Des Choses à lire
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Après tout une communauté en ligne est faite de vraies personnes, avec peut-être un peu plus de liberté dans les manières. Et plus on est de fous...


Je te prie de trouver entre mes mots le meilleur de mon âme.

Georges Brassens, Lettre à Toussenot

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La date/heure actuelle est Jeu 2 Mai - 13:18

326 résultats trouvés pour historique

Gérard Noiriel

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 Massac10


Je ne connaissais pas du tout l'auteur et son parcours, c'est le titre et le lieu qui m'ont attiré sur cette lecture. Bien m'en a pris.


Le massacre des Italiens


L’ auteur a choisi de faire l’analyse socio-politique de ce drame. Il présente le lieu où il s’est déroulé : Aigues-Mortes dans les Bouches du Rhône,  l’histoire de cette ville médiévale, construction, économie, démographie (tour à tour prospère, puis en récession, stagnante.)

Une ville isolée entourée de marais insalubres lesquels provoquent les fièvres, manque vital  d’eau, à l’époque. Donc un manque d’hygiène.

Ces marais salins sont avec les vignobles les deux économies actives de  la ville mais surtout  les prémices du capitalisme ; c’est la Compagnie des Salins du Midi qui exploite les marais, quant aux vignobles les propriétaires sont les notables de la ville.

Le travail des ouvriers dans les marais est  équivalent à celui d’un forçat : chaleur, sel qui imprègne tout, poids à manipuler, longue journée, mal nourris, mal logés, mal payés …………..

Cette photo illustre la difficulté de pousser les brouettes sur un passage étroit  qui s’élève au fur et à mesure que s’élève les pyramides de sel (c’est le levage)


Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 Brouet10

La CSM  trouve intérêt à mettre en concurrence les ouvriers Français et Italiens, plus rentables, un affrontement meurtrier* se déroula les 16 et 17 août 1893. L’ auteur  en dresse la chronologie. Les victimes en sont les Italiens (morts et de nombreux blessés). Massacre auquel ont participé les ouvriers , les trimards (vagabonds, sans emploi, nomades : les plus démunis) et une partie de la population Aigues-Mortaise.

L’auteur a fait des recherches sur le parcours des personnages représentant l’autorité (le Maire, le Préfet, le Procureur, les gendarmes, l’armée… )et la CSM, tous niant leur responsabilité.

Pour expliquer cette féroce attaque l’auteur analyse l’affaire Aigues-Mortes, à travers  la situation de la France et de l’Italie pays  tous deux touchés par la Dépression.

- Social (l’ affaire des Fourmies  en France par exemple)

- Politique  dans les deux pays également  (En France la thèse nationaliste  exacerbée par les lois de l’immigration  (Barrès, Drumont…..), la thèse libérale…)

- La justice (dont l’indépendance n’est pas avérée dans cette affaire ; pression des groupes nationalistes, le jury de la cour d'assises d'Angoulême où a eu lieu le procès acquittera tous les accusés malgré des preuves accablantes. Ce qui constitue un scandale judiciaire)

- Les relations diplomatiques (résultant  de l’ affaire de Tunis, la guerre de 1870 etc….)

Cependant « L'intérêt national » a incité les gouvernements français et italiens à « enterrer l'affaire ». C'est pourquoi, malgré son importance, cet événement a été ensuite occulté de la mémoire collective.

- L' importance de la Presse (nationale et locale) et son impact sur la population

Remarque :  Les discours les plus nationalistes étaient tenus par les radicaux qui défendaient en même temps les « droits de l'homme » ! (grand écart !)

Rappel et incidence de l’affaire Dreyfus.

Viennent ensuite l’analyse par les experts, psychologues, anthropologues, sociologues…..

La mémoire, l’ oubli,  la résurgence de l’affaire de longues années après

C’est au centenaire qu’est apposée une plaque commémorative sur la place d’Aigues-Mortes.



Une lecture très intéressante qui  fait le lien entre l’immigration de l’époque (les Italiens) et celle d’ aujourd’hui  (les maghrébins), le racisme qui ne se nommait pas en 1893, non plus que le « pogrom ».
Le chapitre  sur la   presse montre bien le pouvoir des » médias », à l’époque déjà avec des extraits judicieux des éditoriaux.

La conclusion de l’auteur  aurait presque suffit à  relater l’affaire, car bien argumentée.

Personnellement j’ignorais ce massacre,  qui s’est déroulé dans ma région, à  Aigue-Mortes , je n’avais pas le sentiment que l’immigration des Italiens avait été si dure, même si bien sur j’avais une connaissance du rejet et des noms péjoratifs qui leur étaient donnés.

Les immigrés sont exploités par les patrons et servent à ces derniers à exploiter  également les ouvriers Français. (me semble que c’est encore d’actualité).

Il y a certaine lecture qui vous rappelle que c’est bien votre pays qui a adopté des lois qui ne l’honoraient pas. Il faut rester vigilent car certaines idées délatrices sont encore bien  vivantes.

*Succinct résumé du massacre

Spoiler:





PS j’ai trouvé dans cette lecture un éclairage  quant aux propos de Bernanos  sur les Républiques et la démocratie(les cimetières sous la lune)


Arensor ce livre devrait t’intéresser,  et d'autres je pense


mots-clés : #social #historique #immigration
par Bédoulène
le Sam 29 Juil - 15:41
 
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Sujet: Gérard Noiriel
Réponses: 7
Vues: 788

Léon Tolstoï

Bavard le garçon ! Au vu de sa bibliographie ! Et quand on voit la longueur de ses romans ... Shocked
Mais embarquer avec Léon, c'est la quantité et la qualité ! voui, voui M'sieurs dames !

Je ne m'étais pas encore penché sur ses monuments, j'avais fureté dans ses contes, et j'avais été intrigué par ses positions. C'était le dernier des grands noms russes qui manquait à mes lectures, il était donc temps, en cet été 2017, que je me plongeasse dans le roman-fleuve La guerre et la paix !

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 41qxsj10

Sauf que, au dire de l'auteur ce n'est pas un roman. Ni un essai, ni un poème. En bref, un OVNI révolutionnaire. Quelques 200 ans après les évènements relatés dans ce texte, paru en feuilleton (pas les feux de l'amour, quoique ...), me voilà plongé dans les confrontations Napoléon / Empire Russe. A la découverte des préoccupations de l'aristocratie moscovite et pétersbourgeoise de l'époque.

Y a un truc qui me chiffonne, je ne parviens pas à savoir si ce texte est une attaque, une dénonciation, ou un témoignage d'une époque, qui est déjà loin derrière l'auteur, au moment de sa rédaction.

Bon, je n'ai pas encore fini ma lecture, je reviendrai vous donner mes impressions finales. J'en suis rendu dans la première partie du second volume. Jusque-là, je dirais que Tolstoï est vraiment différent des autres "grands". Plus clinique, un réel métronome. Moins d'emphase et de folie que chez Dosto ou Gogol. Même une absence. Pourtant, c'est plaisant, ce n'est pas terne. Je le rapprocherais d'un Balzac, ou d'un Zola.

J'aime bien le personnage de Pierre. Parfois benêt, grand naïf. Croyant sauver le monde en entrant chez les Francs-maçons ... Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 1390083676 Il a un petit côté Martin Eden, ce garçon !
Puis la Natacha, ce devait être quelque chose (sont tous en pâmoison …).


mots-clés : {#}historique{/#}
par Invité
le Mar 25 Juil - 18:04
 
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Sujet: Léon Tolstoï
Réponses: 34
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Joseph Roth

Malgré un titre mal-traduit et mettant l'accent seulement sur Zweig (probablement plus connu en France), je veux recommander ce livre, même si apparemment certines éditions, une traduction soit très fautives?

