Des Choses à lire
Visiteur occasionnel, épisodique ou régulier pourquoi ne pas pousser la porte et nous rejoindre ou seulement nous laisser un mot ?

Après tout une communauté en ligne est faite de vraies personnes, avec peut-être un peu plus de liberté dans les manières. Et plus on est de fous...


Je te prie de trouver entre mes mots le meilleur de mon âme.

Georges Brassens, Lettre à Toussenot

Des Choses à lire
Visiteur occasionnel, épisodique ou régulier pourquoi ne pas pousser la porte et nous rejoindre ou seulement nous laisser un mot ?

Après tout une communauté en ligne est faite de vraies personnes, avec peut-être un peu plus de liberté dans les manières. Et plus on est de fous...


Je te prie de trouver entre mes mots le meilleur de mon âme.

Georges Brassens, Lettre à Toussenot

La date/heure actuelle est Dim 28 Avr - 1:54

195 résultats trouvés pour voyage

Joseph Kessel

Les nuits de Sibérie

Tag voyage sur Des Choses à lire - Page 8 41-ujv10

J'ai adoré ! Vraiment !
C'est un court récit, celui d'une journée et d'une nuit, d'un officier français dans le port perdu de Vladivostok peu après la Révolution Bolchévique.
Narré à la première personne s'adressant au lecteur ou un personnage connu du héros, nous déambulons dans cette ville alcoolisée, sale, lugubre, aux filles faciles et au pouvoir corrompu où toutes les armées se jaugent et se soûlent.
Les russes dans tout cela vaquent à leurs crimes, leurs trafics, leur prostitution tentant de prendre l'argent qui n'est plus à personne puisqu'il serait à tout le monde.
On y comprend le désespoir et l'agonie, nous nous prenons de pitié pour cette perdition géographique et culturelle, sans aucun repère, sans aucun fondement.
Le style est fluide, riche, il contraste par sa netteté avec la souillure de la ville décrite. C'est laconique et tranchant, mélancolique et attristé.
Nous aimerions que l'histoire soit plus longue, mais la gradation de la violence, et la vacuité des destins de la ville nous laissent à penser que tout a été dit.

mots-clés : #violence #voyage
par Hanta
le Ven 18 Aoû - 15:02
 
Rechercher dans: Écrivains européens francophones
Sujet: Joseph Kessel
Réponses: 47
Vues: 5242

Mariusz Wilk

Tag voyage sur Des Choses à lire - Page 8 51xqms10

Le journal d’un loup


Original : Wilczy Notes. Zapiski sołowieckie 1996-1998 (Polonais)

Né en 1955 à Wroclaw/Pologne, Mariusz Wilk était entre autre très tôt actif dans le mouvement de « Solidarnosc ». Puis il travaillait comme reporter à Moscou, Berlin, les Etats-Unis. Un jour il sentait le besoin d’une distance et atterrissait, un peu par hasard, sur les Îles très reculés des Solovki, dans la Mer blanche, dans l’Extrême Nord de la Russie. C’est de là il commença à écrire régulièrement des articles pour le journal polonais « Kultura ».

Les semaines se prolongent en années et il se laisse toucher non pas plus comme un pur étranger, mais comme de l’intérieur, comme par empathie par les réalités de la Russie dans ces contrées lointaines des centres virevoltantes comme St. Petersbourg ou Moscou. Malgré ses origines polonaises (qui connaît l’histoire…) il arrive de devenir tout proche des gens, si souvent abandonnés par un pouvoir trop occupé par d’autres soucis. C’est de l’optique de ces lieux –là, qu’il regarde, observe et commente les développements de ce pays. Mais jamais cela devient une exercice d’enseignement sec, même si il nous fait partager une quantité de pensées et réflexions sur la culture, la foi et l’histoire de ce pays. Il part de la réalité concrète sur ces Ïles de Solovki, lieu si fameux dans l’histoire de la Russie, et cela à double titre : Cette île est historiquement et spirituellement célèbre pour son monastère fondé au XVème siècle, lieu qui a bien rayonné au-delà des environs. De l’autre côté, ce même lieu est devenu le premier « GOULAG » de l’Union soviétique, au tout début des années 20. C’est par ailleurs de là que Soljenitsyne a pris le titre de son investigation sur les camps : « Archipel de Goulag », c’était d’abord cet archipel de quelques îles dans la Mer blanche.

Quelques fois ses visions, ses descriptions prendront une allure apocalyptique, comme par exemple quand il parle de ce fléau qu’est l’alcoolisme ou les désastres écologiques… D’un coup l’animal humain n’est pas loin, purement historique, mais tout proche. Et pourtant… Qui connaît la Russie comme Wilk s’y laissait prendre, y discerne une force d’attraction qui peut dérouter dans son étrangeté ; mais qui ne nous lâche plus.

C’est un livre très varié de par ses sujets, idées, analyses, impressions évoqués, qui pourra donner des nouveaux perspectives à chaque russophile ancien et nouveau sur ce pays fascinant. Ayant été moi-même infecté par ce virus de l’amour pour ce pays, et ayant visité avec bonheur et respect cet archipel proche du Cercle polaire, je trouve dans les pages de Wilk mes impressions confirmées et nourries. Dans CE genre précis, avec cette lucidité et cet amour pour la Russie, j’ai rien trouvé de comparable.

Entre-temps Wilk est en train de se confirmer comme un explorateur/voyageur dans la meilleure tradition…

Il faut dire que les éditions « Noir sur blanc » ont eu une main magnifique en nous présentant Mariusz Wilk !


mots-clés : #campsconcentration #voyage #insularite
par tom léo
le Mar 8 Aoû - 7:48
 
Rechercher dans: Écrivains d'Europe centrale et orientale
Sujet: Mariusz Wilk
Réponses: 17
Vues: 1463

Pierre Loti

Longuement, Pierre Loti a sillonné la terre, rapportant de ses voyages des récits uniques et imagés. Le Désert, consacré à sa traversée du Sinaï en direction de Jérusalemn, est le premier volet d'un trytique (Le Désert, Jérusalem, La Galilée)

Tag voyage sur Des Choses à lire - Page 8 515kvj10

Le Désert

Chaque matin, s'éveiller en un point différent du vaste désert. Sortir de sa tente et se trouver dans la splendeur du matin vierge ; détendre ses bras, s'étirer demi-nu dans l'air froid et pur ; sur le sable, enrouler son turban et se draper de ses voiles de laine blanche ; se griser de lumière et d'espace ; connaître, au réveil, l'insouciante ivresse de seulement respirer, seulement vivre.
Et puis partir, très haut monté sur le dromadaire éternellement marcheur, qui va l'amble égal jusqu'au soir. Cheminer en rêvant, cheminer, cheminer toujours, ayant devant soi la tête poilue ornée de coquillages et le long coup de la bête, qui fend l'air avec des oscillations de proue de navire. Voir les solitudes passées après les solitudes ; tendre l'oreille au silence, et ne rien entendre, ni un chant d'oiseau, ni un bourdonnement de mouche, parce qu'il n'y a rien de vivant nulle part.


Je l'avoue tout net, d'ordinaire, je n'apprécie guère les longues descriptions. Elles m'agacent, car j'ai l'impression qu'une trop grande précision bride mon imagination. Sachant cela, j'ai ouvert ce Désert avec quelques réticences qui, d'emblée, ont été annihilées par la langue de Loti, sinueuse, chatoyante, cette langue qui m'avait déjà tant séduite lorsque, adolescente, j'avais dévoré Pêcheurs d'Islande. Ce livre, je l'ai savouré par petites touches, patiemment. Marche lente au pas des chameaux, contemplation sereine d'un désert minéral et silencieux...

Ca et là, quelques épisodes viennent tout de même réveiller l'intérêt du lecteur qui, bercé par le balancement de sa monture, risquerait de s'assoupir… Il y a cette halte dans un monastère hors du temps sur le mont Sinaï, au plus fort d'une tempête de neige ; Là, Loti se pare de ses plus belles soieries et s'émerveille devant l'antiquité des lieux, les reliques, ou le chatoiement des multiples icônes parées d'or…
Et puis, il y a les tractations avec les cheikhs et les représentants officiels du gouvernement ottoman, qui règnent en tyrans sur les zones qu'ils contrôlent. Il faut négocier leur protection contre les pillards ; il faut aussi payer un tribut pour gagner la permission de traverser leurs territoires… Paradoxalement, Loti m'a semblé quelque peu déçu que son voyage se déroule sans autre anicroche qu'un ou deux contretemps mineurs et l'interdiction de traverser Pétra. J'ai eu l'impression que, sans se l'avouer vraiment, il aurait aimé un peu plus de frisson et de Grande Aventure...

