Des Choses à lire
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Je te prie de trouver entre mes mots le meilleur de mon âme.

Georges Brassens, Lettre à Toussenot

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La date/heure actuelle est Jeu 9 Mai - 10:39

61 résultats trouvés pour universdulivre

Vladimir Nabokov

Littératures 1 : Austen, Dickens, Flaubert, Stevenson, Proust, Kafka, Joyce

Tag universdulivre sur Des Choses à lire - Page 3 Littzo10


Ce sont les (notes de) cours donnés par Vladimir Nabokov, où l’on retrouve ses points de vue personnels sans faux-fuyant, avec un peu de son vif esprit (notamment lorsqu’il rejette les thèses freudiennes avec humour).
« Style et structure sont l’essence d’un livre, les grandes idées ne sont que foutaise. »

Pour lui, la littérature fait frissonner les moelles épinières réceptives :
« Beauté plus pitié, c’est le plus près que nous puissions approcher d’une définition de l’art. Où il y a beauté, il y a pitié, pour la simple raison que la beauté doit mourir ; la beauté meurt toujours, la manière meurt avec la matière, le monde meurt avec l’individu. »

Comme c’est un des écrivains dont l’œuvre retient le plus mon attention, que je partage beaucoup de ses opinions et qu’il me fait rire, cette lecture m’a exaucé. Nabokov fut sans conteste un bon lecteur, à rapprocher d’Umberto Eco.
J’ai longtemps nourri des doutes sur la valeur ou l’intérêt de la « critique littéraire », mais pense maintenant, grâce à certains auteurs dont ceux-ci, que l’étude des œuvres ne les déprécie pas, qu’au contraire le travail d’un écrivain valable gagne à l’examen sous différents points de vue de sa structure et de son style, comme sans doute aussi de sa genèse et de ses variantes.
Je ne peux jamais m’empêcher de penser que, quoique géniaux, ces auteurs et œuvres classiques sont choisis comme terrains de jeux, de joutes littéraires, surtout par une sorte de consensus qui a le mérite de sélectionner et s’entendre sur les sujets d’étude communs des critiques. L’intérêt n’en est pas moindre d’apprendre à (mieux) lire, qui me semble le propos de l’exercice ‒ qui semble consister à comprendre comment on écrit.
Pour profiter au mieux de ces cours où est étudiée une œuvre de chacun des auteurs concernés, je pense qu’il serait souhaitable pour le lecteur de disposer simultanément des livres étudiés, à l’instar des élèves de Nabokov ; cependant, les avoir lus est suffisant, compte tenu des nombreuses citations. (Maintenant, pour quelqu’un qui ne se sent pas de se lancer dans A la recherche du temps perdu et/ou Ulysse, il y a là moyen de se faire une bonne idée sans grand effort…)
« En fait, toute fiction est fiction. Tout art est mensonge. Le monde de Flaubert, comme celui de tous les grands écrivains, est un monde imaginaire, qui a sa propre logique, ses propres conventions, ses propres coïncidences. […] Toute réalité n’est qu’une réalité comparative [… »

Cette tonique lecture m’a ramentu (ou appris) que l’argent (les dettes) est pour moitié dans la mort d’Emma Bovary (avec le romanesque mâtiné de rouerie) ; que ce livre constitue un sottisier des poncifs de la bêtise philistine, dite bourgeoise, qui fait plus qu’annoncer Bouvard et Pécuchet ; que Flaubert est un transmutateur du vulgaire et du médiocre en art (projet typique de son contemporain Baudelaire), ce que Nabokov appelle un enchanteur ; que, poème en prose, son roman est structuré comme une symphonie.
« Il y a une chose dont vos esprits doivent bien se pénétrer : l’œuvre n’est pas autobiographique, le narrateur n’est pas Proust en tant qu’individu, et les personnages n’ont jamais existé ailleurs que dans l’esprit de l’auteur. Inutile, par conséquent, de nous attarder sur la vie de l’auteur. Cela est sans importance dans le cas présent et ne ferait qu’embrouiller la question, d’autant que le narrateur et l’auteur ont plus d’un point en commun et évoluent dans des milieux très semblables.
Proust est un prisme. Son seul objet est de réfracter, et, par réfraction, de recréer rétrospectivement un monde. Ce monde lui-même, les habitants de ce monde, n’ont aucune espèce d’importance historique ou sociale. Il se trouve qu’ils sont ce que les échotiers appellent des représentants du Tout-Paris, des messieurs et des dames qui ne font rien, de riches oisifs. Les seules professions que l’on nous montre en action, ou à travers leurs résultats, relèvent de l’art ou de l’érudition. Les créatures prismatiques de Proust n’ont pas d’emploi, leur emploi est d’amuser l’auteur. »

Il m’avait échappé (ou j’ai oublié) que les personnages de Proust sont systématiquement présentés sous des facettes différentes :
« La diversité des aspects sous lesquels apparaissent les personnages selon la diversité des regards qui les observent […]
Proust, pour sa part, soutient qu’un personnage, une personnalité, n’est jamais connu de façon absolue, mais seulement comparative. Au lieu de le hacher menu [comme Joyce], il nous montre tel personnage à travers l’idée que d’autres personnages se font de ce personnage. Et il espère, après avoir donné une série de ces prismes et de ces reflets, les combiner pour en faire une réalité artistique. »


J’ai lu ces cours dans l’édition de poche… Le livre de poche (Fayard), qui m’a parfaitement convenu, surtout comparativement à un Christian Bourgois de sinistre mémoire. Il s’agit d’un exemplaire d’occasion, marqué S. P. ‒ si ce sigle signifie « Service de Presse », cela expliquerait peut-être qu’il paraisse n’avoir jamais été lu avant de me parvenir.


Mots-clés : #essai #universdulivre
par Tristram
le Mer 10 Avr - 0:04
 
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Sujet: Vladimir Nabokov
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Johan Faerber

Après la Littérature : Ecrire le contemporain

Tag universdulivre sur Des Choses à lire - Page 3 41tld510

Ouvrage indispensable s'agissant de la littérature française actuelle.
Johan Faerber introduit son propos par une question que l'on se pose tous que nous soyons auteur ou lecteur : la littérature décline t-elle ?
Est elle en train de mourir ? Vivons nous l'époque qui la verra disparaître ?
la réponse est catégorique et est présente dès le début : c'est un refus vindicatif et véhément, comme un cri du coeur qui devient un propos de raison à travers ce livre.
Interroger la notion de temporalité, affirmer et définir le concept de contemporain est déjà la première base pour questionner une évolution et un déclin.
Puis, questionner les causes de ce ressenti souvent claironné par les penseurs réactionnaires.
Ensuite établir en quoi la littérature vit toujours, faire l'effort de déceler les écrivains qui ravivent cet art.