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 514xpa10

Volker Weidermann - Ostende 1936 - Un été avec Stefan Zweig  


En fait, il s'agit d'un été à Ostende en 36 que des fuyants le régime nazi passent ensemble. Dans ce contexte on parle de leurs histoires, surtout de Zweig et justement Joseph Roth, ainsi que d'Irmgard Keun (la campagne de Roth!). Simplement admirable (dans la version allemande que j'ai lue):


Présentation de l'éditeur a écrit:Ostende, la station balnéaire huppée belge, le soleil, la mer, l'ambiance des cafés d'avant-guerre : pour les deux amis qui s'y retrouvent en cet été 1936, cela ressemble à de banales vacances où l'essentiel est de prendre du bon temps. Sauf que ces deux amis, ce sont Stefan Zweig, le richissime écrivain de bonne famille, et Joseph Roth, l'alcoolique miséreux mais génial, désormais indésirables dans une Allemagne nazie où leurs livres sont interdits. Les écrivains qui les rejoignent, dont Arthur Koestler, sont, comme eux, traqués, bannis, à mesure que la situation politique en Europe empire. Ostende 1936 est un « roman vrai » dans lequel Volker Weidermann raconte l'histoire envoutante d'un été pas comme les autres, à la veille des atrocités de la Seconde Guerre mondiale. Un été au cours duquel Zweig, Roth et bien d'autres se sont réunis pour célébrer la vie comme on ne le fait que par désespoir. Une fête d'adieu à la culture européenne.



mots-clés : #historique
par tom léo
le Dim 23 Juil - 8:54
 
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Sujet: Joseph Roth
Réponses: 31
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Rana Dasgupta

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 Unknow10

Delhi capitale

Rana Dasgupta ne connaissait l'Inde que parce que ce pays était celui de son père. Jamais il n'aurait imaginé quitter définitivement le confort de Manhattan pour la cité de Delhi. Et pourtant, il a été aspiré par le pouvoir d'attraction de cette ville dont il est, dit-il, tombé aussi amoureux qu'haineux… Et cette ville, il a eu envie de la comprendre, en se replongeant dans son histoire (récente et plus ancienne), et en allant à la rencontre de ses habitants, plus particulièrement ceux de la classe moyenne, qui sont au coeur de ce livre.

Maintes fois, Delhi a été détruite. Maintes fois, elle a su renaître de ses cendres. Le dernier traumatisme en date étant le drame de la Partition, dont les conséquences ont totalement changé le visage de la capitale indienne, donnant lieu à un vrai bouleversement culturel. L'empire moghol avait laissé en héritage une culture raffinée, un art unique et une langue célébrée des poètes. En exacerbant les antagonismes, la Partition a provoqué la mort de ce subtil sincrétisme hindo-musulman, que l'auteur évoque avec une certaine nostalgie. Cet extrait certes un peu long synthétise bien, je crois, la pensée de l'auteur :

Sans doute pense-t-on qu'un pays indépendant est plus porté à s'exprimer qu'un pays colonisé. Peut-être imagine-t-on l'Indépendance comme un moment où des voix jusque-là muettes se déversent tout à coup en conversation et en chants. Mais, dans l'Inde du Nord, la vérité était plus complexe. On ne lisait plus les ouvrages des grands auteurs en hindoustani, qui contenaient trop d'éléments désavoués et était écrits dans un alphabet qu'on ne pourrait bientôt plus déchiffrer.  Les maisonnées pendjabies, naguère si fièrement littéraires, se mirent à dédaigner les livres. La plupart, tous ceux qui ne servaient pas directement à promouvoir la carrière, représentaient une dépense sans retour sur investissement ; en fait, ils étaient une menace pour la maisonnée post-Partition, dans laquelle reconstruire la base matérielle de la famille était l'unique préoccupation légitime. (…)
Delhi mérita une fois de plus sa réputation de ville ou les langues viennent mourir. Si les réfugiés de la partition oublièrent l'ourdou en une génération, ils éprouvèrent les mêmes des difficultés à transmettre leur langue maternelle, le Pendjabi, dont leurs petits-enfants, dans leur immense majorité, ne connaissaient que des bribes. Beaucoup de membres de la classe moyenne finirent par ne parler correctement aucune langue – ni l'anglais, qui était, néanmoins, leur langue professionnelle, ni le hindi, qu'ils parlaient chez eux avec un vocabulaire limité aux besoins de la vie quotidienne. Le souci de la langue ? Vain et efféminé. La mode fut un certain relâchement dans l'expression, à une ignorance voulue de la grammaire.  (…) L'ancienne largeur de vue disparut. Les gens savaient de moins en moins ce que pensaient ceux qui n'étaient pas comme eux, l'isolement et la suspicion s'accrurent entre les castes.
Ce sont souvent les pauvres migrants des petites villes qui préservaient l'idée de la belle langue. Les réfugiés de la Partition, qui étaient propriétaires, comptaient leurs maisons et leurs économies, se repaissant de leur supériorité face à ces nouveaux venus dépenaillés ; mais parfois, ils entendaient parler les classes laborieuses venues d'autres lieux où l'on avait conservé les éléments poétiques, extatiques de l'hindoustani, et il s'apercevaient alors de tout ce qu'eux-mêmes avaient perdu.


La devise des années Nehru, "frugalité, service, nation", déjà mise à mal sous le régime d'Indira Gandhi, fut littéralement balayée par la dérégulation économique des années 2000. Aujourd'hui, la ville de Delhi se trouve dédiée tout entière à la rentabilité, à la réussite sociale et au consumérisme. L'opulence se doit d'être ostentatoire. Mais si le dynamisme de cette classe moyenne force l'admiration, il n'en cache pas moins des failles : une jeunesse désoeuvrée et en perte de repères, et des cellules familiales déstabilisées par la nouvelle indépendance des femmes, la (relative) libéralisation des moeurs, ou encore le recul de la spiritualité.
Et puis, le pendant de tout cet argent coulant à flot est, on le sait, la corruption endémique qui sévit dans le pays. Le système, loin d'être anarchique, est au contraire soigneusement planifié et entretenu par tous ceux qui y trouvent leur intérêt. Même le système médical est gangrené, les hôpitaux n'hésitant pas à faire payer des sommes ahurissantes des traitement totalement inutiles, voire dangereux pour les patients…
Delhi est en plein boom, Delhi s'enrichit, mais Delhi marche sur la tête…

Bien entendu, les pauvres sont comme toujours les grands perdants dans cette histoire. Les terrains où ils établissent leurs bidonvilles étant régulièrement convoités par les promoteurs, ils sont évincés manu militari, relégués dans les friches insalubres. Là, patiemment, de leurs propres deniers, ils reconstruisent des habitations, des écoles, et adjoignent un système de canalisation, avant d'être, de nouveaux, chassés comme des malpropres. Eternel cycle infernal pour ces déshérités ouvertement méprisés :

Le corollaire de tout cela était que, dans l'esprit de la classe moyenne, les domestiques ne méritaient pas leur salaire. Ce dernier n'était pas le reflet de leur contribution à la maisonnée, mais une espèce d'aumône qui leur était faite en dépit de leur incompétence. (…) Leur représentation des pauvres n'était pas celle d'une formidable force de travail, mais d'une meute de parasites qui vivaient au crochet de l'intelligence et du dur labeur de leurs supérieurs. C'était elle, la classe moyenne, qui boostait l'économie, et elle était déterminée à s'assurer que les fruits de la croissance lui reviennent en propre, et à personne d'autre. (…) « Se faire plumer » par les pauvres étaient quasiment une obsession (…)  Comme si, en réaction à la sempiternelle maxime de l'immédiat après indépendance – « Souvenez-vous des pauvres ! » –, Le temps était venu, semblait-il, de les oublier.