Des compagnons de route de Loti, nous ne saurons rien, ou presque, si ce n'est qu'un certain Léo l'accompagne. De même, il ne nous glisse que quelques phrases sur le jeune cheikh qui, un temps, dirige son escorte, ou sur les Bédouins qui furent ses guides tout au long du voyage
Les femmes, quant à elles, passent de loin en loin, inaccessibles ombres hiératiques …
Qu'il s'agisse ou non d'un parti pris d'écriture, j'avoue que cela m'a étonnée, cette absence d'intérêt pour ses compagnons de route. De ce fait, lorsqu'il se laisse aller à glisser quelques phrases sur les Bédouins, elles n'en sont que plus remarquées. Et c'est là que le bât blesse, car on découvre un Pierre Loti ambivalent : éprouvant une réelle admiration pour ceux qu'il qualifie de "nobles races orientales", il y mêle une condescendance et un sentiment de supériorité confinant au racisme parfois bien difficile à lire...  Il y a là toute l'ambiguïté d'un homme qui s'est ouvert au monde, mais qui n'a pas su pour autant dépasser certains préjugés de son époque...

On lira donc le Désert pour la magie de la langue, unique et savoureuse, qui sait si bien retranscrire toutes les nuances et subtilités d'un lieu aussi mouvant qu'immuable, aux prises avec les ondoiements du soleil… On s'émerveillera des rocs millénaires et des lumières chatoyantes, et l'on rêvera de se trouver à son tour paré(e) de longs voiles blancs, allant l'amble d'un chameau au son de mélancoliques mélopées...

Et c'est d'une magnificence presque effroyable… Dans des lointains si limpides, qu'on les dirait beaucoup plus profonds que les habituels lointains terrestres, des chaînes de montagnes s'enlacent et se superposent, avec des formes régulières, qui, depuis le commencement du monde, sont vierges de tout arrangement humain, avec des contours secs et durs qu'aucune végétation n'a jamais atténués. Elles sont, au premier plan, d'un brun presque rouge ; puis, dans leur fuite vers l'horizon, elles passent par d'admirables violets, qui bleuissent de plus en plus, jusqu'à l'indigo pur des lointains extrêmes. Et tout cela est vide, silencieux et mort. C'est la splendeur des régions invariables, d'où sont absents ces leurres éphémères, les forêts, la verdure ou les herbages ; c'est la splendeur de la matière presque éternelle, affranchie de tout l'instable de la vie ; la splendeur géologique d'avant les créations…


mots-clés : #voyage
par Armor
le Mer 26 Juil - 21:20
 
Rechercher dans: Écrivains européens francophones
Sujet: Pierre Loti
Réponses: 10
Vues: 1537

Collectif : Le goût de Tahiti

Tag voyage sur Des Choses à lire - Page 8 912bg410

Le goût de Tahiti

Mercure de France a écrit:   Textes choisis et présentés par Tristan Savin

    Récits de voyage et romans maritimes ont révélé la lointaine Tahiti. Deux siècles durant, chaque écrivain parti « dans les mers du Sud » fut incité à le faire par un prédécesseur. Herman Melville séjourne à Tahiti en 1846 et décrit à ses lecteurs un Éden insoupçonné. Sur ses pas, Stevenson embarque pour le Pacifique en 1888, et parcourt les îles, les atolls, les motu, des Marquises aux Samoa. En France, cette « Nouvelle Cythère » devient sujet philosophique avec Diderot. Les poètes romantiques succombent à son exotisme. Les confettis formés par les îles de la Société deviennent un carrefour obligatoire pour romanciers et artistes voyageurs. Des mythes d’hier aux réalités d’aujourd’hui, balade au cœur de ce paradis pas tout à fait perdu, en compagnie de Bougainville, Victor Hugo, Leconte de l'Isle, Victor Segalen, Pierre Loti, Paul Gauguin, Jack London, Pierre Loti, Gary, Jean Reverzy, Jacques Brel, Jean-Luc Coatalem et bien d’autres…


Première observation, possible que je n'ai lu qu'une version légèrement abrégée (achetée avec un numéro de Géo) 91 pages contre 128 annoncées.

Une petite introduction pour cette petite anthologie de petits textes pour rappeler l'historique des découvertes et redécouvertes et quelques parentés littéraires sans oublier d'ouvrir sur un regard nuancé ou chargé de regrets sur ce "paradis".

Et possible que le sujet et l'émerveillement du voyage soit une belle source d'inspiration. Les vahinés font rêver mais une vision humaniste s'insinue rapidement dans l'ordre chronologique de présentation retenu. Au menu à côté du poisson cru mariné au citron vert il y a perte d'identité, tromperie et au-delà de l'identité d'un monde.

Quand on ne connait pas les auteurs on a le plus souvent envie ou très envie de les lire (celui qui m'a le moins marqué doit être de Victor Hugo ?) et on découvre aussi des auteurs polynésiens. Le texte de Chantal T. Spitz qui clot le recueil est puissant.

Questions d'exotisme et de racines, de besoins de racines mêmes étrangères, un infime aperçu sans doute de ces îles lointaines mais une belle petite lecture aussi multiple que stimulante (j'espère y piocher des idées).

Très bonne surprise, je ne m'attendais pas à autant compte tenu du format d'acquisition !


mots-clés : #voyage
par animal
le Mer 12 Juil - 22:25
 
Rechercher dans: Nature et voyages
Sujet: Collectif : Le goût de Tahiti
Réponses: 10
Vues: 1038

Robert Louis Stevenson

Tag voyage sur Des Choses à lire - Page 8 Oeuv_c10

Voyage en canoë sur les rivières du Nord

Le petit périple, d'abord en Belgique puis en France pour traverser le Nord et remonter l'Oise, de "L'Aréthuse" accompagné par "La Cigarette". Stevenson et un copain partis se dégourdir le ciboulot à l'anglaise (ou à l'écossaise ?) sur le continent.

De petits chapitres par étapes, des péniches, de la pluie, du soleil, des péripéties de voyage, des rencontres. Une manière de faire vivre le voyage avec ce qu'il faut de pittoresque, d'étonnement et de certitudes. La description documentaire du pays au milieu des années 1870 ne manque pas d'intérêt sans non plus verser dans le fracassant. De même que l'ensemble du texte à mon sens si je dois être honnête.

On y trouve quand même de quoi faire et on a aussi l'occasion d'entrevoir l'auteur derrière son oeuvre, un homme, encore jeune et qui se cherche. Sans s’appesantir sur ses malheurs, sans courir après n'importe quoi mais avec une attente manifeste, une faim, une soif de quelque chose à venir qui se trouve déjà sans doute d'une manière dans le décor de ce voyage mais incomplète.

Effet de traduction ou de fatigue j'ai trouvé que ça accrochait un peu à la lecture.

Ce qui n'empêche pas à l'envie de liberté et de plénitude d'être communicative...


mots-clés : #voyage
par animal
le Mer 17 Mai - 22:04
 
Rechercher dans: Écrivains européens de langues anglaise et gaéliques
Sujet: Robert Louis Stevenson
Réponses: 63
Vues: 6183

John Hopkins

Tag voyage sur Des Choses à lire - Page 8 413vio10

Adieu, Alice

C’est un petit roman agréable à lire, entre deux pavés par exemple !
Adieu, Alice, au charme un peu désuet, raconte l’histoire d’un couple d’Américains qui décide de partir vivre au Maroc sur un coup de tête après avoir discuté avec un inconnu à la terrasse d’un café parisien. Norman et Alice, sa compagne qui a l’âge de sa mère, découvrent le pays, la mer, le climat doux, l’hospitalité marocaine et Tanger où ils élisent domicile.

Norman est asthmatique et recherche plutôt un climat sec pour éviter les crises. Il sera hospitalisé. Tandis qu’il est dans sa chambre d’hôpital à attendre Alice, il croit l’apercevoir par la fenêtre. Hélas, il ne la reverra jamais car elle devra rejoindre rapidement les États-Unis pour à son tour se retrouver à l’hôpital et y mourir.

Norman se retrouve seul au Maroc, en quête de nouveaux amis, mais c’est un homme convivial qui sait faire des rencontres, se trouver des nouveaux amis : Harry, Miss Toledano…

Il va découvrir le désert, trouver un autre sens à sa vie.

John Hopkins est l’ami de l’écrivain Paul Bowles, qui lui aussi a publié des romans se déroulant au Maroc dans la même veine. Une époque et un lieu où il faisait bon vivre pour un Occidental. L’écriture de Hopkins et celle de Bowles sont proches, par exemple dans son Thé au Sahara, qui fut aussi un plaisir de lecture.


mots-clés : #voyage
par Barcarole
le Mar 11 Avr - 20:26
 
Rechercher dans: Écrivains des États-Unis d'Amérique
Sujet: John Hopkins
Réponses: 4
Vues: 652

David Van Reybrouck

Le fléau


Tag voyage sur Des Choses à lire - Page 8 Le-fle10


David Van Reybrouck, lors de ses recherches universitaires, découvre que l’écrivain naturaliste sud-africain Eugène Marais, spécialiste des termites, a été plagié par Maurice Maeterlinck, prix Nobel de littérature, qui a écrit un livre sur les termites, La Vie des termites, dont le contenu est quasi identique à celui qu’avait publié Marais. Eugène Marais est sud-africain, Maeterlinck est belge… En Afrique du Sud on parle l’africaans, langue proche du néerlandais, et Maeterlinck peut lire l’africaans puisqu’il lit et parle le néerlandais. Plagier Marais, ni vu ni connu. Qui oserait dire que le grand Maeterlinck eût piraté un confrère de Pretroria ?