Un propos très juste m'a alerté ; l'idée selon laquelle des auteurs ont été des auteurs tellement importants et tellement synthétique de tout ce que la littérature proposait, qu'on pensa suite à cela qu'on ne pourrait plus rien faire, plus rien innover et finalement lecteur comme écrivain en herbe ne pourraient plus rien découvrir ou créer.
C'est un ressenti que j'ai personnellement lorsque je veux écrire. Je repense à mon panthéon personnel et je me résigne. Le génie est mort, en tout cas il n'est pas moi.
ce livre réfléchit et répond non. Les icônes n'en sont pas malgré leur immense talent et la mort de la littérature ne sera déclarée que lorsque personne ne passera outre ces icônes pour écrire son propre propos, son propre récit. je schématise, pour mieux cerner cette subtilité argumentative il convient de se plonger dans les pages du livre de Faerber.

Ouvrage riche, en références, en réflexion, en arguments avec un style très abouti, proche du soutenu universitaire par moments. Il demande à être assimilé avec patience.
je ne sais pas si l'auteur sera d'accord mais il m'est venu que la littérature était en fait soumise à la Reprise kierkegaardienne: une expérience ans cesse renouvelée même quand les éléments nous paraissent identiques.

une oeuvre qui fera date.


mots-clés : #essai #universdulivre
par Hanta
le Jeu 21 Fév - 11:46
 
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Sujet: Johan Faerber
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Claudie Hunzinger

Tag universdulivre sur Des Choses à lire - Page 3 La-sur10

Claudie Hunzinger : La Survivance

A l'époque d'Amazon et des librairies en ligne, peut on encore faire vivre une librairie de livres d'occasion  et accessoirement en vivre ? Pour Sils et Jenny la réponse est négative. La librairie en faillite, ils sont contraints de partir.
Mais où aller ?
Jenny se souvient d'une maison désaffectée dont elle a héritée. Une ruine en fait et perchée à 1000 mètres dans les Vosges. A 20 ans ils y passaient les vacances. Y retourner 40 ans plus tard pour y vivre est une épreuve totalement inconnue. D'autant qu'ils ont embarqué tous leurs livres et quelques rares objets personnels.
Les accompagnent Betty, la chienne et Avanie, l'ânesse, compagnons d'infortune mais pas seulement.

Ce qu'ils vont découvrir c'est que le vieux monde n'est plus pour eux, il les a rejetés et continuera à le faire. Et de plus, c'est un monde fini ou en voie de l'être.
Continuer c'est tenter de survivre en autarcie, en cachette, avec la seule compagnie de quelques cerfs. Mais s'adapter à la solitude et à la promiscuité, à l'isolement et aux intempéries est une forme de révélateur inéluctable de leur condition humaine  et de leur absence d'avenir.
Ils sont au bout du chemin.

Sils et Jenny sont des survivants d'une époque où les illusions et les utopies tenaient lieu d'avenir. Où les livres comblaient tout ce qui manquait dans une société matérialiste et anonyme.
Ce qu'ils vont vivre va les souder mais aussi leur faire comprendre qu'ils ont perdu la partie.
Ce sont ces perdants magnifiques dont parle Leonard Cohen.
Si nous les aimons c'est parce que le coeur n'est pas qu'un muscle ou un homme de coeur une simple métaphore.
Ces personnages sont inoubliables et l'écriture de Claudie Hunzinger nous entraine et nous transporte loin des clichés et des sentiers battus.
Et nous les suivons.


mots-clés : #amour #nature #solitude #universdulivre
par bix_229
le Jeu 24 Jan - 19:53
 
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Sujet: Claudie Hunzinger
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Jean Berthier

1144 livres

Tag universdulivre sur Des Choses à lire - Page 3 412fo110

Un jeune bibliothécaire né sous X a bien enrobé la plaie de son abandon par sa mère sous une existence heureuse quoiqu’ un peu convenue, nourrie par la richesse que lui apportent ses lectures. Quand soudain lui arrive ce curieux legs : les 1144 livres de la bibliothèque de sa mère biologique qui vient de décéder, livrant ce bien intime sans pour autant se dévoiler.
L‘ouverture de 38 cartons, plus dérangeante qu’il n’était prévu,  ne lèvera pas l’anonymat de cette femme inconnue, mais éclairera le narrateur sur le sens de la filiation.
C’est raconté sur un ton désuet et léger qui contraste avec la gravité du sujet (avancer léger fait sans doute moins mal). C’est assez plaisant, quoique survolé et ce double thème de la filiation et des livres m’a fourni un agréable moment.


mots-clés : #relationenfantparent #universdulivre
par topocl
le Dim 13 Jan - 11:21
 
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Alberto Manguel

Réponse @Dreep

Je remballe ma bibliothèque. Une élégie et quelques digressions

Tag universdulivre sur Des Choses à lire - Page 3 Je_rem10


Suite à un litige avec l’administration fiscale française, Manguel a dû (faire) emballer les 35000 volumes de sa bibliothèque avant de déménager à New York, puis Buenos Aires (comme directeur de la Bibliothèque nationale, tel que Borges en son temps), en attendant de pouvoir les déballer. Nouvelle occasion de digresser sur les livres, les bibliothèques ; j’y marque beaucoup de citations, notamment… de citations !
« L’allocution du pasteur Montmollin [à l’enterrement de Borges] ouvrit judicieusement sur le premier verset de l’Évangile selon saint Jean. “Borges, dit le pasteur, était un homme qui cherchait sans cesse le mot juste, le terme qui résumerait l’entière et définitive signification des choses”, et il poursuivit en expliquant que, comme nous l’apprend le Livre saint, un homme ne peut jamais atteindre un tel mot par ses propres efforts. Jean l’a dit clairement, ce n’est pas nous qui découvrons le Verbe mais le Verbe qui nous trouve. Le pasteur Montmollin résuma avec précision le credo littéraire de Borges : la tâche de l’écrivain consiste à trouver les mots justes pour nommer le monde, sachant dès le début que ces mots, par leur nature même, sont inaccessibles. Les mots sont les seuls instruments nous permettant de prêter et de retrouver du sens et, en même temps qu’ils nous permettent de comprendre ce sens, ils nous montrent qu’il se trouve précisément au-delà du domaine des mots, juste de l’autre côté du langage. Les traducteurs le savent, peut-être, mieux que tous les artisans des mots : ce que nous édifions à l’aide de mots ne peut jamais saisir dans sa plénitude l’objet désiré. Le Verbe qui est au commencement nomme mais ne peut être nommé.
Toute sa vie durant, Borges a exploré et expérimenté cette vérité. De ses premières lectures à Buenos Aires à ses derniers écrits dictés sur son lit de mort à Genève, tout texte devenait, dans son esprit, une preuve du paradoxe littéraire consistant à être nommé sans jamais vraiment conférer à quoi que ce soit un nom porteur de vie. Depuis son adolescence, dans chaque livre qu’il lisait quelque chose semblait lui échapper, tel un monstre rebelle, promettant toutefois une page de plus, une plus grande épiphanie dès la lecture suivante. Et quelque chose dans chaque page qu’il écrivait le forçait à avouer que l’auteur n’était pas le maître ultime de sa propre création, de son Golem. Ce double lien, la promesse de révélation qu’accorde chaque livre à son lecteur et l’avis de défaite que signifie chaque livre à son auteur, prête à l’acte littéraire sa constante fluidité. »

