Javier Cercas
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Javier Cercas
Javier Cercas Mena (né en 1962 à Ibahernando, dans la province de Cáceres) est un écrivain et traducteur espagnol. Il est également chroniqueur du journal El País.
Il est le fils d'un vétérinaire de campagne qui s'installe à Gérone en 1966 alors que Javier est âgé de quatre ans. Il y étudie chez les maristes.
À quinze ans, il découvre Jorge Luis Borges qui va durablement marquer son œuvre.
En 1985, il est diplômé en philologie espagnole à l'Université de Barcelone où il obtient un doctorat.
Il travaille deux ans à l'Université de l'Illinois à Urbana-Champaign. Il y publie son premier roman El móvil et y écrit son deuxième, El inquilino. En 1989, il devient professeur de littérature espagnole à l'université de Gérone.
Il devient un auteur connu du grand public avec son troisième roman, Les soldats de Salamine (2001), qui est révélé par Mario Vargas Llosa dans un article célèbre1, et qui obtient, par ailleurs, les éloges de John Maxwell Coetzee et Susan Sontag.
Il est un collaborateur régulier de l'édition catalane et du supplément dominical du journal El Pais.
Il remporte le prix Salammbô (es) (2001), le prix du récit Grinzane Cavour (it) (2003), le prix de la Critique du Chili, le prix de la ville de Barcelone et de la ville de Carthagène, le deuxième prix Librero (2001) et la médaille de l'Estrémadure (es) (2005), tous accordés par la critique. Il remporte le prestigieux prix Méditerranée étranger en 2014 pour cinquième roman, Les lois de la frontière (2014).
Son œuvre est traduite dans plus de vingt langues.
Bibliographie (ouvrages traduits en français)
1987 Le Mobile : Page 1, 3
2001 Les soldats de Salamine : Page 1, 3
2002 A petites foulées : Page 1, 3
2009 A la vitesse de la lumière : Page 1, 2, 3
2009 Anatomie d'un instant : Page 3, 4
2012 Les lois de la frontière : Page 1, 2, 3
2014 L'imposteur : Page 1, 5
2016 Le point aveugle, essai : Page 4
2017 Le Monarque des ombres : Page 2, 3, 5
2019 Terra Alta : Page 4, 5
2021 Indépendance : Page 4, 6
2022 Le château de Barbe Bleue : Page 6
màj le 17/10/2024
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Flore Vasseur
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Re: Javier Cercas
Au début, on croit qu’on va lire une biographie romancée de Rafael Sànchez Mazas. .
( …)comme quelqu'un qui aurait pu faire de grandes choses, mais n'en avait quasiment fait aucune.
Mais on y découvre aussi le travail de l'écrivain-journaliste (miroir de Javier Cercas) qui s'attache à ses pas, dans un making off en 3 étapes. Le narrateur découvre par hasard une anecdote romanesque rattachée à Sànchez Mazas, grandiose, mais aussi dérisoire puisqu’on on ne saura pas si elle est réelle ou si elle constitue un embellissement personnel de sa propre biographie par Sànchez Mazas. Il s'intéresse, se documente puis se passionne pour ce fondateur de la phalange espagnole, écrivain assez largement oublié, personnage pour le moins ambigu. Il en tire ensuite un livre, interrogeant les archives, rapprochant les témoignages, construisant dans les blancs pour une interprétation cohérente de l’homme, et de la guerre d’Espagne d’une façon plus générale. Finalement insatisfait de sa production, il est encouragé à persévérer et élargir son champ par sa maîtresse bécasse – celle-là même qui l'énervait en s'insurgeant qu’il écrive sur ce « sale fasciste ». Et sa rencontre avec le grand écrivain chilien Roberto Bolaño, son maître en écriture, le fait avancer dans ses interrogations sur l'écrit et le récit, rendre son propos plus universel, y incluant l'autre bord, celui des combattants anonymes, au travers d'un soldat républicain obscur mais au destin extraordinaire. Enrichir son propos en acceptant de rester l’humble serviteur de son texte et non son maître intransigeant.
La biographie de Sànchez Mazas met en lueur les rapports de la phalange et du franquisme, et c'est très éclairant sur les mécanismes contradictoires mais synergiques de ces 2 mouvements, qui aboutirent à la guerre fratricide que l'on sait.
