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Georges Brassens, Lettre à Toussenot

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Henri Bosco

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Message par Barcarole Sam 10 Déc - 8:58

Henri BOSCO
(1888-1976)

Henri Bosco Bosco110

Henri Bosco est un romancier français né à Avignon le 16 novembre 1888 et mort à Nice le 4 mai 1976.

Né sous le soleil de Provence, Henri Bosco s’exile un temps pour découvrir celui du Maroc, en particulier de Rabat, où il enseigne la littérature. Mais son œuvre évoque peu l’Afrique du Nord : c’est son terroir natal qu’il décide de louer, à l’instar de son contemporain Giono. Comme lui, Bosco entend le message de la terre. Qu’il s’agisse de poèmes, de recueils de souvenirs ou de romans, ses écrits trahissent une vision du monde quasi animiste de la part de leur auteur, persuadé que les éléments, les bêtes et les choses sont dotés d’une vie intérieure, d’intentions et d’influences qu’il est nécessaire de savoir décrypter.

Bosco est également fasciné par l’ésotérisme, et ce goût imprègne fortement ses récits. Écrivain régionaliste, sa plume est restée célèbre pour avoir parfaitement su plonger ses lecteurs dans une atmosphère où l’étrange côtoie le mystère
(source : Evene).

Bibliographie :

1925 – Pierre Lampédouze : Page 7
1928 – Eglogues de la mer
1928 – Irénée : Page 6
1929 – Le Quartier de sagesse
1932 – Le Sanglier
1935 – Le Trestoulas et L'Habitant de Sivergues : Page 5
1937 – L'Âne Culotte : page 2
1940 – Hyacinthe : page1 , 2
1942 – L'Apocalypse de Saint Jean
1944 – Bucoliques de Provence
1945 – Le Jardin d'Hyacinthe page 4
1945 – Le Mas Théotime : page 1, 2, 3, 6
1945 – L'Enfant et la Rivière : page 1, 3, 4
1947 – Monsieur Carre-Benoît à la campagne : page 5
1948 – Malicroix :  page 2, 3, 5
1948 – Sylvius : page 5
1949 – Le Roseau et la Source
1950 – Un rameau de la nuit : page 1, 4
1950 – Alger, cette ville fabuleuse
1950 – Des sables à la mer. Pages marocaines
1951 – Sites et Mirages
1952 – Antonin
1954 – L'Antiquaire
1956 – La Clef des champs
1956 – Le Renard dans l'île : Page 7
1956 – Les Balesta : Page 5
1957 – Sabinus : Page 5
1957 – Barboche
1958 – Bargabot
1959 – Bras-de-fer
1959 – Saint Jean Bosco
1961 – Un oubli moins profond (premier volume de souvenirs d'enfance) : Page 7
1962 – Le Chemin de Monclar (second volume de souvenirs d'enfance) : Page 7
1963 – L'Épervier : Page 6
1966 – Le Jardin des Trinitaires
1967 – Mon compagnon de songes : Page 6
1971 – Le Récif : Page 6
1972 – Tante Martine
1978 – Une ombre
1980 – Des nuages

màj le 04/11024

Site officiel Henri Bosco : http://henribosco.free.fr/


Dernière édition par Barcarole le Sam 10 Déc - 9:24, édité 2 fois
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Message par Barcarole Sam 10 Déc - 9:03

Henri Bosco 419yt710

Un rameau de la nuit

Premier roman de Bosco et superbe découverte ! Ce Rameau de la nuit est indescriptible, magique. Décrire ce livre n'aurait pas grand sens, je vais simplement décrire mes impressions. L'écriture est magnifique, poétique, la nature est sublimée. Sensation de sérénité, de paix sous les forces naturelles et surnaturelles de la terre ; impression seulement !  car sous la plume de Bosco, il règne une angoisse redoutable qui monte paisiblement, la crainte de voir à chaque instant surgir de nulle part quelque chose ou quelqu'un, une âme ou une Ombre, un double... La mort rode aussi, un enfant est malade, un homme est souffrant...