Pour dresser ce portrait contrasté de la ville, l'auteur a interviewé des gens très divers, arrogants, attachants, lucides, déroutants aussi, parfois, qui se sont livrés en toute sincérité. Mais Rana Dasgupta ne se contente pas de nous proposer des témoignages bruts, il fait un véritable travail de mise en perspective, aussi bien culturel que politique, analysant les mutations actuelles à l'aune du passé de la ville et du pays. C'est passionnant, parfois édifiant, et que l'on soit d'accord ou pas avec ses théories, on se plongera avec fascination dans cet essai de quelques 600 pages qui se lit aussi facilement qu'un roman, et livre de Delhi une vision aussi séduisante qu'effrayante.
A l'heure actuelle, Delhi est une ville à l'équilibre précaire, d'autant plus que son approvisionnement en eau est de plus en plus difficile à asssurer. Delhi pourrait donc bien s'auto-détruire. Avant de renaître, encore une fois ?


mots-clés : #corruption #essai #historique #mondialisation #social
par Armor
le Sam 15 Juil - 18:29
 
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Sujet: Rana Dasgupta
Réponses: 9
Vues: 1004

Hervé Abalain

Le Pays de Galles, identité, modernité

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 61yjd311

Ayant des racines galloises, bretonnes (et tchèques vous imaginez le mélange) j'avais envie de découvrir mes origines culturelles et de découvrir l'histoire d'une culture si méconnue car "écrasée" par l'identité anglaise et du Royaume Uni par extension.
Je me suis donc procuré cet ouvrage à cette fin.
Je n'ai pas été déçu. Monsieur Abelain est fin pédagogue et sait mesurer la dose de détails utiles à une bonne compréhension des diverses périodes et événements importants de l'histoire du Pays de Galles.
Une part conséquente est accordée à la cartographie et l'évolution de la langue pour comprendre les raisons du développement atypique de cette région.
Un très bon ouvrage de vulgarisation historique, clair et intéressant.



mots-clés : #historique
par Hanta
le Dim 25 Juin - 10:43
 
Rechercher dans: Histoire et témoignages
Sujet: Hervé Abalain
Réponses: 3
Vues: 793

Jim Fergus

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 51zadz10

Mille femmes blanches

En 1875, Little Wolf, un chef Cheyenne décide de rejoindre Washington pour faire une proposition assez incroyable au président Grant : il s'engage à livrer mille chevaux sauvages contre mille femmes blanches, en expliquant que les enfants étant toujours élevés par la tribu de la mère, les bébés qui naîtront de ces unions apprendront au contact de leur mère toutes les techniques blanches pour vivre sans les bisons. Ce qui apparaît comme lumineux ou franchement immoral, soulève un tolet à Washington et Grant entre deux hoquets (peut-être dus à son alcoolisme) quitte la salle scandalisé.

C'est sans compter sur le courrier de centaines de femmes prêtent à s'engager dans cette aventure folle. Le gouvernement fait un rapide calcul et se dit qu'un cheyenne apprivoisé vaut mieux qu'un cheyenne humilié. Dont acte. Seulement voilà, nous sommes loin des mille femmes blanches et il va donc falloir aller recruter dans les prisons et les asiles un peu de chair toute rose.

C'est ainsi que nous découvrons May Dodd, une femme enfermée dans un asile et qui pense échapper à l'horreur blanche en nomadisant avec les cheyennes.

Si le Journal de May Dodd permet au lecteur de découvrir mille et une facettes de la vie indienne, des relations (souvent basées sur des incompréhensions) entre les armées blanches et les tribus qu'elles tentent de parquer (soit disant pour les protéger mais en réalité pour mieux pouvoir les surveiller), j'avoue ne pas avoir été touchée par l'écriture extrêmement naïve de Jim Fergus.

Le texte n'est pas désagréable à lire, il gratte fort justement aux endroits qui font mal (le rapport aux femmes, à la sauvagerie, aux rituels, au respect de l'autre) mais l'ensemble est englué dans une sorte de mélasse un peu pâteuse, qui ne parvient pas à emporter la lecture.

Pas mal de fond mais pas assez de forme...



mots-clés : #historique #journal #minoriteethnique #Amérindiens
par shanidar
le Lun 19 Juin - 18:51
 
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Sujet: Jim Fergus
Réponses: 7
Vues: 790

Leonardo Padura Fuentes

l'homme qui aimait les chiens

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 41j9wd10

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 Barzoi10
Lévrier barzoï


   Ce fut le temps où se concrétisa la grande désillusion.



Padura se fait une fois de plus  virtuose, scrutant l'histoire, emmêlant les destins.
Il relate la biographie sur plusieurs décennies de Léon Trotski, de son assassin Ramon Mercader, et d'un jeune, puis moins jeune écrivain cubain fictif qui a perdu ses illusions. Il relate avec ambition, et réussite, pas moins que les grandes purges de Staline, la guerre d'Espagne, la dictature cubaine.

Ce roman extrêmement riche, instructif, passionnant, foisonnant, parfois un peu trop car Padura est un  grand bavard, qui ne connaît guère les limites, aime les détails à n'en plus finir Il quitte le romanesque au profit de l’encyclopédique, et noit ainsi parfois l'ampleur de son texte. Cela donne des longueurs, d'autant que le récit est souvent fait de deux points de vue successifs sur les mêmes faits (celui de Trotski et de son assassin) mais c'est addictif, et… terrorisant, comme tout ce qui parle de l'histoire du XXe siècle.

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 Mercad10
Ramon Mercader

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 Xvm89d10
Trotski et les siens à Mexico

(commentaire récupéré)



mots-clés : #exil #historique #politique
par topocl
le Mar 23 Mai - 14:33
 
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Sujet: Leonardo Padura Fuentes
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Leonardo Padura Fuentes

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 41w2du10

Hérétiques


Trois parties, trois époques, trois histoires qui ne font qu'une, chacune pleine d'enseignements, extrêmement bien documentée. L'histoire des juifs de Cuba dans les années 30 à 50 à travers  Daniel Kaminski un jeune juif qui a fui la Pologne en 1939, dont les parents furent passagers du Saint Louis, un paquebot chargé de 900 juifs qui se virent refusé le débarquement à Cuba et furent renvoyés se faire massacrer en Europe. Au XVIe siècle, un jeune séfarade,  qui trahit sa foi en peignant. Et à Cuba de nos jours, des bandes de jeunes au psychisme dévasté d'avoir grandi dans un monde d'interdits et de corruption.

Pour faire jonction entre ces trois mondes, une intrigue, à la résolution tarabiscotée, qui tourne autour d'un tableau transmis au fil des siècles, et résolue par Mario Condé, un homme des plus sympathiques, personnage fétiche de Padura, satisfait d'avoir des livres, un bon chien, l'amitié et l'amour dit-il (on pourrait rajouter une bouteille de rhum !). Ex-policier devenu marchand de livres anciens, comme les trois personnages décrits par Padura, c'est un « hérétique », un homme qui choisit sa liberté face au dogme.

Hérétiques est un livre ambitieux, qui fourmille d'informations passionnantes, brille à faire vivre de l'intérieur chacun des personnages et chacune des époques qu'il décrit. Mais… Padura est  trèèès bavard, aime enfoncer les clous jusqu'à la garde, bien tout expliquer et réexpliquer, par des phrases longues et compliquées , voire enchevêtrées. Cela ne simplifie pas la lecture de ce roman, qui  est dense et parfois jubilatoire, mais aussi plein de longueurs, qui m'a réjouie et lassée à la fois.

(commentaire récupéré)



mots-clés : #creationartistique #historique #religion
par topocl
le Mar 23 Mai - 7:48
 
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Sujet: Leonardo Padura Fuentes
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Michel Pastoureau

Le Roi tué par un cochon

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 Pastou11

Michel Pastoureau est un conteur redoutable. A partir de ce qui ne semble à première vue qu’un épisode historique secondaire, il nous entraîne dans une enquête quasi policière pour un voyage fascinant parmi la symbolique du Moyen Age.
A point de départ, un évènement dramatique : le 13 octobre 1130, le cheval que montait le jeune Philippe, roi de France, fils aîné de Louis VI le Gros, chute dans une rue de Paris à cause d’un cochon. Le roi est projeté sur une pierre et écrasé sous le poids du cheval. Il meurt quelque temps plus tard.
Philippe ne figure pas dans la numérotation des rois de France. Toutefois, comme tous les fils aînés du roi régnant jusque Philippe-Auguste, il a été sacré à Reims afin d’assurer un principe dynastique (les Capétiens n’oublient pas que le premier d’entre eux Hugues Capet doit son pouvoir à l’élection). Oint du saint chrême, Philippe participe donc bien au caractère sacré des rois de France. Il est qualifié dans les textes de « Rex junior ». Il est d’ailleurs rapidement inhumé dans la basilique royale de Saint-Denis. Quelques jours plus tard, son frère Louis est sacré à Reims. On ne plaisante avec la continuité royale !
Que ce jeune héritier ait été tué à la chasse par un sanglier, gibier royal à l’époque, passe encore. Mais par un vulgaire porc gyrovague, bête immonde entre toutes, un « porcus diabolicus » comme en parle Suger, voilà qui entache la dynastie d’une souillure  indélébile.