(…) bien loin de regretter d'avoir contribué de son mieux à enflammer la guerre qui lamina une république légitime et d'avoir établi non pas le terrifiant régime de poètes et de condotierres renaissants dont il rêvait, mais un vulgaire gouvernement d'aigrefins, de balourds et de culs-bénits.
Javier Cercas, au-delà de cet homme qui fut l'un des moteurs déterminants de l'entrée en guerre, fait revivre des petits, des sans-grades, dont le nom n'est pas retenu par l'histoire, mais dont l'auteur considère qu'ils furent les vrais héros, les vrais moteurs de l’Histoire et dont il entend transmettre et l'histoire, et le nom, afin qu'ils ne se perdent pas.
À côté de cette réflexion historique, ce livre est une réelle interrogation sur l'écriture, et le rapport à la fiction. L'auteur narrateur veut écrire un « récit réel », mais comprend vite que son interprétation et son imagination sont un des moteurs de son récit. Exposant ses interrogations personnelles, il lui donne sa vraie dimension. Dans le roman Les soldats de Salamine de Javier Cercas, comme dans celui que son héros écrit, on ne sait jamais ce qui est vrai, ce qui est transformé par le souvenir, ce qui est magnifié par le récit, ce qui est inventé par les protagonistes ou l'auteur. C'est une interrogation éclairée sur la vérité, sur le sens de l'écrit et de la mémoire.
J'espère que ce ne sera pas un roman.
-Non, dis-je très confiant. C'est un récit réel.
-Et c'est quoi ça ?
Je le lui expliquais et je crois qu’elle comprit.
-Ce sera comme un roman, résumai-je. Sauf qu'au lieu que tout soit faux tout sera vrai.
L’Histoire a un sens et le rôle de la littérature est de nous le restituer à travers les hommes qui la construisent, grands ou petits. Javier Cercas nous le raconte avec une intelligence malicieuse.
(commentaire rapatrié)
mots-clés : #biographie #devoirdememoire #guerredespagne
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Flore Vasseur
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Re: Javier Cercas
A Urbana, dans le Middlewest, le narrateur, jeune écrivain espagnol qui n'est jamais qu'un double de Cercas, s’est lié avec Robney, un vétéran de la guerre du Vietnam hanté par son passé (je fais court, c’est beaucoup plus compliqué et subtil que ça). Pendant des années, le jeune écrivain va souhaiter écrire cette histoire, la différant perpétuellement. Il lui manque quelque chose. Puis peu à peu les pièces du puzzle se combinent. L’écrivain un temps aveuglé par le succès de son dernier livre (Les Soldats de Salamine à l’évidence) découvre peu à peu les pièces manquantes du puzzle, pour qu’enfin il arrive à mener à bien cette histoire de souffrance et de culpabilité. La propre culpabilité de l’auteur en est un élément primordial, qui lui fera effleurer une meilleure compréhension de son ami.
C’est donc la même histoire, transposée, que Les soldats de Salamine. Le parallèle entre les 2 est impressionnant, des coups de téléphone répétés pour retrouver la piste des témoignages manquants jusqu’aux trains en partance qui interrompent les confidences. On croit, longtemps, lire le même livre.
Mais ici Cercas va beaucoup plus loin, car le narrateur et son « héros » sont des contemporains, des amis, des doubles. L'écrivain aussi est pris dans la culpabilité.
Trouver des coupables, c’est très facile ; ce qui est difficile, c’est d’accepter qu’il n y en ait pas.
Et cela donne une dimension émotionnelle qui manquait aux Soldats de Salamine avec de très belles scènes d'intimité. Les diverses rencontres entre les personnages, tous souffrants à leur manière, sont d'une tendresse mélancolique et souvent désespérée. Cercas joue avec un grand talent sur les silences, les regards, les gestes, les non-dits. A la vitesse de la lumière, qui parle de guerre et d’abominations, de la violence et de l’abjection de l'homme, réalise le tour de force d’être aussi un roman d’une grande tendresse. L’amitié y a une expression forte et pudique. La vie est bien différente de ce que la jeunesse en attendait, mais, quoique complexe et impitoyable, elle n’interdit pas une certaine réconciliation, avec le monde, avec soi-même.