« Chaque expérience de lecture tient uniquement à son lieu et à son temps, et ne peut être dupliquée. »

Conversation érudite et de bon ton d’un lettré qui a beaucoup lu et s’en souvient ‒ et qui bien sûr s’adresse à nous, lecteurs !

Mots-clés : #essai #universdulivre
par Tristram
le Dim 6 Jan - 13:10
 
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Sujet: Alberto Manguel
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Guillaume Meurice

Cosme

Tag universdulivre sur Des Choses à lire - Page 3 Cosme10

Tag universdulivre sur Des Choses à lire - Page 3 50511810

Tag universdulivre sur Des Choses à lire - Page 3 Voy10

Voilà, je tombe en médiathèque sur ce roman, la 4eme de couverture évoque Rimbaud, "Cosme ou l'histoire d'un fils d'immigrés espagnols, agrégé de rien, pas même bachelier, qui découvre le Graal de la poésie française : le sens caché du sulfureux et mystique poème de Rimbaud, Voyelles. ", je ne connais pas dutout Meurice (et serai surprise d'apprendre qu'il est connu et pas spécifiquement écrivain ), et ne saurai qu'après lecture qu'il s'agit d'un récit, à quatre mains, puisque guidé, validé, inspiré par Cosme Olvera, ci -dessus en photo.

Le roman (on va quand même dire ça comme ça, ça s'y prête) a une langue simple mais séduisante, phrases assez courtes, images précises, on suit l'élan de vie d'un homme habité par ses propres marottes. Des marottes d'hyper logique . Des talents hyper logiques.
c'est un livre qui raconte bien une personne, plein de détails sont très singuliers, ça s'entend après coup comme caractéristique de l'aspect non fictionnel, au fond : l'empathie est mobilisée à fond, puis parfois beaucoup moins, mais toujours on reste intéressé, je trouve, dumoins. Et notamment parce qu'il y a ce récit d'une quête, qui est partagée généreusement, sans nous faire l'outrage d'une ellipse.
Je disais à Quasimodo que ce roman rendait hommage au jeu des Echecs, une des passions de cosme. J'ai beaucoup aimé, pour ça, pour Rimbaud, pour en fait cette immersion dans un esprit que je n'ai pas dutout, hélas, ce côté méthodique hyper logique, qui est raconté avec clarté. On rigole parfois, parfois on est ému, parfois enfin, on est très intrigué. Je conseille ce livre qui a les caractéristiques d'une friandise, quant au plaisir qu'il donne, orchestré de manière modeste mais précise. Ma foi. Il a quelques défauts mais surtout la qualité d'enthousiasme. Meurice le traduit bien.Il insère très discrètement, aussi, une forme de vanité qui va de pair avec la quête, mais on l'admet volontiers. Et puis le chemin de vie parallèle à la passion poétique et logique est très agréable à découvrir. Les réserves sur le tout , finalement, est semblable à celle qu'on aurait devant un individu lambda, du moment que ce sont les faits, on ne peut que difficileent faire un procès littéraire, et sortir du duo ce qui revient à Meurice ou Olvera est franchement compliqué à mon avis.

Je n'ai plus le livre, je l'ai rendu, c'est un peu dommage, il ya des passages à relire, sans doute, si vraiment on se pique de suivre Olvera dans ses chemins, y compris à travers ses poemes qui sont retranscrits. Il y a une touche ésotérique , parfois, que j'ai abordé avec méfiance instinctive, j'avais peur que ça vire "illuminé" mais en fait, non, ça reste très tenu au final, pour moi qui suis très attachée au vraisemblable . Bon mon commentaire est pas super précis, mais vous voyez en gros.
chouette lecture.


mots-clés : #creationartistique #initiatique #poésie #temoignage #universdulivre
par Nadine
le Ven 5 Oct - 10:43
 
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Sujet: Guillaume Meurice
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Christiane Taubira

Nadine a écrit:
Exçusez moi, vraiment, pour çes  çédilles et majusçules /minusçules tronquées, mon çlavier est moribond, j'espère que ça reste lisible.
.


J'ai corrigé les ç et les majuscules dans l'extrait et le commentaire, Nadine, afin que leur lecture en soit facilitée.
Tu aurais des hashtags à conseiller ? (Je pensais notamment à #universdulivre ?)
Et n'hésite pas à faire un tour chez Emmaüs ou dans une Trocante, on peut y trouver un clavier pour vraiment pas cher, qu'il suffir de brancher sur l'ordi.
par Armor
le Mer 26 Sep - 13:25
 
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Sujet: Christiane Taubira
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Christiane Taubira

Baroque Sarabande

Tag universdulivre sur Des Choses à lire - Page 3 41d5jt10


"On prend d'assaut la prison du langage
Pour libérer les mots prosçrits
Et autour des rêves menaçés par les fauves
On entretient le feu

c'est d'Abdellatif Laâbi.
Voilà bien ce qu'il s'agit de faire, entretenir le feu. Contre l'adversité, contre les interdits, contre la violence qui semble gratuite mais dessert un dessein, celui d'un ordre social où les places sont attribuées. Ne pas obéir. Ne se laisser ni asservir ni accabler. " La langue maternelle, la langue dans laquelle on rêve, c'est bien là le "chez soi". Les interdits sur la langue sont donc une expulsion en bonne et due forme, de chez soi, de soi. Ne pas consentir au bannissement ontologique. Refuser l’exil symbolique. Accéder au baroque bénéfique. Ce baroque-là même qui « rompt toute certitude orthodoxe de limite, d’unité, d’espace borné, d’angle de vue privilégié, pour tout changer –espace et temps, rêve et réalité – en objet d’une floraison dynamique, sans axe centrique par nature, soumises aux lois du mouvement plus qu’à celles de l’essence », tel que le définit Carlos Fuentes ».



Voilà un peu l'objet de ce livre, remonter avec l'auteur les sources de cette lutte , au coeur de ses sources personnelles. Taubira se fait passeuse, offre un nombre important de noms, de citations, à suivre, à redécouvrir.