La nuit est magnifiée, effrayante aussi, palpable car opaque et dense. S'y aventurer c'est risquer de se confondre et de se fondre en elle.

Le jour, c'est la Haute-Provence, Gèneval, petit village perdu, silencieux avec ses rares habitants. C'est la maison de Loselée, emplie de mystère, avec son jardin et au-delà, son parc, où Meyral demeure dans une chambre qui recèle des secrets. Secrets des morts, secrets des amours prêts à surgir eux aussi de la nuit.

J'ai été plus particulièrement sensible à cette époque où Meyral s'installe et va vivre à Loselée, plutôt qu'à l'époque antérieure où il erre sur les quais pour rejoindre l'Altaïr, l'épave au large de Marseille, lieu confiné où les expériences oniriques se confondent avec la vie même. Ce livre est tellement riche que le résumer ou donner ses modestes impressions c'est lui enlever sa part de mystère car les mots pour le décrire seront toujours trop terre à terre.

Je suis conquise ! Le mot est faible...


mots-clés : #fantastique
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Message par Bédoulène Sam 10 Déc - 17:09

Henri Bosco 51k99p10

Le mas Théotime

C’est tellement de sentiments, d’émotions, la lecture de ce livre, mais c’est avant tout un grand amour pour la Terre et tout ce qu’elle offre à l’être humain ; Terre nourriture du corps mais aussi de l’âme.
Sortant de ma lecture de Simone Weil, j’ai retrouvé dans ce livre sa pensée :  le salut par le travail, le travail salvateur de la Terre et qui conduit vers  la sérénité, la pureté  et plus, vers Dieu.
« Or dans la solitude des champs, des bois et des collines, si quelque aliment pur ne nous soutient, il peut nous arriver d’abandonner, sans le savoir, l’exercice des facultés humaines et de perdre le sentiment et la jouissance des biens intérieurs. Ce sont de vieux biens, depuis longtemps déposés en nous par la patiente communauté des hommes, et qu’ ils nous ont légués pour nous permettre justement de passer sur la terre, sans trop de terreur ni de désespoir. Quand nous les perdons, il ne nous reste plus que notre chair à opposer au monde, et nous savons trop le peu qu’elle pèse. »
« Le travail qui nous occupait du matin au soir, rudement, maintint notre souci commun dans les lieux solides et sains de l’âme. »

« Ils savaient simplement de père en fils, que ces grands actes agricoles sont réglés par le passage des saisons ; et que les saisons relèvent de Dieu. En respectant leur majesté,  ils se sont accordés à la pensée du monde, et ainsi ils ont été justes, religieux. »


Mais comme l’Homme et la Femme  ne sont que des humains ils ont aussi des bonheurs et des malheurs terrestres ; l’amour en est un. Celui qui unit Geneviève et Pascal est malheur par la force de leur cœur sauvage, et bonheur  quand ils comprennent et acceptent qu’il ne vive que dans leur âme,  en le consommant ils le perdraient.

Il y a beaucoup de respect et d’amitié dans les relations entre Pascal et les Alibert, cette famille représente avec honneur la vie de l’homme de la terre,  celui qui  sait s’en faire une alliée.  Le lecteur sent  dans les mots de l’auteur tout le respect que lui-même accorde à ces paysans :
« Elle respirait le bonheur. Et de la voir ainsi je me sentais heureux, parce qu’elle  était grande, belle, et qu’elle marchait près de moi, avec la confiance, à pas lents, comme une vraie femme de la terre. »

Quand Clodius est assassiné à la lecture du testament Pascal découvre la justesse avec laquelle le disparu  l’a jugé puisqu’il lui lègue tout ses biens, à lui alors que tant de haine les  a fait ennemis, mais dont le même sang coule dans les  veines ; c’est avec humilité et honneur qu’il acceptera les devoirs qui y sont rattachés.