L'écrivain est le seul qui puisse sauver la mémoire de Robney, il le sait, écartelé entre son amitié et l'horreur des actes que son ami a commis. Il sait que cette écriture sera pour lui une délivrance qui lui permettra, peut-être, un départ vers le meilleur. Pardonner à Robney, c’est se pardonner à soi-même. Et tous, Robney, son père, sa femme comptent sur lui pour défendre la mémoire du soldat, même s’ils savent que :
je mentirai sur tout, mais uniquement pour mieux dire la vérité.
On ne peut qu’être fasciné de voir s’entremêler le roman et de l’autobiographie, non par une espèce de curiosité morbide, mais parce que c'est le sens-même de l'écriture que Cercas interroge ici : l'écriture donne sens à la vie et la vie donne sens à l'écriture. Qu’est ce que la vérité, qu’est ce que la fiction, qu’est ce que l’art si ce n’est un moyen de survie ?
Ce roman, qui ressemble d’abord à un remake de Les soldats de Salamine, ouvre peu à peu d'autres pistes, il est encore plus achevé, il fouille au plus près l’intimité de l'homme et de l'écrivain, ses interrogations, ses errances et sa possible rédemption.
(commentaire rapatrié)
mots-clés : #biographie #psychologique
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Flore Vasseur
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Re: Javier Cercas
A travers le parcours d'un jeune écrivain espagnol en herbe tout juste sorti de l'oeuf, qui partira aux Usa en tant que professeur vacataire dans une université engendrant une rencontre-clé dans sa vie , Cercas nous invite tout au long du livre à partager les interrogations d'un homme en quête de vérité .....
Une étrange relation s'établit entre le narrateur et son collègue universitaire Rodney Flak , essentiellement orientée au départ vers des échanges intellectuels à bâtons rompus .
Ce Rodney Falk énigmatique , appartient à ceux qui ne se laissent pas apprivoiser facilement ; ancien vétéran du Viet-nam , il semble traîner une âme aussi lourde et souffrante que sa carcasse à l'allure claudicante et dégingandée avec son cynisme silencieux , ses rares propos laconiques et aiguisés ,sa misanthropie à peine dissimulée et son goût pour la solitude .
Il n'en faut pas moins pour éveiller la curiosité du jeune écrivain qui cherchera à percer ce halo de mystère entourant celui dont il se sent l'ami alors que Rodney continuera jusqu'à la fin à maintenir un semblant de distance affective .....
De ces discussions informelles , de la pugnacité de l'écrivain pour parvenir à saisir la personnalité fuyante de son ami , de ce lien qui naitra progressivement mais indissoluble par la suite , entre ces deux êtres et du parallèle de leur vie chaotique , Cercas nous immerge dans la profondeur du questionnement de l'homme .....Errance , doute , choix ou soumission , aléas de la vie ou libre-arbitre ,essence de l'âme humaine, danger du pouvoir ou de la réussite et notion de culpabilté , sens de l'écriture .....Ce roman est une invitation à la réflexion de l'homme qui se veut lucide , créateur de sa vie dans un grand souci d'honnêteté !
Choisir un écrivain comme protagoniste principal du roman n'est pas innocent car c'est bien de lui même dont nous parle Cercas et de ses tourments d'écrivain dans cette identité de 'témoin" de la vie , et de la capacité à créer peut-être une force "rédemptrice" , permettant peut-être aussi à regarder et accepter la réalité à travers le prisme de l'écriture ....(Il fait d'ailleurs référence à certains ouvrages écrits par lui même , le doute n'est pas permis ).
Perplexe en début de lecture car l'intrigue tarde à se mettre en place , je me suis laissée portée par l'écriture fluide , souple et aérée de Cercas : une belle rencontre m'attendait ....Cet écrivain fait preuve d'une rare probité , d'une lucidité effrayante et courageuse et d'un talent subtil pour mettre tout cela en mots !
Coup de coeur !
églantine- Messages : 4431
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Re: Javier Cercas
Les soldats de Salamine
Soixante ans après la fin de la guerre d’Espagne l’auteur souhaite écrire un livre mettant en vis à vis la mort d’ Antonio Machado poète Espagnol qui mit sa plume au service du parti républicain et de Rafael Sanchez Mazas écrivain Espagnol leader de la Phalange qui lui mit sa plume au service des Nationalistes.
