Joseph Kessel
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Joseph Kessel
Joseph Kessel
(1898-1979)
(1898-1979)
source : WikipédiaBiographie a écrit:Joseph Kessel est le fils de Samuel Kessel, médecin juif d’origine lituanienne et de Raïssa Lesk, d'une famille juive établie en Russie.
Samuel Kessel obtient son doctorat à Montpeller. La famille s'installe un temps en Argentine (où naît Joseph), avant de revenir en Russie, puis en France. Joseph fait ses études à Nice puis au lycée Louis-le-Grand à Paris. Tenté un temps par le théâtre, il fait quelques apparitions sur la scène de l’Odéon. Il obtient sa licence de lettres en 1915 et se trouve engagé, à dix-sept ans, au Journal des débats, dans le service de politique étrangère.
En 1916, il s’enrôle comme engagé volontaire, dans l’artillerie puis dans l’aviation. De cet épisode, il tirera plus tard le sujet de son premier grand succès, L’Équipage. Il se marie avec Nadia-Alexandra Polizu-Michsunesti en 1921 (elle décédera en 1928).
Avec Georges Suarez et Horace de Carbuccia, il fonde en 1928 un hebdomadaire politique et littéraire, le Gringoire. Romain Gary y publie deux nouvelles, mais renonce à y envoyer ses écrits lorsque le journal affiche des idées fascistes et antisémites.
Joseph Kessel rencontre Catherine Gangardt avec qui il se marie en 1939 mais dont il divorcera ensuite.
Correspondant de guerre à Paris-soir pendant la guerre d'Espagne, puis durant la drôle de guerre, il rejoint après la défaite la Résistance au sein du réseau Carte, avec son neveu et ami Maurice Druon. Ensemble, ils franchissent clandestinement les Pyrénées pour gagner Londres et s’engager dans les Forces aériennes françaises libres. C'est également ensemble qu'en mai 1943, dans l'enceinte d'un pub de la banlieue de Londres, ils composent les paroles françaises du « Chant des Partisans » qui deviendra le chant de ralliement de la Résistance. Kessel écrit L'Armée des ombres, en hommage à ces combattants. Il finit la guerre capitaine d’aviation dans une escadrille qui, la nuit, survole la France pour maintenir les liaisons avec la Résistance.
À la Libération, il reprend son activité de grand reporter à France-soir, et assiste au procès du maréchal Pétain, puis au procès de Nuremberg. Il voyage en Palestine, et reçoit le premier visa du tout nouvel État d'Israël. Il continue ses voyages, et l'Afghanistan lui inspire son chef-d’œuvre romanesque, Les Cavaliers (1967).
En 1949, il se marie avec Michèle O'Brien, rencontrée à Londres en 1944, et qui devait par la suite sombrer dans une dépendance à l'alcool qui incita Kessel à s'intéresser aux Alcooliques anonymes et aux méthodes de traitement.
En 1950 paraît Le Tour du malheur. Cette fresque épique en 4 volumes, que l'auteur mit vingt ans à mûrir, contient de nombreux éléments de sa vie personnelle et occupe une place à part au sein de son œuvre.
Consécration ultime pour ce fils d’émigrés juifs, Joseph Kessel est élu à l'Académie française en 1962, au premier tour de scrutin. Il tient à faire orner son épée d'académicien d'une étoile de David.
« Pour remplacer le compagnon dont le nom magnifique a résonné glorieusement pendant un millénaire dans les annales de la France, dont les ancêtres grands soldats, grands seigneurs, grands dignitaires, amis des princes et des rois, ont fait partie de son histoire d’une manière éclatante, pour le remplacer, qui avez-vous désigné ? Un Russe de naissance, et juif de surcroît. Un juif d’Europe orientale… vous avez marqué, par le contraste singulier de cette succession, que les origines d’un être humain n’ont rien à faire avec le jugement que l’on doit porter sur lui. De la sorte, messieurs, vous avez donné un nouvel et puissant appui à la foi obstinée et si belle de tous ceux qui, partout, tiennent leurs regards fixés sur les lumières de la France. »
François Mauriac lui rend hommage dans son Bloc-notes : « Il est de ces êtres à qui tout excès aura été permis, et d’abord dans la témérité du soldat et du résistant, et qui aura gagné l’univers sans avoir perdu son âme. »
Il meurt d'une rupture d'anévrisme le 23 juillet 1979, à l'âge de 81 ans, quelques mois avant son épouse Michèle.
