Expositions
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animal a écrit:Et le quatuor d'expos de peintures Italienne entre Chantilly, Amiens, Compiègne, Beauvais (si je ne me plante pas) ?
C'est une manifestation destinée à faire connaître les richesses de peintures italiennes conservées dans le domaine public en Picardie : musées et églises. Le titre "Heures italiennes" vient d'un ouvrage de Henry James dans lequel l'écrivain rassemblait des promenades effectuées dans différentes villes d'Italie. C'est effectivement l'esprit que les commissaires ont voulu donner à la manifestation : une déambulation dans la peinture italienne du 14e au 18e siècle, parcours non exhaustif car certains artistes ne sont pas représentés. La moisson s'est avérée tellement riche qu'il a fallu la répartir sur plusieurs sites :
Musée de Picardie, à Amiens : les Primitifs
Musée Condé à Chantilly : le 16e siècle
Beauvais : MUDO, Musée de l'Oise + galerie "Le Quadrilatère" : le 17e siècle
Compiègne, Château : le 18e siècle.
Les expositions d'Amiens et de Chantilly sont à présent terminées, celle de Compiègne s'achève fin juillet, celles de Beauvais se poursuivent jusqu'au 17 septembre.
Si vous voulez, je pourrais vous présenter plus en détail l'exposition de Beauvais consacrée au caravagisme et au Baroque. J'ai vu les autres présentations mais je n'ai pas pris de photos.
ArenSor- Messages : 3433
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Re: Expositions
Nadine- Messages : 4882
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Re: Expositions
Cézanne c'est tentant aussi mais le planning d'un weekend imaginaire d'expos se remplit bien vite...
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Re: Expositions
A la demande d’Animal et de Nadine, voici quelques impressions sur le volet 17e s. de l’exposition « Heures italiennes » présentée à Beauvais :
Le caravagisme (musée de l'Oise) et le Baroque (partage musée de l'Oise et une galerie de la ville, le "Quadrilatère", soit au total plus de 80 tableaux, mais je ne vous présenterai ici que quelques œuvres présentes au Musée.
Pour comprendre la révolution opérée par le peintre le Caravage à la fin du 16e et au début du 17e s. nous pouvons prendre appui sur le tableau de Morazzone « Résurrection de Lazare » qui présente encore de nombreuses caractéristiques du Maniérisme, le courant pictural dominant de la seconde moitié du 16e s :
- composition complexe avec point de vue vers le haut (tête du Christ) et vers le bas (Lazare)
- espace saturé (ici de personnages)
- élongation des corps (Christ)
- gamme de couleurs particulière (tons acides, roses pâles etc.)
- Poses contournées de certains personnages.
Maniérisme signifie « à la manière de », c’est-à-dire à la manière des deux grandes références picturales de l’époque : Raphaël et Michel-Ange. C’est bien ce dernier dont se revendique Morazonne avec le corps de Lazare qui évoque ceux du maître et surtout la position des mains du Christ et de Lazare proches l’une de l’autre sans se toucher comme dans la création d’Adam de la Sixtine. Morazonne connait bien ses classiques !
Les musées de Picardie n’ont pas la chance de posséder un tableau du Caravage. Ils ont toutefois une copie de la « Marie-Madeleine en extase », copie découverte par l’un des commissaires de l’exposition dans une réserve. Le tableau du Caravage est bien connu par les textes, mais on perd sa trace à la mort du peintre. Aujourd’hui plusieurs tableaux peuvent prétendre être l’original sans mettre tous les spécialistes d’accord…
Cette copie de la Marie-Madeleine du Caravage aide à comprendre combien le maître bouleverse les codes de représentation :
- cadrage serré sur le sujet et élimination des détails non signifiants
- réalisme de la représentation. La Marie-Madeleine, tête renversée en arrière, front plissé, yeux révulsés, bouche ouverte et bien la figure d’une femme en extase
- mise en scène théâtrale grâce à un jeu savant de clair-obscur
- Dans un camaïeu de gris, force de quelques couleurs vives. Ici, le rouge du manteau de la sainte qui peut évoquer la Passion, le sang du Christ etc.