« Il n’en reste pas moins que l’on retrouve chez Maeterlinck la théorie de Marais sur l’unité organique de la termitière. Dans un des tout premiers chapitres de La Vie des termites, le prix Nobel présente même cette théorie comme la conclusion de ses travaux. »


A l’époque de Maeterlinck et de Marais, les livres sur les termites, les fourmis, les serpents et les grands singes se vendaient comme des petits pains, et Maeterlinck a battu des records de vente avec son livre sur les termites.

Van Reybrouck, intéressé par cette affaire, expose tout d’abord une hypothèse sur le plagiat du livre de Marais par Maeterlinck qui, paraît-il n'est pas une lumière. Il veut des preuves. Il décide donc de partir en Afrique du Sud pour mener l’enquête.

Nous voilà donc partis avec lui en voyage, en avion, en autocar, en train ou dans une vieille guimbarde qui tombe en panne. Au fur et à mesure de son enquête, il découvre l’Afrique du Sud, sa population, la pauvreté et le racisme, mais aussi des régions agréables à voir, d’autres plus rudes, tels ces paysages désertiques, plats, des territoires sans lieux :

« La station-service est un endroit lugubre, un successeur indigne des ces auberges où, autrefois, l’on dételait les chevaux pour leur donner un sac d’avoine. Je fais les cent pas sur l’asphalte craquelé. Comme je n’ai aucune envie de me nourrir d’un hamburger spongieux ou d’un malheureux triangle de pizza, je me dirige nonchalamment vers une boucherie située de l’autre côté de la rue. »


Il fait des rencontres au gré de son périple, de personnages intéressants, d’autres originaux, qui vont le guider, lui donner des pistes pour aller de l’avant dans son enquête.
Le lecteur découvre également la langue de l’Afrique du Sud, l’africaans, faite de plusieurs langues, dont le néerlandais, de langues locales, et les dialectes et autres langues parlées. L’Apartheid puis la Réconciliation font partie du passé, mais ça c’est en théorie. Le racisme est plus que jamais encore très prégnant, des métiers ou activités sont réservés aux Noirs, d’autres accessibles seulement aux Blancs, des insultes fusent, destinées aux Noirs, les Blancs ne se mélangent pas. Dans les contrées plus reculées, c’est encore pire qu’en ville, le racisme est franc et massif, tandis que dans les villes il apparaît plus masqué, plus hypocrite. Van Reybrouck est choqué. Il culpabilise aussi…

Au fur et à mesure de l’avancée du livre, l’auteur évoque ses recherches faites à Gand, en Belgique, la consultation des différentes archives dans des institutions diverses qui l’ont mené à aller sur le terrain pour vérifier si Maeterlinck a pillé Marais. Car ce plagiat est bien difficile à avaler pour David Van Reybrouck.

Van Reybrouck qui est l’auteur et également le narrateur, puisqu’il s’agit d’une histoire vécue (une non-fiction), nous décrit aussi, tel un entomologiste, la vie des termites dans leur termitière, leur rôle, leur morphologie. Ordre, obéissance sont de rigueur…, ces colonies sont encore plus sophistiquées que celles des fourmis ou des abeilles. Pour les entomologistes et pour Maeterlinck, ces petits insectes sociaux, c’est l’Homo sovieticus. L’équation est la suivante : termites = totalitarisme.

Malgré leur grande diversité, tous les termites ont en commun une organisation sociale rigide. Ils ont élaboré une société dans laquelle certaines castes spécifiques remplissent des tâches bien précises. Il y a ainsi des termites-ouvriers, des termites-soldats et un couple royal. Les ouvriers, aveugles et stériles, forment la plus grosse partie de la colonie et accomplissent l’essentiel du travail. Ils se déplacent dans des galeries et des tunnels souterrains et effectuent des razzias afin de rassembler des vivres pour nourrir le reste de la communauté…

Ce livre est riche et très intéressant : la description d’un voyage lointain, une leçon d’entomologie très divertissante, un environnement politico-social de l’Afrique du Sud, les recherches sur les textes des deux scientifiques, les témoignages, et beaucoup d’autres événements encore.

S’il part avec un but précis, Van Reybrouck reviendra-t-il avec une réponse ? Le but de ce voyage ne sera peut-être pas celui qu’il avait envisagé en partant.

Agréable lecture, je recommande vivement ce livre !


mots-clés : #nature #segregation #voyage
par Barcarole
le Jeu 30 Mar - 12:58
 
Rechercher dans: Écrivains européens de langue néerlandaise
Sujet: David Van Reybrouck
Réponses: 16
Vues: 1327

Joseph Conrad

Lord Jim
Roman, publié en 1900, écrit entre septembre 1899 et juillet 1900.
Titre original "Lord Jim", 470 pages environ, deux parties, quarante-cinq chapitres.

Tag voyage sur Des Choses à lire - Page 8 Lord_j10

Comme d'autres titres de Conrad, il est possible de le lire ici.

Conrad a entrepris Lord Jim en souhaitant faire beaucoup plus court, vingt-cinq mille mots, soixante-quinze pages environ, une nouvelle complémentaire de Jeunesse et d'Au cœur des ténèbres. C'est en ce sens qu'il signe avec la revue écossaise Blackwood's magazine, pour une parution en feuilleton. Nul ne se doute alors, à commencer par l'auteur, que l'ouvrage final sera de si longue haleine, qu'il comprendra deux vastes parties denses et bien distinctes, presque deux romans en un.

Conrad a dû s'employer. Il n'avait jamais alors exploré ses possibilités d'écriture sur une distance allant au-delà de la centaine de pages. Or, dans cette relative terra incognita de ses possibilités littéraires, il finit son roman en athlète-marathonien enfiévré, sur la bagatelle de vingt et une heures d'écriture non-stop pour apposer le point final !!

Le procédé littéraire lui fut reproché, je veux dire ce discours interminable de Marlow. De bien futiles et savants critiques ont calculé que Marlow a dû parler onze heures de rang, ce qu'ils jugent peu probable et donc disqualifiant pour cet ouvrage.
Tout à l'opposé cela me semble très moderne, comme "impossibilité physique", ça le fait sortir d'un réalisme millimétré.
Et je suis presque chagriné que Conrad ait cru bon de leur répondre, au lieu de se contenter d'un vague haussement d'épaule.

Lord Jim, entreprise novatrice, s'avère éprouvant pour le lecteur, lequel est sollicité, en effet la matière est très riche, et tout n'est pas dans la linéarité chronologique.

Comme le roman se veut une compilation, faite par Marlow, de témoignages, dont le sien propre, nous devons garder les faits mais aussi les petits indices (un peu comme dans un polar) susceptibles de ressurgir: d'où la nécessité, au moins pour chaque partie (on peut souffler longuement au milieu), d'une lecture assez rapide, histoire de bien tout garder frais en tête.
Le discours de Marlow, méandreux, à bâtons rompus parfois, n'est pas effectué par un professeur, ni par un enquêteur professionnel, mais par un pair, certes plus expérimenté et plus élevé en grade et c'est cela que veut restituer (ou instituer comme procédé) Conrad.

D'où, et nous en sommes gré à l'auteur, les détours discursifs et les petites longueurs (rares, au reste) narratives, rendant ainsi un cachet certain et une belle atmosphère à l'ensemble. Il y a ce côté "élucubrations entre gentilshommes (ou racaille) de mer", ressassant au rythme d'une lenteur régulière, qui sonne bien.  

__________________________________________________________________________________________________________________________________

De quoi s'agit-il ?

D'un jeune gentleman face à l'honneur, au devoir, à la solidarité, aux codes du métier de marin. Une histoire de courage, de loyauté, de manquement. En somme assez Kiplinguienne, la thématique, assez "empire britannique sur lequel le soleil ne se couche jamais".

Mais quel traitement !
Tout part, avec une excusable prémisse ancienne, d'un travers dans lequel Jim (re)tombe. Puis, qui fuit, sur une chance donnée par Marlow, le monde, toujours plus discret, toujours plus à l'est, à mesure que son histoire le rattrape.
Est-il encore "l'un des nôtres" ? (Marlow assène, à longueur de chapitres, qu'en effet c'est "l'un des nôtres").

Marlow, par son entregent, lui permet une dernière chance, dans un recoin de l'Indonésie hors du temps. Où il devient Tuan Jim, Lord Jim. Sans dévoiler le final de cette tragédie, et pourtant il le faudrait, car il se pose là et ce n'est rien de l'écrire, le "je" narratif passera entre plusieurs bouches ou écritures, revenant parfois à Charlie Marlow: le procédé n'est si fréquent, il fallait oser !

Les personnages secondaires sont extraordinairement campés, et vraiment, quand Conrad s'attarde sur "le célibataire blasé entre-deux âges qui avait une réputation d'excentrique et possédait une rizerie", ou Chester, ou Stein (ah, Stein !), Brown, Jewel, Doremin, Tamb'Itam, Cornelius, le Rajah dans la seconde partie, ou bien "le Lieutenant français d'un certain âge" rencontré à Sidney, l'extraordinaire Brierly, Mr Jones, le Capitaine et le chef-mécanicien du Patna dans la première, ce ne sont pas de ces sous-lectures au sein d'une lecture principale, qui alourdissent le pavé, mais du bon trait croqué, des gens dont le témoignage, le regard, ne sont pas forcément ceux de Marlow, et qui viennent, à leur manière, nous illustrer mais aussi nous complexifier le cas Jim.

