Des Choses à lire
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Je te prie de trouver entre mes mots le meilleur de mon âme.

Georges Brassens, Lettre à Toussenot

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La date/heure actuelle est Dim 28 Avr - 1:30

279 résultats trouvés pour social

Olivier Adam

Peine perdue

Tag social sur Des Choses à lire - Page 14 Image100

24 chapitres, 24 personnages qui se passent le relais en une grand ronde pour se raconter, au cours quelques jours d'une petite station balnéaire près de Nice , abandonnée à l’automne par les touristes, où tout le monde  se connaît plus ou moins. Chacun traîne sa pauvre ou belle vie, ses petites et grosses misères, ses regrets, sa rage ou ses espoirs, qui vont se cristallier le temps d'une tempête dévastatrice. 24 petites histoires qui en forment une grande.

Au départ il y a la prose d' Olivier Adam. dont on se demande si elle tient du procédé ou du  tic de langage. : énumérations  sans virgules, phrases nominales enchaînées,anaphores récurrentes.Il faut l'accepter, car finalement, pourquoi Olivier Adam serait-ils obligé de faire des phrases s'il aime mieux écrire autrement ? Car à part ça, il a un sacré talent de conteur, de façon très touchante de sonder l'intime des gens, de « la douceur sous la carcasse».

Certains trouveront que cela fait beaucoup de drames et de malheurs. Peut-être suffirait-il de se dire que ce sont des personnages de la vie et non des personnages de roman. Des gens dont on ne parle pas si souvent, pas des vrais losers au départ, mais simplement pour qui le travail n'est ni une évidence ni un plaisir,un monde de loyers à payer,  de petites combines et grosses magouilles, où les hommes  jouent au foot le dimanche,  les parents se meurent, l'amour  ne flambe plus comme avant, les enfants  s'éloignent. J'ai trouvé Adam très proche de chasun de ses personnages, très proche de moi, au final. Il est plein de compassion, ne larmoie pas, ne juge pas. Et peu à peu, son histoire voit plus loin que les individus, la société, telle un piège, emprisonne les personnages

Alors, au final, ce n'est pas de la grande littérature, mais de toute façon, ce n'est pas ce qu'on recherche en lisant Adam, n'est ce pas ? C'est un bon roman choral attentif aux homme set au monde, à la forme originale et bien maîtrisée. Peut-être un peu trop romanesque (encore que...), qui a su me toucher par sa fréquentation du quotidien d'hommes et de femmes de tous milieux, des gens simples et complexes à la fois,  par une façon de leur donner une voix, une intimité au delà  la façade, au delà du destin qui les spolie.

(commentaire rapatrié)


mots-clés : #social
par topocl
le Jeu 15 Déc - 13:12
 
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Sujet: Olivier Adam
Réponses: 18
Vues: 1017

In Koli Jean Bofane

Tag social sur Des Choses à lire - Page 14 97827411

Mathématiques congolaises

Entre-temps, la Faim, au milieu de la population, gagnait du terrain, faisait des ravages considérables. Elle progressait en rampant, impitoyable comme un python à deux têtes. Elle se lovait dans les ventres pareille à un reptile particulièrement hargneux creusant le vie total autour de sa personne. Ses victimes avaient appris à subir sa loi. En début de journée, avant qu'elle ne se manifeste, on n'y pensait pas trop, absorbé par le labeur qui permettait justement de manger et ainsi obtenir un sursis. On faisait semblant d'oublier, mais l'angoisse persistait à chaque moment. En début d'après-midi, avec le soleil de plomb qui accélère à la déshydratation, cela devenait plus compliqué. L'animal qui, depuis longtemps, avait pris la place des viscères,  manifestait sa présence en affaiblissant le métabolisme, se nourrissant de chair et d'autres substances vitales. On était obligé de vivre sur ses maigres réserves. L'effort faisait trembler les membres, rendait les mains moites et froides, le cœur avait tendance à s'emballer. Pour calmer la bête, on lui faisait alors une offrande d'eau froide, pour qu'elle se sente glorifiée. Cela ne dure pas, car juste après, elle jouait sur le cerveau et d'autres organes de la volonté et du sens combatif. On pouvait avoir tendance à quémander et à mendier. certains devenait même implorants, parce qu'elle laminait, de son ventre rêche, des choses aussi précieuses que l'orgueil et la fierté. Elle était omniprésente et omnipotente. On ne conjuguait plus le verbe « avoir faim ». À la question de savoir comment on pouvait aller, la réponse était :  «Nzala ! », « La Faim ! ». Elle s'était institutionnalisée.


La Faim… La Faim est omniprésente dans ce roman. Les habitants de Kinshasa passent leur journée à tenter de la contrer, sans grand succès la plupart du temps. C'est pour gagner un peu d'argent afin d'apaiser la Faim que de jeunes habitants acceptent régulièrement de jouer le rôle de partisans du gouvernement lors de manifestations factices contre l'opposition.
Mais il peut arriver qu'une manifestation dégénère, et que l'on déplore des morts. Innocentes victimes des petits jeux de dupes auxquels se livrent les puissants du pays… C'est en venant faire taire une famille éplorée que l'homme de l'ombre du président, Gonzague Tsihilombo, remarque Célio Matemona, dit Celio Mathematik.

Celio, que la guerre civile a rendu orphelin, n'a dû son salut qu'à un prêtre missionnaire et à la découverte émerveillée des mathématiques. Dès lors toute situation devint pour lui sujette à analyse, résumée en quelques théorèmes mâtinés d'une ou deux sentences de Machiavel. Gonzague Tshilombo pressent que ce drôle d'énergumène pourrait être utile à la présidence, et l'embauche. L'idéaliste Celio se retrouve donc au service d'un homme sans scrupule, qui "appréciait de vivre cette période de transition. Il estimait connaître des moments privilégiés ou le savoir-faire des hommes tels que lui était nécessaire. Il était non seulement l'expert en écran de fumée, mais aussi le spécialiste en « comment poser une poutre dans l'œil du voisin sans faire tomber la paille qui s'y trouve déjà, des qualités inestimables en matière d'intoxication et de désinformation, car telle était sa véritable tâche."

Désir de s'élever dans la société, de quitter les petits boulots précaires, de jouir de l'argent facile, Celio fait taire sa conscience et met toute la fougue de sa jeunesse au service de son employeur.
L'Europe fait pression sur l'état congolais ? Jouons donc le jeu de la démocratie, si cela peut leur faire plaisir, mais tentons néanmoins de tourner chaque situation à notre avantage…Celio découvre avec grand plaisir que les mathématiques lui permettent de se jouer des hommes à sa guise et d'anticiper leurs réactions pour mieux les influencer. Et tant pis si quelques innocents sont balayés au passage, il est si amusant, et si facile de manipuler les foules !
Mais quand on est un enfant de la rue, un idéaliste, un ami des opprimés, peut-on indéfiniment faire taire sa conscience ? Tel sera le dilemme auquel Celio sera confronté…

La plume d'In Koli Jean Bofane, teintée d'humour noir, est un subtil mélange de décontraction et de recherche, et décrit à merveille la vie quotidienne des kinois. La quête d'argent happe certes toute leur énergie, mais ils n'en oublient toutefois pas de palabrer, d'aimer, et… d'entretenir leur amour de la sape !
Pendant ce temps, les puissants usent et abusent de leur pouvoir pour maintenir le pays sous leur joug, se jouant des hommes et des concepts avec un cynisme qui fait froid dans le dos. Les sorciers et autres féticheurs sont régulièrement mis à contribution, pour aider une ascension sociale ou pour faire taire une conscience trop longtemps bafouée… L'humour sous-jacent ne met que plus en valeur la déliquescence d'un pays gangrené par une corruption généralisée et un pouvoir oublieux de son peuple, qui ne sert que ses intérêts particuliers.
Sans céder à la facilité ni à l'exotisme, l'auteur est parvenu à rendre palpable la réalité de ce Congo ravagé par les luttes intestines. Mais une fois le livre refermé, c'est la dignité et la force de vie du "petit peuple" que le lecteur a envie de retenir, en espérant qu'un jour le mot "démocratie" décrira une réalité bien tangible, et non plus un concept détourné à leur profit par des dirigeants corrompus…

Chaque jour, le pouvoir d'achat s'amenuisait. Les denrées alimentaires étaient rares et hors de prix. Le système de santé n'existait plus depuis longtemps. Le sida et ses conséquences s'étant ajoutés à tout cela, l'ensemble était devenu ingérable. Les gens ne tenaient plus que par la peau qui les recouvrait. Pour l'éducation, c'étaient les parents qui s'organisaient pour payer le salaire des professeurs. Dans ce contexte, seul Dieu faisait des miracles, et encore, il avait un mal fou à suivre.



(Ancien commentaire remanié)


mots-clés : #corruption #regimeautoritaire #social
par Armor
le Mar 13 Déc - 16:41
 
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Sujet: In Koli Jean Bofane
Réponses: 2
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Sergio Atzeni

Sergio Atzeni (1952-1995)

Tag social sur Des Choses à lire - Page 14 Sergio10


Sergio Atzeni (né le 14 octobre 1952 à Capoterra en Sardaigne et mort le 6 septembre 1995 (à 42 ans) à Carloforte) est un écrivain, journaliste et traducteur italien.

Né à Capoterra, Sergio Atzeni vit à Cagliari dès sa première enfance. C'est là qu'il passe, hormis un court séjour à Orgosolo son enfance et sa jeunesse et qu'il fait ses études. Il s'inscrit à la faculté de philosophie mais la quittera avant d'avoir obtenu son diplôme.

Très jeune, dès 1966, il commence à se consacrer au journalisme et collabore bientôt avec les plus importants journaux sardes : Rinascita sarda, Il Lunedì della Sardegna, L'Unione Sarda, l'Unità, La Nuova Sardegna, ou encore Altair, revue qu'il a fondée et dirigée. Il travaille en même temps pour la radio. Il s'inscrit également au parti communiste italien, participant activement à la vie politique de la cité. Il ne parvient toutefois à trouver un emploi stable, à la société nationale italienne de production d'électricité ENEL, qu'en 1976. Travail qu'il abandonne au moment de ses débuts littéraires, quand il décide en 1987 de quitter l'île, un an après la parution de son premier roman.

Il s'installe durablement à Turin, qui sera jusqu'à sa mort son lieu de résidence, hormis durant un court intermède à Sant'Ilario d'Enza en Émilie de 1990 à 1993. Il travaille comme journaliste pour L'Europa et traducteur pour de nombreuses maisons d'éditions, notamment d'auteurs français. Ce sont des années particulièrement riches dans sa carrière d'écrivain, pendant lesquelles il écrit quelques-unes de ses œuvres les plus importantes, comme L'Apologo del giudice bandito, Il figlio di Bakunin, Passavamo sulla terra leggeri et Il quinto passo è l'addio.

Il trouve la mort tragiquement à Carloforte, le 6 septembre 1995, à l'âge de 42 ans, emporté par une vague, lors d'une tempête, sur les falaises de l'île de San Pietro.

(wikipedia)

Oeuvres traduites en français :

Le Fils de Bakounine
La Fable du juge bandit
Le Cinquième pas est l'adieu
Bellas mariposas
Il existe deux couleurs au monde, le vert est la seconde ; voyage en compagnie de Vincent
Récits avec bande-son
Nous passions sur la terre, légers





Tag social sur Des Choses à lire - Page 14 51ltuq10

Le Fils de Bakounine

Qui est Bakounine ? C'est le surnom donné par la population de Guspini à Antonio Saba, le meilleur cordonnier de Sardaigne !

C'est sur les traces de son Fils Tullio Saba qu'une mère incite son fils à enquêter, est-il journaliste comme il se présente ?

La mémoire est-elle fidèle ? infidèle ? transforme-t-elle la réalité ? par besoin de l'enjoliver ou au contraire de la noircir ?
C'est au lecteur de décider, s'il le peut, s'il le veut après avoir suivi le jeune homme dans son enquête, après avoir entendu les témoins du passé.

En le suivant le lecteur découvre la vie des pauvres gens de Sardaigne  au moment du fascisme et après la guerre ; les figures qui s'imposent se sont celles des mineurs.
Tous ces hommes ont besoin de moments de bravoure dans cette dure vie, cela peut être un drapeau hissé sur le clocher à la barbe des fascistes qui ont interdit la fête du travail le 1er mai ou l'inscription du nom de Staline sur une poutre de  soutènement dans la galerie de la mine ou encore porter un béret français quand tous portaient un bonnet ou une chéchia.

Le langage est coloré, les divers personnages bien campés dans leur emploi, dans le temps.

J'ai trouvé dans ce petit livre beaucoup de plaisir de lecture, merci à Bix de me l'avoir conseillé !


quelques extraits :

"Certaines nuits il prétendait à ma chaleur, mais il était tellement soûl que je lui faisais un service à la main et il ne s'apercevait même pas de la différence."

"Au bout d'une quinzaine de jours tous ceux qui n'étaient satisfaits, qui auraient voulu un monde ou au moins un travail différent avaient tous un couvre-chef pareil au sien."

"Tu sais ce que je te dis ? Je donnerais tout ce que j'ai pour éprouver à nouveau l'émotion de ce jour, quand nous avons vu le soutènement terminé et cette inscription lumineuse tout en haut, VIVE STALINE."

"Il m'avait parlé de la Grande Guerre, il me semblait impossible que les hommes soient assez stupides pour refaire une telle connerie. Puis j'ai vu de mes yeux que c'était possible."

"Avec ces têtes brulées de communistes il faut être dur et sans pitié dans les actes, mais aussi astucieux, capable de jouer avec les salaires pour créer la division, et de jouer avec les mots pour exploiter leur ignorance."

"Croyez moi. Parole de carabinier. Et n'écoutez pas ceux qui disent que les carabiniers sont idiots. Les blagues sur les carabiniers, nous les inventons nous-mêmes, parce qu'on a le sens de l'humour."


mots-clés : #regimeautoritaire #social
par Bédoulène
le Lun 12 Déc - 18:42
 
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Sujet: Sergio Atzeni
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Olivier Truc

[b]La montagne rouge [/b]

Tag social sur Des Choses à lire - Page 14 Montag11

, qui termine la trilogie est aussi passionnant à lire que Le dernier lapon  et Le détroit du loup

depuis une quinzaine d’années,  procès  entre les éleveurs de rennes et les forestiers .
lors de abattage des rennes avant l'hiver , le fils du chef sami trouve un os humain.
il est ressorti en cause , les  fortes pluies.
de ce fait , enquête  de la  police  des rennes , procureur etc  donc abattage suspendu car on découvre le squelette mais sans le crâne.
ce squelette dérange de nombreuses personnes .
qui était cette personne, un sami  ou pas..
si vous voulez le savoir..il faut lire ce merveilleux récit.
les personnes qui ont lu et apprécié les 2 premiers  livres aimeront celui-ci.
on retrouve avec plaisir Nina et son comparse de la police des rennes.


mots-clés : #polar #social
par faustine
le Sam 10 Déc - 15:53
 
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Sujet: Olivier Truc
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Vercors

Colères

Tag social sur Des Choses à lire - Page 14 Images69

Il semble qu'il s'agisse, d'après le titre, d'hommes et femmes en colère, et qui cherchent chacun leur solution.
En colère contre un monde d’injustice, Pélion donne toutes ses forces à la fraternité chaleureuse des combats syndicaux. En colère contre un monde d'ignorance, Egmond fait le choix d’un salut individuel et s’enferre dans de curieuses transes-extases censées le mener à une connaissance intime de lui-même et de l’homme. Entre les deux, Pascale, écartelée entre l’amour des deux hommes, dont les emportements existentiels s'emballent dans une naïveté confondante. Et Mirambeau, savant reconnu et ancien résistant, qui réalise une espèce de référence commune, uniflant les deux combats.

Cela donne un roman assez disparate, très inégal, à la symbolique à la limite du pontifiant, facilement phraseur au milieu de belles envolées. Honnêtement je me suis promenée entre ennui et hilarité face aux explorations transcendantales d’Egmond, et leurs tentatives d’explications médicales qui frisent le grotesque.

Par contre quel talent, quelle vigueur à nous faire partager la lutte fraternelle des ouvriers de Cheaulieu. Quel roman nous aurions eu si Vercors avait limité son ambition à cette seule histoire !

Le style de Vercors reste toujours aussi prenant et noble ,et certains passages constituent de vrais morceaux d’anthologie (l’incendie du manoir peuplé d’animaux empaillés,  la réconciliation des ouvriers en grève et des « jaunes » sous le feu des CRS)

En somme un roman qui est loin de m’avoir convaincue, mais qui ne m’empêche pas de conserver une grande admiration pour l’écriture de Vercors, pour son empathie vis à vis d’hommes qui font des choix qu’ils assument avec courage.


On devrait vivre dans une colère constante, bouillir sans cesse de révolte, de fureur. Au lieu de ça, on pense sa petite histoire, un point c'est tout, on s'accommode. V’s comprenez ? Ne pas être inquiété, ni épaté, être seulement troublé. Les choses comme ça, donc elles sont très bien, et laissez-moi tranquille.


L’impuissance est décourageante, mais se décourager, c'est se faire complices, en fin de compte.



(commentaire rapatrié)
mots-clés : #social
par topocl
le Sam 10 Déc - 11:00
 
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Sujet: Vercors
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Upton Sinclair

La jungle

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Plus que l'histoire d'une famille lituanienne qui émigre aux États-Unis au début du XXe siècle, La jungle est l'histoire d'un jeune Lituanien qui émigre avec sa famille. La nuance est de taille car, si chacun des membres de la famille va apporter sa contribution au niveau financier, seul Jurgis que l’on suit de la première à la dernière page, a réellement intéressé Upton Sinclair qui en a fait un personnage vraiment creusé, analysé, qui a une épaisseur. Si on est ému par les difficultés des autres membres de la famille, on n'y est pas attaché car Upton Sinclair daigne à peine le décrire et les faire exister.

Il y a deux façons de lire ce livre, soit comme un roman, soit comme réquisitoire

Un roman : comment un jeune Lituanien droit, courageux, déterminé, responsable, arrive à Chicago pour trouver du travail, enthousiaste au début, puis tombant de Charybde en Scylla, perd toute vitalité, toute dignité, sombre dans le vice et l'alcool, finit par ne se soucier que de lui-même, alors même qu’il n’est plus qu’une loque, pour être finalement sauvé par l'illumination de la parole socialiste. Même si tout cela correspond très certainement à une réalité du monde du travail de l'époque(on a en effet lu de nombreux romans et récits parlant de ces drames de l’émigration), et dans une moindre mesure d'aujourd'hui, on a quand même un peu l'impression que Upton Sinclair s'est fait une liste de toutes les situations dramatiques, macabres, dégradantes, sans en oublier une, auxquelles il pouvait confronter son héros. Cependant, on souffre avec lui, on se désole de sa déchéance, on se réjouit de son retour parmi les hommes.

Un réquisitoire : Upton Sinclair a fait un travail de documentation extrêmement poussé et l'on n’ignore plus rien du monde du travail de cette époque, des procédés utilisés dans les abattoirs (technique, hygiène, recrutement), des terribles corruptions qui se développent comme une pieuvre dans le monde du travail comme dans le monde de la politique et de la justice, du maillage fin scrupuleusement établi pour enfermer le prolétariat dans sa misère et son inculture, afin d'en mieux abuser ensuite. C'est parfaitement détaillé, cela fournit des détails très intéressant sans être rebutant On regrette parfois (cela reste roman) que Upton Sinclair explique trop plutôt que de donner à voir.

J'ai été gênée par les 40 dernières pages, exposant à travers des discours divers d'hommes politiques le projet socialiste de l'époque d'une façon quand même bien lourde et pesante qui frise le prosélytisme.

Il n'en demeure pas moins que ces 550 pages sont le reflet dramatique et passionnant d'une époque, pleines d'enseignement et qu’il serait bien léger de détourner les yeux d'un livre qui a marqué son époque et permis des avancées dans le domaine du respect de l'homme et des réglementations sanitaires


(commentaire rapatrié)


mots-clés : #social #immigration
par topocl
le Sam 10 Déc - 10:04
 
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Sujet: Upton Sinclair
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Upton Sinclair

Pétrole !

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C’est un gros livre de 700 pages, qui est paru en 1927 et a fait l’objet d’une adaptation au cinéma il y a quelques années par Paul Thomas Anderson sous le titre There will be blood. Si on retrouve bien l’ambiance, certaines situations et personnages dans le film, l’esprit est totalement différent et l’esprit militant de Sinclair n’y apparaissait pas de la même façon

Le livre se déroule de 1913 à 1924 en Californie du Sud. C’est l’occasion d’évoquer le milieu des magnats du pétrole, ces capitalistes richissimes et sans scrupules. On y parle aussi du milieu prolétarien, des divers partis de gauche, des actions qu’ils ont désespérément menées face au mépris et l’intransigeance de leurs patrons. Au passage on passe aussi dans le milieu du cinéma hollywoodien et d’un mysticisme protestant qui profitait de l’inculture des masses populaires.

Quand l’histoire commence, Jim Arnold Ross, ancien muletier, s’est hissé a la force des poignets parmi les magnats du pétrole. C’est un homme que rien n’arrête, sûr de lui, prêt à tout, compromission et corruption comprises, dur avec son personnel, mais juste : implacable, mais pas le pire parmi ces exploitants pétroliers.
Il a tout investi sur son fils Bunny, 13 ans, qui est le vrai héros de cette histoire. Tous deux s’aiment passionnément, partagent tout : l’amour du pétrole et de l’argent (et des plaisirs qu’il dispense), de la vie au grand air. Leur confiance réciproque est inattaquable. Bunny est un garçon vif, intelligent, ouvert à tout , que tout le mode adore ; il est fondamentalement bon et moral.

« Bunny ne pouvait pas arriver à comprendre – il n’y arriverait jamais de toute sa vie - comment les gens pouvaient ne pas s’intéresser aux autres gens. »


Tout ceci fait sa force : il s ‘entend avec tout le monde , se lie d’amitié avec des employés de son père . Et cette différence entre eux séduit son père qui le regarde d’un œil amusé et tendre, et pense qu’il ira loin. Inversement Bunny, qui croit naïvement que tout le monde est bon comme lui, voue une adoration à ce père fabuleux. Dès les premières lignes du livre, caractères et relation intime, cette envie commune de tout dévorer dans un paysage américain grandiose, sont superbement campés en un paragraphe :

«La route filait, lisse, nette, quatre mètres trente de large exactement, les bords coupés comme au ciseau, ruban de ciment gris déroulé à travers la vallée par une main géante. Le sol ondulait en longues vagues : une lente montée puis un plongeon soudain. Vous grimpiez et passiez en trombe la crête, mais vous étiez sans crainte, car vous saviez que le ruban magique serait là, libre de tout achoppement, vierge de toute bosse ou crevasse, attendant le passage des roues aux caoutchoucs gonflés tournant sept fois à la seconde. Sur les côtés déferlait en sifflant l’âpre vent du matin, orage de mouvements qui vibrait et grondait en des harmoniques aux incessantes variations. Mais vous vous pelotonniez confortablement derrière un pare-brise incliné qui dérivait la tornade par dessus votre tête. Quelquefois il vous plaisait de lever votre main pour sentir le choc glacial ; quelque fois vous risquiez un œil par le côté du pare-brise afin que l’ouragan vous frappe au front et vous ébouriffe les cheveux. Mais, la plupart du temps, vous demeuriez assis, muet et digne, car c’était ainsi que faisait Papa, et les manières de Papa constituaient l’éthique de l’automobiliste. »


Mais ses qualités sont aussi la faiblesse de Bunny, qui ne veut faire de peine à personne et va longtemps galérer avant de se rendre compte que c’est impossible et faire des choix nouveaux.

Toute la première partie du livre on voit cette relation passionnelle, l’œil amusé du père et aussi le questionnement qui se fait peu à peu en Bunny quand il constate que son père agit mal. Ses amis ouvriers le convertissent peu à peu à leur cause.

« Ce qui avait été malfaisant devenait soudain héroïque, alors que ce qui avait été respectable apparaissait tout à coup comme stupide »


Après cette rupture, il continue à s’entendre à merveille avec son père, car leur amour commun est leur grande richesse, et voulant le rendre meilleur essaye vainement de le convertir un tant soit peu à ses idées. Il continue à profiter des plaisirs liés à l’argent, mais plus le temps passe, plus il réfléchit, se positionne, utilise son argent dans le sens de la solidarité et de la cause ouvrière.
Ses yeux s’ouvrent aux idées modernes, et il est heureux de le voir se tenir à ses objectifs de droiture et de moralité, ce qu’il fera magnifiquement, malgré toutes les difficultés que cela implique, sans jamais rompre avec les siens. Sa naïveté initiale en prend un sacré coup, il souffre des choix à faire, mais il tient bon..

Roman social et roman d’apprentissage, mais aussi roman d’aventure, Pétrole est un livre qui apprend beaucoup, mais qui sait aussi émouvoir, les personnages sont très attachants et complexes, extrêmement bien campés dans un style très vivant, comme si l’auteur vous racontait l’histoire en direct. Le ton est celui d’une ironie tendre et détachée, qui cache une espérance désespérée.


(commentaire rapatrié)


mots-clés :  #social
par topocl
le Sam 10 Déc - 10:02
 
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Sujet: Upton Sinclair
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Mario Rigoni Stern

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l'histoire de Tönle; je retrouve le même plaisir qu'avec les Sentiers sous la neige.

Tönle, contrebandier par nécessité, berger, traverse la frontière pour aller travailler, dans divers pays dont d'ailleurs il parle la langue, l'Autriche, la Hongrie, l'Allemagne etc .. Obligé, sous peine d'être emprisonné suite à une altercation avec un douanier, de se cacher, il passe la frontière pour travailler à l'étranger car il faut nourrir la famille.
L'amour qu'il porte à sa région, sa maison, sa famille, son village le conduit tous les hivers à revenir.
L'harmonie avec la Nature, les animaux et les hommes est brutalement bouleversée par la guerre de 14/18.
C'est en homme libre qu'il vit même lorsque déjà vieux il est fait prisonnier par les Allemands. Il est libre dans sa tête et dans son coeur. C'est ainsi qu'il a vécu et qu'il mourra.

L'histoire de cette région d'Italie éclaire ce récit.

Toujours cette chaleur des mots, ce regard apaisant sur la Nature, les Hommes et l'incompréhension quant à la guerre et la misère qu'elle jette sur tout ce qui vit.
mots-clés : #premiereguerre #social
par Bédoulène
le Jeu 8 Déc - 18:08
 
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Sujet: Mario Rigoni Stern
Réponses: 19
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Mario Rigoni Stern

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Mario Rigoni Stern.

- Histoire de Tonle. -

Il y a des etres humains qui ont vraiment la foi dans l'humanité chevillée au corps. Quoiqu'il advienne... Pour le vérifier, il suffit de lire L'histoire de Tonle de Mario Rigoni Stern. C'est l'histoire d'un homme simple, dont la maison -pour son malheur- était située du coté italien de la frontière austro-italienne, et cela se passait au tout début du 2Oe siècle.

Tonle était un berger pauvre, très pauvre et pour nourrir sa famille, il devait de temps en temps franchir la frontière en question en tant que contrebandier, pour aller en Autriche... Tonle n'aimait pas les fontières, mais la pauvreté ne lui laissait pas le choix. Il détestait encore plus la guerre, mais celle de 14-18 ne lui demanda pas son avis. Plusieurs fois, il dut s'enfuir, et la dernière fois qu'il revint chez lui, sa maison était détruite et lui-meme mourut au pied d'un olivier.

Voilà. C'était juste l'histoire d'un homme qui a cru jusqu'au bout en l'humanité. Et croyez moi, ce n'est pas une histoire désabusée. Car la foi de Tonle, c'est aussi la philosophie de l'écrivain Mario Rigoni Stern, même idéal, même lieu de vie que son aieul, et qui alla se battre sur le Front russe pendant la 2e Guerre mondiale. Et qui n'a jamais renoncé à sa foi dans la fraternité et la paix malgré l'horreur de la guerre qu'il a connue. J'aime beaucoup cet homme-là, cet écrivain, c'est pourquoi, pour une fois, je me suis attardé sur sa biographie.

Message rapatrié. Pour un de mes écrivains italiens favoris.


mots-clés : #premiereguerre #social
par bix_229
le Jeu 8 Déc - 17:56
 
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Sujet: Mario Rigoni Stern
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Manuel Scorza

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Roulements de tambours pour Rancas


Ce qu'en dit l'auteur:
“c'est la chronique désespérément vraie d'un combat solitaitre: celui que livrèrent, dans les Andes centrales,
entre 1950 et 1962, les hommes de quelques villages visibles seulement sur les cartes d'état-major des troupes qui les rasèrent.”
En effet, la socièté minière Cerro de Pasco Corporation a clôturé un million d'hectares pour élever le bétail de sa section agricole
au détriment de ces hommes et femmes qui vivaient dans ces villages qui, du jour au lendemain, se sont trouvés coupés du monde avec leurs troupeaux affamés.
La révolte populaire se terminera par le massacre des comuneros.

L'histoire est on ne peut plus vraie: tous les personnages sont réels ainsi que tous les faits.
L'auteur a volontairement modifié certains noms et certaines dates pour “protéger les justes de la justice”.
Hector Chacon, chef de la révolte, sera arrêté et jeté en prison durant 11 ans. Le traducteur avertira le lecteur qu'Hector fut libéré le 28 juillet 1971,
à la suite de la campagne de presse sans précédent soulevée au Pérou par la publication de “Roulements de tambours pour Rancas” de Manuel Scorza.

Malgré le contenu tragique et révoltant du roman, Scorza (membre du mouvement littéraire indigéniste de l'époque), militant des luttes paysannes indiennes de son pays,
emploie un ton humoristique, un peu naïf, plein de tendresse avec une touche de réalisme magique qui nous rapproche des croyances précolombiennes qui ont survécu au christianisme
chez les habitants des hauts plateaux (parler avec les animaux, sonder les rêves, interpréter les signes de la nature,etc...)

L'histoire de ce premier volet d'une saga qui en comporte 5:
A Yanahuanca, la population est terrorisée par le Docteur Monténégro (l'habit noir), juge du district et riche propriétaire.
Les paysans, peu éduqués et sans défense, se voient privés de leurs droits.
A cela vient s'ajouter l'apparition d'une clôture américaine qui ne fera que grandir tout au long de l'histoire, qui coupera les accès aux différents villages, aux terres pour les troupeaux.
Les bêtes mourront de faim et les habitants tomberont dans la misère. Les malheureux exploités tenteront de résister chacun à sa manière et verront l'appartition de soldats.
Un habitant de Rancas, Hector Chacon, va tenter avec d'autres, si pas de stopper l'avancée de la clôture, au moins de mettre fin
aux agissements tyraniques du Docteur Monténégro mais l'issue de la rébellion sera l'arrestation d'Hector et le massacre des habitants.

Les chapitres sont très courts et présentés un peu comme dans un conte; chaque protagoniste a son nom mais aussi un ou plusieurs surnoms,
ça peut poser un petit problème de confusion au début de la lecture.


Cette lecture est une agréable découverte et je déplore que les livres soient si difficiles à trouver.
J'ai pu me procurer 3 volumes de la saga en occasion.
Je pense que Scorza est unique en son genre et avec son style si sensible, si poétique, il donne une dimension encore plus tragique aux faits qu'il relate.


mots-clés : #insurrection #social
par Cliniou
le Mer 7 Déc - 8:57
 
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Sujet: Manuel Scorza
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Philippe Huet

Philippe Huet
Né en 1942

Tag social sur Des Choses à lire - Page 14 Philip10

Philippe Huet est passionné depuis son enfance par le journalisme. Après ses 3 années d'études à l'ESJ Paris, il intègre le journal Le Havre Presse. Il a l'ambition de devenir grand reporter. Il obtient ce poste en entrant à la rédaction de Paris Normandie. Pendant quinze ans, il couvre de grands évènements tels que des déplacements présidentiels, le Tour de France, des guerres (notamment au Liban), des grands procès, ou encore la catastrophe aérienne d’Ermenonville du 3 mars 1974 où il arrive en premier sur les lieux.
En 1989, Philippe Huet démissionne de son poste de rédacteur en chef adjoint du journal Paris Normandie et entame, parfois en collaboration avec son épouse Elizabeth Coquart, une carrière littéraire qui inclura documents, œuvres biographiques, romans noirs et romans sociaux.

source : wikipedia.org

Bibliographie ::

L'ivresse des falaises
1994 : Quai de l'oubli
1994 : La main morte
1997 : La nuit des docks
1999 : Cargaison mortelle
2001 : Les démons du comte
2003 : Un jour sang
2003 : L'enfer du décor
2005 : Les quais de la colère
2006 : Souk à Marrakech
2011 : La poubelle pour aller danser
2012 : Nuit d'encre
2014 : Les égarés de la plage
2015 : Les émeutiers
2016 : le feu aux poudres

Ouvrages écrit en collaboration avec Élisabeth Coquard
1989 : Ma liberté dans l'église
1990 : Bourvil ou la tendresse du rire
1994 : Le jour le plus fou, 6 juin 1944, les civils dans la tourmente
1996 : Mistinguett : la reine des années folles
1997 : Le Monde selon Hersant
1999 : Les rescapés du Jour J
1999 : Vacances secrètes en Normandie
2004 : Stars et paquebots




(oooooh un fil inédit !)

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Tag social sur Des Choses à lire - Page 14 97827420

Le feu aux poudres

Le roman d'un contexte social extrêmement tendu. Au Havre en 1936 le chômage écrase ouvriers et dockers alors que les patrons alliés aux organisations d'extrême droite et anxieux d'une victoire prochaine du front populaire jouent  des épaules. Polyphonique à la troisième personne et documenté le roman narre un tournant de la lutte sociale dont le pivot est une grève chez Breguet (fleuron de l'aéronautique). Par petites touches l'auteur dévoile les conditions de vie et préoccupations des uns et des autres. Les espoirs des uns côtoient la marque indélébile de la grande guerre. Les craintes des autres sont alimentées par les nouvelles venues d'Amérique et de Russie. En toile de fond principale les quartiers pauvres et laborieux du Havre et le décalage avec le monde de ceux qui s'en sortent ou incarnent une humanité à la fois soucieuse et insouciante. Nous trouvons donc ici un journaliste amoureux qui est un pont entre ces mondes et qui voisine avec la figure de Céline. Pour la beauté des anecdotes mais aussi pour une humanité qui se perd en laissant s'échapper l'espoir.

Le genre d'espoir qui s'incarne dans la dignité de la solidarité et du combat pour le progrès social. Et toutes ces cartes ne sont pas mal jouées. Tout en s'appuyant sur une vision actuelle avec ses acquis ( ?) dans le monde du travail et dans l'égalité de droits entre hommes et femmes, le récit déroule un panorama assez large qui fait sentir que ce n'est pas si simple.

Certes la recette est visible et l'écriture n'est pas fracassante mais l'empathie et la volonté de détail et de représentation de plusieurs milieux font que ça vaut le détour. Et puis on ne peut pas se plaindre des personnages sympathiques qui font vivre cette tranche d'histoire populaire. Ca se lit tout seul et c'est instructif. Je ne dirais pas non à lire les précédents tomes de cette trilogie (je crois) !

Et puis Le Havre...


mots-clés : #insurrection #social #historique
par animal
le Lun 5 Déc - 22:35
 
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Sujet: Philippe Huet
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Russell Banks

Lointain souvenir de la peau

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Le Kid, 22ans , un homme (ou un gamin?) qui n’ a plus de nom, et plus d’existence aux yeux de la société, mais marqué à vie et fiché sur internet. Condamné pour déliquescence sexuelle, il a purgé une peine de prison, et est assujetti pour 10 ans au port d ‘un bracelet électronique, à l’interdiction d’habituer dans un lieu où il pourrait côtoyer des enfants et figure  sur un site répertoriant les délinquants sexuels des Etats Unis, accessible à tous. Rejeté et quantité négligeable dans le monde réel, suivi et surveillé dans le monde virtuel... Dans cette presqu’île de Calusa noyée sous le béton, le seul lieu habitable est un espace vague sous une bretelle d’autoroute , en compagnie d’autres délinquants sexuels. Ayant grandi dans un désert affectif puis une misère sexuelle complets, n’ayant jamais eu pour  ami qu’un iguane apprivoisé, il a intégré cette image de lui que la société veut donner, et fini par accepter comme juste et logique cette exclusion absurde.

Sa vie va cependant être bouleversée, durant les quelques jours que dure le roman, par une descente de police, une tempête qui ravage la ville et son lieu de vie, mais surtout parce que quelques individus, par intérêt et/ou ( ?) compassion vont le regarder autrement que s’il était une chose (repoussante qui plus est), le regarder, l’écouter, lui parler : un Professeur de sociologie géant et obèse qui élude en gloussant les questions d’ordre privé, un couple dont le femme n’est autre que Dolorès, l’attachante conductrice du bus de De beaux lendemains, qui a refait sa vie et garde sa vision du monde lumineuse et chaleureuse, et l’Ecrivain, un type qui ressemble à Hemingway (et peut-être bien aussi à Russell Banks ?). Avec eux , le Kid va se découvrir une identité, s’expliquer à lui-même, mieux comprendre le monde ; il va découvrir , et nous avec, le sens profond de la vérité , du mensonge et du secret, un autre rapport au bien et au mal que par la culpabilité ou la honte

Voilà un livre d’une grande intelligence, peut-être parfois un peu trop grande et qui peut par moment glacer. La première partie est distante et froide, lisse d’une certaine façon, comme le Kid qui n’a jamais appris à vivre et à aimer. Puis l’intrigue se noue, les affects se déchaînent, et Russell Banks  nous propose une démonstration magistrale où rien n’est jamais acquis, tout est perpétuellement remis en question, au contraire du monde simple mais inhospitalier du début. L’émotion monte au fur et à mesure que les personnages gagnent en complexité , au delà de leur aspect premier et des étiquettes qu’on leur   attribue . Il y a quelques moments un peu glauques, mais parfaitement justifiés par le sujet.

Un roman qui gagne en ampleur au fil des pages, des personnages uniques, un style narratif ciselé, des descriptions de paysages , de sites urbains, de phénomènes naturels… Russell Banks revient à son meilleur avec un roman d’aventure personnelle plein de messages et de profondeur.


(commentaire rapatrié)


mots-clés : #discrimination #identitesexuelle #social
par topocl
le Lun 5 Déc - 9:49
 
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Sujet: Russell Banks
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Yves Simon

Yves Simon
Né en 1944

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Yves Maurice Marcel Simon est un auteur-compositeur-interprète et un écrivain français né le 3 mai 1944 à Choiseul (Haute-Marne).

En littérature, il a publié de nombreux romans, des essais, un recueil de nouvelles et trois de poésies. Il a obtenu pour Le Voyageur magnifique le prix des Libraires (1988) et pour La Dérive des sentiments, le prix Médicis (1991). Il a vendu à ce jour plus de un million deux cent mille livres et il est traduit en quinze langues.
Journaliste et observateur de son époque, il publie régulièrement dans la presse éditoriaux et reportages (Rwanda 2000, New York novembre 2001…) et se trouve engagé auprès de Reporters sans frontière dans la plupart de ses actions.  (livre de poche)


Bibliographie

1971 : Les Jours en couleurs
1971 : L'Homme arc-en-ciel
1973 : Bagdad-sur-Seine / Photographies de Daniel Boudinet
1975 : Transit-Express
1978 : L'Amour dans l'âme
1983 : Océans
1985 : Tard dans la nuit / hors commerce, tiré à 1000 exemplaires.
1987 : Le Voyageur magnifique (prix des libraires 1988).
1988 : Jours ordinaires (carnets)
1988 : Un autre désir (chansons)
1990 : Les Séductions de l'existence (François Bott/Dominique Grisoni/Roland Jacard/Yves Simon)
1991 : La Dérive des sentiments (prix Médicis 1991).
1993 : Sorties de nuit (carnets)
1996 : Le Prochain Amour
1997 : La Ruée vers l'infini
1997 : Un instant de bonheur
1997 : Paravents de pluie / Photographies de André Mérian
1998 : Plaisirs ordinaires
1999 : Jours ordinaires
2000 : Le Souffle du Monde
2000 : Paris aquarelles / dessins de Fabrice Moireau
2001 : La Voix perdue des hommes
2001 : L'Enfant sans nom (ouvrage pour la jeunesse)
2003 : La Manufacture des rêves
2004 : Les Éternelles
2004 : Lou Andreas-Salomé (Destins)
2005 : La Ruée vers l'infini (2)
2006 : Les Novices
2007 : Je voudrais tant revenir
2007 : Épreuve d'artiste, dictionnaire intime (essai)
2009 : Jack London (essai)
2011 : La Compagnie des femmes - prix Erckmann-Chatrian 2011
2011 : Un homme ordinaire (récit)





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"la voix perdue des Hommes"

Je connaissais le  chanteur,  mais j'ignorai qu'il fut écrivain et à cette première lecture, un écrivain à connaître.

Comme le chantait Brassens : tous les hommes d'église, hélas ne sont pas tous des dégueulasses témoin........... ce prêtre, Andrea.

Il reçoit les confidences les plus intimes de ces femmes et ces hommes mendiants de la vie ; demandeurs d'une écoute, d'une pause, d'un partage, simplement déposer leurs soucis à Andrea.

Andrea plus accessible qu'un Dieu, plus humain.

Et Andrea chargé de tout ce poids doute par moment, des autres, mais surtout de lui.

L'apparition ponctuelle de l’auteur travaillant sur ce livre rappelle au lecteur qu’il s’agit d’un récit, rappel utile tant on est pris dans ce qui pourrait être, est certainement, une réalité.
Et en accompagnement Paris, cette ville qu’on devine qu’il aime. Tel un personnage, il en décrit la grandeur comme la misère.

Les mots touchent là où il faut, au cœur, au ventre, l’esprit, révélant tous ce qui construit ou détruit l’Homme.


Extraits
Tag social sur Des Choses à lire - Page 14 Y_110

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"message rapatrié"


mots-clés : #religion #social
par Bédoulène
le Dim 4 Déc - 23:08
 
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Sujet: Yves Simon
Réponses: 2
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Jean Rolin

Jean Rolin
Né en 1949


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Né(e) à : Boulogne-Billancourt , le 14/06/1949

Jean Philippe Rolin
est un écrivain et journaliste français. Il a reçu le prix Albert Londres pour le journalisme en 1988 et son roman "L'Organisation" a reçu le prix Médicis en 1996.

Fils d'un médecin militaire, il grandit en Bretagne et au Congo. Étudiant, il s'investit — tout comme son frère Olivier, de deux ans son aîné — dans la tendance maoïste de mai 68, au sein de l'Union des Jeunesses Communistes.

Journaliste, il a surtout effectué des reportages, notamment pour Libération, Le Figaro, L'Événement du Jeudi et Géo. Écrivain, il est l'auteur d'essais, de chroniques, de romans et de nouvelles.

Jean Rolin, écrivain voyageur
, est un grand mélancolique, il décrit souvent des mondes, des sociétés et des solidarités qui disparaissent, Terminal Frigo en est sans doute l'exemple le plus beau et le plus flagrant, évoquant les chantiers de Saint-Nazaire où l'auteur milita pour la gauche prolétarienne.

En 2006, il reçoit pour son livre "L'Homme qui a vu l'ours" le prix Ptolémée lors du 17e Festival international de géographie de Saint-Dié-des-Vosges.

En 2013, il reçoit le prix de la langue française.
"Un chien mort après lui" en 2009 et "Le ravissement de Britney Spears" en 2011 publiés chez POL montre son éclectisme.

Source : Wikipédia

Bibliographie

1980  : Chemins d’eau
1982 : Journal de Gand aux Aléoutiennes (prix Roger-Nimier)
1983 : L’Or du scaphandrier : Page 1
1984 : L’Avis des bêtes
1986 : Vu sur la mer
1988 : La Ligne de Front (prix Albert-Londres)
1989 : La Frontière belge : Page 5, 6
1994 : Cyrille et Méthode
1994 : Joséphine : Page 2
1995 : Zones : Page 2
1996 : L’Organisation (prix Médicis) :  Page 1
1999 : Traverses :  Page 1
2000 : Campagnes : Page 2
2002 : La Clôture (Prix Jean-Freustié) :  Page 1
2003 : Chrétiens
2005 : Terminal Frigo :  Page 1, 6
2006 : L’Homme qui a vu l’ours
2007 : L’Explosion de la durite :  Page 1, 2
2009 : Un chien mort après lui :  Page 1
2011 : Le Ravissement de Britney Spears :  Page 1
2013 : Ormuz :  Page 1, 2
2015 : Les Événements : Page 2
2015 : Savannah :  Page 1, 2, 3, 5
2016 : Peleliu : Page 1
2018 : Le traquet Kurde : Pages 4, 5

Essai
2012 Dinard, essai d’autobiographie immobilière : Page 2

màj le 13/11/2021





La clôture

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Précision : La clôture est une rue qui se situe sous le ventre du Bd Ney et le périphérique

J’ai compris dès les premières pages qu’ il me faudrait un plan des rues de Paris dans le secteur pour comprendre les errances des divers personnages du livre et les recherches de l’auteur.  Les personnages ne sont pas fictifs ; l’auteur accompagne son récit d’une analyse( ?) sur le Maréchal Ney.

En effet l’auteur a le « projet assez vaste et confus d’écrire sur le maréchal Ney du point de vue du boulevard qui porte son nom. Ou, ce qui revient au même (au moins sous le rapport de l’ampleur et de la confusion) d’écrire sur le boulevard qui relie la porte de Saint-Ouen à la porte d’Aubervilliers, mais du point de vue présumé du maréchal Ney. » ce qui appelle de ma part une première remarque : l’auteur présume souvent des pensées ou actes des personnages qu’il  les fréquente ou pas.  Puisque c’est son écrit je lui en reconnais  le droit, mais cela m’a fait sourire parfois.

J’ aime son écriture très « visuelle » son ton où même dans l’ironie, dans la critique  se dévoile beaucoup d’humanité. C’est certainement cette qualité qui lui a permis de recueillir les paroles de ces personnes déshéritées, réprouvées durant ses incursions dans leur milieu de vie.

Il faut beaucoup de détermination, de lectures (celles des biographies sur le Mal Ney) et encore plus d’imagination   pour  transposer  dans le Paris du 21ème siècle les lieux  où se sont déroulées les plus importantes batailles du règne de Napoléon, où s’est  tour à tour illustré ou incliné l’un de ses Maréchaux et le faire resurgir  du passé.

La vision photographique  de ce secteur de Paris est un atout dans ce récit ; constructions en bordure  des voies et des berges qui  s’étalent , et le Bd du Mal Ney qui  longe le périphérique. Les lieux deviennent  plus précis  et utiles  à la compréhension quand l’auteur les nomme  et les situe  (bar, hôtel, immeuble…)

le lecteur suit  l’auteur jusqu’à  rencontrer Ney et  en chemin  faire  connaissance avec Gérard, Daniel, Roger, Lito ; s’arrêter  là où a été assassinée une prostituée, puis une autre et même  découvrir  sur un talus un chien mort.

Ce qui m’a interpellée c’est le fait qu’à 2 reprises (passages en italiques) l’auteur  décrit  un homme  à la  fenêtre  et ce qu’il aperçoit ;  j’ai pourtant l’impression qu’il s’agit de lui-même : pour quel effet ?

Bon si je m’égare un peu c’est qu’il y a tant de choses à dire, mais surtout que j’ai trouvé là un écrivain que je vais suivre.

ps J'aimerais aussi connaître le rapport de Rolin au chien, présent dans beaucoup de ces livres.

Extraits :


« La première  nuit où je pars à la recherche de la rue de la Clôture, je suis avec Lancien, dans la 405 blanche – blanche mais crade – qu’il possède à l’époque. Lancien est d’assez petite taille, moustachu, il porte ce soir-là un blouson de cuir, je suis quant à moi d’assez grande taille, le front largement dégarni, mal rasé et vêtu d’un imperméable sombre. Je ne donne ces détails morphologiques et vestimentaires qu’afin de faire ressortir la ressemblance, fortuite mais évidente, que nous présentons avec un couple de vieux flics patrouillant à bord d’une voiture banalisée. »


« Les Albanaises, au nombre de quatre ou cinq, s’y tiennent, par roulement, à raison d’une équipe de jour et d’une équipe de nuit, avec de brèves interruptions. »


« De nos jours, il pourrait du moins allumer la télé – sans doute l’auberge de la pomme d’or serait-telle abonnée à canal +, faute de quoi resterait toujours M6 – pour regarder pendant quelques minutes un spectacle sexy ou rigolo et se  changer les idées. Mais il n’y a pas de télévision à l’auberge de la pomme d’or, pas plus qu’il n’y aura de journalistes, demain matin, sur la place où il devra s’adresser à ses troupes. En ce temps -là, les gens n’avaient même pas la ressource de lire l’éditorial de la rédaction du Monde pour savoir comment il convenait de penser ou d’agir. »


« Au pied de l’hôtel, à l’angle de la rue Emile-Raynaud et de l’avenue Jean-Jaurès, un piège à pauvres d’un modèle inédit vient d’être mis en place : il s’agit d’un mini-casino automatique, accessible vingt-quatre heures sur vingt-quatre, et débitant des produits de base – sandwiches, boissons en boites, papier-cul, yaourts aux fruits, protections périodiques, œuf de lump ou pâtée pour chien – à des prix vraisemblablement prohibitifs : afin de m’éviter des poursuites de Casino, je précise que je n’ai pas vérifié ce point. ………………. – des curieux se pressent devant le dispositif, qui comme la plupart des choses nouvelles présente au moins l’avantage d’abolir superficiellement toute différence de race, de classe ou d’âge. »


»La population de Sheffield, ou du moins la masse de celle-ci, manifestant encore des réticences à s’acquitter de son devoir de culture, la Graves Art Gallery demeure un séjour agréable, où l’on peut accéder sans faire la queue, regarder ou non les œuvres exposées, rêvasser, écouter craquer sous ses pas les lames du plancher. »


« ….on avait élevé un haut mur en parpaings entre le talus au chien mort et la déchetterie sis à l’angle du boulevard Macdonald, dressé le long des voies ferrées de nouvelles clôtures – bien qu’inévitablement elles dussent être forcées presque aussitôt – ou prolongé de quelques travées anti-putes le mur antibruit protégeant l’angle nord-est du parc de la Villette. Tout ce secteur de Paris offre d’ailleurs de nombreux exemples des techniques mises en œuvre par la société pour rendre moins visibles, plus furtifs, des maux qu’elle a depuis longtemps renoncé à prévenir ou à combattre. »


« Il n’y avait parmi eux qu’une seule femme, apparemment africaine, âgée peut-être d’une trentaine d’années, vêtue avec élégance, assise sur une couverture à l’intérieur de cette espèce de tuyau que doivent emprunter les impétrants. Ses lunettes sur le nez, elle était plongée dans un livre, et, même en faisant la part des choses – même en tenant compte de la nécessité,  pour la lectrice, de se composer une attitude susceptible de tenir à distance les emmerdeurs -  on aurait aimé savoir quel était ce livre , et ce qu’il avait pour mériter d’être lu dans des conditions si précaires. »

il y a même de l'empathie pour le Mal Ney (voir son commentaire sur le tableau de son exécution par Gérôme), qu'il a choisi aussi parce que :

"Si sujet à caution que soit le témoignage du général Bonnal et dans une moindre mesure celui de Lavalette, il me plait que l'un et l'autre attestent la présence au chevet de Ney de la danse et de la musique champêtres, d'abord sous les murs de Mayence, au moment où son destin prend forme, puis derrière ceux de la Conciergerie alors qu'il est sur le point de s'accomplir. Car ce fond sonore un peu niais, si éloigné de l'idée que l'on se fait d'un maréchal d'Empire, indique au moins dl'une des sources de mon inclination pour celui-ci de préférence à toute autre."


Ney joue d'ailleurs de la flûte.



"message rapatrié"


mots-clés : #historique #social
par Bédoulène
le Dim 4 Déc - 22:49
 
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Sujet: Jean Rolin
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Kent Meyers

Twisted Tree

Tag social sur Des Choses à lire - Page 14 419prp10

Magique ! Un roman, puissant et sombre, à la beauté sauvage, à la fois violent et tendre, dur et fragile. De ces livres marquants comme on en lit peu dans une année, qui répond à toutes mes attentes de lectrice.

A qui je conseille Twisted tree ?. Ça va être long, mais vous avez le droit d’arrêter votre lecture dès que vous avez décidé de lire le livre !

A ceux qui aiment l'histoire d'une petite ville américaine déstabilisée par un sordide fait divers (et tout particulièrement ceux qui ont lu La vérité sur l'affaire Harry Quebert et sont restés sur leur faim car un peu trop joli, un peu trop propret, un peu trop superficiel). Mais ne cherchez pas sur une carte, la ville de Twisted Tree n'existe pas. Kent Meyers a fait exprès de donner des informations géographiques qui font qu'elle n'est pas situable sur la carte du Dakota.


   Seul le vide était troublant : sa persistance, la sensation de sa présence infinie


A ceux que les troupeaux de bisons réconfortent (mais à éviter pour ceux que les crotales terrifient).

A ceux qui aiment les K-Mart, les pick-up rouillés, les monts-de-piété et les Indiens confits d’alcool, la poussière qui s'infiltre partout.

A ceux qui aiment les éditions Gallmeister.

A ceux qu’émeut un monde où les silences valent autant que les paroles, où les hommes ont parfois envie de prendre leurs enfants ou leur femme dans les bras mais n’osent pas.

Entre eux, silence : rien que leurs pas, à l'unisson.

   
Ils se remirent à marcher en rythme, plus près l'un de l'autre, un petit espace chaud entre eux.


A ceux qui aiment les caissières acerbes, qui surveillent la ville et connaissent tous ses secrets, les garces qui se cachent sous les saintes et les petites filles blessées qui se cachent sous les garces.

A ceux qui aiment qu’un bocal de billes de l’enfance, brillantes sous la lumière d’une lampe de bureau, marque la vie d’un homme et ne le quitte plus.

A ceux qui vibrent devant cette photo.

Tag social sur Des Choses à lire - Page 14 -twist10

A ceux qui aiment les non-dits, les non-dits qui rôdent sans se dire, qui émergent juste ce qu'il faut pour qu'on les comprenne, mais qui resteront là une vie entière.


   Un truc de fou. On pense connaître le moindre boulon qui compose la structure d'un homme, on pense connaître ses secrets, mais on se rend compte qu'il a des secrets sous ses secrets, et ceux qu'on connaît servent juste à vous empêcher de penser qu'il puisse y en avoir d'autres. Comme un trou noir. Si sacrément invisible qu’il devient visible presque instantanément. Tout semble pointer dans sa direction, les choses s’enroulent autour, se déforment.


A ceux qui aiment quand c'est bien écrit, dense, serré, et que ça vous prend aux tripes et que l’auteur a vraiment une voix propre et qu’il aime les mots. Au point qu’il écrit :

   Peut-être que dans une autre langue, plus sensible aux relations humaines, il existe une douzaine de pronoms pour évoquer les nuances avec lesquels les hommes et les femmes mariés prennent leur décision, comme dans les régions arctiques où la neige a un nom différent suivant le vent qui l’a portée.


A ceux qui aiment les romans chorals qui se donnent de airs de nouvelles avec des personnages complexes, fragiles et douloureux, découverts à travers leurs actes et leurs failles intimes, sans un mot de psychologie, où l’ auteur ne vous prend pas par la main, mais vous laisse faire votre propre chemin dans un livre qui ne parie à aucun moment sur la facilité, et qui surprend jusqu’à la dernière page.

A ceux qui aiment que ça démarre par un premier chapitre hallucinant, qui instaure du départ le malaise et la violence intrinsèque de nos vies

A ceux qui aiment les histoires où les tombes sont perdues, mais où les morts ne laissent pas les vivants en paix.

A ceux qui aiment ce genre de choses :

   La fille étreignait ses cheveux dans une main, la tête inclinée, et portait l'autre main à son front pour s'abriter du soleil. Clay penchait le menton, comme s'il s'adressait au sol. Puis il avait relevé la tête et croisé le regard d’Hayjay. Elle avait acquiescé et ses cheveux avaient glissé de son emprise. Le vent les avait soufflés en avant, lui cachant le visage, et leurs quatre mains s’étaient précipitées dans ses boucles emmêlées pour les maîtriser, alors son visage était réapparu, elle avait repris ses mèches entre les mains de Clay, il lui avait souri mais elle était restée si grave que son sourire s'était évanoui, puis il avait fourré ses mains dans ses poches


ou des phrases comme celle-ci :

   Ses lèvres étaient blanches, il semblait jeune et vulnérable, le danger l’encerclait comme un placenta.


A ceux qui savent que les amours se délitent mais que la p/maternité serre la gorge, qu’elle est source d’interrogations, de terreurs mais aussi des plus belles et poignantes émotions de la vie.

   Richard fut submergé par une myriade de déceptions face à cette vie qui s'annonçait - et il sut qu'il était déjà trop tard pour apprendre à son fils à devenir un homme dur, et il en fut empli de fierté et de chagrin.


A ceux ont envie de découvrir un auteur du Dakota du Sud, homme charmant dans la vie, un grand de la littérature américaine, voix d’une Amérique souffrante et abandonnée, mais devront se résoudre à attendre la prochaine traduction (à moins qu’ils maîtrisent bien l’anglais, car sa langue est aussi complexe que belle)

A ceux qui aiment sortir d’un livre avec une étrange émotion, une douleur sourde et tendre à la fois, à tous ceux qui aiment « le côté obscur de la littérature »…

Il y en a encore qui me lisent ? Des pas convaincus ? Qui ne se sont pas laissés tenter ? Twisted Tree n’en fut pas moins mon grand roman du moment!


(commentaire rapatrié)


mots-clés : #social
par topocl
le Dim 4 Déc - 21:11
 
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Sujet: Kent Meyers
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Réjean Ducharme

Tag social sur Des Choses à lire - Page 14 51ioit10

Va savoir

Comme disent nos cousins Québecquois je crains d’être tombée en amour  pour cet auteur.

Rémi, le narrateur, aime les femmes, sa femme d’abord qui ne s’est jamais aimée et qui à la suite d’une double fausse-couche part courir le monde en compagnie de Raïa l’ancienne maîtresse de Rémi lequel  lui a confié Mamie  pour lui redonner le goût de l’amour et la ramener auprès de lui.

Pendant ce temps Rémi restaure une veille maison qui accueillera sa Mamie quand, enfin,  si elle revient ; elle lui a dit en partant « la vie il n’y a pas d’avenir là dedans faut investir ailleurs ». Rémi lui s’investit dans l’amour, celui qu’il garde pour Mamie, celui qu’il prend de Jina et Mary ses voisines mais surtout celui de Fanie la fillette de Mary, c’est  d’ elle d’ailleurs qu’il recevra après tant de complicité, de jeux le plus grand mépris.

Mamie s’ingénie à se perdre, à se gommer de la vie, de celle de Rémi et des autres ; elle le fait si bien que même Raïa avoue à Rémi qu’elle l’a perdue complètement.
Comme il le dit à Hubert le mari de Mary, Rémi est un panier percé, il perd les femmes qu’il  aime. Il avait investi, il a compris qu’il ne le fallait pas. Hubert, le mari de Mary  (qui lui perd sa vie) lui accorde à sa succession,  le cœur de Mary.  

Va savoir ?

Ces portraits de femmes sont superbes . Le langage m’a surprise dans les premières pages mais quelle force , quel coup au cœur ces phrases. J’aime cet homme qui met ses sentiments à nu, qui lit si bien les femmes et a su conquérir Fanie qui ne s’était pas ouverte à la vie.


Extraits

Fanie :

« Elle me prend par la main. Je me laisse mener. On ne peut pas résister,  des doigts si menus, si délicats, ce n’est pas humain. On est saisi par la grâce et remis à sa place, au règne inférieur où  on s’élève en grandissant. On est tout organes et tout infections, elle est tout art. On râle, elle rêve.  On a des mangeoires, des lavoirs, des histoires, des boudoirs, des baisoirs, des histoires où les ranger, des maîtres équipés pour nous y tenir et mieux nous rançonner. Elle n’a rien , elle est tout ce qu’elle a. »

« Et ça l’avait épuisée. Ou elle me faisait un numéro, pour se faire porter. Je ne me suis pas fait prier, je l’ai juchée sur mes épaules, et je ne sais pas ce que ça m’a encore fait comme effet, si j’étais heureux de l’avoir, ou malheureux qu’elle ne soit pas à moi. »

« C’est à ce moment que le petit miracle instantané s’est produit. C’est en tout cas l’effet que m’ a fait ce que j’ai pris dans mes bras quand Fanie a réussi à s’échapper et qu’elle m’a escaladé pour que je la sauve… Le monde entier comprenait de quel prix je paierais un autre écart de loyauté : il ne s’en est pas mêlé. »

Raïa :

« Elle veut visiter la vie, fourrer son nez délicat, aux parois frémissantes, où ça fermente. Il faut que ça souffre et ça sacre, se caresse et se salisse, sinon ça l’assomme.

Dali le chien : « Dali finit par la trouver sympathique aussi malgré les accrocs de leurs premiers contacts. Il la raccompagne en prenant ses coordonnées avec son nez, il sait tout de suite où les trouver. Il ne faut pas s’attacher aux gogo-girls qui ont du cran, elles sont trop portées à se ramasser dans un fossé avec du plomb dans le compteur. »

Mamie :

« Pour moi, il y en a une, une seule, et c’est bon de la perdre une fois de temps en temps, de courir le danger de la chercher encore, trouver sous quel visage elle s’est encore cachée. Qui risque rien n’ a rien, et c’est à ne souhaiter à personne, encore moins à la personne qu’on a qu’à la personne qu’on est… »

« Je te prends les doigts et te les mords, te les mange un par un comme je faisais à Raïa parce que tu m’en donnais envie et que tu confisquais les tiens, pas assez soignés, assez élégants pour être adorés, tu leur trouvais des cuticules, un air trapu, bossu, tordu, tout ce qui pouvait t’arranger… »

« Si tu disparais ainsi tu m’auras quitté en me serrant dans les bras de Raïa, et pour le fou d’amour que je suis c’est l’image idéale pour tracer une croix. Tu aurais fait exprès que ça ne me surprendrait pas. Tu auras fait ton gros possible , une dernière fois. Je te demande pardon  de t’avoir demandé ce que tu ne pouvais plus donner mais je sais pas si ce n’est pas moi qui ne te pardonne pas. Tu m’as dévoyé finalement, disqualifié, empêché d’accomplir ma sale petite  besogne de vivant. »

Jina et Mary : « Je les aimais de plus en plus sans le leur faire payer et ça leur faisait de plus en plus plaisir sans que ça paraisse. Histoire d’essuyer mieux les plâtres, on a combiné un de nos
fameux pique-niques. »

(message rapatrié)


mots-clés : #famille #social
par Bédoulène
le Dim 4 Déc - 18:11
 
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Sujet: Réjean Ducharme
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Theodor Mikhaïlovitch Rechetnikov


Theodor Mikhaïlovitch Rechetnikov
(1841-1871)


Tag social sur Des Choses à lire - Page 14 Theodo10
On sait peu de choses du Sibérien Fédor (ou Theodor) Mikhaïlovitch Rechetnikov (1841-1871). Emporté par la tuberculose, le jeune homme ne laisse en effet dans son sillage que l’embryon d’une oeuvre prometteuse.

Orphelin précoce élevé par son oncle, modeste employé des postes, il fut d’abord scribe au tribunal avant de devenir fonctionnaire au ministère des Finances. Très jeune, il entra en contact avec les cercles littéraires de Saint-Pétersbourg et c’est d’ailleurs pour poursuivre une carrière dans les lettres qu’il décida de quitter la vie active. Son premier roman, Ceux de Podlipnaïa, fut publié en 1864 dans le journal Le Contemporain dirigé par le célèbre intellectuel libéral Nekrassov. Ce texte sans concessions frappa les lecteurs de l’époque, notamment par son évocation vériste des misérables conditions d’existence des paysans sibériens. Rechetnikov, dans la foulée du succès remporté par son premier opus, allait s’attacher à d’autres coups de sondes dans les classes laborieuses du peuple mais ses oeuvres ultérieures, dédiées principalement aux mineurs, ne furent que partiellement publiées. Où vit-on mieux ? (1868) et Notre propre pain (1870) consacrèrent véritablement la réputation de Rechetnikov en tant que romancier du témoignage social et que précurseur de l’essai ethnographique. Malgré sa renommée croissante, Rechetnikov souffrit d’une profonde détresse morale.

Éprouvant des difficultés à concilier sa vie de famille et l’exercice de son art, rongé par la dépression, il sombra dans l’alcoolisme puis contracta le mal auquel il allait succomber. Il est enterré à Saint-Pétersbourg.

source : l'arbre vengeur

Ouvrages traduits en français :

Ceux de Podlipnaïa




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"Ceux de Podlipnaïa"

Des paysans de Podlipnaïa hameau de la Sibérie vivent dans la misère la plus profonde, physiquement et moralement. Ils vivent dans de véritables "taudis", dans le froid, la saleté, la maladie, sans espoir. Leur vie est "vide", sans intérêt.

« Jamais les Podlipovtsiens ne sont gais ou joyeux : en été même, pendant la belle saison, ils gardent l’expression triste des gens qui souffrent ; leur humeur est pénible et maladive. Les enfants eux-mêmes ne ressemblent pas aux autres enfants : ils courent, tombent, pleurnichent sans jamais chanter ou rire, ils s’ébattent pour ainsi dire à contre-cœur. Les vaches, les chevaux ont l’air de squelettes et se promènent d’un air morne. Le seul bruit qui fasse vibrer l’air, c’est l’aboiement d’un chien, échappé par miracle à la marmite, et que conserve sans doute un paysan désireux de se faire un bonnet de sa peau. »

Après qu'ils furent baptisés et malgré qu'ils conservèrent leurs "croyances animistes" ils furent sous la botte du Pope et de l'administration (prélèvement pour l'armée).

« S’ils l’avaient osé, les habitants du hameau auraient bien tenté de garder leur liberté, et chassé fonctionnaires et pope, mais le stanovoÏ les avait si bien caressés de son fouet, qu’ils ne regimbaient pas.»

Puis un jour plus cruel, Pila, le "sage" du hameau décide de partir, la famille et Syssoïko, l' ami partent donc. Leur ignorance s' illustre tout particulièrement quand ils atteignent une ville. Ils doivent mendier, mais mendier ou voler, si nécessaire.  Ils se retrouvent en prison.

« Grâce à leur séjour en prison, Pila et Syssoïko en apprirent plus que de toute leur vie ; ils n’ignoraient plus que Podlipnaïa n’était qu’un trou et qu’il y avait des villes qui valaient cent fois mieux, que ces villes étaient  habitées par des gens riches qui faisaient tout ce qu’ils voulaient, non par la force, mais à cause de leur argent. »

Incités par quelques habitants de leur région Pila et Syssoïko s'engagent comme "bourlaki" le dur métier de haleur sur les rivières  Tchoussovaïa, puis la Koma. Métier qui représente à leurs yeux la prospérité. Mais il est écrit que pour eux la misère, la cruauté de la vie est une peau dont ils ne se sépareront que dans la mort.

Mais l'espoir fait jour pour les enfants de Pila pour lesquels l'ignorance, l'obscurantisme cèdent au savoir.

Un court livre, une écriture sobre mais efficace. L'auteur connait cette misère et ce livre qui n'épargne rien des insuffisances de ces hommes et femmes, paysans, bourlaki, est malgré tout une reconnaissance à ceux qui leur vie durant sont dans la souffrance, dans la misère.


extraits :

« Ca vous regarde-t-il ? J’ai tué huit ours fit Pila d’un ton glorieux. Et toi, qu’as-tu fait ?
-J’ai mis bas un homme.
- Viens un peu ici, chien, tu verras de quel bois je me chauffe !
Et Pila saisit le premier pot qui lui tomba sous la main : il le fit tournoyer autour de sa tête, prêt à le lancer, mais on le poussa et un liquide puant et infect se répandit sur sa souquenille.
Les détenus éclatèrent de rire, Syssoïko aussi. »


"Ils ne se rendent pas compte de leur position et restent incapables de déclarer s’ils sont heureux ou misérables. Ils n’ont du reste pas le temps d’analyser leurs sentiments, ne doivent-ils pas équarrir, fendre et tailler les poutres ? Le travail manuel ne dispose guère à des réflexions dont, au reste, ils sont parfaitement incapables… Ils n’ont que des sensations matérielles : la force, la fatigue, le plaisir du sommeil ; quant aux autres, il ne faut pas en parler. »

« L’administration de la fabrique, en bas comme en haut, n’avait guère de ménagements pour les bourlaki qu’on lésait de toute manière, aussi nombre d’entre-eux souffraient-ils de la faim. Les directeurs y trouvaient sans doute leur intérêt. Aussi ne s’inquiétaient-ils guère de ce que les bourlaki pouvaient bien penser. N’ était-ce pas leur gent taillable et corvéable à merci ?
Que le paysans russe se taise ou jure, il n’ira jamais se plaindre : à qui se plaindrait-il du reste et qui entendrait sa prière ? »


« -Syssoïouchko ! vit encore un peu pour nous faire plaisir ! lui disent les bourlaki avec compassion.
Le pilote ne put les décider à se remettre au câble qu’on venait de réparer. Non !  Nous ne bougerons pas de place ! dirent les bourlaki, sans quoi nous mourrons aussi ! »


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"message rapatrié"


mots-clés : #social
par Bédoulène
le Sam 3 Déc - 16:54
 
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Sujet: Theodor Mikhaïlovitch Rechetnikov
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Augusto Roa Bastos

Augusto Roa Bastos (1917-2005)

Tag social sur Des Choses à lire - Page 14 Bastos10

Augusto Roa Bastos est un écrivain paraguayen du XXe siècle.
Il passe une partie de son enfance dans le monde rural indien d'Iturbe qui servira plus tard de cadre à la plupart de ses romans sous le nom d'Itapé.Iil s'enrôle à l'âge de 15 ans dans l'armée à titre d'assistant infirmier et participe à la guerre pour les terres du Chaco qui oppose le Paraguay et la Bolivie de 1932 à 1935.

Il est ensuite journaliste au quotidien El Païs et commence à publier quelques contes et poèmes. Il découvre les écrivains français (Valéry, Cocteau, Eluard, Breton, Aragon,...) et lit passionément Faulkner. Sa première nouvelle, Fulgencio Miranda, sort en 1941. Pendant la seconde guerre mondiale, il devient correspondant de guerre à Londres, où il donne aussi des cours de littérature, puis séjourne quelques mois en France avant de revenir diriger la rédaction d'El Païs.

Il est contraint de s'exiler au début de la guerre civile de 1947 qui aboutit à la dictature du général Alfredo Stroessner et s'installe à Buenos Aires (Argentine), où il vivra une trentaine d'année. It y écrit la majeure partie de son oeuvre littéraire.
En 1976, à la suite du putsch militaire, Augusto Roa Bastos doit quitter Buenos Aires. Il s'installe en France, à Toulouse, où il enseigne la littérature hispano-américaine à l'université. Il continue à publier. Il ne retourne au Paraguay qu'en 1989, après 42 années d'exil et la chute du dictateur Alfredo Stroessner, retrouvant sa citoyenneté d'origine dont le despote l'avait destitué en raison de son opposition au régime.
A sa mort le président paraguayen Nicanor Duarte a décrété trois jours de deuil national.


Source : http://www.republique-des-lettres.fr/10249-

Ouvrages traduits en français :

1960 : Fils d'homme (Hilo de Hombre)
1974 : Moi, le Suprême (Yo, el Supremo)
1992 : Veille de l'Amiral (Vigilia del Almirante)
1993 : Le procureur (El fiscal)
1994 : A contrevie (Contravida)
1995 : Madame Sui (Madama Sui)
1996 : Métaphorismes (Metaforismos)





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Fils d’Homme

Ce récit est celui de la vie d’hommes et de femmes  du Peuple vivant dans deux villages d’une même contrée au Paraguay  et dont les destins vont s’entrecroiser sur plusieurs décennies  dans les révoltes et les guerres.

Le narrateur, habitant lui aussi d’Itapé qui conte l’histoire dont il est le témoin et l’un des participants en tant que militaire, fasciné qu’il a été enfant par les vêtements rutilants.

Itapé : Les habitants d’Itapé ont adopté comme Fils de Dieu, la sculpture  en bois d’un Christ lépreux sorti des mains d’un musicien – Gaspar Mora -  qui le fit à son image et le laissa pour le remplacer quand il mourut de sa maladie. «  C’est son Fils il l’a laissé pour le remplacer dit Macario » C’est le Fils d’Homme !

Maria Rosa  aimera Gaspar jusqu’après sa mort jusqu’à la folie,  offrant sa belle chevelure au Christ lépreux.

Rancho


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Sapukai : Ville tragique née l’année de la comète qui balaya la Terre de sa queue de feu, où la révolte agraire fut écrasée coûtant la mort des rebelles, trahis par le télégraphiste du village, et de la population. Les stigmates de la gare,  d’où devait partir le train des révoltés et qui  fut bombardée, ne s’aplanirent qu’au bout de plusieurs années. La conservation du  seul wagon encore debout devint pour Casiano,  évadé de la plantation où lui et sa femme Nati travaillaient comme des esclaves, le but de sa vie. Cette obsession, engendra chez leur Fils une volonté d’accomplir ce qu’il devait, que ce soit un nouveau soulèvement ou la guerre où s’engagea sa Patrie.

« Car maintenant il ne restait plus qu’à avancer, avancer toujours, avancer coûte que coûte à travers la jungle, le désert, les éléments déchaînés, la tête morte d’un ami, à travers ce trémolo où la vie et la mort se rejoignaient sur une ligne indéfinissable. C’était ça le destin. Et que pouvait donc être le destin pour un homme comme Cristobal Jara, si ce n’est de conduire son obsession comme un esclave, sur un étroit sentier de la jungle ou sur la plaine infinie, emplie de la sauvage odeur de la liberté ? »

Dans cette ville était arrivé un étranger qu’un jour la population du village découvrit comme étant médecin. Il vivait dans un rancho dans la forêt, s’occupa des lépreux, sauva plusieurs personnes dont Maria Regalada qui lui voua un amour et une reconnaissance inébranlable qui la conduisit,  alors que le docteur les avait tous abandonnés à s’occuper elle-même des lépreux et de son chien fidèle, alors même qu’il l’avait violée.

« Le chien ramasse l’ayaka entre les dents et s’en retourne par le chemin, résigné à tout, aux coups de pieds du tenancier, aux crottes de boue qu’un gamin lui jette avec sa fronde pour exercer son adresse, ou aux serpents et crapauds morts que d’autres lui mettent furtivememnt dans le panier. Lui, il ne s’en rend même pas compte, occupé à sa trace. Il ne sait même plus aboyer. Rien que ce hurlement ténu qui lui sort encore de la gorge certaines nuits, au dernier quartier de la lune, avant de s’endormir roulé en boule contre la porte de la cabane vide.
La Maria Regalada l’attend toujours au croisement du chemin du cimetière pour l’aider pour adoucir les abus".


Les militaires qui étaient punis pour insubordination, conspiration  et les civils  emprisonnés pour soulèvement furent eux aussi mobilisés quand la guerre éclata entre le Paraguay et la Bolivie.  Parce que toute chair est bonne pour la guerre.  

« Près de mon abri git mon adjudant, les lèvres retroussées et bleues dans le dernier visage. Il me tend encore le pot de fer-blanc entre les clavettes de ses doigts, me montrant les dents pleines de terre. Les mouches vertes entrent et sortent par ses fosses nasales. De temps en temps il s’en détache une et elle fait une rapide virée de reconnaissance sur moi, pour voir si je suis déjà mur. J’ai comme l’impression que ma lenteur et ma résistance l’énervent. »

Le destin du narrateur Miguel n’est pas meilleur, considéré dans l’armée comme conspirateur et par la population de Sapukai de traitre, il ne parvient pas à contrôler sa vie tiraillé par sa position et par le sentiment que lui inspire les « révoltés », ces  hommes du peuple.

« Je pense aux autres êtres comme eux, dégradés jusqu’à l’extrême limite de leur condition comme si l’homme qui souffre, l’homme humilié, était toujours et partout le seul être fatalement immortel.
Il doit bien y avoir une issue à ce monstrueux contresens de l’homme crucifié par l’homme. Parce que sinon il faudrait penser que la race humaine est maudite à jamais, que ceci c’est l’enfer et que nous ne pouvons espérer de salut.
Il doit y avoir une issue, parce que sinon……. »


Il est important de lire la préface de l’auteur et la note de la traductrice.  Ouvrir un fil au nom de cet écrivain m’apparait évident.

L’écriture de l’auteur porte toutes les traces de l’histoire de son pays, il a participé à la guerre contre la Bolivie et les descriptions dans son livre sont des plus réalistes.  A travers la mémoire du personnage Macario  est rappelé que ce pays a subi plusieurs  dictatures, cause notamment  de deux soulèvements agraires, malheureusement écrasés par les troupes présidentielles.
Le fait qu'à certains moments les personnages s'expriment dans leur langue le guarani apporte du poids quant aux liens qui les unissent.
Il y a de belles figures de Femmes dans ce récit, femmes compagnes mais aussi "compagnonnes"

C’est une très bonne lecture et ce livre étant le premier d’une trilogie je continuerai donc ma connaissance de cet auteur.

L’un des camions porteur d’eau dans cette région où, en absence,  cet élément était l’un des plus cruels ennemis.


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la route poussièreuse qui étouffait les combattants


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"message rapatrié"




mots-clés : #guerre #insurrection #social
par Bédoulène
le Sam 3 Déc - 15:46
 
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Sujet: Augusto Roa Bastos
Réponses: 17
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Paul Nizan

Antoine Bloyé

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Carrément beau.
Où Nizan nous montre à voir que le plus bel âge de la vie reste à définir.
Antoine Bloyé, une vie à cheval sur les XIX et XXèmes siècles, illusions et désillusions d’un homme révélateur de son temps.
Parfait parcours d’un enfant d’ouvrier, sorti du lot par le travail, encore le travail, marié, père de famille , arrivé. Mais arrivé où ? Les failles souterraines sont là, creusant leurs galeries de mélancolie et de désespoir. La façade est splendide mais cache des interrogations qui s’insinuent d’abord discrètement pour s’épanouir en gouffres béants. La tragédie de la réussite, quand elle trahit l’homme qu’elle est sensée porter dans une  société qui n’ a pas fini de se venger. Nos choix ne sont ils pas des renoncements perpétuels ?
Et puis il y a la langue, sérieuse, dense, noble. Puissante. L’impression d’une condensation intense où chaque mot utile, chaque phrase signifiante. Sans concession, comme le message de l’auteur. Des pages entières qu’on a envie de relire à haute voix, d’une perfection formelle  qui remue.


Ainsi Antoine commence à éprouver, maladroitement encore  ce soir-là, ainsi à la porte de la maison, que le monde dans lequel ses études le poussent, où l'entraîne une naïve ambition est assez loin du monde où depuis leur jeunesse otn vécu ses parents, et sent un commencement de séparation, il n'est plus exactement de leur sang et de leur condition, il souffre déjà comme d’un adieu, comme d'une infidélité sans retour.



Anne Guyader appartenait à un tout autre univers sentimental que Marcelle : Antoine se demandait sans beaucoup de clarté dans les idées, si l’ardent royaume des femmes sans avenir et sans caution n'était pas d'un plus grand prix pour un homme que les douceurs virginales, les chastes conspirations des vertus bourgeoises.

La vie est ainsi, un soir dans l'hiver. La lampe charbonne, sous son abat-jour de papier glacé couleur vert d’eau. On mourra, mais on a des fils : après tout il n'y a pas lieu de regretter d'être un homme et de vivre…


Quand Anne lui demande s’il se trouve heureux, il répond qu'il l’est, à peine y a-t-il dans un recoin de sa personne une résistance, une petite force de protestation et d'angoisse solitaire qui est écrasée sous les tissus de l'homme social et qui ne demande qu'à grandir, qui ne peut pas mourir : c'est à cause d'elle qu'Antoine attend toujours une seconde avant de répondre qu'il est heureux de. Car il faut qu’il l’écarte… Lorsqu'elle est écartée, il se voit enfin du même regard que les autres hommes, il s'approuve comme ils l'approuvent et il étend les bras à droite et à gauche dans l'espace de sa journée, comme un être agréable à la terre. Le soleil est pour lui à mi-course : il est comme éternellement suspendu à une place nuageuse de lété où il ne déclinera plus.
Le soleil déclinera.



(commentaire rapatrié)


mots-clés : #social
par topocl
le Sam 3 Déc - 9:57
 
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Sujet: Paul Nizan
Réponses: 8
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