Bibliographie :
- Pour accéder à la bibliographie de cet écrivain prolifique, cliquer ici:
- Romans
La Steppe rouge, Gallimard, 1922
L'Équipage, Gallimard, 1923 (nouvelle édition en 1969)
Vent de sable, Gallimard, 1929
Au camp des vaincus, ou la Critique du 11 mai, Gallimard, 1924 (avec Georges Suarez)
Rencontre au restaurant, À l'Enseigne de la Porte Étroite, 1925
Les Rois aveugles, Les Éditions de France, 1925
Mary de Cork, Gallimard, 1925
Mémoires d'un commissaire du peuple, Champion, 1925
Le Triplace, Marcelle Lessage, 1926
Makhno et sa Juive, EOS, 1926
Moisson d'octobre, La Cité des livres, 1926
Les Captifs, Gallimard (Grand prix du roman de l'Académie française), 1926
Le Thé du capitaine Sogoub, Au Sans Pareil, 1926
Naki le kourouma, 1926
Terre d'amour, Les Éditions de France, 1927
Nuits de princes, Les Éditions de France, 1927
La Rage au ventre, EOS, 1927
La Coupe fêlée. Un drôle de Noël, éditions Lemarget, 1929
En Syrie, Simon Kra, 1927
De la rue de Rome au chemin de Paradis, Les Editions du Cadran, 1927
La Femme de maison ou Mariette au désert, Simon Kra, 1928
Littérature rouge, Société de conférences de la Principauté de Monaco, 1927
Dames de Californie, Émile Hazan, 1928
Belle de jour, Gallimard, 1928
Les Nuits de Sibérie, Flammarion, 1928 : Page 1
La Règle de l'homme, Gallimard, 1928
Secrets parisiens, Éditions des Cahiers Libres, 1928
Le Coup de grâce, Les Éditions de France, 1931
De la rue de Rome au chemin de Paradis, Editions du Cadran, 1931
Fortune carrée, Les Éditions de France, 1932
Bas-fonds, Éditions des Portiques, 1932
Wagon-lit, Gallimard, 1932
Nuits de Montmartre, Les Éditions de France, 1932
Les Nuits cruelles, Les Éditions de France, 1932
Marchés d'esclaves, Les Éditions de France, 1933
Les Cœurs purs, Gallimard, 1934
Les Enfants de la chance, Gallimard, 1934
Stavisky, l'homme que j'ai connu, Gallimard, 1934
Le Repos de l'équipage, Gallimard, 1935
Une balle perdue, Les Éditions de France, 1935
Hollywood, ville mirage, Gallimard, 1936
La Passante du Sans-Souci, Gallimard, 1936
La Rose de Java, Gallimard, 1937
Comment est mort le maréchal Pétain, France Forever, Executive office, 1942
L'Armée des ombres, Charlot, 1943
Les Maudru, Julliard-Séquana, 1945
Le Bataillon du ciel, Julliard, 1947
Le Tour du malheur, Gallimard, 1950
La Fontaine Médicis
L'Affaire Bernan
Les Lauriers roses
L'Homme de plâtre
La Rage au ventre, La nouvelle société d'édition, 1950
La Nagaïka. Trois récits, Julliard, 1951
Le Procès des enfants perdus, Julliard, 1951
Au Grand Socco, Gallimard, 1952
Les Amants du Tage, Éditions du Milieu du monde, 1954
La Piste fauve, Gallimard, 1954
La Vallée des rubis, Gallimard, 1955
Témoin parmi les hommes, Del Duca, 1956 et Presses d'aujourd'hui, 1974 (illustrations de Richard de Prémare)
Le Temps de l'espérance
Les Jours de l'aventure
L'Heure des châtiments
La Nouvelle Saison
Le Jeu du Roi
Les Instants de vérité
La Petite Démente, Gallimard, 1958
Le Lion, Gallimard, 1958 ; Page 2
Les Mains du miracle, Folio , 1960
Inde, péninsule des dieux, Hachette, 1960
Tous n'étaient pas des anges, Plon, 1963
Pour l'honneur, Plon, 1964
Nuits de Prince, Éditions Lidis, 1965 (illustrations de Gabriel Zendel)
Les Cavaliers, Gallimard, 1967 : Page 1
Un mur à Jérusalem, Éditions Premières, 1968
Les Fils de l'impossible, Plon, 1970
Des hommes, Gallimard, 1972
Le Petit Âne blanc, Gallimard, 1975