Enfin, mais que cela ne soit pas réduit à cette seule dimension, c'est -et vous vous en doutez bien sûr- un livre de mer et d'aventure de haute tenue.
Qu'est-ce avant tout, sinon un chef-d'œuvre (au reste reconnu, je crois) aux pistes et questionnements toujours très intemporels ?

_______________________________________________________________________________________________________________________________


Relire Lord Jim une fois de plus ?

J'en brûlais. Au point (c'est ridicule, et de bout en bout j'en fus conscient) de mettre en place une véritable mise en scène, que j'ai respectée à la lettre.
Le grand privilège de la relecture, c'est peut-être cela: pouvoir se placer en situation optimale.

Lecture démarrée dans une tente ouverte (sauf la moustiquaire), à la lueur d'une frontale, une fin de nuit d'août très sereine, avec comme seul fond sonore le ressac, quelques feuilles d'arbres bruissant à peine, et des odeurs salines, de mer.    
Captain Charlie Marlow peut prendre la parole et se lancer dans son discours interminable.

Puis prolongée, aux toutes premières lueurs, et après l'intermède d'un café sur le réchaud, au bout d'une grève sableuse, contre quelques rocs calcaires, avec la compagnie de ces petits crabes si craintifs, de couleur vert-bronze.  

Magnifique lever de soleil, des stries régulières d'abord rosâtres sur ton suie, puis orangées sur ton cendre. Et le ciel se mirait à l'identique sur les flots d'huile absolument, sauf sur une légère frange agitée d'un faible clapot le long de la berge.

J'attendais la chaleur d'août, la canicule, celle de l'air épais et comme gluant, je ne l'ai pas eue, au moment de lire le balancement des pankas dans l'air surchauffé, irrespirable.

Les estivants commençant à se déverser, un recoin du port (enfin, pas du côté port de pêche ni port de plaisance), laissé aux herbes folles, puis un paisible vieux marais, envasé, à l'abandon, fournirent les lieux propices à la lecture de la première partie, pliée en 24 heures.

La seconde fut avalée en deux longs traits, deux nuits, à la maison. Puis j'ai traîné à plaisir sur les soixante-dix dernières pages (chapitre 37 et suivants), que j'avais autrefois avalées tel un boulimique, pressé de connaître l'issue, puis lors de la relecture précédente, pages parcourues sans trop chercher à voir ce qu'on peut scruter au-delà des mots et des situations, de l'action.

Pas plus de dix pages par jour. Quand le dénouement est déjà connu, il reste encore à apprécier la manière de le conduire, tout ce que je n'avais pu (ou plutôt su) apprécier jusqu'à présent.  

____________________________________________________________________________________________________________________________

Deux extraits:

Chapitre 10 a écrit:Je fus frappé par la vérité suggestive de ses paroles. Elle est très particulière, la situation d'un petit canot isolé sur une mer infinie. Sur ces vies évadées de l'ombre de la mort plane le spectre de la folie. Lorsque l'on a perdu son navire, c'est l'univers entier que l'on a perdu; cet univers qui vous a façonné, qui vous a contraint, qui a pris soin de vous.
L'âme des hommes qui flotte au-dessus d'un abîme, en contact avec l'immensité, se croit autorisé à se livrer à n'importe quel excès d'héroïsme, d'absurdité ou d'abomination.
Évidemment, comme pour les croyances, la pensée, l'amour, la haine, les opinions, et même l'aspect extérieur des objets concrets, il y a autant de sortes de naufrages que de sortes d'hommes; et, dans ce cas-là, il y avait un élément d'abjection qui rendait l'isolement plus complet.
Il y avait des circonstances d'une vilenie qui coupait plus radicalement ces rescapés de tous les autres hommes, de ceux qui n'avaient jamais eu à subir l'épreuve de cette farce démoniaque. Les trois hommes étaient exaspérés contre lui parce que c'était à contrecœur qu'il avait déserté; lui les rendait responsables de la haine et du dégoût que tout cela lui inspirait.
Il aurait voulu se venger sur eux de l'ignoble tentation qu'ils avaient poussée sous ses pas.
Rien de tel qu'un canot en haute mer pour libérer l'irrationnel tapi au cœur de toute pensée, de tout sentiment, sensation ou émotion.  


Chapitre 19 a écrit:Tous furent également empreints de cette absurde noblesse d'intention qui rendait leur futilité profondément émouvante. Renoncer à son pain quotidien afin d'avoir les mains libres pour se colleter avec un fantôme est peut-être un acte d'héroïsme prosaïque.
D'autres l'ont fait avant lui (mais nous, qui avons vécu plus longtemps, nous savons que ce n'est pas une âme obsédée, mais un corps affamé qui fait le hors-la-loi), et certains hommes qui mangeaient et entendaient bien manger chaque jour ont applaudi à cette folie pleine de bonnes intentions. La chance n'était pas avec lui, vraiment, car toute cette instabilité ne pouvait parvenir à le mettre à l'abri de ce fantôme.
Un doute subsista toujours sur son courage. La vérité, me semble-t-il, c'est qu'il n'est pas possible de se libérer du fantôme d'un fait. Vous pouvez lui faire face, ou l'éviter, - et j'ai connu un ou deux hommes capables de faire un clin d'œil à leurs spectres familiers.
Manifestement, Jim n'était pas un homme à clins d'œil.
Mais ce que je n'ai jamais pu tirer au clair, c'est si sa stratégie avait pour but d'éviter son fantôme ou de le défaire en combat singulier.  



(Ramené toiletté d'un commentaire du 31 août 2014, et du 1er septembre 2014 pour les extraits)



mots-clés : #aventure #voyage
par Aventin
le Dim 19 Mar - 7:36
 
Rechercher dans: Écrivains européens de langues anglaise et gaéliques
Sujet: Joseph Conrad
Réponses: 95
Vues: 13331

W.G. Sebald

Tag voyage sur Des Choses à lire - Page 8 416kbg10

Vertiges


CONTENU:
Sebald raconte dans da façon bien à lui – dont on a déjà parlé plus haut: c’est à dire un mélange de notes de voyage, impressions, images. Il parle de Henri Beyles, alias Stendhal, de ses voyages et offensives militaires au début du 19ème siècle au Nord de l’Italie et au même moment d’un séjour qu’y a fait Franz Kafka en 1913. C’est dans leurs traces que le narrateur visite en 1980 et 1987 ces mêmes lieux et encore autres en Autriche et, sur le chemin de retour, aussi en Allemagne. Par des motifs répétitifs et des allusions comparables dans ces niveaux différents, Sebald crée chez le lecteur un sentiment de liens tissés étroitement entre le passé et le présent, une parenté entre ces trois personnages. Ce qui semble propre et caractéristique pour ces trois personnes, c’est le sentiment d’une étrangeté, d’une forme de distance, d’aliénation, même d’une inquiétude vis-à-vis la réalité et eux-mêmes : oui, des sentiments de vertige !

REMARQUES :
Paru en Allemagne en 1990, Vertiges est en réalité le premier livre de W.G. Sebald. Pour moi il fut le deuxième livre de l’auteur, mais après « Austerlitz » je ne fus nullement décu. J’ai retrouvé ce style si particulier à Sebald et une maîtrise de la langue allemande qui rappelle des classiques d’un autre temps. Mais peut-être cette utilisation n’est pas ici si écrasante et construite  comme dans « Austerlitz », mais un peu plus aérée, oui, même légère et des fois drôle? Je pense par exemple à une situation grotesque dans un café « Rose des Alpes » qui avait jamais servi personne et où on aurait été tout à fait perdu à l’apparition d’un premier hôte !
Mais on trouve encore, ou déjà, les sujets si essentiels de Sebald : la mémoire, le souvenir, le passé. Comment est-ce que je me souviens? Est-ce que je peux faire confiance à mes souvenirs? Où est-ce que je suis en moi et à l’extérieur, même chez moi et dans ma patrie, un étranger ? Ce dernier sujet se relate particulièrement sur ses propres expériences avec sa non-patrie l’Allemagne et le vécu dans sa famille.

Mais c’est fascinant comment cet écrivain qui laisse dans un certain sens derrière lui son pays d’origine, s’approprie par le travail de l’écriture un univers, dans lequel les événements les plus divers, des expériences de différentes vies, pays et époques sont mis en relation, parenté et parallèles ! Par cette manière des frontières de temps et d’espace semblent tomber et apparaît une certaine unité !