L’avènement au trône de Louis VII, frère de Philippe, mal préparé à la fonction, semble confirmer la malédiction qui frappe la famille royale. C’est en effet un règne calamiteux marqué par l’échec de la 2e croisade, celui du mariage avec Aliénor suivi d’un divorce désastreux qui va livrer l’Aquitaine à l’Angleterre, et j’en passe. Trois personnes entrent alors en jeu : l’abbé de Saint-Denis, le fameux Suger, saint Bernard de Clairvaux et bien sûr le roi. Tous vouent une dévotion profonde envers la Vierge Marie. Bientôt les attributs de la Vierge, la fleur de lys, symbole de pureté, et la couleur bleue vont devenir ceux du roi de France, le fameux « d’azur semé de lis d’or ». Coup de génie qui place à nouveau le roi de France dans une position particulière, ses armes étant de nature divine, par rapport à ses confrères d’Europe. L’hypothèse séduisante, remarquablement argumentée par Michel Pastoureau, bien qu’elle ne puisse malheureusement être confirmée par aucun document, est que l’adoption des attributs mariaux lave la souillure due au porc errant. De l’animal infâme aux lis d’or sur azur il n’y aurait donc qu’un pas !
Et qu’est-il advenu de ce « porcus diabolicus ». Nous l’ignorons. Dans un passage limpide sur les procès d’animaux et leurs enjeux, l’auteur nous apprend qu’ils n’apparaissent qu’un peu plus tard. Le régicide a donc évité le jugement et probablement une condamnation à mort.

Michel Pastoureau a le privilège d’une plume claire et simple qui fait de son récit un livre abordable par tous et vraiment agréable à lire, tout en gardant une rigueur historique sans faille. C’est un historien aussi plein d’humour. Il nous dit par exemple de nous méfier de la prose de Suger, maniant mal le latin, aux phrases ampoulées, cherchant à imiter Lucain. Il nous explique également les difficultés qu’il rencontrait lors de son service militaire pour replier le drapeau tricolore selon les règles et faire en sorte que le bleu recouvre les autres couleurs !
Qui a dit que nous n’avions plus de grands historiens en France ?


mots-clés : #historique #moyenage
par ArenSor
le Ven 12 Mai - 20:00
 
Rechercher dans: Histoire et témoignages
Sujet: Michel Pastoureau
Réponses: 2
Vues: 869

Arturo Pérez-Reverte

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 518ysi10


Le Hussard

Premier roman d'Arturo Perez Reverde....et bien heureusement que je n'ai pas commencé par celui-ci, sinon je n'aurais peut-être pas poursuivi avec cet auteur.

L'Andalousie en 1808, guerre napoléonienne Français-Espagnols....la confrontation de jeunes officiers du corps des Hussards pour qui c'est le baptême du feu....tout juste sortis de l'école Militaire... avec la dure réalité du terrain.....leurs rêves de gloire vont s'effondrer tout comme leurs chevaux, leurs camarades...dans un torrent de sang, de boue...

Et la gloire. Merde à la gloire, merde au monde entier, merde à l'escadron..........Ils pouvaient bien tous la garder pour eux, leur maudite gloire, leurs drapeaux, leurs cris de "Vive l'Empereur"......  

Nous livrons une guerre étrange qui ne figure pas dans les livres que nous avons étudiés à l’École militaire. Tu te rappelles notre conversation de cette nuit ? Il est difficile de renoncer à des guerres loyales, contre des ennemis parfaitement identifiables et bien alignés en face de nous.
— Des guerres propres, résuma Bourmont.
— Oui. Des guerres propres, où les curés ne battent pas la campagne avec leur soutane retroussée et un tromblon à l’épaule, où les vieilles n’arrosent pas nos soldats d’huile bouillante. Où les puits contiennent de l’eau et non des cadavres de camarades assassinés.
— Tu demandes beaucoup, Frédéric.
— Pourquoi ?
— Parce qu’à la guerre, on hait. Et c’est la haine qui motive les hommes.



Bref, un réquisitoire contre l'absurdité de la guerre et son horreur...

Mais, ça n'a pas suffit pour que j'accroche...je trouve qu'il n'y a pas d'émotion...  Neutral

(commentaire récupéré)

mots-clés : #guerre #historique #xixesiecle
par simla
le Ven 12 Mai - 6:38
 
Rechercher dans: Écrivains de la péninsule Ibérique
Sujet: Arturo Pérez-Reverte
Réponses: 24
Vues: 2456

Arturo Pérez-Reverte

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 11

Cadix, ou la diagonale du fou

"Cadix, 1811. Joseph Bonaparte est sur le trône d'Espagne et le pays lutte contre l'occupation des armées napoléoniennes. Mais dans la ville la plus libérale d'Europe, les batailles sont d'une autre nature.Des jeunes filles y sont  brutalement assassinées à coups de fouet, à l'endroit exact où tombent les bombes françaises. Ces meurtres tracent sur la cité une carte sinistre, un échiquier sur lequel la main d'un joueur invisible semble déplacer ses pions selon les lignes de tir, la direction des vents ou de savants calculs de probabilités, scellant le destin des personnages : un policier brutal et corrompu, l'héritière d'une importante compagnie de commerce maritime, un corsaire prêt à risquer sa vie par amour, un taxidermiste misanthrope et un excentrique artilleur français."

Quel roman ! Je viens de le terminer (hélas)....on est complètement pris dans l'histoire, c'est toujours aussi bien écrit, les personnages très bien campés, et toujours, du moins dans les trois romans de Arturo Perez Reverde que j'ai lus, des hommes très virils mais avec une part de vulnérabilité...envers les femmes bien entendu, une femme de caractère qui domine la plupart du temps la situation.

Lolita, qui gère d'une main de fer sa compagnie maritime,se sent attirée par le corsaire qu'elle a pris au service de sa compagnie, Pepe Lobo, un marin expérimenté et séduisant.....et tous les autres personnages décrits ci-dessus interviennent au fil des chapitres....un récit captivant, très bien documenté.

On a du mal à lâcher ce roman....j'aime toutes ces descriptions assez techniques ou pas....assez longues...et en opposition des dialogues relativement courts, aucun mot inutile.

Evidemment, j'aurais préféré une autre fin..mais j'ai adoré, quel écrivain bravo  Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 3245407319

(commentaire récupéré)

Depuis que tout a commencé, Cadix n'est plus pour Rogelio Rizon le terrain familier, le domaine connu sur lequel il s'est toujours déplacé avec aisance, impunité et cynisme. La ville s'est transformée en un échiquier hostile, plein de cases étranges, d'angles ténébreux jusque-là inconnus. Un casse-tête fait de traits géométriques dont il n'a pas la clef, avec une multitude de pièces insoupçonnées qui défilent sous ses yeux comme un défi ou une insulte. Quatre pièces perdues, jusqu'à maintenant. Et pas un seul indice. Cela signifie une gifle qui se répète chaque jour, tandis que le temps passe et qu'il continue à rester cloué sur place, perplexe. Dans l'attente d'un éclair de lucidité, d'un signal, d'une vision du jeu qui n'arrivent jamais. Qu'il ne voit jamais.


mots-clés : #historique
par simla
le Jeu 11 Mai - 7:00
 
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Sujet: Arturo Pérez-Reverte
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Marguerite Yourcenar

J'ai passé une partie de l'année dernière en compagnie de Marguerite, en voici le premier écho :

Mémoires d'Hadrien

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 Hadrie10

Yourcenar précise dans les notes qui suivent son roman historique, qu'elle a écrit sur le règne d'Hadrien parce qu'elle a en tête depuis toujours cette phrase de Flaubert : "Les dieux n'étant plus, et le Christ n'étant pas encore, il y a eu, de Cicéron à Marc Aurèle, un moment unique où l'homme seul a été".

[On remarque dans la phrase de Flaubert une figure de style appelée hyperbate qui consiste à intercaler entre deux mots d'autres mots ou à en inverser l'ordre classique des mots pour leur donner plus de poids ; Yourcenar utilise souvent cette forme assez rare en français ce qui donne à son style un relief tout à fait particulier ou pour le dire mieux un particulier relief.]