« Dans la pièce il y avait Clodius, et il était vivant. On venait d’entendre sa voix, dure, ironique, mais mâle et d’une sorte de grandeur qui nous dominait, même moi, qui l’avais haï, et qui savais pourtant ce que peut inspirer un cœur sauvage. Du mien, une sorte d’amour aussi farouche partait vers lui, et je me disais, tout en moi, avec un orgueil chaud et sombre, que c’était mon sang qui venait de parler. »

Difficile de comprendre, à part au premier abord, dans les premières minutes où Pascal comprend que celui qu’il abrite est l’assassin, la raison de la non-dénonciation.  C’est qu’il ne faut pas oublier l’hospitalité dû à celui qui la réclame, l’asile en quelque sorte.

« Le sens de l’hospitalité l’avait emporté sur le sens moral. »

Quel désarroi ensuite pour Pascal lorsqu’il comprend qu’il se trouve complice de cet homme, mais Théotime le sauve de  l’acte vil, la dénonciation qu’il s’apprête à faire alors que la décision de Geneviève le bouleverse  et qu’il comprend que la séparation est définitive :

« Je fis un pas ; mais, quoique je n’eusse pas honte , tant je brûlais de douleur et de jalousie, je fus arrêté. Une brise m’avait apporté une odeur de fumée que je connaissais bien. Il était six heures, et Marthe venait d’allumer du feu à Théotime pour mon déjeuner du matin.  Malgré moi je me retournais pour regarder ma maison. »

Geneviève qui vivra désormais dans la sérénité qu’offre la piété, donne à Pascal un dernier gage d’amour, en lui offrant l’Ermitage de St-Jean, en tant que Maître il redonnera vit à la fête de Noël « le feu des bergers ».
Pascal vivra ses obligations envers la Terre, ses gens, Théotime  dans la solitude, le respect et l’amitié des Alibert,  avec l’apport de tous les » Vieux  Biens » légués par ses ancêtres.

Une lecture qui illumine, qui apporte la sérénité, les bienfaits de la Terre et un espoir en et pour  l’Homme.
Beaucoup de poésie dans les mots, l’auteur  fouille au plus secret des cœurs et des âmes, n’en cache pas la noirceur mais sait en élever aussi le meilleur.

l'Ermitage de St-Jean du Puy à l'heure d'aujourd'hui

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Message par Nadine Sam 10 Déc - 18:44

Merci Bédoulene, j'ai un rapport tres affectif à cette lecture. C'est bon d'en lire écho.
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Message par Nadine Sam 10 Déc - 18:45

Barcarole a écrit:Un rameau de la nuit

Premier roman de Bosco et superbe découverte ! Ce Rameau de la nuit est indescriptible, magique. Décrire ce livre n'aurait pas grand sens, je vais simplement décrire mes impressions. L'écriture est magnifique, poétique, la nature est sublimée. Sensation de sérénité, de paix sous les forces naturelles et surnaturelles de la terre ; impression seulement !  car sous la plume de Bosco, il règne une angoisse redoutable qui monte paisiblement, la crainte de voir à chaque instant surgir de nulle part quelque chose ou quelqu'un, une âme ou une Ombre, un double... La mort rode aussi, un enfant est malade, un homme est souffrant...

La nuit est magnifiée, effrayante aussi, palpable car opaque et dense. S'y aventurer c'est risquer de se confondre et de se fondre en elle.

Le jour, c'est la Haute-Provence, Gèneval, petit village perdu, silencieux avec ses rares habitants. C'est la maison de Loselée, emplie de mystère, avec son jardin et au-delà, son parc, où Meyral demeure dans une chambre qui recèle des secrets. Secrets des morts, secrets des amours prêts à surgir eux aussi de la nuit.

J'ai été plus particulièrement sensible à cette époque où Meyral s'installe et va vivre à Loselée, plutôt qu'à l'époque antérieure où il erre sur les quais pour rejoindre l'Altaïr, l'épave au large de Marseille, lieu confiné où les expériences oniriques se confondent avec la vie même. Ce livre est tellement riche que le résumer ou donner ses modestes impressions c'est lui enlever sa part de mystère car les mots pour le décrire seront toujours trop terre à terre.