Quel auteur !


mots-clés : #voyage
par tom léo
le Jeu 2 Mar - 22:41
 
Rechercher dans: Écrivains européens de langue allemande
Sujet: W.G. Sebald
Réponses: 74
Vues: 8394

Vassili Golovanov

Tag voyage sur Des Choses à lire - Page 8 Captur21

ELOGE DES VOYAGES INSENSES

A l'extrême nord de la Russie, dans la mer de Barents, il est une île « presque ronde ; légèrement relevée sur les côtés comme une pièce de monnaie ancienne et usée. Verte : relief de plaine. Et aussi, quelques rivières, quelques lacs, des collines. D'étranges étendues de sable... » Cet âpre bout de terre émergée, tout près du pôle, c'est Kolgouev, où survivent, livrés à la pauvreté, dans un village crasseux, quelques centaines d'habitants, descendants des Nenets, éleveurs de rennes. Avant de débarquer à Kolgouev, au début des années 90, le journaliste et écrivain russe Vassili Golovanov en avait longtemps rêvé - rêvé d'une île, quelle qu'elle soit, où qu'elle soit, pourvu qu'elle soit le support de son besoin de mystère et d'enfance, pourvu qu'elle lui soit une échappatoire à une vie insatisfaite, un mariage en miettes, un dégoût général, un début de folie peut-être. « C'est l'idée de l'île que j'ai aimée, bien avant d'y mettre le pied », confesse Golovanov, qui y est bel et bien allé, plusieurs fois et, de ces séjours austères aux confins oubliés de la Russie postsoviétique, a nourri cet ouvrage d'un lyrisme sans mesure. Un Eloge des voyages insensés, insensé lui-même, tant il brasse d'informations, de réflexions et de descriptions. Tout ensemble autofiction, récit de voyage très physique, méditation exaltée sur la place de l'homme dans la nature et le monde, le sens de la vie de l'individu, la destinée collective des peuples..., ce gros livre baroque semble avancer sans fil directeur, mais jamais ne s'égare. Il digresse du côté de la mythologie et de l'histoire, il est secoué parfois d'accès de fièvre, mais sait s'arrêter longuement devant d'admirables paysages septentrionaux, déclinant dans l'air sec et transparent toutes les nuances du gris, du vert, du blanc.


Verdier

Nathalie Crom, Télérama

J' ai lu ce livre il y a près de dix ans mais j' en ai gardé un grand souvenir.
Entre fiction et reportage. Philosophie et onirisme.
Un livre inclassable mais superbe. B



mots-clés : #insularite #voyage
par bix_229
le Ven 24 Fév - 16:54
 
Rechercher dans: Écrivains Russes
Sujet: Vassili Golovanov
Réponses: 1
Vues: 746

Sylvain Tesson

Tag voyage sur Des Choses à lire - Page 8 Tesson11

Sur les chemins noirs

Mon premier Tesson.
Je le dis comme un enfant fier de montrer sa première dent.
Je le dis parce que j'ai beaucoup aimé ce voyage à la fois simple et érudit, inquiétant et rédempteur en compagnie d'un Sylvain Tesson plus que diminué, quasiment moribond.
Tombé d'un toit sur lequel il faisait le guignol, ivre ; l'homme se relève longtemps après le corps couturé, soudé, épinglé, la colonne vertébrale cloutée et le visage en capilotade. Il n'a plus qu'un seul désir : reprendre la marche, se donner un objectif qui lui permettra de regagner confiance en lui.

Pour cela, Tesson, s'empare d'une carte de France sur laquelle sont noircis les lieux de ce qui s'appelle l'hyper-ruralité, c'est-à-dire des endroits qui ne sont pas entravés par le numérique, les nationales, les ZAC ou les barres d'immeuble. Des chemins sur lesquels on peut marcher (presque) librement d'un lieu à un autre sans croiser de ville dortoir, d'autoroutes et où l'on peut faute parfois d'autres moyens remonter les anciennes voies ferrées abandonnées pour rejoindre un bivouac en pleine nature.

L'idée est donc de partir de Provence, du parc du Mercantour, de remonter vers le Massif central en passant par l'Aubrac et de poursuivre son chemin jusqu'à La Hague, destination finale d'une marche qui loin d'être triomphale sera entrecoupée d'un séjour forcé à l'hôpital et d'un long cheminement mental sur la fuite du monde. Car si projet il y a, le véritable enjeu pour Tesson est de trouver en terre de France des havres de paix, des endroits protégés ou ni les hommes, ni leurs infrastructures aliénantes n'ont cours. Il y parvient souvent difficilement mais malgré tout, on ne peut que s'émerveiller de sa façon à la fois désespérée et profondément dandy d'appréhender la nature et les hommes.

J'ai beaucoup aimé ce voyage du repli, cette volonté d'anéantissement, ce désir de se fondre pleinement dans la nature afin d'échapper (de manière sans doute illusoire mais c'est déjà ça) aux diktats qui nous gouvernent : être joignable partout-tout le temps ; être localisable partout-tout le temps ; être un produit partout-tout le temps.

Alors, même si bien sûr, Tesson ne nous dit pas tout de son voyage (et presque rien des incartades qu'il a dû faire pour avancer) cette trouée dans les chemins noirs de la France rurale est une respiration dont il ne faudrait pas se priver et qui donne envie, illico presto de prendre son sac à dos, d'ouvrir sa carte IGN et de suivre du doigt les chemins qui de chez soi pourrait nous conduire au bord du sauvage !

Essayez, vous verrez, c'est une expérience intéressante !


mots-clés : #voyage
par shanidar
le Ven 3 Fév - 13:51
 
Rechercher dans: Nature et voyages
Sujet: Sylvain Tesson
Réponses: 147
Vues: 16737

Colin Thubron

Tag voyage sur Des Choses à lire - Page 8 51qsym10

L'ombre de la route de la soie

La route de la Soie... Route mythique, qui permit aux Romains et aux Chinois d'échanger des objets sans jamais pourtant se rencontrer, carrefour des cultures, voie d'expansion des religions, théâtre des plus beaux métissages comme des plus tragiques carnages...
Colin Thubron entreprend un voyage de près de huit mois qui, de la Chine à Antioche, le conduira sur les pas de ces millions d'hommes qui, au fil des siècles, à dos de chameau ou à pied, à travers les plaines fertiles comme les déserts les plus arides, ont fait notre histoire.

Tout commence en Chine... La Chine que Colin Thubron avait traversée dix-huit ans plus tôt et à laquelle il avait déjà consacré un livre, Derrière la grande muraille. Les changements sont édifiants, et le voyageur ne reconnaît plus rien ; à l'extérieur des anciens remparts de Xian surgit la ville nouvelle :

A l'extrémité de chaque boulevard, une porte-forteresse inscrit dans le smog son profil jaune maladif, tandis que, hors les murs, se dressent des attroupements de gratte-ciel sururbains, fantômes de l'avenir en attente du moment de faire irruption.  
Et l'avenir n'en peut plus d'attendre. La ville entière est prise dans une tourmente de construction.


Pourtant, ce ne sont pas les spectaculaires buildings de la Chine nouvelle qui intéressent l'auteur, mais au contraire les hauts lieux qui ont fait l'histoire. Et peu importe leur apparence ; Colin Thubron s'attache bien plus à l'essence des choses, et la jambe d'une statue, modeste et unique vestige d'un complexe de plus de mille temples taoïstes, l'émouvra bien plus que les clinquantes restaurations de Samarcande.
Merveilleux conteur, il fait revivre avec un talent rare les événements historiques dont chaque monument fut le témoin, ou le résultat. De l'unification de la Chine à la révolution islamique iranienne, de l'arrivée du bouddhisme en Chine au voyage de Marco Polo, nous faisons avec lui d'incessants allers-retours au fil de l'histoire, avec un rare bonheur.

Mais un voyage, c'est aussi et avant tout la rencontre de l'humain dans sa diversité, ses aspirations, son quotidien. L'une des grande qualités de Thubron, c'est qu'il ne noie pas ses lecteurs sous un flot d'innombrables rencontres toutes mises sur le même plan. Il choisit au contraire avec soin et sensibilité les conversations qui, toutes, à leur mesure et par petites touches, donnent à sentir un peu de l'âme d'un peuple.
Ses retrouvailles avec les amis que ce voyageur inlassable s'est fait au cours de précédents périples sont l'occasion de parler de l'évolution récente des pays parcourus, à partir de considérations générales ou d'expériences personnelles. Mais les rencontres de hasard sont tout aussi riches en enseignements, et éveillent chez l'auteur comme chez le lecteur des sentiments forts et contradictoires. Etonnante d'équilibre et de force, cette jolie jeune fille mongole, perdue en pleine steppe, qui avoue son désir de ne jamais quitter la solitude des grands espaces ; glaçant, ce sympathique profeseur iranien qui affirme tranquillement qu'à cause de la culture occidentale les sentiments purs ont disparu dans ce pays. Les femmes ont pris conscience de leurs corps et ça les a corrompues.