Ajoutons que ce type de représentation est tout à fait conforme aux souhaits de l’Eglise qui a réaffirmé le culte aux images, insistant sur le réalisme des représentations, l’intérêt de toucher les fidèles par l’émotion et le recours aux figures de saints, intermédiaires privilégiés entre les hommes et le monde céleste.
Le Caravage n’a pas eu d’élèves. Mais son art a eu une résonnance extraordinaire sur la peinture européenne de la première moitié du 17e siècle, et même au-delà. De nombreux artistes ont repris des formules du maître en les adaptant à leur propre personnalité.
Ainsi Caroselli, peintre romain autodidacte dans ces deux scènes de genre.
Il s’agit de tableaux à but moralisateur.
Le 1er est sur le thème des couples mal assortis. En effet, nous voyons un couple d’âge mûr, la femme détourne le visage de l’homme attiré irrésistiblement par le décolleté avantageux de la jeune belle qui passe à côté.
Dans le 2e tableau, nous avons affaire à une scène de prostitution. Une femme âgée, coiffée d’un postiche qui masque ses cheveux gris, tenant un éventail devant la bouche pour dissimuler les quelques chicots qui lui reste est devant une entremetteuse lui présentant un jeune gigolo.
Ce sont des scènes de la vie quotidienne que les peintres caravagesques ont eu plaisir à représenter.
Ce soldat est encore anonyme. Il frappe par le côté rêveur, voire mélancolique de son expression. C’est une œuvre de très grande qualité avec un beau contraste entre certaines parties qui semblent inachevées comme le foulard autour du cou et la virtuosité du rendu des brillances sur l’armure.
La peinture italienne de l’époque aime représenter le martyr de saint Sébastien. A ceci deux raisons principales :
1) C’est l’occasion pour les artistes de représenter un corps nu, une longue tradition depuis la Renaissance.
2) Saint Sébastien est un saint anti-pesteux. En effet, depuis l’Antiquité on imagine la maladie comme une vengeance divine lancée par la divinité sous forme de flèches pour punir les hommes (cf. Iliade). La tradition a été reprise dans la religion catholique avec saint Sébastien qui a survécu aux flèches tirées par les bourreaux. Or la peste est une terrible réalité de l’époque. Celle qui s’est manifestée en 1630 dans le nord de l’Italie, à Parme et Venise notamment (cf « Les Fiancés » de Manzonni), a fait des ravages épouvantables.
Dans le beau tableau de Rustici, la source de lumière est présente, un flambeau tenu à la main par sainte Irène. Cela permet à l’artiste de faire de savants jeux de clair-obscur plus ou moins contrastés.
Le saint Sébastien de Galli est bien différent de celui de Rustici. Ici, l’artiste a recherché l’élégance des lignes, la belle arabesque des bras du saint ; le rendu est très plastique, caressant le corps, presque sensuel. Galli est un artiste connu que des spécialistes. Pourtant, on lui a attribué depuis peu la paternité du « Narcisse » qui était considéré auparavant comme un des grands chefs d’œuvre du Caravage ! Preuve que les suiveurs sont parfois à la hauteur des maîtres…
A Naples, le réalisme inspiré du Caravage a été poussé parfois très loin, à la limite de la caricature ou du grotesque.
Le Maître de l’Annonce aux bergers est toujours un anonyme bien qu’il possède un beau corpus d’œuvres.
Cette « Rencontre d’Abraham et de Melchisédech » est empreinte d’une profonde spiritualité, une humilité silencieuse. On a parfois effectué des rapprochements entre les tableaux de cet artiste et le jeune Velasquez. Rien d’étonnant, le royaume de Naples est alors une dépendance de l’Espagne !
Je pense aussi aux frères Le Nain en voyant cette scène, dans un autre genre.
Guiseppe Ribera est certainement le plus grand artiste peintre à Naples à cette époque. Né à Valence, il est parfois classé dans la peinture espagnole.
Son « Saint Jean-Baptiste avec l’Agneau » a un air un peu canaille. C’est là encore un héritage du Caravage qui a souvent joué sur l’ambigüité de figures d’adolescents.