Or l’auteur, journaliste, lors de l’interwiew de l’écrivain Rafael Sanchez Ferlosio (fils de Rafael Sanchez Mazas) qui lui révèle la fausse exécution de son père, au Sanctuaire de Collell, car celui-ci a réussi à s’enfuir et se cacher dans la forêt et épargné par un soldat Républicain qui l’avait découvert. Après des jours d’errance il rencontra et fut soutenu par « les amis de la forêt ».
L’auteur n’aura de cesse pendant deux ans de faire des recherches, de rencontrer les survivants de l’époque ou leur famille afin de reconstituer le parcours de cet homme, grâce à des documents, notamment un carnet écrit de la main de Sanchez Mazas et aux souvenirs des uns et des autres.
Ce qu’il n’ a pu retrouver l’auteur le déduit d’après des évènements, le caractère de Sanchez Mazas, son implication dans la Phalange, le gouvernement de Franco et l’après-guerre, en s’appuyant sur les faits réels qu’il connait.
« Ainsi donc, ce que je consigne ci-après n’est pas ce qui s’est réellement dérouler mais ce qui aurait pu se dérouler selon toute vraisemblance ; je n’offre pas des faits attestés mais des hypothèses raisonnables. »
A la relecture de son récit l’auteur n’est pas satisfait, il sent un manque pour en faire un récit abouti. Il retourne travailler au Journal et c’est lors d’une rencontre avec l’écrivain et poète Roberto Bolaño qu’il comprendra ce qui donnera à son récit un équilibre. Il part donc vers une nouvelle recherche. Il n’obtiendra pas la réponse espérée, mais demeure malgré tout « une hypothèse raisonnable » et une rencontre avec un Héros qui s’ignore et que l’histoire a ignoré comme tant d’autres.
C’est en le nommant lui et ses amis que l’auteur les honore.
Une écriture agréable, juste l’essentiel pour un récit réaliste et qui apporte des connaissances à travers Sanchez Mazas et quelques autres Phalangistes sur le Franquisme, l’après-guerre. Très habile composition de ce récit.
Une très bonne lecture qui m’a beaucoup intéressée.
Je retrouverai l’auteur dans un autre de ses livres, plus d’autres pistes de lecture qu’il donne.
Extraits :
« De fait, il n’est pas exagéré d’affirmer que Sanchez Mazas fut le premier fasciste d’Espagne, et il n’est pas moins exact de dire qu’il fut le théoricien le plus influent de cette idéologie. »
« Tout comme José Antonio, Sanchez Mazas fut l’un de ces phalangistes hostiles, selon le cas et en théorie à l’emploi de la violence (en pratique, il la fomenta : lecteur de Georges Sorel, qui la considérait comme un devoir moral, il y incite presque toujours dans ses écrits). »
« Après Barcelone, sur la route de l’exil, le spectacle devient apocalyptique : une horde épouvantée d’hommes, de femmes, de vieillards et d’enfants, de militaires et de civils confondus – chargés de vêtements, de matelas et d’ustensiles domestiques, les uns progressant péniblement d’un pas de vaincus, les autres montés sur les chariots et les mules du désespoir – encombre la chaussée et les fossés, parsemés, ça et là de cadavres d’animaux, les tripes à l’air ou de véhicules abandonnés. »
« Il le reconnait, ou croit le reconnaître, sans se sentir soulagé pour autant par l’idée que c’est lui et non un agent du SIM qui le sauvera de l’interminable agonie de la peur. Comme si cet outrage s’ajoutaire à ceux de ces années de fuite, il est humilié de ne pas avoir trouvé le mort aux côtés de ses compagnons de prison, ou de ne pas avoir su mourir en rase campagne et en plein soleil en se battant avec un courage dont il est dépourvu, au lieu de le faire ici et maintenant, crotté, seul et tremblant de frayeur et de honte, dans un trou sans dignité. C’est ainsi, la tête enflammée, affolée et confuse, que Rafael Sanchez Mazas – poète exquis, idéologue fasciste, futur ministre de Franco – attend la décharge qui doit en finir avec lui. »
« … - cette région de militantisme républicain célébra l’entrée des nationalistes en grande pompe, avec des festins et des fêtes populaires que ne manquèrent pas une seule fois Sanchez Mazas et ses trois compagnons, toujours vêtus de leurs uniformes de soldats rouges et armés de leurs pistolets de neuf largo, mais protégés surtout par la présence intimidante du hiérarque, qui d’une manière un peu ironique mais sans faillir, les présentait comme sa garde personnelle. »
« Il exalta de vieilles valeurs – la loyauté, le courage – mais pratiqua la trahison et la lâcheté, et contribua plus que quiconque à altérer ces valeurs en usant de la rhétorique phalangiste : il exalta aussi de vieilles institutions – la monarchie, la famille, la religion, la patrie – mais ne remua pas le petit doigt pour ramener le Roi en Espagne … »
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“Lire et aimer le roman d'un salaud n'est pas lui donner une quelconque absolution, partager ses convictions ou devenir son complice, c'est reconnaître son talent, pas sa moralité ou son idéal.”