Je suis conquise ! Le mot est faible...
Il me faudra creuser car deux livres totems déjà chez Bosco, pour moi, celui-ci je le lirai, tu en parles bien Barcarole, je le sens !
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Message par Barcarole Sam 10 Déc - 19:02

Nadine a écrit:
Il me faudra creuser car deux livres totems déjà chez Bosco, pour moi, celui-ci je le lirai, tu en parles bien Barcarole, je le sens !

Si tu aimes Bosco, ce Rameau de la nuit est magnifique, tout comme j'ai trouvé superbe son tout aussi mystérieux roman Hyacinthe.
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Message par ArenSor Mer 14 Déc - 20:48

"Le Rameau de la nuit" et "Le Mas Théotime" sont les deux romans les plus connus de Bosco. Ils sont splendides. Barcarole, puisque tu as aimé "Hyacinthe", je te conseille de lire la trilogie "L'Ane culotte", "Hyacinthe" et "Le Jardin d'hyacinthe".
Bosco est pour moi un auteur "refuge". Si j'ai un coup de blues, si je suis lassé de certaines lectures ne sachant pas quelles directions prendre, je sais que Bosco sera une sorte de rocher littéraire sur lequel je pourrais m'appuyer et rebondir Smile
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Message par Barcarole Mer 14 Déc - 22:44

J'en ai lu pas mal de Bosco, tous géniaux, et comme toi, je reviens à Bosco pour me ressourcer, mais un jour viendra où on aura tout lu de lui !
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Message par shanidar Jeu 15 Déc - 11:35

J'ajoute ma petite pierre à l'édifice puisque j'ai lu récemment Un rameau de la nuit ; et j'en profite pour dire mon admiration à Barcarole pour sa capacité à dire l'exact quintessence d'un texte dense, son onirisme, son angoisse et sa beauté.

Henri Bosco 419yt711

Un Rameau de la nuit

Les autres mondes qui, voilés et toujours possibles, entourent [ce monde], j'en connais les puissances dangereuses. Et ce récit -tout simple qu'il soit- je l'écris afin de définir, et, s'il se peut, conjurer l'éventuelle apparition, l'intrusion redoutée des visages secrets dont j'ai rencontré le regard inoubliable.

Pour moi, du moins, car peut-être, pour la plupart de ceux qui me liront (s'il s'en trouve, un jour), ces figures n'offriront rien que d'humainement explicable en dépit de leur étrangeté. Et cependant à peine ai-je, pour les évoquer, touché à la pensée de la première phrase, que de lents glissements se forment derrière elle. Je ne sais d'où me vient ce sentiment d'une présence sous un voile, présence qui double du côté de l'ombre tout ce que je dis au milieu de la plus pure lumière. Je raconte pourtant ce que j'ai vu, ce que j'ai entendu, ce que j'ai fait ; et c'est ce que je n'ai pas vu, ce que je n'ai pu faire, ni pu entendre qui rôde obscurément derrière ma parole et en trouble la clarté. Imagination ? Il se peut et il est sage de le croire. Pourtant je ne le puis. Car d'ordinaire quand je parle je sais que j'abolis, par les mots, le silence qui m'entoure. Or ici, au-dessous de ces mots que je prononce et dont les sons, lorsque j'écris, parlent à mon oreille, un silence étrange subsiste. Je le perçois. Il ne révèle pas le vide, mais une présence voilée : celle des âmes qui se taisent. Leur nuit est pleine, et il y veille une ardente pensée ; c'est cette pensée qui trouble mon âme et quelquefois ma phrase. Je ne la connaitrai jamais. Pourtant quelquefois il me semble qu'elle pénètre en moi et qu'elle devient ma propre pensée ; mais alors je ne puis me la dire à moi-même. La parole n'y suffit plus. Cette pensée relève du silence. Aussi hante-t-elle longtemps les sites sombres de mon âme et laisse-t-elle en moi d'étranges souvenirs dont la nostalgie quelquefois me tourmente. Je la chasse difficilement. (p.28)