En une suite de courts textes, on la suit dans des chemins érudits et engagés. J'ai regretté être aussi ignare, face à de nombreuses références car lorsque  certaines m'étaient connues, j'ai pu mesurer la pertinence de l'auteure à les placer sous une perspective dynamique et nouvelle, personnelle.

La première moitié du livre s'est ainsi déroulée entre mes mains, la langue de Taubira étant très belle, avec grand plaisir , mais pourtant vient un moment où je m'y suis un peu perdue, faute d'être, au coeur des références, familière. je me suis même prise à me dire que son style était peut-être finalement un peu ronflant, faussement précis (l'accumulation des adjectifs commentant les nombreux extraits qu'elle nous propose a produit ce sentiment, par exemple.)
Et puis, PAF, un peu après le milieu de l'essai, en sa 3eme partie, on tourne la page et on lit :

Assez folâtré. Il est temps que je vous dise.
Et d’abord, balisons.
Dans Cayenne des années cinquante, il n’existe pas de librairie. Une papeterie fait vente de livres un mois par an, le temps de liquider les manuels scolaires.

Suivent 5 pages qui prennent cette fois corps dans l'histoire personnelle de Taubira, et c'est magnifique. Sa prose demeure aussi précise, mais prend des atours plus simples, parce qu'elle achoppe au quotidien, au vécu, et en quelques paragraphes elle nous dresse avec beaucoup de force toute une époque, tout un contexte (la Guyane). C'est le joyau de sa transmission. Un livre à lire pour s'instruire, prendre des notes, des références, et pour recevoir ce chapitre magnifique. Le début est visible dans çe lien :
e book

J'avais envie de recopier beaucoup d'analyses ou de commentaires sur des auteurs, mais ce serait trop long. Il y a notamment de très intéressantes notes sur la traduction en littérature. C'aurait été intéressant de le faire car l'intérêt du livre vient certainement de son invite à un allé/retour entre cet essai et les auteurs cités. Elle parle beaucoup des auteurs d'Amérique Latine, notamment.
C'est une promenade à la forme assez libre , dans l'univers si particulier de la culture, pas toujours facile à suivre, mais belle comme la Dame.


mots-clés : #colonisation #conditionfeminine #philosophique #temoignage #universdulivre
par Nadine
le Mer 26 Sep - 10:49
 
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Sujet: Christiane Taubira
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Walter Benjamin

Moi j'en ai à lire, je n'ai lu que :

La tâche du traducteur

Un texte court, d'une quinzaine de pages sur un sujet loin d'être neutre... (tentative de résumé partiel et partial) pour traiter le sujet ou avec le sujet, il y a un passage choisi en premier lieu par des rapports de rupture. Rupture entre l'œuvre, le texte, et le lecteur, n'étant pas écrite pour lui, même si considéré comme entité abstraite. Une rupture entre la traduction et le sens, une identité impossible (ni spontanément souhaitable). Un peu plus loin est affirmée la rupture entre l'écrivain et le traducteur en leur assignant un but différent.

L'écrivain en employant directement sa langue fait tendre son écrit vers un sens (ou un objet). Le traducteur sans être coupé du sens travaille en fait sur le langage, son objet n'étant pas une identité des mots mais de rendre la tension vers le sens, la direction particulière donnée par l'auteur. Jusque là ce serait un peu facile et d'ailleurs ce résumé impose des sauts dans le texte. Parce que ce qui se dessine en même temps c'est une pensée sur le langage même, un rôle essentiel, partagé et pouvant tendre si on coupe vers son essence à un rapport (que je n'ai pas bien saisi <- pas de connotation négative) avec le sacré.

Et autre événement notable quand il s'agit d'idées et d'une abstraction certaine, il y a un rapport précis (pas facile à résumer celui-ci) au temps. L'œuvre n'est traduite qu'en conséquence de sa postérité (et pas l'inverse) ce qui signifie déjà qu'en dehors de sa traduction elle même n'est plus la même, en quelque sorte finie et recommencée. Et la traduction, en tant que rapport au langage, est ancrée dans le temps et donc périssable. On constate donc l'immensité des écarts et des mutations dont on peut à peine espérer qu'il reste l'infime essentiel...

Mais si on en revient à l'essence du langage et aux mouvements de la pensée il se pourrait, c'est la proposition (le texte est doux mais le mot est faible) de Walter Benjamin, que la tâche du traducteur ne soit pas de prendre un sens littéral pour le passer au moule de sa langue mais plutôt de faire intervenir la mécanique, étrangère ?, de l'autre langue, de l'autre pensée dans sa langue. On retrouve donc la tension du dire avec une belle évidence et une autre immensité de possible et d'enrichissement. Et c'est peut-être à ce moment que je fais intervenir une pièce manquante, la Vérité.

La langue est omniprésente, dans le contexte, dans la lecture, ce qui relativise et actualise l'abstraction de ce texte. Quinze petites pages qui sont éloignées de ce résumé sommaire aux nombreuses omissions et ne donnant pas vraiment idée de la suite de cette pensée, des cohabitations, superpositions, échos, reflets, et que sais-je encore qui défient d'une certaine manière une trop grande linéarité.

Pas une lecture facile, j'ai eu tendance à faire de la reconnaissance de phrase : quand je commençais à douter : lecture rapide de la phrase entière avant de revenir, pour essayer de m'articuler autour d'entités cohérentes (ça ne doit pas être clair ça), j'ai senti aussi mon manque de familiarité avec cette pensée et que je ratais probablement une partie du texte, les appels au sacré notamment et leurs implications mais pas que.

Pas non plus une lecture rebutante ou impossible. Elle fut très stimulante et intéressante (et sera à refaire) et j'insiste sur le fait que la clarté du propos n'est pas oubliée ! Il y a de quoi faire donc et de quoi motiver une certaine attention parce que cette écriture, avec dans le plus visible des ruptures, s'avère à la fois logique et belle.  Et il ne faut surtout oublier ni la conclusion ni la finalité de ce texte.

(Qui est une traduction).

récup' mais ce n'est pas toujours inutile de se relire !


mots-clés : #universdulivre
par animal
le Sam 22 Sep - 20:37
 
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Sujet: Walter Benjamin
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Phillip Lewis

Tag universdulivre sur Des Choses à lire - Page 3 Les_jo10

Pas mal sans plus. Se lit bien. Ecriture fluide et passe-partout, rassurante.
L’histoire d’une famille qui vit dans les montagnes du Nord de la Caroline. Les gens sont rudes, mais quand on connait leur manière de fonctionner, tout va bien.