Et puis, il y a aussi ces instants fugaces, qui dégagent un charme indéfinissable, ou laissent une impression indélébile, une gorge nouée. Comme ici, au milieu de nulle part, sur un site sacré ou l'on vient prier pour une vie meilleure :

J'avais des raisons d'être ici. J'avais entendu parler d'un curieux [i]mazar dans les collines, au sud. (...) On s'accroupit au pied de l'éminence, près d'un demi-cercle de pierres noircies par le feu, où des moutons avaient été sacrificiés, et on pria.
_ Vous êtes chrétien? S'enquit l'imam en ouvrant les mains. Il y en a aussi qui viennent ici. Tout le monde vient. (...) Un ermite était monté aux cieux depuis une grotte située au-dessus de nous, et quiconque s'y allongeait guérissait de l'épilepsie et de la folie.
Des personnes d'une même famille s'étaient précautionneusement alignées en contrebas de ce lieu. Leurs prières vibraient et mouraient tour à tour. Une petite fille s'était écartée du groupe  pour se balader dans les rochers. Un cri de colère fusa : on vit son frère cadet brandir un fouet et lui hurler l'ordre de venir "Aux pieds !". Elle revint prendre sa place dans la file, hébétée, et ils se remirent à prier à l'unisson.
_ Elle a une maladie nerveuse, expliqua l'imam. Dans la tête.
Ce n'était qu'une écolière _ 16 ans, peut-être _, aux yeux écartés et inquiets dans un visage pâlot. L'imam récita une prière au-dessus d'elle d'une voix monocorde, dure et rapide; elle le contemplait d'un air d'incompréhension. Il lui prit un bras qu'elle retira vivement. Sa mère s'agitait autour de l'imam en guise d'excuse; le frère se tapotait la jambe de son fouet. La fillette se détourna d'eux pour me dévisager avec stupéfaction. Je lui sourit et elle essaya de parler.
_ Il vient d'Angleterre, expliqua la mère.
La petite fille s'avança et s'appuya contre mon épaule, peut-être parce que j'étais le seul à ne pas crier. En lança soudain en anglais:
_ How do you do ?
_ Elle apprend l'anglais, commenta la mère. Elle est en CM2.
_ Were are you ? Who is your name ? continua  la petite, qui répéta après moi : Colin... (Sa voix était à peine plus qu'un murmure.)
_ Et toi, comment t'appelles-tu ?
_ Je m'appelle Nurana, dit-elle, prononçant ce nom comme si c'était sa seule fierté.
Les siens la tirèrent pour remonter à la grotte. Elle avança en tournant la tête en arrière, le regard figé.
[/i]


Je n'étais a priori pas attirée par les récits de voyage, et pourtant cet ouvrage m'a passionnée, émue, ravie. L'ombre de la route de la soie n'est pas seulement un récit de voyage, c'est également un fantastique livre d'histoire à même de passionner ceux que cette discipline n'attire pas outre mesure. Et c'est aussi un regard tendre et lucide sur le monde actuel. Mais c'est surtout le livre d'un grand écrivain, que je conseille sans réserve !

(Ancien commentaire remanié)


mots-clés : #voyage #historique
par Armor
le Mar 24 Jan - 18:11
 
Rechercher dans: Nature et voyages
Sujet: Colin Thubron
Réponses: 6
Vues: 815

David Grossman

Une femme fuyant l'annonce

Tag voyage sur Des Choses à lire - Page 8 41pbmq10

Ora, une femme séparée depuis peu de son mari Ilan, quitte son foyer de Jérusalem et fuit la nouvelle tant redoutée : la mort de son second fils, Ofer, qui, sur le point de terminer son service militaire, s’est porté volontaire pour « une opération d'envergure » de vingt-huit jours dans une ville palestinienne. Comme pour conjurer le sort, elle décide de s’absenter durant cette période : tant que les messagers de la mort ne la trouveront pas, son fils sera sauf. La randonnée en Galilée qu’elle avait prévue avec Ofer, elle l’entreprend avec Avram, son amour de jeunesse, pour lui raconter son fils. Elle espère protéger son enfant par la trame des mots qui dessinent sa vie depuis son premier souffle, et lui éviter ainsi le dernier.

À travers le destin bouleversant d’une famille qui tente à tout prix de préserver ses valeurs et ses liens affectifs, l’auteur nous relate l’histoire de son pays de 1967 à nos jours et décrit avec une force incomparable les répercussions de cet état de guerre permanent sur la psyché des Israéliens, leurs angoisses, leurs doutes, mais aussi la vitalité, l’engagement, et l’amour sous toutes ses formes.  


Dès le prologue, on constate une puissance narrative, David Grossman ne fait pas qu’écrire et conter, il transbahute son lecteur sur un terrain miné qui tord les tripes. Il ressort de chaque personnage une extraordinaire humanité, une sensibilité singulière, un esprit divin.   Je n’ai pu me détacher de ce chef d’œuvre à la construction si parfaite qu’elle en est bien rare. Comment aborder le conflit Israélo-Palestinien sans tomber dans une gigantesque lourdeur ? C’est un homme ayant perdu son enfant tombé au Liban qui nous offre ce texte colossal, sans trébucher dans le sentimentaliste, juste un hymne admirable, une éloquence  de toute beauté. Un conflit abordé au travers d’une mère, Ora, fuyant de chez elle afin d’éviter l’éventuelle annonce des messagers de la mort alors que son fils s’est porté volontaire pour se battre, une manière de conjurer le sort  ne pouvant se résoudre à l’attendre. Pas d’annonce, pas de mort. C’est en ayant le ventre lacéré par ses entrailles que débute une élégie maternelle lors de son voyage en Galilée avec l’un de ses  amours de jeunesse, une introspection du destin de trois personnes brutalisées par un combat survivant dans la noirceur des sévices moraux et physiques. Ora  ou l’aura absolue, souveraine dans son royaume d’Israël fait de cendres et de  poussières, d’une force  admirable, les étincelles  d’une souffrance immarcescible. De cette guerre qui consume, incendie les âmes, calcine les espérances jaillit ce roman flamboyant , éblouissant.
Un livre  monumental et d’une profonde maîtrise dont on ne ressort pas indemne face à l’évidence que la guerre coule dans les veines, nourrit dès la plus jeune enfance  ceux d’une « terre promise », mais à qui ?


" En l’écoutant bredouiller des explications, les yeux baissés, Ora découvrit avec horreur que personne ne lui avait demandé de rempiler. Officiellement, il était libéré de ses obligations militaires et redevenu un civil. C’était son initiative, admit Ofer, le front buté, virant à l’écarlate, il n’allait pas manquer l’aubaine ! Pas question ! « Durant trois ans, j’en ai bavé pour me préparer à ce genre d’opération. » Trois années de barrages et de patrouilles, au cours desquelles il s’était fait matraquer à coups de pierres par les gamins des villages palestiniens ou des colonies, sans parler du fait qu’il n’était pas monté dans un tank depuis six mois, et maintenant, avec la déveine qui le caractérisait, il allait louper une expédition pareille avec trois unités blindées ! Il en avait les larmes aux yeux. On aurait dit qu’il lui demandait la permission de rentrer tard d’une soirée avec ses camarades de classe. Comment pourrait-il se prélasser à la maison ou se promener en Galilée pendant que ses camarades iraient au casse-pipe ? Bref, elle comprit qu’il s’était porté volontaire de son propre chef, pour vingt-huit jours."






mots-clés : #conflitisraelopalestinien #guerre #psychologique #voyage
par Ouliposuccion
le Mar 24 Jan - 17:23
 
Rechercher dans: Écrivains du Proche et Moyen Orient
Sujet: David Grossman
Réponses: 15
Vues: 1658

Friedrich Gorenstein

Tag voyage sur Des Choses à lire - Page 8 Gorens10

c'est un de mes pieds de l'année dernière Compagnons de route, récup de l'avis d'alors :

comment dire ça ? dans ce voyage en train qui permet de traverser les strates géographiques d'un moment donné il y a de nombreuses occasion pour le narrateur/voyageur et son interlocuteur de revenir dans des strates historiques personnelles et collectives. une découverte de l'Ukraine, avec la Pologne voisine, entre l'Europe occidentale et la Russie sans se situer dans l'exposé historique mais sans non plus taper simplement dans l'anecdote. l'histoire de Tchoubinets, paysan, reconverti dans le théâtre donne déjà de quoi réfléchir, personnage atypique et déplacé, considéré avec autant de distance que de sympathie. dans le livre on a de multiples façon de ressentir les écarts sociaux, d'origine, de classe même à un niveau plus fin que celui habituellement admis. ce n'est pas que fais-tu mais d'où viens tu qui compte.

pas rigolo et complexe avec en retours constant l'antisémitisme à travers les régimes, ces deux ou trois ou quatre "périodes historiques" (avant, pendant la guerre, communisme ensuite puis le frémissement qui annoncerait une fin) donnent de la consistance mais le style que je qualifierai de détendu mais diablement précis brille surtout par un parfait sens de l'alternance et du rythme de la narration. Un rythme lié au voyage et à la collaboration entre le narrateur et l'auditeur, les narrateurs et les auditeurs, un temps de la mémoire et de la transformation, le temps de la passerelle de l'imagination.

une lecture qui procure donc beaucoup de plaisir, genre plat évident et classique, franc en bouche qu'on fait exprès de goûter avec trop de précautions pour faire durer et renforcer le plaisir alors qu'on ne s'empêche pas vraiment de dévorer ? une histoire comme ça.

avec toutes ces qualités, par association d'idées, j'évoquerai un auteur comme Ivo Andric. la tonalité et le ton sont différents, le pays aussi mais ce genre de qualités et de plaisir de lecture...

et pour ma part c'est aussi grâce au héros-limite cette lecture !


mots-clés : #segregation #voyage
par animal
le Dim 22 Jan - 12:55
 
Rechercher dans: Écrivains Russes
Sujet: Friedrich Gorenstein
Réponses: 4
Vues: 1158

Joseph Mitchell

Tag voyage sur Des Choses à lire - Page 8 011010

j'ai terminé Street Life (titre du premier chapitre)

que dire ? sinon que je me suis promenée agréablement dans les mots de l'auteur.