Les Temps sauvages, Gallimard, 1975
Jugements derniers, Christian de Bartillat, 1995
Autres publications
Nouveaux contes. Le tocsin de pâques - Le typhique - Un tour du diable - Le commissaire de la mort - La loi des montagnes.1928
Mermoz, 1939
Paroles du Chant des partisans, avec son neveu Maurice Druon en 1943
Hong-Kong et Macao 1957 ; Page 1
Avec les Alcooliques Anonymes 1960 ; Page 2
Les Mains du miracle, 1960 (biographie de Felix Kersten) : Page 1
Israël que j'aime 1967
Terre d'amour et de feu. Israël 1925-1961 1965
Il pleut des étoiles…Portraits de Stars de cinéma 2003
Ami entends-tu… 2006.
Première Guerre mondiale, recueil de textes inédits 2017
màj le 13/05/2021
Hanta- Messages : 1596
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Age : 36
Re: Joseph Kessel
Les nuits de Sibérie
J'ai adoré ! Vraiment !
C'est un court récit, celui d'une journée et d'une nuit, d'un officier français dans le port perdu de Vladivostok peu après la Révolution Bolchévique.
Narré à la première personne s'adressant au lecteur ou un personnage connu du héros, nous déambulons dans cette ville alcoolisée, sale, lugubre, aux filles faciles et au pouvoir corrompu où toutes les armées se jaugent et se soûlent.
Les russes dans tout cela vaquent à leurs crimes, leurs trafics, leur prostitution tentant de prendre l'argent qui n'est plus à personne puisqu'il serait à tout le monde.
On y comprend le désespoir et l'agonie, nous nous prenons de pitié pour cette perdition géographique et culturelle, sans aucun repère, sans aucun fondement.
Le style est fluide, riche, il contraste par sa netteté avec la souillure de la ville décrite. C'est laconique et tranchant, mélancolique et attristé.
Nous aimerions que l'histoire soit plus longue, mais la gradation de la violence, et la vacuité des destins de la ville nous laissent à penser que tout a été dit.
mots-clés : #violence #voyage
Hanta- Messages : 1596
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Age : 36
Re: Joseph Kessel
ça donne envie !
J'ai un souvenir trop lointain de Belle de jour pour en parler, mais agréable.
J'ai un souvenir trop lointain de Belle de jour pour en parler, mais agréable.
Invité- Invité
Re: Joseph Kessel
Ah! Kessel! un jour il faudra que j'y passe: M topocl m'en tanne les oreilles depuis des années...
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Flore Vasseur
topocl- Messages : 8414
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Localisation : Roanne
Re: Joseph Kessel
quatrième de couverture a écrit:Kessel a situé en Afghanistan une des aventures les plus belles et les plus féroces qu'il nous ait contées.
Les personnages atteignent une dimension épique : Ouroz et sa longue marche au bout de l'enfer... Le grand Toursène fidèle à sa légende de tchopendoz toujours victorieux... Mokkhi, le bon sais, au destin inversé par la haine et la découverte de la femme... Zéré qui dans l'humiliation efface les souillures d'une misère qui date de l'origine des temps... Et puis l'inoubliable Guardi Guedj, le conteur centenaire à qui son peuple a donné le plus beau des noms : "Aïeul de tout le monde"... Enfin, Jehol "le Cheval Fou", dont la présence tutélaire et "humaine" plane sur cette chanson de geste...
Ils sont de chair les héros des Cavaliers, avec leurs sentiments abrupts et primitifs. Et pourtant le souffle de la fable et du mythe les anime et nourrit le roman.