Il y a le père qui nait dans cette famille où aucun bouquin n’est ouvert et où le pasteur brûle les livres qu’il considère immoral sans les avoir lu. Le père est différent, il vit et respire les livres. Il est vite considéré comme “le bizarre” de la communauté. Mais il fait son trou et devient avocat. Puis il se marie et a des enfants, dont un fils, qui est le narrateur de l’histoire. Le père a des prétentions d’auteur et il consacre tout son temps libre à cette tâche qui le submerge. Et il disparait. La vie continue avec cette épine dans le coeur.


mots-clés : #famille #universdulivre
par Pia
le Jeu 20 Sep - 12:49
 
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Richard Jorif

Le Burelain

Tag universdulivre sur Des Choses à lire - Page 3 Le_bur10

Suite de Le Navire Argo, sur le même ton ; toujours le même côté un peu apprêté et maladroit, sans la grâce d’un Huysmans, qui lui aussi cultivait le verbe ancien avec un goût marqué pour l’archaïsme.
L’histoire continue, Frédéric Mops devient un bureaucrate, rôle pour lequel il est aussi peu fait qu’un Bartleby, et s’y entête sous couvert d’écrire un roman :
« ‒ Je n’observe pas vraiment. J’attends que les gens passent dans mon champ visuel.
‒ Et tout aussitôt, vous les transformez en personnages ? en héros ?
‒ Non, ils passent, et je les oublie. »

On y trouve également quelques jolies trouvailles.
« Il me semble que tu es un peu porté sur les listes… Est-ce bien nécessaire ? […]
Dans un sens, je suis comme Littré, je ne veux rien perdre. »

Miscellanées d'une érudition précieuse sans vraie intrigue (ses amours, l'administration, il se découvre un fils de 12 ans) : lecture réservée à quelques rares amateurs ?...


mots-clés : #universdulivre
par Tristram
le Mar 11 Sep - 20:45
 
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Sujet: Richard Jorif
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Raymond Queneau

Le Chiendent

Tag universdulivre sur Des Choses à lire - Page 3 Le_chi10


La scène se tient à Paris, et surtout sa banlieue, début des années trente (roman paru en 33), dans les classes populaires.
Etienne Marcel (comme la rue et la station de métro), d’abord une silhouette, devient un « être plat », puis un « être de consistance réduite », un « être de réalité minime », prenant de l’épaisseur aux yeux de l’observateur, Pierre Le Grand :
« Au lieu d’être découpé comme un soldat d’étain, ses contours s’adoucissent. Il se gonfle doucement. Il mûrit. L’observateur le distingue fort bien, mais n’en aperçoit aucune raison extérieure. Il a maintenant en face de lui un être doué de quelque consistance. Il constate avec intérêt que cet être doué de quelque réalité a les traits légèrement convulsés. Que peut-il se passer ? Cette silhouette est un être de choix. »

« J’observe un homme.
‒ Tiens. Romancier ?
‒ Non. Personnage. »

… et prenant conscience du monde et de lui-même, devenant « un homme qui pense » ; c’est la naissance d’un personnage au travers de ses propres sensations de narrateur :
« Il m’a suffi de tourner la tête à droite au lieu de la tourner à gauche, de faire un pas de plus et j’ai découvert des choses à côté desquelles je passais chaque jour, sans les voir. Je ne tournais pas la tête ; je l’ai tournée. Mais pourquoi l’ai-je tournée ? »

« …] j’ai beaucoup changé ces derniers temps je m’en aperçois maintenant oui le monde n’est pas tel qu’il apparaît, du moins quand on vit tous les jours la même chose alors on ne voit plus rien il y a pourtant des gens qui vivent pareil tous les jours moi, au fond je n’existais pas [… »

Le hasard fait donc se rencontrer Etienne (jeune employé de banque, propriétaire d'une villa inachevée dans la banlieue) et Pierre (oisif rentier), mais aussi Narcense, jeune saxophoniste de jazz au chômage et fasciné par les femmes, Sidonie Cloche, sage-femme avorteuse, Saturnin Belhôtel concierge, écrivain et philosophe à ses heures, Dominique qui tient une friterie à Blagny, Ernestine sa bonne, le père Taupe, vieux brocanteur misérable, « ivrogne et lubrique », les adolescent Théo et Clovis, le nain Bébé Toutout…
Imbroglio savamment intriqué de coïncidences, des bouts d’existences se croisent pour nouer l’intrigue structurée en boucle.
« Alors, ils quittèrent la clairière qui se trouve devant Carentan et, franchissant les fausses couches temporelles de l’éternité, parvinrent un soir de juin aux portes de la ville. Ils se séparèrent sans rien dire, car ils ne se connaissaient plus, ne s’étant jamais connus. »

Je tiens à préciser que la lecture de ce livre n’est pas laborieuse : le lecteur n’est jamais (vraiment, ou longtemps) égaré, et en définitive peu d’effort lui est demandé.
Accumulations rabelaisiennes, échos et rimes, rêves, stream of consciousness, (et même un désopilant fantasme/ digression, l’histoire du bilboquet), échanges épistolaires (ou d’« épistoles »), satires et tous genres d’humour, toutes formes de parodies (« Ernestine, Ernestine, disparue ! »), diverses techniques littéraires sont utilisées (sans jamais insister jusqu’à devenir lourd) ‒ et c’est toujours un grand plaisir de lecture.
La transcription phonétique qui caractérise partiellement son œuvre y apparaît déjà, comme une des sources de néologisme :
« Non, sa belle argent, elle l’aurait pas chtée comm’ ça su’ l’tapis vert, pour qu’aile s’envole et qu’aile la r’voie pus. Non. »

« Narcense n’ose se risquer. Il presquose, puis recule. »

D’une manière générale, c’est une vaste jubilation de mots, parfois aussi des archaïsmes :
« "Alibiforains et lantiponnages que tout cela, ravauderies et billevesées, battologies et trivelinades, âneries et calembredaines, radotages et fariboles !" se dit-elle. »

Souvent une certaine mélancolie affleure, teintée d’une réelle métaphysique :
« Sur le quai, des tas d’êtres humains tout noirs attendaient. On aurait dit du papier à mouches. Le jour, un peu abruti, n’était pas encore bien levé. L’air, parfaitement purifié par la nuit, recommençait à puer légèrement. À chaque instant, le nombre des attendants augmentait. Les uns ouvraient à peine des yeux rongés par le sommeil ; d’autres semblaient plus bas que jamais. Beaucoup étaient frais et dispos. Et presque tous avaient un journal à la main. Cette abondance de papier ne signifiait rien. »

« " C’est ça la vie, c’est ça la vie, c’est ça la vie." »