De cette phrase, de cette latence, de ce moment à la fois de grâce et de disgrâce, Yourcenar écrit une somme. Elle parvient à faire jaillir de la masse informe des documents, des lettres, des relevés archéologiques, des comptes rendus numismatiques, la matière qui formera son livre. Il faudra toute l'énergie d'une femme qui se sait un génie (ou tout du moins géniale) pour extraire de ce magma la substance royale de la vie de l'empereur. Et c'est en endossant le 'je' des Mémoires, que cette femme, vivant au XXème siècle, en Amérique parvient à rendre avec une parfaite détermination et une beauté étrange, les mots, les rêves, les puissances et les déboires d'un empereur qui apparaît sous les traits à la fois d'un homme et d'un dieu.

L'énergie et la maîtrise sont pour moi les deux mots qui définissent le mieux à la fois le formidable travail de Yourcenar (travail d'érudite et travail de création, travail du style et travail de la forme) et son personnage central. Homme aux mille visages et aux mille vertus, Hadrien sut transformer ses vices en fortune et son ambition en volonté de faire le Bien. Attentif à l'humanité de chacun comme à la sienne, c'est en homme éclairé qu'il finit sa vie, espérant de tout son être maintenir une période de paix, d'entente des peuples et de lucidité. Car il sait bien, Hadrien, au bord de succomber que cette accalmie ne durera qu'un temps comme lui-même .

On pourra finalement être attentif aux volontés d'un grand politique et d'un fin stratège qui fit de la Paix son obsession finale et de l'amélioration de la vie de ses sujets sa préoccupation ultime. On pourra regretter que nos politiques n'aient pas lu Yourcenar, qu'ils n'aient pas compris l'immense profit qu'ils auraient pu tirer de la vie du César. On pourra recommander à ceux qui aiment la belle littérature, le bel esprit et la finesse du langage et des idées, de s'emparer très vite de ce très beau roman.

J'ai malgré tout un peu survolé les passages concernant les questions politiques, en me promettant d'y revenir, car au-delà de son amour insensé pour la Grèce, berceau de toutes nos civilisations, au-delà de la réflexion sur les contrées barbares dont les us nous étonnent voire nous scandalisent, au-delà de la question sur l'incertitude de la présence divine ; Yourcenar semble donner quelques clefs pour mieux appréhender notre monde contemporain, barricadé, frileux, moribond et malade du cœur.


Marguerite Yourcenar est un colosse monumental récitant des vers grecs, une armée furieuse avançant avec l'ordre des légions romaines, un cataclysme sûr, un adonis à la peau ferme, aux gestes froids ; elle est tout à la fois puissante, passionnée et tendre, ouragan et simple brise, scandaleuse et cachée. Enigmatique. Tout ça ne peut laisser indifférent.


mots-clés : #historique
par shanidar
le Mer 10 Mai - 12:29
 
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Sujet: Marguerite Yourcenar
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Marguerite Yourcenar

L'oeuvre au noir

On pourrait penser « fichtre que c’est loin » à propos de l’époque dans laquelle vit Zénon : le seizième siècle, à la fin du Moyen-âge. Comme si le temps était un point qui progressait toujours vers plus de lumière. Ce qui est remarquable dans ce récit, c’est l’approche que le lecteur peut avoir avec Zénon. Yourcenar est au plus près de lui. Elle livre ses différents états ; intellectuels, émotionnels, physiques de façon plus ou moins entremêlée. Oui ça a comme quelque chose de Proustien, sauf que la structure des images semblent plus importer à Yourcenar, qui recompose ici une sorte d’ode à la vie. A la manière d’un rêve, avec un protagoniste qui témoigne de l’époque et de lui-même, et des forces qui s’ourdissent pour persécuter avec violence ceux qui s’émancipent du « bien » qu’on a organisé pour eux.

"Des gens avaient logé là comme un ver dans son cocon, et y logeraient après lui. Bien cachés, sinon tout à fait invisibles, un rat derrière une cloison, un insecte taraudant du dedans une solive malade voyaient autrement que lui les pleins et les vides qu’il appelait sa chambre… Il levait les yeux. Au plafond, une poutre remployée portait un millésime : 1491. A l’époque où ceci avait été gravé pour fixer une date qui n’importait plus à personne, il n’existait pas encore, ni la femme dont il était sorti. Il retournait ces chiffres, comme par jeu : l’an 1941 après l’Incarnation du Christ. Il tentait d’imaginer cette année sans rapport avec sa propre existence, et dont on ne savait qu’une chose, c’est qu’elle serait. Il marchait sur sa propre poussière. Mais il en était du temps comme du grain de chêne : il ne sentait pas ces dates taillées de main d’homme. La terre tournait ignorante du calendrier julien ou de l’ère chrétienne, formant son cercle sans commencement ni fin comme un anneau lisse. "


mots-clés : #historique
par Dreep
le Lun 8 Mai - 19:38
 
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Clara Dupont-Monod

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 Images44

Juette est née en 1158 à Huy, une petite ville de l'actuelle Belgique. Mariée à treize ans, elle est veuve cinq ans plus tard.
Juette est une femme qui dit non. Non au mariage. Non aux hommes avides. Non au clergé corrompu. Elle n'a qu'un ami et confident, Hugues de Floreffe, un prêtre. À quelles extrémités arrivera-t-elle pour se perdre et se sauver ?
Car l'Église n'aime pas les âmes fortes ...
De ce Moyen Âge traversé de courants mystiques et d'anges guerriers, qui voit naître les premières hérésies cathares, Clara Dupont-Monod a gardé ici une figure singulière de sainte laïque.



« Je m'appelle Juette, j'ai quinze ans. Je suis mariée. J'ai sans doute été punie parce que je suis mauvaise. »

Ce roman retrace le destin de Juette de Huy tel qu’il fut conté par son ami et confident, Hugues de Floreffe. C’est de nouveau une œuvre de Clara Dupont-Monod qui fait entendre deux voix en parallèle, celle de Juette, et celle d’Hugues.

On y découvre une enfant tel un oisillon fragile qui, peu entouré de l’affection des parents, vit dans ses rêves d’histoires et de chevaliers, mais est aussi animée par la foi et par maintes interrogations qu’elle partage avec son ami religieux, Hugues. Elle est touchante dans sa fragilité, sa voix que l'on entend peu, son innocence et sa gaité d'enfant, cette petite fille maigrichonne.  est comme détruite et Mariée contre son gré après avoir prononcé un  « oui je le veux » auquel elle ne donne aucun sens, elle subit la vie maritale dans une sorte d’errance entre la souffrance de la chair, le détachement, les interrogations sans fin sur ce qui l’a menée à devoir subir cela, sur la vie et les hommes, et une haine progressive à l’égard du sexe masculin. Elle ira jusqu’à craindre la damnation pour avoir espéré la mort de son époux.

Une fois libérée des chaînes du mariage, Juette va s’affranchir peu à peu de la société, de ses peurs, croyances, ce jusqu’à remettre ouvertement en question l’ordre religieux, l’accusant de ses impiétés. Elle qui a choisi d’être auprès des lépreux, exclus par la société, sa voix et sa rebellion est entendu par nombre de femme qui la suivront comme un mentor, ainsi que d’autres, ce d’autant plus qu’elle a des extases. C'est une exemple de force et de positionnement qui jamais ne flanche, une des pionnières dans la libération des femmes de ce destin préécrit qu'on leu impose, mais aussi une femme pieuse qui va s'enfermer de plus en plus dans ce lien particulier qu'elle entretient avec sa foi.

Hugues, quant à lui, est touchant de sa présence constante et délicate envers Juette, dans ses attentes dans l'ombre à différents moments de sa vie, dans la permanence de sa pensée envers elle, de comment elle le touche, comment il va l'aimer en ne lui touchant que le cœur.
Il m'a émue dans son évolution au fil des années, dans ses peurs pour Juette, ses sentiments jamais nommés, seul à attendre dans l'ombre de cette femme devenue sainte qui ne sera plus pour lui à la fin que celle qu'il attend sans espoir pour qu'enfin peut être elle réponde à cette question qu'il a et demeure en suspens...

