de charité, je ne peux m’empêcher de faire le lien avec l’État-providence.
Les corporations les plus touchées économiquement furent les ouvriers et artisans des manufactures et du bâtiment, les transporteurs et notamment la marine, les domestiques et autres services.
« Je pourrais m’étendre plus longuement là-dessus, mais il suffira de mentionner d’une façon générale que, tous les métiers étant arrêtés, il n’y eut plus d’emploi, le travail et, partant, le pain des pauvres furent supprimés. Au début, certes, les plaintes des pauvres gens furent vraiment lamentables à entendre, encore que des distributions charitables aient beaucoup diminué leur misère. Un grand nombre d’ailleurs s’enfuirent dans les comtés ; mais des milliers restèrent à Londres jusqu’au moment où le désespoir seul les chassa, la mort les surprenait alors sur la route et ils ne furent plus que ses messagers. D’autres transportant avec eux l’infection la répandirent malheureusement jusqu’aux extrémités du royaume. »
Le pillage fut évité, et ainsi la famine généralisée…
Nombreuses anecdotes :
« Au milieu de la cour gisait une bourse de cuir, à laquelle étaient attachées deux petites clefs ; elle avait beau contenir de l’argent, personne ne voulait y toucher. Je demandai depuis combien de temps elle se trouvait là et l’homme de la fenêtre me répondit : « Depuis près d’une heure », mais personne n’avait voulu s’en occuper parce que l’on n’était pas certain que celui qui l’avait perdue ne reviendrait pas la chercher. Je n’avais pas assez besoin d’argent, ni la somme n’était-elle assez importante pour que je fusse tenté de m’en mêler ou de prendre le contenu en affrontant le risque que cela pouvait comporter. J’allais donc partir, quand celui qui avait ouvert la porte déclara qu’il allait ramasser la bourse pour la remettre au véritable propriétaire s’il revenait la chercher. Il rentra donc chercher un seau d’eau, qu’il déposa près de l’objet. Puis il retourna de nouveau quérir de la poudre, dont il répandit une bonne quantité sur la bourse ; il traça ensuite une traînée partant du petit tas. Elle avait une longueur de deux verges environ. Après quoi, il rentra une troisième fois, ressortit avec des pincettes chauffées au rouge, qu’il avait, je pense, préparées à cet effet, et commença par mettre le feu à la traînée de poudre ; ce qui grilla légèrement la bourse et fumigea assez congrûment l’air environnant. Mais ces mesures ne lui suffirent pas : il ramassa l’objet au moyen des pincettes et le tint ainsi jusqu’à ce que le métal rougi eût traversé le cuir ; puis, l’agitant, il en fit tomber l’argent dans le seau, qu’il emporta dans le bureau. La somme, il m’en souvient, était d’environ treize shillings, quelques pennies frustes et des farthings de cuivre. »
Clin d’œil ?
« Nous n’avions en ce temps-là rien de semblable aux journaux imprimés pour répandre les rumeurs ou les nouvelles, et les embellir de l’invention des hommes, comme je l’ai pu voir pratiquer dans la suite. »
Longues considérations et redites sur l’opportunité de confiner ensemble, maison par maison, les familles où il y avait un malade, mesure jugée assez inefficace car prise trop tard, et les personnes concernées s’échappant souvent.
« Cela devrait suffire à convaincre toute personne sensée que, s’il n’était pas au pouvoir des magistrats ou d’aucune méthode humaine d’empêcher le développement de l’épidémie, cette manière de fermer les maisons était parfaitement insuffisante pour atteindre le but cherché. Il semble, en vérité, que le bien public n’en retirât un avantage ni égal ni même proportionné au cruel fardeau que ce système faisait peser sur les particuliers ainsi reclus. Et, dans la mesure où le service public m’amena à ordonner de ces sévères mesures, j’eus souvent l’occasion de me rendre compte qu’elles étaient incapables de répondre au but cherché. »

« Or, certainement, si l’on avait ménagé des maisons exprès pour que ces bien-portants accomplissent leur demi-quarantaine, ceux-ci auraient beaucoup moins matière à se trouver lésés d’une pareille obligation que d’une réclusion avec les malades dans leur propre demeure. »
J’ai été étonné du peu d’allégations farfelues au regard des lacunes dans les connaissances scientifiques de l’époque ; j’ai d’ailleurs toujours trouvé ridicule de moquer la croyance à la contamination par les miasmes, parler de bacilles ne changeant guère dans les faits pour le vulgum pecus : « la contagion est dans l’air » (c’est vrai pour la peste pneumonique, pas bubonique, distinction entre formes cliniques qui n’est pas faite au XVIIe), et les médecins recommandent encore de ventiler les locaux, notamment en période de covid (même s’il n’est pas uniquement question de chasser les mauvaises odeurs).
Voilà donc un ouvrage qu’il est judicieux d’ajouter à ceux qui traitent de ce genre de fléau, tel le Décaméron de Boccace, Les Fiancés de Manzoni, Le hussard sur le toit de Giono, et bien sûr La peste de Camus (tous ouvrages commentés sur Des Choses à Lire !).

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Message par Bédoulène Dim 9 Avr - 20:25

merci Tristram, je n'ai lu il y a plus d'un-demi siècle affraid Robinson Crusoe, c'est tout

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