Ce roman est un conte, une traversée de la nuit un rameau à la main et ce rameau pourrait être comme celui des ésotéristes un Rameau d'or. Mais il n'est pas nécessaire de louer les Parques ou nourrir en son sein un homoncule pour pouvoir savourer la lenteur hypnotique de cet étrange roman. Un roman qui fait toucher du doigt les éléments que sont l'eau et le feu, la terre et le ciel, avec l'absence des oiseaux puis leur retour, l'écoute nocturne des chevêche, des hulottes ou d'un loriot, le toucher des arbres, des dryades qui les habitent et les rainettes, mignonnes, qui glissent sur les bassins. Roman nocturne, des astres et des étoiles, de la lune et de l'ombre. L'ombre ou plutôt selon la typographie de l'auteur roman de l'Ombre, celle qui va venir hanter notre personnage principal, homme solitaire, érudit, aimant de loin, s'exilant volontiers. Cet homme cependant malgré sa misanthropie n'a rien de sinistre, au contraire, à force de l'écouter s'écouter on apprend à l'entendre et sa voix, traversant les nuits est inondée de soleil, de l'amour des autres et de cette nature qui sait si bien l'entourer.

Ce que j'imaginais alors, s'il inquiétait mon cœur, ne me poussait pas à me fuir. Ce n'était plus de me quitter que me tourmentait la hantise, car j'étais bien en moi; et, si quelque tourment me traversait, il venait du désir de m'unir à moi-même, à ce moi qui, jamais atteint, dévoilait de son ombre le visage inconnu auquel je ressemblais sans pouvoir cependant m'y reconnaître. Il faisait pressentir le feu des voluptés et la fureur des orages… Car, il me semblait déjà que j'aimais. Je ne savais bien quoi ; et qu'à cette poussée d'un amour sans objet ne répondit aucune créature, du moins visible, peu m'importait, puisque, tout étant clos autour de moi et surtout Fontanelle, c'était en moi que je cherchais l'amour… (p.153)

Il s'agit donc d'un roman-ouroboros, bouclé, entouré, s'enroulant sur lui-même, se mordant la queue pour former un cercle protecteur et salvateur. Un cercle dans lequel s'immisce des personnages, des moments, des lieux et des évènements tous marqués par une sentence, qu'il s'agisse de la folie d'un jardinier, d'une femme muette, d'un enfant sage, d'une tante entêtée, d'une maison désertée, d'un parc sans oiseaux, de Fontanelle, les êtres et les lieux qui se portent au contact de Frédéric lui opposent leur puissance noire. Et Frédéric Meyrel va devoir se confronter à elle pour pouvoir garder son intégrité, sa persévérance, sa tranquillité d'âme. Il devra être eau pour conjurer la dévoration des flammes, il devra devenir aérien pour repousser l'appel fétide des pierres tombales et des autels des dieux sylvestres, il devra être dur et solide pour ne pas être emporté par les flots d'un naufrage et dans l'alambic de sa vie, pour que l'Ombre se change en Lumière, il devra lentement couver l'œuf noir, devenant rouge puis blanc et mélanger les essences, savamment, lentement, pour tel un phénix, renaître.

Etrange roman que celui-ci. Tout d'obscurité, de fièvre noire, d'errements sous les bosquets, de promenades en pleine nuit comme s'il fallait être toujours à l'affût pour atteindre les créatures des rêves et des cauchemars. Les morts. Les morts qui cherchent à revenir à la vie, à être aimés encore, à vous hanter. Il faudrait lire et relire longuement le deuxième chapitre de ce roman qui raconte une messe noire dans les entrailles d'un bateau agonisant, pour atteindre, peut-être, l'âme profonde de ce silence qui entoure l'Homme.

Encore une merveilleuse rencontre faite sous les auspices d'ArenSor, qu'il en soit une nouvelle fois remercié.
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Message par tom léo Jeu 15 Déc - 16:39

Henri Bosco 51tj7g10

L'enfant et la rivière

1945

CONTENU :
Ce qui attire le petit Pascalet dans sa Provence plus que tout, c'est la rivière toute proche de la maison, de laquelle tous le mettent en garde et l'interdisent de l'approcher. Par peur pour l'enfant, bien sûr, mais : quelle meilleure motivation pour être attiré ! Il rêve d'elle. Et de temps en temps le chasseur Bargabot, personnage un peu sauvage et à la limite des lois, apporte des poissons et d'autres nouvelles à la maison. Quand un jour ses parent vont en voyage et que sa tante Martine n'est pas vraimenet attentive, il demarre un tour d'expédition : il découvre alors la rivière fascinante, une île au milieu et Gatzo, un garçon, retnu sur l'île par des inhabitants qui font peur...

REMARQUES :
Roman d'apprentissage, au moins en France un classique de la litérature d'enfants et de jeunes (et d'autres!). En lisant sur ce roman après lecture, je suis tombé sur des articles parlant de parallèles avec des livres comme Huck Finn et Tom Sawyer de Mark Twain. En tous cas : une petite perle !

Dans cet aventure d'enfance Pascalet découvre comment menace et attirance de la nature dans un premier contact immédiat avec elle. Et aussi une première amitié ; celles qui restent peut-être pour la vie, au moins dans nos mémoires. La liberté et l'indépendance vont marquer ces journées qui suivent la libérationde Gatzo et son intervention : « les plus belles journées de ma vie « , comme confesse le narrateur maintenant déjà âgé. Ils se laissent dériver sur un bateau dans la rivière et s'installe dans un bras mort. Ils vont y passer dix jours.

Dictionary of literary biography a écrit:« L'auteur réussit de communiquer le grand étonnement et le regard tout frais d'un enfant qui accueille avec des sens ouverts ce qu'il y a là dans la campagne ce qu'il y a à voir, à écouter, à sentir. »

Un merveilleux petit livre qui me fait aimer Bosco d'emblée !


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Message par bix_229 Jeu 15 Déc - 17:36

On comprend mieux l'oeuvre de Bosco quand on connait le Luberon.
A condition d'oublier ce qu'il est devenu, un site hyper touristique, le lieu des résidences secondaires de la bourgeoisie d'Aix et de Marseille et des stars du show biz.
Il faut y aller à la fin de l'hiver ou au début du printemps. On voit un paysage apre et tourmenté, nettoyé jusqu'à l'os par le mistral qui balaieces étendues de plaines, de colines, de falaises et de bois de pins. De vignes et de vergers. De monuments anciens, d'abbayes et de bories.
De villages perchés, aux maisons incroyablement belles. Harmonieusement
coulés, au point de n'apparaitre parfois que lorsqu'on y est dedans.
Ou que la lumière tranchante du matin ou de la fin d'après midi les incendie.
Et puis vous voyez soudain les premiers arbres en fleurs, les amandiers,
qui donnent une touche de douceur et de fragilité émouvante et de bien
etre immédiat. En espérant qu'ils résisteront au gel et au mistral.

En parcourant ces paysages, moi qui ne suis pas voyageur, j'ai eu l'impression de voir un des plus beaux paysages du monde.
Evident, magnifique, mais aussi contrasté et secret. Un paysage qui demande de l'attention, de la patience, du respect pour le découvrir.
Et ce paysage, Bosco l' a compris et intégré à son oeuvre, comme Giono
l'a fait pour Les Alpes de Haute Provence.

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Message par bix_229 Jeu 15 Déc - 17:40

Pour les amoureux du Luberon, mais qui n'ont pas la chance d' y vivre comme Chamaco.
Toutes les questions y sont abordées.