« Ils s’enfoncent dans leurs destins réciproques comme des crevettes dans le sable, ils s’éloignent et, pour ainsi dire, meurent. »

Une grande scène, celle des noces, qui se terminent par une macabre agonie :
« Elle ne saurait plus tarder ; l’autocar qui la transporte fend l’air ; sa carrosserie trépide d’impatience ; tel un cheval fougueux transportant sur son dos un capitaine de gendarmerie qui craint d’arriver à l’école du soir quand le cours de versification sera terminé, ainsi le puissant quadricycle emporte la noce joyeuse vers son destin, en avalant des kilomètres et en chiant de la poussière, rugissant comme un lion et ronflant comme un dormeur enrhumé. Il égrène un à un les villages de la route et bondit par-dessus les fossés, les ornières et les caniveaux ; les bicyclistes ne le font pas reculer, il aplatit les poules de son pneu increvable, les virages fascinés se laissent prendre à la corde, il foudroie la campagne et subjugue la ville, l’intelligent l’admire autant que l’imbécile. »

« C’est comme moi. I reste du pourri, mais la p’tite voix qui parle dans la tête quand on est tout seul, i n’en reste rien. La mienne quand è s’taira, è r’ parlera pas ailleurs. C’est ça qu’est drôle. C’est pas qu’ ça m’fâche autrement. On s’ passera d’moi. J’ m’en doute bien. Et je m’ passerai bien d’moi-même.
[...]
Bien sûr, y a quéque chose de très simple et tout l’ monde sait ça : la femme Taupe va mourir passque plus tôt ou plus tard, ça finit par arriver et si on vit c’est parce qu’on mourra. Pas vrai ? »

Grinçante caricature des "idéaux" petits-bourgeois :
« "Dans six mois au plus, songe Mme Belhôtel, nous aurons notre petite maison, notre petite maison close. Je la voudrais dans un quartier tranquille et sûr ; une clientèle bourgeoise et fidèle ; sept à huit filles, pas plus ; mais bien choisies. Il y aura tout plein d’or et de velours rouge, et l’on vivra dans l’abondance et le calme et Clovis deviendra ingénieur et il épousera la fille d’un gros industriel et les petits enfants auront une bonne anglaise avec de grandes dents et des rubans bleus flottant sur ses fesses osseuses. »

« Tu vas décrire avec régularité cette splendide trajectoire, Clovis, et rien ne pourrait t’en empêcher. (À moins qu’il ne crève en chemin, mais c’est pas la peine de le lui dire, il est d’un naturel si peureux, il se frapperait.) »

Queneau anticipe aussi la seconde Guerre Mondiale (roman écrit en 1932), avec « charge à la boyaux-nets » :
« Le conflit entre la Gaule et l’Étrurie va probablement tourner en conflagration mondiale. Les Ligures et les Ibères vont sans doute se joindre aux Gaulois ; les Ombriens, les Osques et les Vénètes aux Étrusques. Le peuple polonais a déclaré qu’il soutiendra son alliée de toujours et qu’il mettra sa Vistule à la disposition du gouvermint froncé. »

« Et de nouveau la culture française allait être sauvée, on allait même lui donner du bon engrais à cette culture, quelque chose de soigné, du sang et du cadavre. »

Impossible de ne pas penser à Céline, qui à la même époque publiait Voyage au bout de la nuit
Je suis particulièrement sensible au thème des personnages qui se savent dans un livre (fréquent dans l’œuvre romanesque de Queneau, pour ce que j’en ai lu) :
« ‒ Quel livre ? demandèrent les deux maréchaux errants.
‒ Eh bien, çui-ci. Çui-ci où qu’on est maintenant, qui répète c’ qu’on dit à mesure qu’on l’ dit et qui nous suit et qui nous raconte, un vrai buvard qu’on a collé sur not’ vie.
‒ C’est encore une drôle d’histoire, ça, dit Saturnin. On se crée avec le temps et le bouquin vous happe aussitôt avec ses petites paches de moutte. »

Parfois même le personnage (ou l’auteur ? ici Saturnin) apostrophe le lecteur :
« Gentil, gentil lecteur, soldat zou caporal, moule à gaufre, fesse de farine, je ne te cacherai pas plus longtemps, je suis soûl, soûl comme une vache, salement soûl. »

Le « coupe-œufs-durs-en-tranches-minces » vendu par un camelot, outre un témoignage des foires d’antan, marque l’absurde et le surréalisme qui affleurent dans ce beau roman.
Le titre fait je pense référence à la vie sous forme de reprises têtues, « multiples et complexes », cf. la première-dernière phrase.
Je regrette de n’avoir pas commencé ma découverte de Queneau par ce roman, certainement la meilleure porte d’entrée dans son univers.


mots-clés : #absurde #humour #universdulivre
par Tristram
le Dim 19 Aoû - 13:39
 
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Eric Hazan

Pour aboutir à un livre  
Edition La fabrique

Tag universdulivre sur Des Choses à lire - Page 3 Proxy_50

Très intéressant petit ouvrage sous forme d'un entretien rapportant non "un parcours individuel mais plutôt une aventure collective", Comment on crée une maison d'édition indépendante, en l’occurrence politique voire "subversive", comment on la finance et la gère, comment on choisit une ligne éditoriale, une ligne graphique, des auteurs. Comment l’enthousiasme et la travail sont des ferments certains de l'affaire, comment on se situe face à l'édition commerciale, et en lien avec d'autres éditeurs alternatifs. Comment on reçoit  les aides financière institutionnelles, comment on diffuse ses livres, comment on subit ses détracteurs.


mots-clés : #universdulivre
par topocl
le Jeu 16 Aoû - 8:52
 
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Éric Chevillard

Défense de Prosper Brouillon
Fantaisie critique publiée en 2017

Tag universdulivre sur Des Choses à lire - Page 3 97828810

« C’est un petit bijou d’ironie », selon mon amie H. à qui j’ai demandé de lire Défense de Prosper Brouillon. En effet, cette fantaisie critique écrite par antiphrases est d’une habileté tout à fait remarquable.

Éric Chevillard s’amuse d’abord à détourner quelques remarques destinées au critique un peu sévère afin de nous concocter l’hilarant tableau du « microcosme germanocreusois ».
D’un côté, vous avez Prosper Brouillon ruisselant de sueur, couvert de poussière, qui a œuvré tout le jour dans la carrière pour détacher un beau morceau du monde, un quartier de réel compact avec des gens plantés dessus ; de l’autre, ces prétendus esthètes, oiseux, amphigouriques comme le mot lui-même, celui-ci ayant au moins l’excuse d’être cohérent avec sa définition alors qu’ils ne sont que des faux jetons assoiffés de reconnaissance. Ils jappent en reculant devant les auteurs de best-sellers, ils espèrent être vus enfin dans leur lumière, goûter à leur gloire en leur mordillant les orteils. Quel spectacle navrant !