Un roman intéressant, mais lu très vite après "Le roi disait que j'étais diable", je ne me suis pas laissée emmener aussi facilement dans ce style particulier de l'auteur en tant qu'il m'a donné un arrière goût de déjà vu, même si le fond est différent. Juette est ici dépeinte en partie de par les éléments collectés à son propos par Hugues, d’autre part par l’imaginaire de l’auteur qui lui donne vie, émotion, l’interprète, la parle … certainement aussi par ce qu’induisent les écrits de Hugues de Floreffe.

Je dirai que le style de l’auteur est à découvrir, mais peut être si chaque roman se fait sur la même trame cela risque de devenir lassant, bien que reprenant des moments historique datant du moyen âge, période semble t’il de prédilection de l’auteure


mots-clés : #historique #moyenage #religion
par chrysta
le Sam 6 Mai - 18:09
 
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Sujet: Clara Dupont-Monod
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Richard Powers

Le temps où nous chantions

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 Le-tem11

Un poisson et un oiseau peuvent tomber amoureux mais comment parviendront-ils à construire un nid ? Et quelle sera la vie de leur progéniture ? Sera-t-elle oiseau ou poisson ou un mix des deux sorte de oisson ou de poiseau ?

C'est en très raccourci à ces questions que Richard Powers nous invite à nous confronter dans ce roman qui retrace de 1939 à (presque) nos jours l'histoire américaine et en particulier celle des Noirs américains.

Delia Daley naît dans une famille noire et rencontre David Strom qui est blanc, juif et allemand. Contre toute attente et contre toutes les lois en vigueur au pays des Amériques, ils vont s'aimer, se marier et enfanter. A partir de là, la catastrophe commence et elle a pour nom : métissage. Comment élever des enfants de parents aussi différents et énigmatiquement unis par un lien musical qui remplace toutes les écoles, toutes les morales et toutes les lois du monde ? Que seront ces trois mômes dont les couleurs de peau varient et dont les parents, désireux de les protéger comme tout parent se doit de l'être, imaginent pouvoir les élever sans se poser la question de la race ou plutôt en la dépassant, envisageant de vivre dans un monde où la couleur de la peau n'aurait plus d'incidence sur le rang social, sur l'éducation, l'accès à la culture, sur la liberté. Mais aux Etats-Unis, au XXième siècle, cette éducation est formellement impossible et les enfants du couple mixte vont rapidement être confrontés à la problématique du racisme, de la loi et de la différence. Car le cœur du roman de Powers est bien celle-là : comment vivre en tant que métis dans un monde qui ne reconnaît pas le droit au mélange  ? Dans un monde qui ne s'envisage que de manière polarisée, soit noir soit blanc mais jamais gris ; dans un monde qui n'hésite pas à avoir recours à la bombe atomique, à l'assassinat politique (Martin Luther King, Malcom X,…), au lynchage de mômes pour faire régner l'Ordre. A cette problématique chacun des enfants répondra à sa manière, Jonah sera un ténor reconnu dans le monde entier en chantant des musiques blanches, Ruth s'associera aux Black Panthers pour tenter de changer le monde et Joseph cherchera à être le pilier familial dont la mort de Delia aura privé toute la famille.

Ce livre, ce grand livre, n'est pas seulement une réflexion extrêmement pointue sur le racisme, sur la manière d'élever ses enfants, sur l'histoire politique américaine, il est aussi un livre impressionnant sur la musique et sur le chant en particulier, avec ce que cela veut dire de souffle, de corps, de coffre, de tessiture et de voix, un livre sur toutes les influences musicales qui vont traverser les vies de nos protagonistes et les construire (déconstruire) presqu'autant que la politique ou l'amour. Et si le constat, amer, que fait Powers me reste au fond de la gorge, celui qui consiste à dire que l'éducation choisie par Delia et David est un leurre, qu'un enfant ne peut pas choisir en conscience sa vie, qu'il ne peut décider pour lui-même, en lui-même quels chemins il désire explorer et quels sont ceux qu'il va volontairement ignorer, on ne peut que lire ce livre dans la fièvre d'un désir de réconciliation, d'entente et de partage, tout en rêvant de jour meilleur. La toute fin, d'ailleurs, laisse espérer qu'il pourrait peut-être un jour en être ainsi...

Mais pour être encore un peu plus exhaustif, il faut ajouter une troisième dimension à ce roman et cette dimension est celle du temps. Car si David Strom est allemand et juif, il est également physicien et s'intéresse à la question du temps, permettant ainsi à Richard Powers d'écrire un livre à l'architecture parfaitement magistrale, j'insiste absolument unique.

En effet, ce que nous apprenons à la lecture de ce texte, grâce aux travaux de David, c'est d'abord que le temps n'existe pas et que nous sommes toujours maintenant, dans une succession d'instant présent qui s'emboîte à l'infini les uns dans les autres. Ce que nous découvrons ensuite, c'est que nous pouvons envoyer des messages dans le passé ou le futur mais que nous sommes incapables de les recevoir. Pourtant, la troisième leçon nous informe que nous pouvons voyager dans le passé, revenir à un évènement antérieur à partir du moment où nous l'avons vécu au moins une fois, selon le principe que si nous y sommes présent il est possible d'y retourner. Enfin, David découvre à la toute fin de sa vie que le temps forme des boucles et que nous sommes donc en quelque sorte prisonnier de boucles temporelles qui se referment sur elles-mêmes, ce qui voudrait dire que les évènements peuvent se déplacer continuellement vers leur propre avenir tout en revenant sur leur propre passé ; mais pour se faire il faut pouvoir prouver que les galaxies ont un sens de rotation préféré. Ce que Richard Powers offre au lecteur c'est la mise en application littéraire de cette théorie pour en faire un fabuleux roman.


Reste donc la musique, ce langage qui devrait unir toutes les nations et tous les êtres puisque cette Tour de Babel dressée au milieu des villes comme des déserts, en passant par les sons dépasse le clivage des accents, et pourtant, et pourtant, il n'en reste pas moins, qu'ici comme ailleurs, une blanche vaudra toujours deux noires…


mots-clés : #historique #segregation #racisme
par shanidar
le Jeu 4 Mai - 19:38
 
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Sujet: Richard Powers
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Clara Dupont-Monod

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 17737610

Clara Dupont-Monod reprend cette figure mythique et invente ses premières années comme reine de France, aux côtés de Louis VII. Leurs voix alternent pour dessiner le portrait poignant d'une Aliénor ambitieuse, fragile, et le roman d'un amour impossible.
Des noces royales à la seconde croisade, du chant des troubadours au fracas des armes, émerge un Moyen Age lumineux, qui prépare sa mue.


Ce roman est construit sur deux voix qui s’interposent sans jamais se rencontrer : celle d’Aliénor et celle de Louis VII. C’est une impossible rencontre entre deux êtres englués dans des héritages familiaux dont ils ne peuvent se défaire vraiment, entourés chacun de leurs ombres qui ne sont pas les mêmes. Là où l’une porte les restes des croyances archaïques, l’autre se voue aux croyances nouvelles ; là où l’une est colère, rage, désir de se dégager du lourd regard familial qui pèse et de prouver ce qu’elle vaut, l’autre, roi par défaut, pétri de honte et de colère, va se laisser balloter entre désir pour sa femme impossible à toucher et repli sur lui-même tant elle l’amène à être un autre qu’il refuse.

« Sur le chemin du retour, la fièvre retombe. L’absurdité me saute au visage. Je redeviens un meunier aux mains noires. La ville saccagée, les cris des enfants, et mes hurlements lorsque la porte cède sous mes coups… Ces mêmes portes ouvertes au fond de moi, déversant la colère que je déteste. Et ce n’est qu’un début. (…) Je le sais. Tu me voudras guerrier avant d’être roi. Je vois bien que pour toi, il y a de la noblesse à menacer la vie. Personne ne t’a appris la grandeur du langage et de la bienveillance. Et personne ne m’a appris, à moi, que l’on pouvait aimer quelqu’un qui vous détruit. J’ai vu tes bras ouverts lorsque je suis rentré. Tu t’es inclinée devant moi puis tu as levé les yeux vers mon heaume. Tout cela m’a donné envie de pleurer. Pourquoi faut-il que tu me regardes uniquement lorsque je me ressemble si peu ? J’aurais du hurler : « cet homme n’est pas moi ! », mais c’est bien cet homme, à cet instant, que tu remerciais. Alors je n’ai rien dit."