Le musée a voulu reconstituer une galerie de portraits comme on en trouvait au 17e siècle dans les résidences des amateurs d’art. Le thème choisi est celui des philosophes, le lieu de création Naples.
Giordano, surnommé « Fa presto » en raison de sa vitesse d’exécution, est certainement le principal élève de Ribera. Il a eu un succès énorme à Naples et prolongera le caravagisme à une date tardive.
Il s’est représenté ici en philosophe. La devise écrite sur le parchemin peut se traduire : il faut mieux mourir avec ses amis que vivre avec ses ennemis…
Toujours de Giordano, cet autre philosophe. A noter la mouche posée sur sa joue et la chandelle éteinte derrière lui, deux signes de mort. En effet, ce vieillard est proche de la mort mais, plongé dans sa recherche, il ne s’en soucie guère.
Ces représentations de philosophes sont empreintes de stoïcisme. L’aspect peu avenant de ces philosophes, la simplicité de leur costume, font contraste avec la recherche de leur vie intérieure, simplicité de la vie réflexive face aux vanités du monde !
Encore Giordano, mais pour une scène de genre : un joueur de luth à la trogne bien rouge, aux vêtements très simples, probablement un musicien de taverne : réalisme poussé à la limite de la caricature.
Je termine avec un saint Jérôme peint par de Sommer, un artiste originaire des Pays-Bas qui s’est installé à Naples. On retrouve là le même esprit que dans les représentations de philosophes : richesse de la vie intérieure qui entre en contraste avec le délabrement du corps, chairs flasques, maigreur des bras…
Désolé si le ton peu paraître un peu professoral. J'ai pensé que cette peinture n'étai pas toujours facile d'accès et j'ai essayé de vous fournir quelques clefs
ArenSor- Messages : 3433
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topocl- Messages : 8552
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Tristram- Messages : 15950
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Re: Expositions
topocl a écrit:C'est dommage que ça se "perde" sur le fil expositions, non?
Je plussoie, c'est très intéressant, Arensor. Accepterais-tu que l'on crée un fil spécial pour cette expo ?
Armor- Messages : 4589
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Chamaco- Messages : 4526
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Merci pour cette générosité !
églantine- Messages : 4431
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Nadine- Messages : 4882
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Bédoulène- Messages : 21711
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Re: Expositions
Tant pis pour vous, je vous poste prochainement le second volet consacré au Baroque.
ArenSor- Messages : 3433
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Chamaco- Messages : 4526
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Re: Expositions
Je suis également allé au musée Granet, avec une expo qui vaut le détour, essentiellement art moderne.
Invité- Invité
Re: Expositions
"PROLONGATION DE L'EXPOSITION UNE PASSION DANS LE DÉSERT"
"L'exposition présentée à la maison de Balzac est prolongée jusqu'au 1er octobre 2017.
La satisfaction, l’étonnement et l’enthousiasme exprimés par la plupart des visiteurs d’Une passion dans le désert, un roman, une exposition, ont conduit la Maison de Balzac à la prolonger jusqu’au 1er octobre. Les curieux, les amoureux d’art ou de littérature, se voient donc offrir une deuxième chance pour découvrir ou revoir cette exposition, qui propose un ensemble exceptionnel d’œuvres suscitées par la nouvelle de Balzac Une passion dans le désert. À l’issue de la prestation d’un dompteur de fauves, un ancien soldat explique comment, perdu dans le désert d’Égypte pendant la campagne de Bonaparte, il a rencontré, apprivoisé puis aimé une panthère.
Ce court roman a suscité au XXe siècle l’intérêt de plusieurs artistes sensibles à l’exotisme du cadre comme à la réflexion de Balzac sur l’amour passionnel.
En 1965, Gilles Aillaud, Eduardo Arroyo et Antonio Recalcati exposent à Paris un cycle de treize peintures qui forment le manifeste d’un nouveau mouvement artistique, la figuration narrative, et ils proposent une interprétation très originale d’Une passion dans le désert. Cette réalisation collective critique ouvertement la société de consommation, l’art américain, la peinture abstraite comme les ready-mades ou le pop art. Les trois artistes revendiquent également un engagement politique et retiennent le récit, entre autres raisons, pour son anticonformisme.