Quant à Prosper Brouillon, il est la « figure de synthèse d’une vingtaine d’auteurs contemporains », déjà passés à la moulinette dans le Feuilleton qu’Éric Chevillard a tenu durant six années (2011-2017) dans Le Monde des livres. Ici, ces auteurs ne sont pas nommés, mais leurs citations réintégrées dans un petit roman niais conçu pour articuler toutes ces trouvailles horrifiantes, où la dimension érotique, grossière et ridicule, finit par devenir sordide. Je vous laisse le plaisir d’en découvrir toute la délicatesse.
Se coucher dans l’ombre bleue d’un cyprès, à jamais délivré de toutes ces horreurs…

Et déjà notre main fébrile cherche un flingue.

Des imposteurs en littérature. Dont les livres sont souvent placés en tête de gondole dans les librairies. Et ces bouquins bancals, sûrement rewrités pour la plupart, sont alors pris pour ce qu’ils ne sont pas. Nombre de lecteurs doivent être dupés par l’autorité d’une prestigieuse maison d’édition ou les fanfaronnades d’un auteur agile sur les plateaux télévisés.

Il faut le croire. Ou comment comprendre un tel engouement pour ces histoires insignifiantes et parsemées de tournures d’une vulgarité extrême ? Lesquelles laissent entrevoir une vision non moins médiocre du monde, génératrice de représentations accablantes. Parmi les perles pêchées par Éric Chevillard :
Qu’avait-elle en tête ? Des rêves de boniche, des fantasmes puérils, des chimères de ménopausée. Elle allait, oui, se détériorer, devenir une pauvre chose flasque et ridée.

[…] il y a un moment où une femme doit choisir entre son visage et son corps. Grâce à la graisse, elle avait sauvé sa figure […], mais elle était devenue énorme en dessous.


Heureusement, le trésor empoisonné nous est livré dans un fabuleux écrin. On le ressort, on le relit. Pour l’humour caustique, l’écriture ciselée et les fascinantes figures acrobatiques d’Éric Chevillard. Pour les magnifiques illustrations de Jean-François Martin, qui contribuent elles aussi à nous élever toujours plus haut au-dessus de ce marécage, un terrain saturé de clichés nauséabonds, impropre à la culture de notre esprit.

On rit beaucoup. Mais on aurait quand même un peu envie de pleurer.
J’ai coché quelques passages, donc, en lisant Les Gondoliers. Mais je me suis vite fatigué. L’écriture en est aussi hardie de bout en bout. Il faut le savoir : c’est un livre dont on ne sort pas indemne. Le lecteur prend une vraie claque. Mieux : un uppercut le plie en deux, puis le genou le cueille à la mâchoire.

Qui se décroche.


Éric Chevillard, dans l’émission de radio « Caractères » présentée par David Collin, raconte ce qui l’a incité à écrire cette fantaisie critique corrosive :
Le problème est que ça finit par être toxique. Ce n’est pas seulement ridicule. Comme c’est beaucoup lu, ça fige un certain état de la langue aussi. Ça n’est pas sans influence sur le désespoir contemporain. Au bout d’un moment, nos représentations du monde aussi mal formulées finissent par… y’a un effet de retour qui se produit dans le réel et c’est le réel même qui nous paraît cafardeux d’un coup d’un seul. Donc je me sens non seulement le droit mais le devoir de stigmatiser ce type de littérature ; parce qu’elle est toxique.

mots-clés : #humour #universdulivre
par Louvaluna
le Ven 10 Aoû - 23:26
 
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André Schiffrin

Le contrôle de la parole

Tag universdulivre sur Des Choses à lire - Page 3 Le_con10

Et bien voilà la suite de l'édition sans éditeurs, mais toujours avec ce côté frustrant que le livre date cette fois-ci de 2005 et évidemment on se demande bien ce qui s'est passé après, sans doute pas des progrès.
Comme le prophétisait Tristram, l'Europe n'a pas tardé à rattraper les USA : grâce à la « bienveillance » de l'État pour les capitaux français, on assiste à une «trustisation » de l'édition française, au mains de fonds d'investissement, des capitaux émanant pour la plupart soit de magnats de la presse  Hachette possède  222 titres de presse dans le monde !) soit d'entreprises d'armement dont il n'est pas utile de détailler les positionnements politiques.

C'est donc maintenant la course au best-seller, au profit, l'uniformisation des idées, le conformisme intellectuel, le nivellement par le ras, la manipulation de l'opinion.

Après une description précise des mécanismes économiques qui gouvernent l'édition en France, André Schiffrin fait un petit tour par  la Grande-Bretagne puis revient aux États-Unis et analyse les conséquences de ces phénomènes sur la guerre de Bush en Irak, où le milieu de l'édition, tout comme la presse, a été d'un soutien indéfectible pour son maître.

Il ne fait pas bon être éditeur indépendant, libraire indépendant, et bientôt même lecteur indépendant dans ce monde manipulé par les gros sous. Lecture intéressante, qui apprend à s'y reconnaître, sans doute orientée, et qui n'est pas sans faire peur.





mots-clés : #economie #universdulivre
par topocl
le Ven 3 Aoû - 8:59
 
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André Schiffrin

L'édition sans éditeurs

Tag universdulivre sur Des Choses à lire - Page 3 Images11

André Schiffrin , à travers sa biographie professionnelle, dresse un portrait de ce qu'est devenu l'édition à la fin du vingtième siècle.

Son père a été l'un des fondateurs de La pléiade, dans un souhait d'offrir une littérature de qualité au plus grand nombre. Suite aux persécutions vichystes et à son élégant licenciement par Gallimard, la famille émigre en 1941 aux États-Unis.
André Schiffrin reprend quelques années plus tard la canne de pèlerin de son père, pour publier des œuvres américaines dissidentes ou européennes, dans un message plutôt à gauche, sans recherche systématique du profit,mais dans l'idée d'entretenir et enrichir le discours intellectuel et la réflexion au sein de Pantheon Books. Mais la loi du marché s'installe peu à peu dans l'édition, il faut penser à être rentable, très rentable, il faut arrêter de semer des idées frondeuses dans l'opinion, de croire qu'offrir la culture aux minorités est une bonne chose… En même temps que toute son équipe, André Schiffrin part en claquant la porte et fonde, avec l'aide de quelques fondations privées, The New Press, maison d'édition  dissidente et sans but lucratif.

À travers son parcours, André Schiffrin décrit ce qu'est devenu le livre, le monde de l'édition aux États-Unis mais aussi à un moindre degré en  Europe et particulièrement en France, sous l'emprise des empires du divertissement et de la communication. Il montre comme il est difficile maintenant de continuer à considérer le livre comme un produit culturel et non plus commercial.