C'est rassurant de constater en cherchant deux petites choses pour préparer ce message et en relisant la présentation de l'auteur que ce livre est considéré comme un chef d'œuvre. Dans le cas contraire il aurait fallu revoir beaucoup d'écrits à la baisse.
C'est une des lectures qui donnent toute la démesure de cet acte qu'est la lecture, toute la force imposée par une œuvre qui prend le pas sur nos émotions et notre réalité de l'instant, c'est un transport fulgurant et intense... et l'épopée, incroyable, étourdissante dans des paysages d'un grandiose magique ne serait pas grand chose, si elle se bornait au presque documentaire, à l'histoire racontée...
Le conte de Kessel rend honneur aux deux objets qui sont peut-être l'âme profonde du conte, l'amour de l'histoire et l'homme, la relation conflictuelle qu'il entretient avec lui-même. Peu d'histoires vous emporteront aussi loin ou vous laisseront frémissant et exténués dans l'attente de la suite, peu d'histoires aussi vous émerveillerons par ses richesses les plus grandes et les plus pauvres. Et peu de conteurs auront le talent et la sagesse de l'auteur pour vous parler des hommes de cette manière. Ouroz champion frustré de bouzkachi est blessé, il partira alors pour un long et périlleux voyage vers lui-même et vers son père. Son père, Toursène, ancien champion, apprend la vieillesse et fait un voyage immobile vers son fils.... d'autres cheminent jusqu'au plus ancien, l'Aïeul de tout le monde, Guardi Guedj, le conteur.
Kessel réussit à faire accepter, et ressentir, le tourment de ces hommes fières, il réussit à rendre attachant Ouroz, suprêmement orgueilleux et même mauvais... même son saïs (palfrenier) et ami, le grand et fort Mokkhi au cœur d'or, tournera mal... la grandeur du conte n'empêche pas d'aller loin dans la noirceur, lucide... c'est étonnamment vivant, émouvant, remuant, haletant. Se mêlent conditions et obligations sociales, fierté, conduite, envie et faiblesse... les choses ne sont pas sans raisons les bonnes comme les mauvaises et dans toute l'aura du conte, du déchirement entre le bien et le mal, les choses ne sont pas si claires et les conclusions rarement définitives. C'est d'une grande humanité, bien observée, et exposée avec une certaine réserve. On garde tout dans un dangereux équilibre, le réel et la tradition comme le progrès vers une humanité plus grande, c'est magnifique tout simplement, quelque soit l'âge du personnage observé.
Et de quelle manière la réalité se mêle de fantastique dans une juste intensité du récit...
Une incroyable découverte, un choc. Un beau roman sur les tourments de l'homme et sur le rapport père-fils. Les femmes sont présentes aussi, en retrait, beaucoup, reflet du pays, et Zéré la "petite nomade" n'a pas vraiment un très beau rôle... mais elles sont présentes dans leur fascination et aussi dans le rapport de l'homme à sa condition.
580 pages extraordinaires. une preuve supplémentaire que la beauté et la puissance ne sont pas contraires de la sensibilité et de la sagesse.
Je n'en dis pas assez sur le coeur et l'âme de la chose, je ne pourrai pas et ça ne servirai pas à grand chose. Pensez à votre orgueil, votre fierté... votre besoin de vous sentir vous mêmes, d'acceptation et à ces paysages hors du monde, de plateaux, de steppes et de montagnes... et lisez ce livre, même si il a l'air un peu épais et différent de lectures plus actuelles, c'est un Livre à lire.
(pied rapatrié).
mots-clés : #aventure #initiatique #sports #voyage
Dernière édition par animal le Mar 12 Juin - 21:36, édité 1 fois
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Re: Joseph Kessel
Tu es décidément un fameux promoteur, Animal... un vrai danger pour l'équilibre déjà précaire de mes PAL... j'ai une vieille paire de tongs dépareillées à céder : c'est combien ta commission ?
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Tristram- Messages : 15609
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Re: Joseph Kessel
Deux grandes tiges de bambou frais, mais compte tenu de l'éloignement j'accepte aussi les citations.
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Re: Joseph Kessel
Peut-être qu'une fois de plus l'union animal-M topocl va faire le larron...