Que le premier récit, m' a rappelé les "flâneries urbaines "  
La découverte de la ville de NY en suivant le regard de l'auteur est étonnante. Tout spécialement, les trajets en bus qui montrent l'horizontalité de la ville ; les messes auxquelles assiste Mitchell parce qu'il faut connaître le fond pour appréhender la forme.
En fait il apprécie surtout les vieux bâtiments, autant leur construction que leur démolition. Il visite la ville du plus haut au plus bas. Du plus petit ornement à la plus haute statue.
J'aime que l'auteur lie ce qu'il voit à la main de l'ouvrier qui l'a construit. Les lieux "d'accès interdit" ne le sont pas pour lui.

c'est un récit rythmé.

Dans le bras d'eau

Une agréable, goûteuse et olfactive promenade dans le passé, l'enfance de l'auteur dans sa région (Caroline du Nord)
des aller-retours entre son lieu de naissance et NY car éloigné de l'un ou de l'autre il a la nostalgie.
J'ai suivi l'adolescent dans ses aventures sur le bras de rivière Pittman Mill Branch.

Par  les passés

C'est un homme qui vit dans les passés, le sien, ceux des villes,  les souvenirs des personnes si diverses qu'il a rencontrées dans son travail journalistique, notamment,
L' évolution de NY masque le passé, son passé.

Suit en postface des notes de l'auteur (avec plus particulièrement son attention aux oeuvres de Posada)

Tag voyage sur Des Choses à lire - Page 8 Jose-g10

j'ai noté aussi l'une de ses lectures cultes "Finnegans Wake" de James Joyce, ses deux livres de l'ancien testament : le livre des proverbes et de l'écclésiaste.

Puis Mémoires interrompues de François Tizon où le lecteur apprend que durant les trente dernières années de sa vie Mitchell n'a plus publié, pourtant il disait écrire. Mais c'est du passé.


mots-clés : #voyage
par Bédoulène
le Dim 22 Jan - 10:47
 
Rechercher dans: Écrivains des États-Unis d'Amérique
Sujet: Joseph Mitchell
Réponses: 17
Vues: 1086

Cees Nooteboom

Tag voyage sur Des Choses à lire - Page 8 Nooteb11

HOTEL NOMADE

« Pour moi la seule force qui nous permet d’endurer notre condition sur terre entre nos deux absences infinies, c’est le pouvoir de l’imagination. »

Cees Nooteboom est un écrivain voyageur. L'un ne va pas sans l'autre.
Il voyage en pensant à ce qu'Il écrira à  son retour. Il écrit en imaginant son prochain voyage. Sur le terrain ou en chambre close.
En fait, il ne cesse jamais d' imaginer, de penser, d'écrire et de voyager.

Voyageur il emmagasine ses souvenirs, ses impressions, accordant toute son attention aux détails et aux symboles.
Ici et là, il rencontre des hommes animés par la passion d'une vie.
Il trouve ou retrouve des églises, des temples, des musées, des hotels, des iles et il compose après coup des textes maginfiques à l'allure de mosaïque.
Et ses récits sont le fruit d'une réflexion etonnante, poétique et  toujours très personnelle.
Il réinvente la réalité pour son plaisir et pour le notre.


"Celui qui voyage constamment est toujours ailleurs, c'est vrai pour lui-même toujours absent, et c'est vrai pour tous les
autres, ses amis , car s'il est vrai que pour soi-même, on est toujours ailleurs, et  qu'il y a donc  toujours un endroit où l'on n'est pas, il y en a toujours un aussi où l'on est constamment, à savoir avec soi-même.

Et si primaire que soit cette vérité, on met bien du temps à la comprendre vraiment."


mots-clés : #creationartistique #voyage
par bix_229
le Lun 16 Jan - 19:53
 
Rechercher dans: Écrivains européens de langue néerlandaise
Sujet: Cees Nooteboom
Réponses: 49
Vues: 10354

Olivier Rolin

Sibérie


Tag voyage sur Des Choses à lire - Page 8 Talach14


Publié aux éditions inculte, ce livre est un hommage à la Sibérie, un lieu intime pour Olivier Rolin, puisqu'il s’ « étonne de penser que j'ai passé plus de temps dans la capitale de la Sibérie orientale qu’à Lyon, mettons, ou Toulouse. ».

C'est un ouvrage plutôt journalistique puisqu'il  regroupe
- trois textes qu'Olivier Rolin a lus sur France Culture suite à sa participation au voyage transsibérien organisé pour une quinzaine d'écrivains français en 2010
- trois articles écrits pour Le Monde en 2001 décrivant son séjour à Khatanga, et son expedition au  pôle Nord en compagnie de touristes de l'extrême
- un article de 2004, racontant sa visite sur les lieux de le Kolyma.

Il ne faut donc pas en attendre la belle prose et l'émotion intrinsèque qu'on peut trouver dans d'autres écrits. On n'y trouve cependant bien le recul,et l’humour discret et  le regard personnel à la fois empathique et distant d'Olivier Rolin.
J'en retiendrai notamment une scène hilarante où, parti de Moscou par 20°, arrivant à Khatanga par moins 35, il enfile des collants dans les toilettes de l'avion, et sa visite à un mammouth congelé extrait de la calotte glaciaire. Mais surtout, surtout, Magadan, le dernier article, sur la Kolyma et l’oubli.


 C'est faute de mieux que j'emploie le mot de « curiosité », mais il est bien impropre pour désigner ce sentiment complexe, mélange d’effroi, de respect, d'incrédulité, qui nous saisit sur les lieux où sont arrivées de choses terribles, Verdun, ou Auschwitz, ou la Kolyma. Cela a donc été, c'était là. Le cauchemar de l'Histoire s'inscrit dans une géographie. Et puisque cela n'est plus, puisque je me trouve, moi, là où c'était, c'est aussi une des plus fortes, des plus concrètes expériences du Temps qu'il nous soit donné de faire.


(commentaire récupéré)


mots-clés : #voyage
par topocl
le Sam 14 Jan - 9:52
 
Rechercher dans: Écrivains européens francophones
Sujet: Olivier Rolin
Réponses: 86
Vues: 7383

Conrad Aiken

Tag voyage sur Des Choses à lire - Page 8 Aiken111

UN COEUR POUR LES DIEUX DU MEXIQUE
Edité par La Table ronde/La Petite Vermillon

Deux hommes et une femme quittent les États-Unis pour aller au Mexique. Ce roman est l'histoire de ce voyage.
Les deux hommes aiment cette femme depuis longtemps, mais les aléas de la vie l'ont écartée de leur existence sinon de leur mémoire.
Condamnée à mourir à brève échéance, elle décide d'aller au Mexique avec eux. Et ce voyage avec l'amour et avec la mort se transforme vite en cauchemar. Comme si la mort, délaissant les paysages avait déjà frappé les humains, les transformant en fantômes ou en zombies.

Ce qui m'a ému dans ce livre, c'est le portrait d'une femme comme il en existe de temps en temps dans la fiction comme dans la vie.

"... De type nordique, très blonde ; des yeux bleu gentiane, si ça peut vous dire quelque chose - les plus bleus que vous ayez jamais vus. Mais sur le plan prosaïque, on ne sait pas très bien la décrire, car ce qu'on remarque essentiellement dans son visage, c'est la mobilité, la luminosité. L'énergie et le courage. Son rire est simplement délicieux ; en riant, elle détourne toujours un peu, très peu, son visage, mais sans vous quitter des yeux, à la fois timide et éclatante. Elle est timide. Mais la timidité lui donne une brusquerie, une hardiesse charmantes. On sent en elle un besoin de regarder et de dire la vérité, d'exprimer ses sentiments et c'est ce qu' elle fait. Mon Dieu quelle sincérité ! J'ai souvent pensé, vous savez, qu'elle est l'être le plus transparent que j'aie... Mais en fait la chose la plus étonnante chez elle, et pourtant évidente en même temps, c'est qu'elle fait partie de ces êtres rares qu'on ne peut s'empêcher d'aimer, tout simplement."