Insérée dans le parcours des collections permanentes, l’exposition s’articule autour de ces peintures qui n’étaient jamais revenues à Paris depuis leur création. Confrontées aux créations de Georges Guyot, Paul Jouve etc., elles mettent en scène le récit et en soulignent la densité.
Musée : Maison de Balzac"
l'occasion de renouer avec Balzac
Chamaco- Messages : 4526
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Re: Expositions
Les œuvres de Pierre Tal-Coat suscitent l'intérêt en ce moment, avec beaucoup de préemptions par les fonds nationaux, à l'initiative du domaine de Kerguéhennec sur sa terre natale de Bretagne, et aussi d'acquisitions de la part du Centre Georges-Pompidou (Beaubourg) et du Musée d'art moderne de la Ville de Paris.
Le fait que son atelier de Dormont ait brûlé en 2006, alors qu'il abritait encore, une vingtaine d'années après sa mort, un nombre considérable de toiles (un millier ?) a sûrement généré une prise conscience, en effet un catalogue raisonné est en cours, à l'initiative de l'un de ses petits-fils (même si l'on peut pester et dire que ceci aurait dû être entrepris dès le décès de Tal-Coat).
M'intéressant à l'art de Pierre Tal-Coat depuis belle lurette (évoqué, par ailleurs sur le fil d'André du Bouchet) je ne pouvais pas manquer cet accrochage dans mes parages, sachant que les évènements autour de Tal-Coat se traduisent, rien que pour 2017, par huit expositions personnelles (7 en France, 1 en Allemagne), un livre d'art (de Jean-Pascal Léger), quelques rencontres et conférences, dont celle qui eu lieu au printemps au domaine de Kerguéhennec qui abrite une expo permanente d'œuvres de Pierre Tal-Coat, etc...
Deux d'entre les multiples intérêts de l'accrochage royannais sont de se concentrer sur une seule période ("pré-Dormont" si l'on veut), et de n'offrir au regard du visiteur que les toiles en provenance de collections privées, donc invisibles le reste du temps.
Grâce à plusieurs tableaux disposés judicieusement peut-on saisir quelques unes d'entre les subtilités peut-être, en tous cas un bout du cheminement de l'artiste. Ainsi, par exemple, la maturation qui conduisit aux séries "profil sous l'eau", se déclinant ensuite en "portraits sous l'eau".
Par rapport à l'époque aquarium - poissons - atelier/verrière, aux contours si contrastés, la fluidité des sous l'eau frappe.
Je n'avais jamais fait la relation avec celles d'entre ses toiles des années 1970 et 1980 qui me frappent le plus (telles que surgissant, ou vertige par exemple), justement, par leur fluidité et l'abandon de la couleur.
Venant d'un artiste qui entreposait une foultitude de toiles, et qui, pour certaines, mettait vingt ans ou plus si nécessaire à les recouvrir, les repeindre, ou encore les "laver" (sic, selon ses termes), cette exposition me rendit très sereinement heureux, comme un éclairage. Ce n'est pas l'époque que je prise le plus de ce peintre.
Mais, pour une évidence, l'inscription temporelle, singularité dont on ne peut se départir s'agissant de Tal-Coat, fait qu'on pénètre mieux dans son art au soir de sa vie si l'on en appréhende l'aube et le midi.
Par exemple apparaît sans le moindre doute la notion sur laquelle il travaillera tant de matière-peinture, le relief, la croûte, mal rendu par cette photo, mais évident lorsqu'on est devant la toile.
Dernière édition par Aventin le Dim 23 Juil - 21:43, édité 1 fois
Aventin- Messages : 1985
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Re: Expositions
Chamaco a écrit:Merci Arturo, je vais remettre la visite en Septembre car là, début août, je suis invité à passer quelques jours à Paris, alors j'ai cherché et j'ai lu un texte sur une expo à la Maison de Balzac, une expo qui crée un pont entre peinture et lecture, une expo intrigante, non conformiste :
l'occasion de renouer avec Balzac
Des éternités que je ne suis pas allé à la maison de Balzac mais je m'en souviens comme d'un très bel endroit
ArenSor- Messages : 3433
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