C'est bien lui qui a écrit Les mains du miracle, aussi? je ne le vois pas dans la biblio ...
Et Le lion, quand même c'était quelque chose! Personne n'a lu Le lion?
C'est bien lui qui a écrit Les mains du miracle, aussi? je ne le vois pas dans la biblio ...
Et Le lion, quand même c'était quelque chose! Personne n'a lu Le lion?
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Flore Vasseur
topocl- Messages : 8414
Date d'inscription : 02/12/2016
Age : 64
Localisation : Roanne
Re: Joseph Kessel
Oui, Les Mains du miracle aussi (il est dans "autres publications"), et un commentaire à rapatrier ?
Héhé. Serait-il soupçonné de "bonhomme attitude" Kessel ?
Héhé. Serait-il soupçonné de "bonhomme attitude" Kessel ?
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Re: Joseph Kessel
Le lion bien sûr, si, Topocl. Et relu d'ailleurs moult fois.Un livre de chevet de mon enfance.
J ai Mermoz, de lui, en train. Faudra que je le finisse et en parle.
J ai Mermoz, de lui, en train. Faudra que je le finisse et en parle.
Nadine- Messages : 4832
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Re: Joseph Kessel
Les mains du miracle
La drôle d'histoire d'un des moments les moins drôles de l'histoire avec quelques uns des moins drôles des personnages possibles. Felix Kersten a été le médecin "personnel" de Heinrich Himmler, ministre de l'intérieur il est aussi chef des SS et de la Gestapo et dirige pour ainsi dire les camps de concentration.
Felix Kersten de son côté a un parcours atypique. Né en Estonie, devenu Finlandais après la première guerre, mettant fin à un parcours hésitant il se tourne vers le massage traditionnel avant d'aller se perfectionner à Berlin où il vit de petits boulots en parallèle de son apprentissage. Il fera ensuite la rencontre du Dr Kô qui lui a appris au Tibet et lui transmettra son savoir et sa clientèle...
La renommée venue et aidant il est sollicité par des personnalités influentes avant de tomber sur Himmler, ce qui ne l'enchante guère mais.
Et l'essentiel du livre est dans ce qui suit. Dans les terribles années de la deuxième guerre mondiale, années de déportation et de génocide le livre déroule la relation entre le malade qui souffre de terribles crampes d'estomac et son médecin qui négocie inlassablement des anomalies dans l'implacable machinerie. Une relation de confiance ambiguë qui repose sur la douleur et sur la peur et débouche sur des faits incroyables, absolument surréalistes.
J'ai été un peu frustré par le style "documentaire" (c'est ce qui est indiqué sur la couverture de toute façon) et il y a un phénomène de répétition au fur et à mesure de cette relation mais c'est dingue. La toute petitesse d'hommes aux pouvoirs effrayants et tant d'impensable qui tient à si peu de choses. Kersten a sauvé des amis, des amis d'amis avant de réussir à sauver des milliers de vie. Le tout en étant paradoxalement au cœur du secret et à distance, favorisé par les avantages accordés par son patient dévoué.
A la fois concret et schématique, déroutant, étonnant, très étonnant quand on n'a pas prêté plus qu'une oreille distante à cette petite partie de l'histoire, c'est un peu rapide, brusque mais dingue. Et très factuel, donc le voyage dans l'envers de l'histoire est perturbant.
Perturbant aussi de penser que cela représente peu d'années mais que tant de choses, de drames et de renversement ont pu s'y dérouler.
On peut aussi râler à propos de l'insistance sur l'opposition physique entre le gros docteur débonnaire et son malade chétif se rêvant athlète et quelques autres chimères de l'imaginaire nazi, sur les femmes reléguées à la toile de fond utilitaire qui consiste au mieux à tenir la maison avec attention mais l'essentiel du livre se situe malgré tout ailleurs. Dans l'inimaginable du fait anormal, du grain de sable fruit de la patience et de l'obstination, une détermination improvisée et réinventée constamment pour sauver des vies et dépasser un mensonge permanent.
En forme de lecture ce n'est pas le gros pied mais c'est tellement gros, et grand, que ça serait dommage de se priver de 300 petites pages comme ça.