Et puis il y a dans ce livre une intensité dramatique à cause de la mort attendue, et de la révolte et de l'amertume des survivants.
Ce livre-là est romantique et les sentiments évoqués deviennent merveilleusement crédibles sous les yeux fascinés du narrateur…

(Message récupéré)

mots-clés : #psychologique #voyage
par bix_229
le Mer 11 Jan - 16:30
 
Rechercher dans: Écrivains des États-Unis d'Amérique
Sujet: Conrad Aiken
Réponses: 5
Vues: 1190

David Lefèvre

Aux quatre vents de la Patagonie / En route pour la Terre de Feu

Tag voyage sur Des Choses à lire - Page 8 311x5010

Récit de voyage de plus d’un an et demi en Patagonie aux multiples rencontres, émerveillements, réflexions. Le but initial est d’élucider le mythe des Césars qui naquit à l’époque de la conquête espagnole et aurait donné lieu à la création d’une cité perdue d’hommes blancs. Mythe beaucoup moins connu que celui de l’Eldorado, D Lefèvre parcourt les montagnes, forêts, rivières, villes perdues, ensommeillées ou fantôme, créant une cartographie mythologique dont le cœur bat des différentes racines de la Patagonie moderne.
Mêlant récits d’exploration, d’histoire, on est également amené à rencontrer et partager avec des gens simples et anonymes qui aiment et n’ont d’autres horizons que ceux nuageux de la Cordillère des Andes ou ceux des tempêtes du détroit de Magellan.
Un vrai plaisir de lecture qui m’a rappelé les récits de Nicolas Bouvier, avec une vraie qualité littéraire avec un choix du mot et de la phrase.

« Il y a peu encore, les Chilotes, peuple d’agriculteurs et de marins, étaient unis dans cette culture populaire. Chiloé est une île à la population clairsemée, un monde cousu d’espaces vierges qui ne demandaient qu’à être peuplés d’histoires à se faire peur. Chez les anciens regroupés en veillées dans le fogón – la maison communautaire –, ce bestiaire local participait d’une sorte de poésie populaire. Et José nous contait par le menu les frasques des uns et des autres.
En réalité, ces présences surnaturelles naquirent d’un syncrétisme entre les mythes venus d’Espagne et des éléments de la cosmovision des Huillinches – les “gens du Sud”. Plus froidement, elles étaient aussi là pour rappeler à chacun que hors la terre, sur les bordures périlleuses du Pacifique, la mort s’impatiente. Et aussi loin que le tío se souvînt, l’océan portait son lot de mises en garde. Pour les marins accomplis, la mort était sournoise, elle rôdait partout sous la mer. Elle ne prélevait aucune vie tant qu’on daignait l’aborder avec égards. De certaines passes, on disait qu’il fallait toujours les franchir à marée haute ou hélice au ralenti. Aux marins disparus sans explication qui tienne, le tribunal des esprits reviendrait rendre sa propre justice. Gare au couperet vengeur ! Gare au retour des braves morts d’une mort violente, sans sépulture ni planche de salut, sans que leur corps fût rendu à la mer dûment amarré à un roc pour maintenir l’âme au fond des eaux. Dans bien des cosmologies, les âmes des marins sont aussi revanchardes que celles des enfants mort-nés. Elles reviennent tourmenter ceux qui les ont insultées ou querellées de leur vivant. Pour cette raison, sur Chiloé, quand on tenait le corps d’un marin décédé à terre, on ne le loupait pas. On le remarquait dans les cimetières des villages. La pierre tombale se devait de peser sur la sépulture pour l’empêcher de s’évader. Les portes des niches sépulcrales étaient parfois fermées par un verrou.
Dans la bouche du tío, le plus intriguant fut alors prononcé : parmi les mirages qui s’emparaient de l’esprit des marins, un navire – le Caleuche – recueillait les malheureux égarés en mer. Selon certains récits, il s’agissait d’un navire festonné d’ampoules qui déambulait à proximité des côtes par les nuits de brume. Ailleurs, c’étaient des miroitements de lucioles jetés à l’eau dans une nuit de poix. L’embarcation insaisissable cherchait le repos d’une terre où mettre fin à son errance. Ce port d’attache improbable était identifié comme… la cité des Césars. Contre toute attente, ma chimère apparaissait sur la frange des mythes chilotes. Révélation de premier choix. Fallait-il parler de hasard objectif ? Était-ce si étonnant ? À y regarder de près, tout se tenait.
Dans la mythologie chilote, la cité mystérieuse était une garantie de bonheur perpétuel, sorte de futur eschatologique. Le lieu du refus de la mort, du retour à la terre où l’existence poursuivait son aventure. Ce retour à la matrice était une manière juste de gagner l’immortalité. Que les âmes des disparus festoient à bord d’une sorte de cabaret flottant fagoté pour les grands soirs, cela n’avait rien de surprenant. Il s’agissait de la dernière grâce d’un amène purgatoire avant le débarquement sur une terre connue du seul gouvernail. Les pauvres bougres ne pouvaient errer comme des damnés. Détaché du temps, le navire les envoyait vers une cité secrète. Nouvelle inscription dans l’ordre du cosmos, l’universel voyage des âmes figurait justement dans la cosmogonie des Huillinches, peuple premier de Chiloé.
Si, dans les descriptions, la cité était parfois pavée d’or ou si ses résidants y dînaient avec des couverts d’argent, le Caleuche en apportait la raison. Des vaisseaux jadis partis du Pérou chargés de l’or des Incas n’avaient jamais atteint l’Espagne pour avoir disparu quelque part sur les côtes chiliennes. Une rumeur tenace racontait qu’une partie des équipages avait trouvé refuge dans un lieu propice à son établissement. Ils auraient fondu les métaux précieux dont les cales regorgeaient et fabriqué les ustensiles domestiques et autres objets assurant leur confort. Ne passait-on pas au large de Chiloé pour gagner les mers du Sud ? Au XVIIe siècle, Jacob L’Hermite et Enrique Brower, pirates hollandais à la réputation de pyromanes notoires, venaient en aide à la légende. Leurs raids incendiaires contre les premières escales prolongées des Espagnols sur l’archipel dissuadèrent l’ennemi. Quelques coups de canon bien ajustés, puis ils reprenaient le large aussi vite qu’ils étaient apparus sur l’horizon. La légende du Hollandais volant avait puisé dans ces attaques furtives pour forger le mythe d’un navire fantôme. Wagner l’immortalisa dans son opéra. »
(p. 85-87)

D'autres extraits ...

Tag voyage sur Des Choses à lire - Page 8 Patagonie1
D'autres photos ...


mots-clés : #voyage
par GrandGousierGuerin
le Lun 9 Jan - 20:39
 
Rechercher dans: Nature et voyages
Sujet: David Lefèvre
Réponses: 8
Vues: 769

Nicolas Werth

La route de la Kolyma

Tag voyage sur Des Choses à lire - Page 8 97827010

   Aujourd'hui, les dernières traces des dizaines de camps qui occupaient cette vallée s'effacent inexorablement. On n'a pas eu besoin de détruire les camps pour en effacer les traces. Il a suffi de laisser les lieux à l'abandon pour que les traces disparaissent elle-même. Les barbelés, les miradors, les briques des cachots, le bois des baraquements ont disparu, arrachés, démantelés, emportés par les habitants qui se sont tout simplement servis. On a toujours manqué de tout ici… Aujourd'hui, le paysage la Kolyma a éliminé son passé.



Curieusement, bien qu'il soit le co-auteur de L'histoire du Goulag stalinien, en 7 volumes parus en 2004, Nicolas Werth n'avait jamais mis les pieds à la Kolyma. En 2011, il décide de combler cette lacune, de sentir la terre sous ses pieds, de voir les traces et les paysages de ses yeux, d'entendre les témoignages de ses oreilles.

   Face à ce paysage qui offre sa splendeur et dissimule son passé, je ressens un profond malaise : comment peut-on admirer le cadre d'un tel malheur, d'un tel anéantissement, d'une telle souffrance collective ?


Accompagné de sa fille Elsa, et de deux responsables de l'association Memorial à la recherche de tous les vestiges du Goulag susceptibles d'alimenter un musée virtuel du Goulag, il a sillonné les routes construites par les anciens zeks, en voiture, en camion, en minibus. Pendant 3 semaines, il a visité les les  villes désertées, les usines et mines abandonnées, les camps disparus et leurs charniers secrets . Et il a rencontré des habitants. Ceux qui n'ont jamais rien su ou voulu savoir, ceux qui ont vécu dans les camps, ceux qui y ont travaillé en tant que civils. Ceux aussi, qui, fourmis obstinées, s'attachent à en conserver le souvenir, créant des musées, recherchant des vestiges, plantant des croix ou des monuments, commémorant.

Ce livre est le récit de ces trois semaines, les faits, les échanges, les réflexions, les découvertes, illustré de quelques photos. Nicolas Werth transmettre ainsi de façon tout à fait informelle son savoir, et sa culture passionnée de tout ce qui touche au Goulag, sans oublier la littérature qui s'en est nourrie. A côté de cette description informative des évènements historiques, , il parle de l'évolution des connaissances et des points de vue sur le plus grand système concentrationnaire du XXème siècle. C''est une belle réflexion sur l'historien au travail et la mémoire en train de devenir histoire.

(commentaire récupéré)


mots-clés : #campsconcentration #voyage
par topocl
le Dim 8 Jan - 9:51
 
Rechercher dans: Histoire et témoignages
Sujet: Nicolas Werth
Réponses: 1
Vues: 706

Revenir en haut

Page 8 sur 10 Précédent  1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10  Suivant

Sauter vers: