Simone Schwarz-Bart
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Simone Schwarz-Bart
Simone Brumant est née le 1er août 1938 à Saintes d'un père militaire et d'une mère institutrice, tous deux natifs de la Guadeloupe. Elle rentre au pays à l'âge de trois mois et fait ses études à Pointe-à-Pitre, à Paris, puis à Dakar.
À 18 ans, alors qu'elle est encore étudiante à Paris, elle fait une rencontre qui sera déterminante : André Schwarz-Bart. Celui-ci est en pleine écriture difficile de son livre Le Dernier des Justes (prix Goncourt 1959). C'est lui qui exhortera Simone à écrire à son tour car il a décelé en elle le talent d'un grand auteur. Ce sera d'abord un roman à quatre mains avec son époux : Un plat de porc aux bananes vertes, histoire des exils antillais et juif en miroir.
Puis en 1972, Simone écrit seule Pluie et vent sur Télumée Miracle qui est considéré comme un chef-d'œuvre de la littérature caribéenne.
Cette période correspond aux années de nationalisme radical en Guadeloupe : elle et son mari subissent un quasi-procès politique. Ils décident de rester en Guadeloupe mais de ne plus rien publier, et ouvrent donc une boutique d'antiquités coloniales.
Après un long silence, Simone écrit Ton beau capitaine, une pièce de théâtre en un seul acte, avant de publier, avec son époux, une encyclopédie en sept volumes, Hommage à la femme noire, mettant notamment à l'honneur toutes ces héroïnes noires absentes de l'historiographie officielle.
Œuvres :
• Un plat de porc aux bananes vertes (avec André Schwarz-Bart), Seuil, 1967
• Pluie et vent sur Télumée Miracle, Seuil, 1972
• Ti Jean l'horizon, Seuil, 1979
• Ton Beau Capitaine, Seuil, 1987 (théâtre)
• Hommage à la femme noire (avec André Schwarz-Bart), Éditions Consulaires, 1989 (essai)
• Au fond des casseroles, Espoir et déchirements de l'âme créole, Autrement 41, 1989
• L'Ancêtre en Solitude (avec André Schwarz-Bart), Seuil, 2015
• Adieu Bogota (avec André Schwarz-Bart), Seuil, 2017
(D’après Wikipédia)
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« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
Tristram- Messages : 15926
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Re: Simone Schwarz-Bart
Pluie et vent sur Télumée Miracle
Ce roman semble contenir toutes les Antilles françaises, du moins les thèmes qui les particularisent dans la littérature qui va suivre.
On retrouve le typique caractère antillais dépeint par les écrivains autochtones, tempérament teinté de cette ombre amère, la défiance, un fond rancunier, voire haineux ‒ l’héritage de l’inoubliable, l’irrémissible esclavage (on peut être raciste à moins). Et tout le livre qui parle des Afro-Caribéens pauvres le fait toujours en opposition aux Blancs quand ces derniers sont évoqués.
Mots-clés : #esclavage #identite #racisme
Ce roman semble contenir toutes les Antilles françaises, du moins les thèmes qui les particularisent dans la littérature qui va suivre.
On retrouve le typique caractère antillais dépeint par les écrivains autochtones, tempérament teinté de cette ombre amère, la défiance, un fond rancunier, voire haineux ‒ l’héritage de l’inoubliable, l’irrémissible esclavage (on peut être raciste à moins). Et tout le livre qui parle des Afro-Caribéens pauvres le fait toujours en opposition aux Blancs quand ces derniers sont évoqués.
Pays aussi et surtout de conte, d’oralité, d’invention verbale, où l’important semble être d’avoir à dire :« Il ne sut jamais dire ce qui se passa en lui et comment il en vint, sur la fin de son séjour, à considérer les Blancs comme des bouches qui se gavent de malheur, des vessies crevées qui se sont érigées en lanternes pour éclairer le monde. » (II, 13)
Au travers de la vie de Télumée, qui connaît plusieurs fois l’amour et sa perte, ce roman expose la précarité du bonheur, et témoigne de la dignité humaine jusque dans la misère.« …] ils surent qu’ils auraient une belle chose à raconter, au moins une fois dans leur vie. » (I, 1)
« L’Ange Médard sourit et je lui tins la main jusqu’à l’aube, agenouillée près de lui, cependant que les gens s’amassaient en silence, devant ma case, contemplant la scène qui se déroulait devant leurs yeux et s’efforçant d’en tirer une histoire, déjà, une histoire qui ait un sens, avec un commencement et une fin, comme il est nécessaire, ici-bas, si l’on veut s’y retrouver dans le décousu des destinées. » (II, 14)
Quant au style, cet extrait devrait assez donner le ton :« Toutes les rivières, même les plus éclatantes, celles qui prennent le soleil dans leur courant, toutes les rivières descendent dans la mer et se noient. Et la vie attend l’homme comme la mer attend la rivière. On peut prendre méandre sur méandre, tourner, contourner, s’insinuer dans la terre, vos méandres vous appartiennent mais la vie est là, patiente, sans commencement et sans fin, à vous attendre, pareille à l’océan. » (II, 4)
Un classique : à lire !« Cette année-là, la disgrâce de Fond-Zombi commença par un hivernage qui surprit tout le monde. Des trombes d’eau s’étaient abattues sur le village, transformant les chemins en torrents boueux qui charriaient vers la mer toute la graisse de la terre. Les fruits coulaient avant de mûrir et les négrillons avaient une petite toux sèche qui faisait mal. Attendons le calme, disait-on, oubliant que mauvais hivernage vaut mieux que bon carême. Et le carême survint, torride, stupéfiant, étouffant porcs et dévastant poulaillers, cependant que les feuilles de bananiers devenaient hachures du vent, oripeaux défraîchis qui striaient l’espace en signe de débandade. Fond-Zombi avait un aspect désertique, et le mal semblait dans l’air la seule chose palpable, que les gens fixaient hébétés des après-midi durant. Les femmes allaient par la rue avec une célérité déconcertante, et à peine pouvait-on deviner leur maigreur, la tristesse de leurs yeux. Elles glissaient comme des ombres et se croisant, elles s’adressaient un salut évasif qui signifiait, de l’une à l’autre… il faut stopper le mal par notre silence et d’ailleurs, depuis quand la misère est-elle un conte ?... » (II, 8 )
Mots-clés : #esclavage #identite #racisme
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Tristram- Messages : 15926
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Re: Simone Schwarz-Bart
Celui-là je le note !