― Le club des incorrigibles optimistes de Jean-Michel Guenassia
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"Il n'y a pas de mauvais livres. Ce qui est mauvais c'est de les craindre." L'homme de Kiev Malamud
Bédoulène- Messages : 21537
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Re: Javier Cercas
Il est dans ma PAL !
Du temps !!!!! Et un cerveau disponible !!!!
églantine- Messages : 4431
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Re: Javier Cercas
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Bédoulène- Messages : 21537
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Re: Javier Cercas
J'avais noté quelques mots de Javier Cercas, lors d'un entretien, dans un de mes petits carnets:
Ecrire ne sert à rien, le langage ne sert à rien, mais il me faut continuer. Ecrire, c'est peut être la seule façon de trouver une illusion aux choses de la vie. Vous avez lu l'éloge funèbre de David Grossman à son fils de 20 ans mort au Liban? Il a écrit un chef d'oeuvre. Je ne veux pas avoir à écrire ce genre de chef d'oeuvre. Plus je vieillis, plus je ne crois qu'en l'honnêteté personnelle. C'est peu.
C'est déjà beaucoup!
Lu aussi, grâce à Avadoro, Anatomie d'un instant , variations autour d'un moment bien particulier du coup d'état manqué du 23 février 1981.
Le titre est particulièrement bien choisi. Tel un anatomiste minutieux, obsédé par une image, Cercas va disséquer , observer, noter, parcourir des centaines de documents, établir des relations, comparer , réfléchir , revenir en arrière, expliquer, recommencer.Pour tenter de rester au plus près de la vérité des faits. De leur contexte et de leurs conséquences historiques. Et de pouvoir se glisser dans la peau des personnages qu’il décrit, à partir de l’instant où il les décrit.
Pour en arriver à essayer de comprendre pourquoi certains n’ont pas le même instinct, la même logique de survie que les autres.
Borges a-t-il raison et est-il vrai que tout destin, aussi long et compliqué soit-il, consiste en réalité en un seul instant, celui où un homme sait une fois pour toutes qui il est?
Et,enfin, pouvoir passer ,comme à son habitude dans ses descriptions et tentatives d'analyses de comportements humains, du général au particulier à travers sa propre histoire.
Javier Cercas a reçu le prix du Livre européen ( catégorie roman) pour son dernier ouvrage, L'Imposteur.
Son discours , Europe et littérature, ici
Marie- Messages : 649
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Re: Javier Cercas
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Bédoulène- Messages : 21537
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Re: Javier Cercas
je préfère le mélodrame au mensonge.
Une fois refermé ce livre, je ne sais pas trop ce qu'il raconte :
Est-ce l’histoire d’un trio infernal et de ce qui lui advient au fil de trois décennies de répulsion-fascination, rejets et appels à l’aide ?
Est-ce l’histoire de Zarco, adolescent charismatique, chef de bande, qui passe les trois quarts de sa vie en prison, et, au fil des coups d'éclat et provocations devient une star manipulatrice ?
Est-ce l’histoire d’Ignacio, lycéen déboussolé des classes moyennes, qui, le temps d'un été, croit trouver sa place dans la bande, fasciné par Zarco et amoureux de Tere « la fille la plus belle du monde », et qui, sans jamais rien comprendre à rien, est resté de manière fidèle au fantasme de son enfance et l’a payé le prix fort?
Est ce l’histoire métaphorique d’une Espagne désorientée et déchue, qui a voulu simplement tourner la page et s’est rendu compte que c’était plus compliqué que ça ?
Est-ce l’histoire de l'impossible recherche de la vérité ?
Évidemment, c'est tout cela à la fois. En tout cas, c'est un sacrément bon roamn, porté par des personnages magnifiques dont les espoirs et folies de jeunesse laissent place à des déchirements, une noirceur, que quelques éclats de bonheur viennent magnifier.
Le livre se présente sous la forme d’ interviews menés par un écrivain, nègre engagé pour rapporter rétrospectivement les faits. Cela permet à Cercas d' utiliser ce style efficace qui est le sien, pseudo-oral, très fluide, rapide , précis, qui n'exclue pas de belles envolées littéraires. L'interviewé principal est Ignacio, qui croit avoir pris ces distances avec cette histoire, et va découvrir, dans un final aussi bouleversant que le début du roman se veut retenu, que tous les doutes persistent, et que les blessures sont loin d’être cicatrisées. Le témoignage d’un policier et du directeur de la prison viennent nuancer ses dires, apporter un éclairage autre, et tout à la fois préciser les choses et multiplier les interrogations.
Ignacio est un homme qui a l’apparence d’un gagnant et le cœur d’un loser . La fidélité à soi-même et à sa jeunesse, son refus de la perte des illusions, la poursuite de l’impossible amour sont les ingrédients de son questionnement perpétuel sur la vérité et le sens de la vie. Il est question d 'une confiance alternativement récompensée et bafouée. Et Javier Cercas n’est pas du genre à apporter des réponses toutes faites à cette quête déraisonnable du pardon et de la rédemption.
(commentaire rapatrié)
mots-clés : #criminalite
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Flore Vasseur
topocl- Messages : 8533
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Re: Javier Cercas
Après qu'il se soit foulé la cheville en faisant son jogging, les ennuis s'acharnent sur Mario, universitaire italien terne et paresseux chargé de cours dans une université du Texas : un spécialiste dynamique se voit confier la plupart de ses cours, on le relègue dans un bureau au fond du couloir, sa petite amie se désintéresse de lui, et cela continue… Jusqu'à ce que cette histoire plutôt légère et loufoque tourne à quelque chose de plus grinçant et déstabilisant.
J'avais jusque-là une image Javier Cercas en homme mûr intelligent, trèèès sérieux et porteur de conscience. Du lourd. Et bien il sait faire dans le léger. J'ai découvert ici une image toute autre, jeune homme non moins intelligent, mais facétieux et ironique. Cette histoire, qui n'est pas sans rappeler La moustache d’Emmanuel Carrère, part comme une simple galéjade. On s'interroge peu à peu sur le sens de la vérité, et si Mario est passé quelques temps « de l'autre côté du miroir » c'est une façon pour Cercas de mieux faire apparaître les faiblesses et le quotidien routinier de son personnage et du milieu universitaire américain.
Un petit livre malin et drôle, qui se finit sur un dernier clin d'oeil, et montre que l'auteur a bien plus d’une corde à son arc.
(commentaire rapatrié)
mots-clés : #humour
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Flore Vasseur
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Re: Javier Cercas
Enric Marco est un imposteur de première, démasqué en 2005 par l’historien Benito Bermejo. Pas un escroc qui aurait fait fortune sur des mensonges, mais un homme qui s'est construit une biographie inventée pour apparaître au monde comme un phare, briller, capter l'attention.
Non seulement il s'est approprié une bravoure et une forme de résistance pendant la guerre d'Espagne, mais au final cela a plutôt été le lot commun de l'après-guerre. Mais il s'est aussi attribué des activités anti franquistes, et, cerise sur le gâteau et horreur suprême, il s'est monté de toutes pièces un séjour en camp de concentration allemand. Auréolé de ce passé fictif ô combien valorisant, porté par un charisme et une réelle générosité, il a imposé cette image de héros, et a ainsi pu sortir de son image d'homme ordinaire, toujours « du côté de la majorité ». seulement,
« Marco a oublié que le passé ne passe jamais, qu'il n'est qu'une partie ou une dimension du présent, qu'il n'est même pas le passé - c'est Faulkner qui le dit - et qu'il revient toujours mais pas toujours pour nous sauver (...) »
Javier Cercas, qui dans toute son œuvre jongle entre vérité et mensonges, fiction et réalité, bien et mal, n'a pu lutter contre sa fascination pour ce « héros», fascination qui l'avait tout d'abord terrorisé, par peur des vérités auxquelles il allait le confronter. Il y a finalement consacré une belle énergie : interviews, rencontres avec des proches amis ou hostiles, avec des intellectuels, compulsion de bibliographique et d'archives…
Si au départ il ne voulait que « comprendre » au fil de l 'avancée de son travail, il s'est alternativement demandé s'il voulait accuser, juger, justifier, réhabiliter, voire sauver Enric Marco. Il s’est surpris à ce qu'une certaine empathie prenne le pas sur son dégoût pour le personnage, l'amène, sous certains aspects, à l'admirer , pourquoi pas l'aimer. Croyant maîtriser son œuvre il s'est vu tant manipulateur que manipulé, il s'est interrogé sur le rapport entre mensonge et fiction, réalité et roman, ressortant son cher thème du récit réel et du roman sans fiction.
Se plaçant sous le double patronage de Truman Capote avec son récit collé à la réalité (De sang froid) , et de Cervantès et son Don Quichotte qui se fantasme et s'invente comme héros, Javier Cercas , une fois de plus, s'interroge sur lui même, homme et romancier, à travers son analyse trèèès méticuleuse de l'imposteur.
J'ai mis très longtemps à entrer dans le récit, comme c’est souvent mon cas avec Cercas. Mais ici, vraiment très longtemps, plus de la moitié du livre. La première partie est en effet factuelle et descriptive, et plombée par la hantise de l'auteur de se laisser piéger par le mensonge. Cette prudence est comme une chape de plomb sur le récit, elle entraîne des réserves, des circonlocutions, des conditionnels, des avertissements tendant à différencier vérité et hypothèses, des redites nombreuses, des leitmotivs qui alourdissent le propos. Mais la deuxième partie (« le vol d'Icare » et l'épilogue), a fini par emporter mon intérêt, dans une interrogation sans réponse sur l'histoire et la mémoire (sa nécessité et son commerce), le repentir, et la capacité de dire Non.
(commentaire rapatrié)
mots-clés : #biographie
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Flore Vasseur
topocl- Messages : 8533
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Re: Javier Cercas
Le Mobile
Ce roman de jeunesse de Javier Cercas n'a pas l'ambition de ses oeuvres récentes, mais cet exercice de style met déjà en lumière ses interrogations et obsessions. Il s'attache ici à suivre la figure d'un apprenti écrivain, qui s'inspire pour ce qui doit être son premier roman de la personnalité de ses voisins d'immeuble afin de composer une trame romanesque...sauf que son imagination semble peu à peu se confondre avec la réalité jusqu'à atteindre une impasse.
Par sa brièveté, Le Mobile résonne comme un miroir et une parenthèse pour Cercas, avec les débuts d'une réflexion sur la portée et la fragilité de l'acte de création.
Avadoro- Messages : 1405
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Re: Javier Cercas
Le mobile
C'est un court roman qui offre une espèce de suspense à la Hitchcock , avec un romancier dans le roman, manipulateur magistral de personnages dont on ne sait plus trop s'ils sont dans la réalité ou l'objet de la création de l'écrivain. Un texte à la sobriété clinique et qui finit par se mordre la queue (et en cela il faut souligner, une fois n'est pas coutume, l'excellente couverture).
Il s'agit d'un texte de jeunesse que Javier Cercas a ressorti de ses cartons et cela incite à une certaine indulgence. On y trouve trouve des réminiscences de Flaubert, Dostoïevski, Perec, mais l'auteur n'est pas encore de taille à égaler ses maîtres. Eu égard à sa jeunesse, on s'attachera plus au brio de la construction, qu'au côté désincarné des protagonistes et à la prévisibilité de l'intrigue.
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Etre dans le vent, c'est l'histoire d'une feuille morte.
Flore Vasseur
topocl- Messages : 8533
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Re: Javier Cercas
Ecrire la vérité vraie de celle d'un imposteur qui fut pendant des décennies sous les feux des projecteurs : d'abord dans ses rôles successifs d'antifranquiste admiré , militant anarcho-syndicaliste, parangon incontestable de l'homme héroique dans tous ses combats , mais surtout comme porte-parole des survivants espagnols de l'Holocauste ,
Ecrire la vérité par souci de rendre justice aux vraies victimes de L'holocauste ? Ecrire la vérité pour tenter de réhabiliter un homme peut-être pas si monstrueux que cela après tout ? Ecrire la vérité pour satisfaire son petit ego d'écrivain qui cherche LE sujet de son chef d'oeuvre , écrire la vérité pour rendre justice ? Et si au final il ne s'agissait pas plutôt de tuer l'imposteur pour permettre à l'homme vrai de renaitre , une écriture salvatrice en quelque sorte ?
Mais où se situe la vérité finalement ? Un roman fictif est -il moins vrai qu'un roman qui soit disant écrit la vérité ? Et pourquoi les romans fictions ont -ils autant de succès ? N'est-ce pas que ceux -ci mettent en lumière la vérité à travers une forme de mensonge ? Et toi Javier qui es-tu pour chercher à écrire l'impossible , quelle est ta légitimité dans cette histoire ? Mais est-ce la vérité que tu veux écrire ?
Tâche ardue car l'homme est complexe : Marco , l'imposteur est incernable . Et c'est bien ce qui aiguise la plume de Javier Cercas ! Décrivant avec une précision de détective ce que furent ces mois , ces années son travail de quête d'informations pour reécrire l'histoire de Marco , celle qui se cache derrière tous ses artifices et ses rôles de fieffé roublard , le vrai Marco . Au risque de .... perdre son âme comme Truman Capote après la publication de son "De sang-froid" .
Il est malin Javier Cercas : A travers cet histoire d'imposture Marco ne sera pas le seul sur la sellete . Pour qu'il y ait imposture , il faut aussi un contexte social ( y aurait -il mensonge en dehors du regard d'autrui ? Un Homme seul sur île déserte pourrait-il être un imposteur ? ) et ce contexte là ne serait pas si innocent que ça après tout puisque il a donné vie à cette imposture . Et puis , si on y regarde de plus près , ce Marco n'aurait il pas tout simplement exacerbé les petits mensonges de monsieur tout le monde , juste pour oublier qu'il n'est qu'un monsieur tout le monde , qui tente de survivre dans cette Espagne de terreur . En somme ne serait-il pas le petit menteur qui se cache en chacun de nous , juste un ...."gros poilique " exacerbé ? Et finalement L'industrie de la mémoire n'a t-elle induit le comportement de cet homme car n'est-il pas vrai que ce "devoir de mémoire" a été rattrapé par un phénomène presque "de mode" , ce qui reviendrait à dire que l'imposteur n'a que répondu à une demande inconsciente de la société du moment ?
Javier Cercas interroge Marco , , interroge l'histoire , interroge les souvenirs , interroge l'actualité et s'interroge lui et probablement le lecteur , ouvre des portes sans les refermer , et au final laissant chacun dans son libre-arbitre . Mensonge et vérité n'étant peut-être que des perceptions . Marco affabulateur invétéré mais au final peut-être plus sincère que l'opinion publique , Marco génial manipulateur sans scrupules à l'ego démesuré ou Marco victime de l'histoire de son pays qui n'a pu trouver d'autres moyens de survivre que de se réfugier dans un personnage . Javier Cercas écrivain lui aussi génial ou simplement petit bourgeois qui cherche à se donner une bonne conscience ?
Et voilà on pourrait en écrire des tartines , le sujet est sans limites mais Javier Cercas sait le faire mieux que moi !
Com rapatrié
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Dernière édition par églantine le Mar 8 Aoû - 21:38, édité 1 fois
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Re: Javier Cercas
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« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
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Re: Javier Cercas
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Re: Javier Cercas
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Flore Vasseur
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Re: Javier Cercas
Oui.. je lisais tout à l'heure ce que tu avais extrait de ta lecture récente d'Umberto Eco. Ca se prête peu à commentaire, du moins dans ce cadre.Tristram a écrit:(Les soldats de Salamine pour commencer ?)
Mais quand je lis: nous rencontrons souvent notre destin tout simplement parce que nous pensons notre monde comme les personnages de fiction pensent le leur., je pense que Cercas adhèrerait .
Cercas, ce n'est pas de la fiction. C'est plus un chemin, je dirais ( je n'ai pas lu les derniers) ,pour dire en mots ce qui motive les humains, ce qui les fait bouger, agir, en fonction de certaines circonstances??
Bon, manifestez vous, les pas d'accord, c'est en tout cas un écrivain contemporain très intéressant qu'il faut lire, à mon sens au début de ce chemin.
Dernière édition par Marie le Mar 8 Aoû - 21:58, édité 1 fois
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Re: Javier Cercas
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