(Récup').
mots-clés : #campsconcentration #deuxiemeguerre #documentaire #historique
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Re: Joseph Kessel
Les mains du miracle
Animal l'a expliqué, Felix Kersten, masseur épicurien initié aux mystères de la médecine chinoise, est introduit bien malgré lui au côté de Himmler cet implacable salaud, qui s'avère le pire des hypocondriaques. S'immisçant progressivement dans l'intimité affective et intellectuelle du bourreau, il fait donc, avec ses mains, des miracles, chassant douleurs et malaises . Et avec sa tête d'autres miracles dans une manipulation de moins en moins prudente, de plus en plus ambitieuse et de plus en plus fructueuse, sauvant une, puis quelques unes, puis d'innombrables victimes (des milliers) de l'oppression nazie.
Il faut passer vite sur le style basiquement journalistique et ce que cela implique de descriptions répétitivement plaquées, d'emportements pathétiques, de dialogues nuisant à toute subtilité, ce côté conventionnel et hagiographique.
On peut par contre s'interroger sur l'absence absolue de sources citées, et sans remettre en cause l'ensemble du récit, se demander sur quels détails Kessel a été (ou non) tout aussi manipulé que le Reichsführer.
Mais finalement qu'importe : c’est une aventure extra-ordinaire, palpitante, inouïe, qui arrive à tenir son suspense alors qu'on en connaît la fin. Un de ces trucs, comme on dit, qui réconcilient avec le genre humain (sauf que évidemment, Kertsen, ce n'est pas un prototype représentatif du genre humain.
Animal l'a expliqué, Felix Kersten, masseur épicurien initié aux mystères de la médecine chinoise, est introduit bien malgré lui au côté de Himmler cet implacable salaud, qui s'avère le pire des hypocondriaques. S'immisçant progressivement dans l'intimité affective et intellectuelle du bourreau, il fait donc, avec ses mains, des miracles, chassant douleurs et malaises . Et avec sa tête d'autres miracles dans une manipulation de moins en moins prudente, de plus en plus ambitieuse et de plus en plus fructueuse, sauvant une, puis quelques unes, puis d'innombrables victimes (des milliers) de l'oppression nazie.
Il faut passer vite sur le style basiquement journalistique et ce que cela implique de descriptions répétitivement plaquées, d'emportements pathétiques, de dialogues nuisant à toute subtilité, ce côté conventionnel et hagiographique.
On peut par contre s'interroger sur l'absence absolue de sources citées, et sans remettre en cause l'ensemble du récit, se demander sur quels détails Kessel a été (ou non) tout aussi manipulé que le Reichsführer.
Mais finalement qu'importe : c’est une aventure extra-ordinaire, palpitante, inouïe, qui arrive à tenir son suspense alors qu'on en connaît la fin. Un de ces trucs, comme on dit, qui réconcilient avec le genre humain (sauf que évidemment, Kertsen, ce n'est pas un prototype représentatif du genre humain.
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Flore Vasseur
topocl- Messages : 8414
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Localisation : Roanne
Re: Joseph Kessel
Les Cavaliers
Malgré une certaine invraisemblance un peu artificielle dans l’agencement romanesque et qui m’a vaguement gêné au début, j’ai rapidement été emporté par le souffle épique de cette histoire qui dépasse la peinture, pourtant fort impressionnante, de l’Afghanistan, de l’Hindou Kouch à la steppe ouzbèke.
Les personnages sont fouillés (comme Guardi Guedj le conteur, « aïeul de tout le monde », à la fois stéréotype et incarnation magistrale), les péripéties soigneusement élaborées, les descriptions travaillées, et surtout les passions complexes, comme lorsque Ouroz le tchopendoz, blessé dans sa fierté comme dans sa chair, fuyant sa honte, rejette l’aide de son loyal palefrenier, Mokkhi, en lui instillant le désir d’hériter de son superbe cheval, Jehol.
Le nœud de l’intrigue est le dépassement humain dans l’orgueil (le voyage d’Ouroz), et la (mythique) rivalité père-fils, ou l’amour filial/ paternel occulté/ refoulé comme sensiblerie. Cela est inséparable du contexte de cette société du cheval, intransigeante, âpre et violente, mais aussi courageuse jusqu’à l’héroïsme, misérable mais hospitalière et opposée à la cupidité, éprise de gloire et de liberté.
