Philip Roth
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Re: Philip Roth
Tristram a écrit:Ton commentaire sera sans doute déterminant pour faire gagner le sommet de PAL à ce livre, Topocl !
tu as lu les 2 premiers livres du cycle Tristram ?
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“Lire et aimer le roman d'un salaud n'est pas lui donner une quelconque absolution, partager ses convictions ou devenir son complice, c'est reconnaître son talent, pas sa moralité ou son idéal.”
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Re: Philip Roth
j'ai en vu aussi ces lectures !
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Re: Philip Roth
C’est donc l’histoire d’une épidémie de polio, mais surtout prétexte à s’interroger sur l’« injustice », l’iniquité perçue entre destins humains plus ou moins "heureux", (et) l’absence de sens de ces destinées.
La « fureur contre Dieu pour avoir poursuivi d’une haine meurtrière les enfants innocents de Weequahic » entre en résonance avec ma lecture de Le Livre contre la mort, d’Elias Canetti.« Quel sens peut bien avoir la vie ?
‒ On a l’impression qu’elle n’en a pas, répondit Mr Cantor.
‒ Où est la balance de la justice ? demanda le pauvre homme.
‒ Je n’en sais rien, Mr Michaels.
‒ Pourquoi est-ce que la tragédie frappe toujours les gens qui le méritent le moins ?
‒ Je ne connais pas la réponse, répondit Mr Cantor. »
« Parfois on a de la chance, et parfois on n’en a pas. Toute biographie tient du hasard et, dès le début de la vie, tout relève du hasard, de la tyrannie de la contingence. Le hasard, je crois que c’est ce que Mr Cantor voulait dire quand il accusait ce qu’il appelait Dieu. »
Concernant l’épidémie et ses méfaits collatéraux, le mécanisme du bouc émissaire joue bien sûr (tout autant qu’à notre époque "éclairée", si acharnée à trouver "un responsable") :« Mais maintenant qu’il n’était plus un enfant, il était capable de comprendre que si les choses ne pouvaient pas être autres que ce qu’elles étaient, c’était à cause de Dieu. Si ce n’était pas à cause de Dieu, de la nature de Dieu, elles seraient autres. »
« Il était frappé de voir à quel point les vies divergent, et à quel point chacun d’entre nous est impuissant face à la force des choses. Et Dieu dans tout ça ? Pourquoi est-ce qu’Il installe une personne, le fusil à la main, dans la France occupée par les nazis, et une autre dans le réfectoire d’Indian Hill devant une assiette de gratin de macaronis ? Pourquoi est-ce qu’Il place un enfant de Weequahic dans un Newark ravagé par la polio, et une autre enfant dans le splendide sanctuaire des Poconos ? Pour quelqu’un qui avait jusqu’alors trouvé dans le sérieux et l’application au travail la solution à tous ses problèmes, il était maintenant bien difficile de s’expliquer pourquoi ce qui arrive arrive comme ça et pas autrement. »
« Espérons que leur Dieu miséricordieux leur accordera tout cela avant de leur planter Son poignard dans le dos. »
Le point de vue juif souligne la mécanique du tandem peur-haine :« C’est pourquoi tout le monde essaie de trouver qui ou ce qui pourrait être responsable. On essaie de trouver un coupable pour pouvoir l’éliminer. »
Qu’on soit croyant ou pas, l’existence est incertaine, et ceci établi il reste à s’interroger sur les réactions humaines vis-à-vis de cet état de fait. Bucky Cantor est déterminé par son passé à une culpabilité ravageuse : son sens des responsabilités est paradoxalement mené à l’absurde.« Je m’oppose à ce qu’on fasse peur aux enfants juifs. Je m’oppose à ce qu’on fasse peur aux Juifs, point. Ça c’était l’Europe, c’est pour cela que les Juifs ont fui. Nous sommes en Amérique. Moins il y aura de peur, mieux cela vaudra. La peur fait de nous des lâches. La peur nous avilit. Atténuer la peur, c’est votre job, et le mien. »
« Certains semblent penser que la meilleure solution pour se débarrasser de la polio serait d’incendier Weequahic, avec tous les Juifs dedans. Il y a beaucoup d’agressivité à cause de toutes les choses délirantes que les gens disent par peur. Par peur et par haine. »
Le passage central sur les activités "scoutes" du camp d’été m’a paru long, et assez hors de propos, alors que la thématique du roman est ailleurs exposée sans détour.« Il faut qu’il convertisse la tragédie en culpabilité. Il lui faut trouver une nécessité à ce qui se passe. Il y a une épidémie, il a besoin de lui trouver une raison. Il faut qu’il se demande pourquoi. Pourquoi ? Pourquoi ? Que cela soit gratuit, contingent, absurde et tragique ne saurait le satisfaire. Que ce soit un virus qui se propage ne saurait le satisfaire. Il cherche désespérément une cause plus profonde, ce martyr, ce maniaque du pourquoi, et il trouve le pourquoi soit en Dieu soit en lui-même, ou encore, de façon mystique, mystérieuse, dans leur coalition redoutable pour former un destructeur unique. »
« "Je voulais aider les gosses à devenir forts, finit-il par dire, et au lieu de ça, je leur ai fait un mal irrévocable." C’était cette pensée qui avait tenaillé pendant tant d’années de souffrance silencieuse un homme qui méritait moins que tout autre qu’il lui soit fait du mal. »
Le style m’a semblé impropre par moments, mais est-ce dû à la traduction ?