Dans ce couple improbable qui unit Aliénor d’Aquitaine à Louis VII, c’est la dame qui tient la barre. Elle le pousse à se renier pour elle, sans jamais, ou presque, le reconnaître ni le voir. Et tout au long du roman nous entendons Louis dans sa complainte face à cette femme adulée qui ne le voit pas, voire le méprise et l’amène à moult actes terribles. Mais nous l’entendons aussi grandir, changer, peu à peu se ranger à la voie d’une raison qu’il n’acquiert que bien tard. Certes, Aliénor ne peut porter la responsabilité de ce qu’elle lui a fait commettre, il en a sa part, elle ne semble qu’avoir permis qu’il délie ses colères, tue son (ses) père(s) dans les meurtres qu’il commet essentiellement au nom de l’honneur de sa femme.

Quant à Aliénor, elle se livre telle une femme blessée, arrachée aux siens, à sa ville, ses racines. Une femme finalement restant dans le fond l’enfant dont les ombres parentales qu’elle veut apaiser la suivent une bonne partie du roman. Louis lui permettra en partie d’en être libérée.

Ce roman a été pour moi une belle découverte, et je me suis laissée bercer et emmener par la plume de l’auteur à traverser des épisodes d’histoire aux côtés de ce couple médiéval célèbre. Il noue, dans un style rapide et entrainant, les figures contraires du calme et du chaos. Il nous fait rencontrer deux personnages dans leurs aspects psychologiques, leurs failles, leurs forces, leurs faiblesses, et nous les montre évoluer page après page au fil d’une histoire dure et chargée de combats et de morts dépeinte dans une sorte de poésie horrifique.


mots-clés : #historique #moyenage
par chrysta
le Mer 3 Mai - 17:00
 
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Mireille Calmel

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Le lit d'Aliénor

Aliénor d'Aquitaine.
Une belle jeune fille au caractère fougueux, encore à marier. Sa dot : le duché d'Aquitaine, des terres débordant de richesses. D'ailleurs, en 1137, il fait bon vivre dans le château d'Aliénor à Bordeaux, luxueusement décoré et résonnant des chants des troubadours, alors que le Louvre de ce pauvre roi de France est sinistre, sale et silencieux. Au côté d'Aliénor, depuis quelques jours, une charmante silhouette se profile, celle de Loanna de Grimwald.

Elle a quinze ans, le même âge qu'Aliénor, mais elle n'est pas tout à fait comme les autres, un peu fée, un peu sorcière. Envoyée par son ancêtre Merlin l'Enchanteur, héritière des secrets druidiques, Loanna a une mission : devenir la confidente d'Aliénor, son ombre, et faire en sorte qu'elle épouse un jour Henri, le futur roi d'Angleterre. Un premier roman éblouissant, où le surnaturel et la sensualité se mêlent à l'Histoire, recréant une Aliénor d'Aquitaine insoupçonnée.



Aliénor d’Aquitaine, née en 1122, a été reine deux fois, d’abord femme de Louis VII à la cour de France, puis de Henri de Plantagenêt à la cour d’Angleterre. Elle enfanta 2 filles avec Louis et 3 rois avec Henri, dont Richard Cœur de Lion.
Ce livre retrace la partie de la vie d’Aliénor aux côtés de Louis VII, soit 15 années nous emmenant dans les méandre du 12ème siècle, de la cour de France, de ses intrigues, alliances, allégeances, mais aussi au-delà puisque nous partons aussi aux côté d’Aliénor dans la croisade dans laquelle elle accompagne Louis, de Constantinople  l’Asie mineure.

Le roman reprend toutes les grandes lignes de cette période qui associa Aliénor à Louis VII, et nous permet de découvrir (ou redécouvrir) ce pan de l’histoire de France autour de personnages qui en ont fait la légende : Aliénor, Louis, l’abbé Suger, le troubadour Jaufré Rugel notamment. Mais ce livre est aussi romancé, et, pour donner vie à l’histoire, peut être en combler les vides, lui donner une touche romanesque, l’auteure introduit le personnage de Loanna de Grimwald, narratrice la plupart du temps, aux côtés d’Aliénor. Elle serait la dernière descendante de la lignée de Merlin et des fées d’Avalon,  à une époque où les anciennes croyances, si elles persistent encore en certaines contrées, ont été délaissées et sont pourchassées au profit d’un Dieu unique. Placée auprès d’Aliénor, elle serait celle qui manipule sa vie pour écrire le destin de l’Angleterre en l’amenant à devenir par la suite reine aux côtés d’Henri plantagenêt.

On découvre au fil des pages une époque dépeinte dans ses rites et croyances, dans son verbe (bien que je doute que les personnages parlent vraiment comment avant). On rencontre Aliénor, reine en avance sur son temps qui soutient troubadours, poète et tout ce qui est arts, jeune fille passionnée, caractérielle et volage ; mais aussi jeune femme qui s’immisce dans la vie politique.On s’attache aussi à Louis, roi qui souhaitait devenir moine propulsé à cette place par la mort de son frère, celui qui aurait du régner. On fait aussi connaissance de Jaufré Rudel, troubadour chantant l’amour courtois et sans espoir, et dont certains de ses textes ont été retrouvés.

Force est de dire que l’on s’attache aux personnages, qu’ils nous émeuvent ou nous agacent. Le style romancé permet une certaine facilité de lecture, même si parfois les amours à la cour prennent trop le pas dans l’histoire et que l’on en oublie un peu la trame historique.

J’en suis sortie avec des doutes sur ce qui fait partie de l’histoire et ce qui a été ajouté et, après avoir épluché quelques articles sur la question, il s’avère que l’histoire est retracée dans nombre de ses dimensions et événements, du coup j’ai comme appris un bout d’histoire en me détendant car, sauf quelques moments plus longuets, j’ai apprécié ce livre de détente qui m’a emmenée bien loin de notre époque, entre monde médiéval, cour de France, et magie merlinienne.


mots-clés : #historique #moyenage
par chrysta
le Mer 3 Mai - 7:39
 
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Sujet: Mireille Calmel
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Alessandro Manzoni

Les Fiancés (I Promessi Sposi)

Tag historique sur Des Choses à lire - Page 12 70331010

L’histoire se déroule en Lombardie à la fin des années 1620. Deux jeunes villageois, Renzo et Lucia veulent convoler. Hélas, un seigneur local, Don Rodrigue, à la suite d’un pari avec un parent, a jeté son dévolu sur la belle. Il va tout faire pour empêcher ce mariage, en premier lieu faire pression sur le curé du lieu. Cette situation va entraîner nos deux promis dans une série d’aventures toutes plus périlleuses les unes que les autres entre malfrats repentis, religieuse traîtresse, foule en colère, sans oublier la grande peste de Milan de 1630.  

Quel plaisir de lecture ! Pourtant, j’ai horreur des romans historiques ! Mais justement, le livre de Manzoni est bien plus que cela. Toutefois, sous ce simple aspect, le lecteur ne devrait pas être déçu. En effet, les péripéties s’enchainent les unes aux autres et maintiennent sans difficulté l’attention. Quel spectacle un Visconti, par exemple, aurait pu tirer de ce roman ! Ce qui m’a beaucoup plus intéressé est la psychologie des personnages qui n’a rien de caricaturale. Manzoni nous livre de beaux portraits d’hommes et femmes dont parfois les décisions sont surprenantes, le secours ou la détresse ne viennent pas forcément de ceux que l’on pense. Surtout, l’auteur en fin politique analyse remarquablement les relations sociales de l’époque. Dans un monde où les règlements ne sont pas respectés, ce sont de petits potentats locaux qui font la loi aidés de quelques hommes de main. Par leur parentèle plus élevée en noblesse, par quelques hommes de loi corrompus, ils arrivent toujours, ou presque, à leur fin. Don Rodrigue en est un parfait exemple. Heureusement, parfois un grain de sable déjoue leurs pronostics. Certaines situations sont clairement expliquées par Manzoni ; ainsi les causes de la disette à Milan liée à de mauvaises récoltes, et aggravée par une taxation du blé imposée par quelques « populistes » afin de calmer le peuple mais qui ne mènent qu’à l’émeute. Sur cela vient se greffer la fameuse épidémie de peste qui ravage le Milanais à la suite de la descente des troupes de lansquenets sur Mantoue. Nous retrouvons cette litanie de l’époque « a peste, a fame, a bello, liberere nos domine ». Manzoni montre parfaitement l’enchaînement de ces trois fléaux. « Les Fiancés », c’est aussi comment les appétits de puissance de quelques individus provoquent des ravages parmi le peuple ; heureusement, c’est aussi quelques hommes dévoués qui avec des moyens dérisoires tentent de remédier au pire, tentent de secourir et de soulager dans une ville de Milan ravagée par la peste dont Manzoni donne une description apocalyptique, mais malheureusement véridique. « Les Fiancés » est un très très grand livre.
Rien de mieux pour vous donner envie, je l’espère, que deux passages qui montrent toute la finesse d’analyse de l’auteur et aussi son humour, comme le souligne Quasimodo.
 