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Message par ArenSor Jeu 15 Déc - 19:32

bix_229 a écrit: A condition d'oublier ce qu'il est devenu, un site hyper touristique, le lieu des résidences secondaires de la bourgeoisie d'Aix et de Marseille et des stars du show biz.
Tiens, tout le portrait de Chamaco pirat Smile
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Message par Nadine Jeu 15 Déc - 19:34

Very Happy
Ya taquin, par là ^^
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Message par Barcarole Ven 30 Déc - 15:22

Henri Bosco 51k99p10

Le mas Théotime

Sous la plume d’Henri Bosco, le charme opère tout de suite et la Haute-Provence âpre s’offre à moi, le Luberon, Sancergues, Puyloubiers…, les hommes de la terre. Deux familles règnent dans ce terroir : les Dérivat et les Métidieu.

Le mas Théotime, c’est celui de Pascal Dérivat, qui a décidé de s’y installer et été accepté par les gens du pays et qui compte régner sur ses terres. Pascal est doux, aimable, mais aussi d’une nature sauvage. C’est le narrateur. Ses fermiers ou métayers, la famille Alibert, sont des gens secrets qui vivent à quatre cents mètres, qui veillent, attelés à leur travail quotidien.

Le voisin d’à côté, c’est Clodius, Un Métidieu, un homme bourru et taiseux, lui c’est l’ennemi, le « mauvais ». Un homme sombre, un marginal. Son seul but : chercher des noises.

« Mon arrivée déplut à Clodius. L’installation des Alibert, leur succès et notre bonne entente l’avaient irrité. J’allais le voir. Il me reçut fort mal, se plaignit de mes métayers et au bout de huit jours me coupa l’arrosage. »

Pascal Dérivat, lui, est plutôt introverti. Il aime sa cousine Geneviève, son amour d’enfance, un amour impossible hélas pour lui. Elle vit quelque temps avec lui. Les travaux des champs continuent. Mais après le départ de Geneviève, c’est d’abord un sentiment de soulagement…

« Je ne voulais pas aller à Sancergues. J’étais libre pourtant, après le dépiquage ; mais à la vive tentation de partir et de retrouver Geneviève s’opposait un obscur mouvement de l’âme qui me retenait à Théotime. […] Il s’élève toujours des lieux que j’habite une sorte d’âme exigeante qui me repousse ou qui m’attire à elle. »

Le retour de Geneviève au mas Théotime va être la source d’événements graves qui vont bousculer la vie de tous ces paysans du terroir.

« En effet, il se passait quelque chose d’extraordinaire chez Clodius. Devant le bois, on voyait une sorte de break, pareil au mien. Il était arrêté. Ça et là une douzaine d’hommes, par groupes de trois ou de quatre. De loin, ils paraissaient tout noirs. Marthe, qui a de bons yeux, s’écria : – C’est curieux : je vois deux gendarmes… »

Et après son départ définitif, l’absence de Geneviève se fait pesante, douloureuse :

« La souffrance se fit un peu attendre ; mais elle vint. Elle vint d’en bas, du fond. Ce fut cette masse de chair, de sang, de vie, tout humide encore, et qui fume habituellement au-dessous de mon âme, qui monta. Dès qu’elle m’atteignit, un choc sourd ébranla mon cœur encore calme et une petite amertume s’infiltra dans mes veines, puis s’étendit. De mon corps, saisi peu à peu par ce poison actif, le mal s’éleva jusqu’aux parties obscures de mon âme, et tout l’édifice fut ébranlé. »

Le travail de la terre que nous décrit Bosco, il est le sens de la vie, et qui d’autre que Bosco peut nous parler de la beauté de ces gens humbles, mais aussi et surtout des régions obscures de leur âme.

L’univers surnaturel est moins marqué dans ce roman mais Bosco nous ouvre la porte de ces êtres tourmentés, qui vibrent, unis à la terre et au rythme des saisons de l’année. Ne pas en dévoiler plus. Car ces quelques mots et quelques citations ne peuvent traduire l'atmosphère de ce roman inénarrable comme les autres romans de Bosco.
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Message par shanidar Ven 30 Déc - 15:29

Je me souviens très bien de cette forte, de cette puissante lecture et du mystère qui entourait Pascal.