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"Et au plus eslevé trone du monde, si ne sommes assis, que sus notre cul." (Michel de Montaigne)
Armor- Messages : 4589
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Re: Simone Schwarz-Bart
Super ! Tu nous diras ?
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Tristram- Messages : 15926
Date d'inscription : 09/12/2016
Age : 68
Localisation : Guyane
Re: Simone Schwarz-Bart
Impec', ça me fera la piqûre de rappel.
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Keep on keeping on...
Re: Simone Schwarz-Bart
Ah, ça a aussi l'air bien intéressant.
Merci Tristram !
Comme "le dernier des Justes" traine autour de moi depuis longtemps, elle m'intriguait.
Je l'ai vue récemment parler dans un documentaire consacré à André.
Celui-ci est-il son oeuvre centrale, à part l'encyclopédie de sept volumes ?
Peut-on encore trouver cet "hommage à la femme noire" ?
Merci Tristram !
Comme "le dernier des Justes" traine autour de moi depuis longtemps, elle m'intriguait.
Je l'ai vue récemment parler dans un documentaire consacré à André.
Celui-ci est-il son oeuvre centrale, à part l'encyclopédie de sept volumes ?
Peut-on encore trouver cet "hommage à la femme noire" ?
Gnocchi- Messages : 965
Date d'inscription : 01/01/2017
Re: Simone Schwarz-Bart
Je crains que cette encyclopédie ne soit épuisée, mais elle est trouvable d'occasion, Gnocchi.
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Tristram- Messages : 15926
Date d'inscription : 09/12/2016
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Localisation : Guyane
Re: Simone Schwarz-Bart
Un plat de porc aux bananes vertes
Marie, Martiniquaise de soixante-douze ans, vivote dans un sordide hospice parisien : elle est « le Quatorze » au « Trou ».
Misère (dont la faim) et rire, et toujours la prégnance de l’ineffaçable esclavage.
Retour (trop rapide ?) à l’hospice, où elle ne peut voir qu’au moyen des lunettes prêtées de mauvaise grâce par la Bitard, devant laquelle Marie s’humilie pour pouvoir lire, et écrire ces cahiers, elle qui a quitté sa Martinique depuis bien longtemps.
Le style de ce roman (co-signé par son mari André) m’a paru d’un lyrisme un peu soufflé, même si les recours au « patois créole » (et au verbe de Césaire) sont heureux.
\Mots-clés : #biographie #enfance #esclavage #exil #famille #insularite #misere #nostalgie #vieillesse
Marie, Martiniquaise de soixante-douze ans, vivote dans un sordide hospice parisien : elle est « le Quatorze » au « Trou ».
Ce n’est qu’à la moitié du roman qu’elle parviendra à évoquer de nouveau son île, à en faire revivre le souvenir : son enfance de ti moune, « Petit Monde », Mariotte-enfant Câpresse « possédée », sa Moman, Hortensia-négresse dite la Lune, la mère de celle-ci, Man Louise, et le souvenir de la mère de celle-ci, la femme Solitude de Guadeloupe. Sa grand-mère s’éteint sur le morne Pichevin (cher à Raphaël Confiant), et sa mère sacrifie le cochon pour payer à Saint-Pierre une robe de chambre-suaire à Man Louise, et apporter un plat de porc à son compère Raymoninque, bagarreur et batteur de Raymon, le gros tambour N’goka (qui est peut-être le père de Mariotte).« Je suis à l’égard de mon passé un croyant qui a perdu la foi. »
Misère (dont la faim) et rire, et toujours la prégnance de l’ineffaçable esclavage.
Retour (trop rapide ?) à l’hospice, où elle ne peut voir qu’au moyen des lunettes prêtées de mauvaise grâce par la Bitard, devant laquelle Marie s’humilie pour pouvoir lire, et écrire ces cahiers, elle qui a quitté sa Martinique depuis bien longtemps.
Le style de ce roman (co-signé par son mari André) m’a paru d’un lyrisme un peu soufflé, même si les recours au « patois créole » (et au verbe de Césaire) sont heureux.
\Mots-clés : #biographie #enfance #esclavage #exil #famille #insularite #misere #nostalgie #vieillesse
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Tristram- Messages : 15926
Date d'inscription : 09/12/2016
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Localisation : Guyane
Re: Simone Schwarz-Bart
merci Tristram, tu me tentes encore, je ne puis résister
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“Lire et aimer le roman d'un salaud n'est pas lui donner une quelconque absolution, partager ses convictions ou devenir son complice, c'est reconnaître son talent, pas sa moralité ou son idéal.”
― Le club des incorrigibles optimistes de Jean-Michel Guenassia
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"Il n'y a pas de mauvais livres. Ce qui est mauvais c'est de les craindre." L'homme de Kiev Malamud
Bédoulène- Messages : 21639
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