« Quant à ce qui forme la masse, et comme le matériel du tumulte, c’est une mixture accidentelle d’hommes qui tiennent plus, ou moins, selon une gradation infinie, de l’un ou de l’autre extrême : un peu échauffés, un peu fripons, un peu enclins à une certaine justice, telle qu’eux-mêmes l’entendent, un peu curieux aussi du spectacle d’une grosse affaire, prompts à la férocité et à la miséricorde, à détester ou à adorer, selon que se présente l’occasion de ressentir avec plénitude l’un ou l’autre sentiment ; avides à tout moment d’en apprendre, ou d’en croire de belles, avec le besoin de vociférer, d’applaudir quelqu’un ou de le conspuer. »


«Ayant tout bien pesé, le comte invita un jour à dîner le père provincial, qui trouva là un cercle de convives assortis entre-eux avec une intention raffinée. Quelques parents, des plus titrés, de ceux dont le seul nom patronymique était un titre , et qui par leur seul maintien, une certaine assurance native, une nonchalance hautaine, une manière de parler de grandes choses en termes familiers, réussissaient, sans même le faire exprès, à imprimer ou à rafraîchir, à tout moment, l’idée de la supériorité et de la puissance ; et quelques clients, liés à la maison par une dépendance héréditaire, et aux personnages par une servitude de toute leur vie ; lesquels, commençant, dès le potage, à dire oui, de la bouche, des yeux, des oreilles, de toute la tête, de tout leur corps, de toute leur âme, vous avaient, au dessert, réduit un homme à ne plus savoir comme on peut faire pour dire non. »
(traduction Yves Branca)




mots-clés : #guerre #historique #social
par ArenSor
le Mar 2 Mai - 19:06
 
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Sujet: Alessandro Manzoni
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Eric Vuillard

On se remonte le moral en repartant en arrière (en 2009) :

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Conquistadors

Eric Vuillard a écrit:« Conquistadors raconte un épisode de la conquête du monde telle que je l’ai rêvée, ouragan ou invasion de sauterelles. C’est en tous les cas un grand raout d’or et de sang, épopée glorieuse et vulgaire, comme elles le sont toutes, assortiment de hautes manœuvres et de mauvais coups.
Cet épisode est celui de la conquête du Pérou par Francisco Pizarre et de la destruction de l’Empire inca. On y voit s’ouvrir la tragédie de notre monde, celui où nous vivons, par un grand fait divers où la mappemonde, Dieu, l’or et la poudre se rencontrent.
Ainsi, s’accrochant aux pentes sèches de la Cordillère pour la grande chasse à Dieu, les mercenaires d’Espagne soufflèrent sur les premières braises de l’empire le vent glacial du progrès. »


C'est une écriture assez lourde, sans devenir lourdingue, qui s'étend sur un même rythme lentement épuisant sur les 400 et quelques pages du livre. Comme une pâte très dense mais qui s'écoule infailliblement. C'est un mélange d'Histoire comme si on y était, en fait c'est l'histoire, les faits mais après seulement les pensées des hommes, chefs plus ou moins grands au fil d'une longue épopée particulièrement meurtrière. ça n'empêche pas le regard et les réflexions modernes, l'après-coup qui donne sa dimension au roman en dégage les perspectives, cherchant entre autres à esquisser ce que signifie la découverte d'un monde fini ou la fin d'une civilisation.

L'épopée est brutale et résolument crade, collante, sans que ça pousse le lecteur à saturation, un petit sentiment de too much. La violence fondamentale est nécessaire à l'épuisement moral qui nourrit le récit et le propos mais c'est toujours bizarre de se demander comment s'affirme un auteur (moderne) lorsqu'il utilise à répétition le verbe pisser. Superflu peut-être... huhu.

Revenons à nos moutons (ou à nos morts). A côté de la part fresque historique, l'auteur nous emmène vers un rêve-cauchemar du côté de notre civilisation, civilisation chrétienne riche d'images, de douleur et de pitié... intéressant là encore, plus réussi dans l'ambiance que sur le fond, je ne sais pas, je garde l'impression que l'auteur n'a pas tenu toutes ses promesses... il a quand même avec beaucoup d'ambition (qui n'est pas systématiquement un défaut, la preuve) cherché à gratter les recoins sombres de mythes de civilisation et de soif humaine, l'énigmatique soif de condition.

La forme est un peu risquée, l'entreprise aussi, celle d'un vrai livre massif, presque énorme, écrasant... risqué mais mis à part les promesses pas toutes tenues et des petites faiblesses (liées aux style, je le crois) l'expérience de lecture est réelle, efficace, une écriture, lourde, forte qui peut être lu sans déplaisir de façon assez intense (2-3 jours pour ce genre de bouquin chez moi c'est très court!) avec quelques réflexions culturellement et largement vivement intéressantes et pertinentes, de beaux morceaux d'humanité avec ou sans le va-et-vient des souvenirs d'Espagne et de misère, des morceaux d'humanité dégueulasse et franche...

Il en manque beaucoup dans ce que je raconte, des idées, des faits, un rendu de la lecture (notamment dans la géographie, les paysages, la volonté de restituer un contexte complet avec des repères européens)... manque aussi des indiens et des incas, forcément présents dans cette histoire.

Un peu fou, un peu casse gueule, pas parfait mais vrai livre quand même avec une volonté de consistance... je ne regrette pas de m'être laissé tenter par ce "livre de la rentrée" proposé par le libraire. Une lecture pareil sur un weekend pareil (fatigue, ras le bol, ...), aussi dense, lourd et passer aussi bien. Respect. (comme on dit).


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par animal
le Jeu 20 Avr - 20:12
 
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Eric Vuillard

ah ça m'avait gêné moi aussi cette tristesse de la terre, auto-pillage pour l'occasion :

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Tristesse de la terre

Grosse déception. Même recette, et même format, que les deux précédents (La Bataille d'occident et Congo) mais cette fois de l'autre côté de l'Atlantique. Quelques photos et un peu d'histoire autour de Buffalo Bill, de son vrai nom William Cody, figure historique et pittoresque de l'Ouest américain qui s'est incarné lui-même dans de multiples représentations de son Wild West Show. Représentations aux Etats-Unis mais aussi en Europe (il est question de son passage à Nancy). Ah, en fait le sujet du livre pourrait être le spectacle, le grand spectacle et son acte de travestissement de la réalité à fois nocif et vaguement salutaire.

Le problème c'est qu'on en reste à de gros clichés qui ne sont pas loin d'un (très bobo ?) anti-américanisme primaire et de pleins de bons sentiments pour tous ces pauvres indiens qui eux étaient tous gentils alors que les américains de maintenant et bien ils étaient tous méchants et déjà tous idiots (et cruels). Servi sur un toast d'histoire et de chronologie approximative ça aurait eu beaucoup de mal à prendre et les quelques réflexions pas toutes inintéressantes et bien on est fort de tenté de les oublier le plus rapidement possible avec le reste du bouquin.

Je ne sais pas ce que je trouve le plus dommage de mon manque d'intérêt ou de l'impression d'avoir lu un truc rapide, très formaté, et pas forcément très réfléchi. Sur les trois c'est celui qui fait de l'ombre aux autres, c'est celui (de trop ?) qui fait de l'ombre tout court.

L'avantage c'est qu'avec le "format Actes Sud" (qui m'agace aussi) c'est vite lu...


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par animal
le Mar 18 Avr - 19:51
 
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