Est-ce qu'il y a toujours des amours empêchées chez Bosco à cause de la proximité familiale des protagonistes (une cousine ici, une nièce ailleurs...) ?
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Message par Barcarole Ven 30 Déc - 15:35

Tu me poses une colle ! Peut-être dans Hyacinthe, amour et mystère mêlés, et sans doute dans d'autres romans de Bosco, mais l'amour est évoqué parfois juste comme un frôlement d'aile ; demandons l'avis à ceux qui ont lu Bosco, peut-être vont-ils pouvoir répondre.
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Message par bix_229 Ven 30 Déc - 15:45

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HYACINTHE


C'est une histoire opaque et souvent oppressante. On avance dans ce livre comme dans une forêt obscure et qu'on ne connait pas. Et c'est ainsi que le narrateur de cette histoire la perçoit aussi... Elle baigne tout entière dans un climat d' attente, de mystère et d'envoûtement. Cette histoire se présente sous la forme d'un journal.

Dans un état de vide intime, le narrateur s'est retiré dans la solitude d'une grande bâtisse qu'on peut situer dans le Lubéron, et qui s'appelle La Commanderie. Au fil de ses investigations intimes, ses impressions varient et modifient sa vision des choses. Les rares, très rares personnes qu'il voit, observent le même silence que lui, mais des signes invisibles s'échangent quand même. Et même des signaux, comme cette lampe qui s'allume toutes les nuits dans la grande maison silencieuse qui lui fait face, la Geneste. Des forces obscures s'affrontent au dehors, mais aussi dans la tête du narrateur. Et la solitude qu'il avait choisie a raison de lui. Et aussi cette angoissante sensation de vide qu'il éprouve, et qui est proche du néant.

Que dire de plus ? Rien ! c'est déjà assez difficile ainsi ! Il faut lire cette histoire lentement et découvrir la vérité en même temps que le narrateur. C'est une histoire saturée de bruits et de silence, d'odeurs, de couleurs... d'émotions, d'impressions et d'interrogations. Bosco essaie de suggérer l'inexplicable, l'indicible, le mystère, la pression incessante des forces cosmiques exacerbées par le silence.

Le style narratif de Bosco est lyrique, une prose dense aux phrases brèves et d'une grande force poétique. Ce livre est à la limite de l'excès : presque trop dense, trop énigmatique.

Bosco a fait le pari obscur d'expliquer l'amnésie de ses deux protagonistes, amoureux depuis l'enfance, par l'envoûtement, la sorcellerie d'un illuminé qui veut inventer un contre-monde destiné à faire vivre ceux qu'il a choisis pour le peupler. Mais son univers est aussi flou que pervers et finalement glacial. J'avoue que la création de ce personnage m'a gêné et aussi cette tentation mystique qui est très éloignée de moi. C'est une critique de détail. Mais le livre se prête à d'autres lectures.

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Message par Tristram Ven 30 Déc - 17:01

« Deux mains, c’est peu de chose ; le moindre outil vous donne confiance. »
« …] toutes mes facultés de raisonner, c'est-à-dire de faire concorder des méfiances, se résolvaient en un simple ravissement. »
Henri Bosco, « Le sanglier »
« Plus d’amour et voilà l’oubli. Dans la vie, c’est déjà un accroc de la mort. Ils ont tout oublié, par mollesse, laisser-aller, indifférence. »
Henri Bosco, « Monsieur Carre-Benoît à la campagne », XVIII

C'est vrai qu'il sait bien dire les choses, et avec une certaine fulgurance !

_________________
« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
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Message par shanidar Sam 31 Déc - 13:12

Bosco a fait le pari obscur d'expliquer l'amnésie de ses deux protagonistes, amoureux depuis l'enfance

donc encore une histoire d'enfance et d'amour contrarié (?) (ah ah !). Merci bix !
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