Au formidable se mêle une part de merveilleux, mais la lutte de l’homme (et des animaux, par transposition) dans la nature grandiose est le centre du roman ; elle fait une lecture intense et profondément humaine d’un livre d’images : les grands Bouddhas de Bamiyan, le combat des béliers, l’amputation à vif, la crasse des tcharpaïs des tchaïkhanas (sommiers des maisons de thé rudimentaires, le long des pistes)…
Ce roman participe des livres d’aventure qui font rêver les enfants, de Michel Strogoff à Kipling (voire Malraux, Hemingway !), et donne grande envie de chevauchées solitaires dans l’immensité des absinthes, de palao kabouli bien graissé de mouton… on s’y voit…
Le jeu du bouzkachi fait penser à la désignation du bouc émissaire :
Malgré une certaine invraisemblance un peu artificielle dans l’agencement romanesque et qui m’a vaguement gêné au début, j’ai rapidement été emporté par le souffle épique de cette histoire qui dépasse la peinture, pourtant fort impressionnante, de l’Afghanistan, de l’Hindou Kouch à la steppe ouzbèke.
Les personnages sont fouillés (comme Guardi Guedj le conteur, « aïeul de tout le monde », à la fois stéréotype et incarnation magistrale), les péripéties soigneusement élaborées, les descriptions travaillées, et surtout les passions complexes, comme lorsque Ouroz le tchopendoz, blessé dans sa fierté comme dans sa chair, fuyant sa honte, rejette l’aide de son loyal palefrenier, Mokkhi, en lui instillant le désir d’hériter de son superbe cheval, Jehol.
Le nœud de l’intrigue est le dépassement humain dans l’orgueil (le voyage d’Ouroz), et la (mythique) rivalité père-fils, ou l’amour filial/ paternel occulté/ refoulé comme sensiblerie. Cela est inséparable du contexte de cette société du cheval, intransigeante, âpre et violente, mais aussi courageuse jusqu’à l’héroïsme, misérable mais hospitalière et opposée à la cupidité, éprise de gloire et de liberté.
Au formidable se mêle une part de merveilleux, mais la lutte de l’homme (et des animaux, par transposition) dans la nature grandiose est le centre du roman ; elle fait une lecture intense et profondément humaine d’un livre d’images : les grands Bouddhas de Bamiyan, le combat des béliers, l’amputation à vif, la crasse des tcharpaïs des tchaïkhanas (sommiers des maisons de thé rudimentaires, le long des pistes)…
Ce roman participe des livres d’aventure qui font rêver les enfants, de Michel Strogoff à Kipling (voire Malraux, Hemingway !), et donne grande envie de chevauchées solitaires dans l’immensité des absinthes, de palao kabouli bien graissé de mouton… on s’y voit…
Le jeu du bouzkachi fait penser à la désignation du bouc émissaire :
« Or, voici le jeu, dit Guardi Guedj. On choisit dans le troupeau un bouc. On l'égorge. On lui tranche la tête. »
« ‒ S'il n'est pas de mortel qui ait le droit de dire "toujours", il n'en est pas davantage qui puisse dire "jamais". »
« Mais il savait aussi, le vieux Toursène, que le droit à l'empressement, aux marques de respect, ne signifiait puissance et majesté réelles qu'à une seule condition : pouvoir s'en passer. »
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« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
Tristram- Messages : 15609
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Re: Joseph Kessel
De quoi raviver les souvenirs de lecture
Je suis très content que ça t'ait plu.
Je suis très content que ça t'ait plu.
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Re: Joseph Kessel
Dans le genre, c'est magistral !
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« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
Tristram- Messages : 15609
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Localisation : Guyane
Re: Joseph Kessel
Oui, il y a un souffle phénoménal. Je suis très friand de ce genre de plaisir narratif...
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Re: Joseph Kessel
Hong-Kong et Macao
Récit d'un séjour effectué en 1955 par Kessel dans ces ultimes vestiges occidentaux subsistant dans l'Empire du milieu. La période était particulièrement intéressante : d'un côté, la vaste Chine depuis peu sous l'emprise de Mao ; de l'autre, ces territoires anglais (Hong-Kong) et portugais (Macao) où règnent la démesure et un libéralisme effréné. Là également sont venus se réfugier les notables de la Chine et les débris de l'armée de Tchang-Kaï-Chek.
Le récit vaut surtout par ce côté daté. L'auteur narre différentes anecdotes qui montrent les extrêmes contrastes qui règnent dans ces lieux à cette époque. Nous suivons ainsi l'ascension sociale du fondateur du fameux "Baume du tigre", le destin d'une femme chinoise qui sélectionne ses amants occidentaux pour avoir de "beaux bébés" et pouvoir les vendre. Kessel nous entraîne également dans les faubourgs sordides de Kowloon où se tapissent quelques tripots et fumeries clandestines d'opium.
Le dernier chapitre consacré aux enfants mendiants d'Asie est très touchant :
J'ai eu un peu de difficultés avec le style que j'ai trouvé parfois d'un lyrisme un peu appuyé. Je préfère pour ma part le ton plus sec et journalistique d'Albert Londres, mais c'est une question de goût. Je continuerai avec Kessel.
mots-clés : #documentaire #voyage
Récit d'un séjour effectué en 1955 par Kessel dans ces ultimes vestiges occidentaux subsistant dans l'Empire du milieu. La période était particulièrement intéressante : d'un côté, la vaste Chine depuis peu sous l'emprise de Mao ; de l'autre, ces territoires anglais (Hong-Kong) et portugais (Macao) où règnent la démesure et un libéralisme effréné. Là également sont venus se réfugier les notables de la Chine et les débris de l'armée de Tchang-Kaï-Chek.
Le récit vaut surtout par ce côté daté. L'auteur narre différentes anecdotes qui montrent les extrêmes contrastes qui règnent dans ces lieux à cette époque. Nous suivons ainsi l'ascension sociale du fondateur du fameux "Baume du tigre", le destin d'une femme chinoise qui sélectionne ses amants occidentaux pour avoir de "beaux bébés" et pouvoir les vendre. Kessel nous entraîne également dans les faubourgs sordides de Kowloon où se tapissent quelques tripots et fumeries clandestines d'opium.
Le dernier chapitre consacré aux enfants mendiants d'Asie est très touchant :
Je mis quelques pièces dans cette main qui se referma inconsciemment, innocemment, comme une fleur blessée.
Je pensais alors à ce que Dostoïevski faisait dire à l'un de ses personnages damnés :
- Tant qu'il y aura au monde un enfant, un seul enfant malheureux, je ne pourrai pas croire à Dieu...
Et, regardant la petite fille de Macao, j'ajoutai intérieurement :
- Encore moins aux hommes.
J'ai eu un peu de difficultés avec le style que j'ai trouvé parfois d'un lyrisme un peu appuyé. Je préfère pour ma part le ton plus sec et journalistique d'Albert Londres, mais c'est une question de goût. Je continuerai avec Kessel.
mots-clés : #documentaire #voyage
ArenSor- Messages : 3372
Date d'inscription : 02/12/2016
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Re: Joseph Kessel
Il est sur ma PAL, celui-ci. Je le ressors régulièrement, son tour va bien finir par arriver !
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"Et au plus eslevé trone du monde, si ne sommes assis, que sus notre cul." (Michel de Montaigne)
Armor- Messages : 4589
Date d'inscription : 02/12/2016
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Re: Joseph Kessel
Idem. Cela dit, j'ai quand même énormément apprécié le seul livre que j'ai lu de Joseph Kessel : Avec les Alcooliques Anonymes. Une aventure humaine hors norme !ArenSor a écrit:J'ai eu un peu de difficultés avec le style que j'ai trouvé parfois d'un lyrisme un peu appuyé.
Louvaluna- Messages : 1678
Date d'inscription : 19/03/2017
Re: Joseph Kessel
merci Arensor ! j'ai plusieurs livres mais toujours le même dilemme entre l'envie et le temps
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Bédoulène- Messages : 21098
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