Mots-clés : #communautejuive #culpabilité #Pathologie
Dernière édition par Tristram le Jeu 26 Mar - 23:41, édité 1 fois
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Re: Philip Roth
Ha ? Mais vous ne croyiez quand même pas que Philip Roth allait se livrer à une banale autobiographie ? Quelque chose où, à l’inverse de ses romans où l’on recherche la part du vécu caché, on chercherait ce qui va, justement nourrir les romans. Comme si cet effet miroir anecdotique allait suffire Roth le facétieux, l’ambitieux, le provocateur…
Et bien non, évidemment. Au delà d’une autobiographie qui rapporte des faits qui ne pourraient appartenir qu’à lui, Philip Roth, symbole de judéité croisée d’américanité, il invente un dialogue épistolaire entre lui-même et Zuckermann, l’écrivain fictif, le personnage qu’il a créé et accompagné tout au fil d’un cycle romanesque, cet autre lui-même, ce jumeau impertinent… Pour mieux interroger, à son tour, le lien indéfectible entre réalité et fiction.
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Re: Philip Roth
Plutôt, oui, même si on se perd un peu dans son jeu de miroir et de pensée autour de ce rapport fiction/réalité. Mais il y a sa verve habituelle, et ce côté clin d'oeil à ses livres. Difficile de dire cependant si c’est une lecture pour qui ne connaitrait pas l’œuvre...Tristram a écrit:Et tu as aimé ?
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Re: Philip Roth
J'ai une grande idée : si on indiquait pas un pouce, orienté vers le haut ou le bas, comme les... Romains !
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Re: Philip Roth
Je sais très bien que c'est souvent moi lapetite maline qui demande !Tristram a écrit:Je ne vois pas pourquoi certains seraient obligés de donner leur ressenti et d'autres pas.
Génial!!! Et on écrirait "like" à côté!Tristram a écrit:J'ai une grande idée : si on indiquait pas un pouce, orienté vers le haut ou le bas, comme les... Romains !
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Re: Philip Roth
C’est à Nathan Zuckerman (un de ses plus fameux personnages, écrivain lui-même et son alter-ego) que Philip Roth adresse malicieusement son autobiographie, clin d’œil appuyé à la fiction qui se mêle à la réalité (et on peut se demander à bon droit quelle y est la part de souvenirs imaginés).
Enfance à Newark (baseball, antisémitisme et américanité) ; université, premières lectures (Thomas Wolfe, Sherwood Anderson), premiers textes, premières amours ; mariage avec la retorse, possessive et paranoïaque Josie…
Puis tollé soulevé par certaines de ses publications dans une partie de la communauté juive. À ce propos, la judéité, à la définition toujours floue, n’est manifestement pas une question religieuse pour Roth et ses « convictions séculières », mais plutôt semble-t-il « ethnique » :« Que May, mariée ou non, n’eût pas la moindre chance de se conduire comme Josie n’était pas même la question ; je ne pouvais simplement désapprendre du jour au lendemain ce que des années de bataille juridique m’avaient appris, et qui était de ne jamais, au grand jamais, redonner à l’État et à ses instances judiciaires le pouvoir de décider à qui je devais être le plus profondément attaché, de quelle manière je devrais l’être et pour combien de temps. Je ne pouvais absolument plus envisager d’être un mari finalement soumis au mécanisme punitif de leur autorité, et, si peu que j’aie fait l’expérience d’une réelle paternité en pédagogue aidant parfois les enfants de Josie à apprendre leur A.B.C., j’avais le sentiment de ne pouvoir non plus être un père sous leur juridiction. »
Le dernier quart du livre donne la parole à Zuckerman, qui reproche à son auteur d’afficher dans cette autobiographie ses bienséants sentiments filiaux de « bon gars » − cachant la raison qui permit l’écriture libérée, la colère de Portnoy’s Complaint : la catastrophique période dominée par Josie, sa némésis. Toute péripétie a un sens pour Roth ; toute son œuvre se ramène au thème de l’identité, qui chez lui paraît devoir principalement à la judéité, aux femmes et à la littérature.« …] et il y avait l’indiscutable non-judéité de May, consacrée par son éducation et révélée par des traits génétiques qui la rendaient aussi irrécusablement aryenne que j’étais juif, et qu’il ne lui aurait pas traversé l’esprit de vouloir, comme Josie, travestir ou renier. »
Il serait effectivement judicieux d’être familier de l’œuvre de Roth avant de lire cette autobiographie !
\Mots-clés : #autobiographie #ecriture
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