Le livre est écrit et publié en 1999, Amazon n' apparaît qu'une fois de façon très ponctuelle et seulement dans la conclusion. Il va donc falloir lire la suite : Le contrôle de la parole.


mots-clés : #autobiographie #mondialisation #universdulivre
par topocl
le Mar 3 Juil - 16:13
 
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Alberto Manguel

Une histoire de la lecture

Tag universdulivre sur Des Choses à lire - Page 3 Une_hi10

Actes Sud, édition 1998, volume convenable, au format 13x24, au papier agréablement raide, « blanc cassé », illustré (même si les petites images sont parfois peu lisibles), et avec sommaire, notes, index comme il convient, surtout pour un essai : cela devient suffisamment rare pour mériter d’être souligné.

Il s’agit d’un essai sous forme traditionnelle, savant bien sûr, mais que nombre d’anecdotes, personnelles ou pas, rendent d’une lecture facile, « accessible et néanmoins érudit, riche en renseignements et aussi en réflexion. »

Pour se faire une idée, voici la table des matières :

LA DERNIERE PAGE
FAITS DE LECTURE
Lire des ombres
Lire en silence
Le livre de la mémoire
L'apprentissage de la lecture
La première page manquante
Lire des images
Ecouter lire
La forme du livre
Métaphores de la lecture
POUVOIRS DU LECTEUR
Commencements
Ordonnateurs de l'univers
Lire l'avenir
Le lecteur symbolique
Lire en lieu clos
Le voleur de livres
L'auteur en lecteur
Le traducteur en lecteur
Lectures interdites
Le fou de livres
PAGES DE FIN


Tag universdulivre sur Des Choses à lire - Page 3 Lecteu10
Lecteurs dans une bibliothèque londonienne endommagée par une bombe en 1940 (photographie commentée par l’auteur).

On pourra se reporter également au texte de Laurent Jenny, Histoire de la lecture, qui s’y rapporte : Université de Genève

Je renverrai aussi au Journal d’un lecteur, du même Alberto Manguel.

Quelques extraits…

« Quand j’ai découvert que Cervantès, dans son amour de la lecture, lisait "jusqu’aux bribes de papier qu’on jette à la rue", je connaissais exactement la nécessité qui le poussait à de telles récupérations. […]
L’expérience m’est venue d’abord des livres. Quand, plus tard dans ma vie, je me suis trouvé en présence d’événements, de circonstances, de personnages similaires à ceux que j’avais rencontrés dans mes lectures, cela m’a souvent donné l’impression un peu étonnante mais décevante de déjà vu, parce que j’imaginais que ce qui se passait à ce moment m’était déjà advenu en paroles, avait déjà été nommé. »
Alberto Manguel, « Une histoire de la lecture », « La dernière page »

« Quand je ne suis pas en train de marcher, disait-il, je lis ; je ne peux pas rester assis à réfléchir. Les livres réfléchissent pour moi. »
Charles Lamb, cité par Alberto Manguel, « Une histoire de la lecture », « La dernière page »

« "Pour comprendre un texte, écrivait le Dr Merlin C. Wittrock dans les années quatre-vingt, nous ne nous contentons pas de le lire, au sens propre, nous lui fabriquons aussi une signification." Dans ce processus complexe, "les lecteurs prennent le texte en charge. Ils créent des images et des transformations verbales afin de s’en représenter le sens. Plus impressionnant encore, ils produisent du sens en cours de lecture en établissant des relations entre leur savoir, des souvenirs de leurs expériences, et les phrases, paragraphes et passages du texte écrit." Lire ne consiste donc pas en un processus automatique d’appréhension du texte comparable à la manière dont un papier photosensible est impressionné par la lumière, mais en un étonnant processus labyrinthique de reconstruction, commun à tous et néanmoins personnel. »
Alberto Manguel, « Une histoire de la lecture », « Lire des ombres »

« La traduction propose une sorte d’univers parallèle, un autre espace-temps dans lequel le texte révèle d’autres significations possibles et extraordinaires. Pour ces significations, toutefois, il n’existe pas de mots, puisqu’elles existent dans le no man’s land intuitif séparant le langage de l’original de celui du traducteur. »
Alberto Manguel, « Une histoire de la lecture », « Le traducteur en lecteur »

« L’illusion caressée par ceux qui brûlent des livres est que, ce faisant, ils peuvent annuler l’histoire et abolir le passé. »
Alberto Manguel, « Une histoire de la lecture », « Lectures interdites »

« Pour qu’un livre nous touche, il faut sans doute qu’il établisse entre notre expérience et celle de la fiction ‒ entre les deux imaginations, la nôtre et celle qui se déploie sur la page ‒ un lien fait de coïncidences. »
Alberto Manguel, « Journal d’un lecteur », juin 2002

« C’est curieux, cette façon dont un lecteur façonne son propre texte en remarquant certains mots, certains noms qui ont pour lui une signification privée, dont lui seul perçoit l’écho, et qui échappent à tous les autres. »
Alberto Manguel, « Journal d’un lecteur », juin 2002



mots-clés : #essai #universdulivre
par Tristram
le Dim 22 Oct - 21:12
 
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Sujet: Alberto Manguel
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Italo Calvino

Le château des destins croisés

Tag universdulivre sur Des Choses à lire - Page 3 Le_chy10

Même s’il y a le risque de n’y trouver qu’un exercice de style abscons (on est en plein OULIPO), ce court roman réserve un bel instant de lecture. La contrainte : construire des histoires croisées en combinant sémiotiquement, comme autant de scènes, les arcanes de jeux de tarot (dont les lames illustrent le texte). Dans un château (raffinés tarots milanais du XVe), puis une taverne (populaires tarots de Marseille), avec une note de l’auteur en explicit (qui retrace cette laborieuse élaboration), c’est tout un monde qui se déploie de cette brève narration, rigoureuse construction cruciverbiste sur l’inconscient collectif (voire les archétypes jungiens) contenu dans ces images.

« Tout cela est comme un rêve que la parole porte en soi et qui, passant par celui qui écrit, se libère en le libérant. Dans l’écriture, ce qui parle c’est le refoulé. »
« L’écriture avertit de tout ça comme l’oracle, et comme la tragédie elle en purifie. En somme, il n’y a pas là de quoi faire un drame. L’écriture en somme possède un sous-sol qui appartient à l’espèce, ou du moins à la civilisation, du moins dans les limites de certaines catégories de revenus. »

On y rencontre Roland, Faust, Perceval/ Parsifal, Hamlet, le Tao ; on y trouve des allusions à Sade, Stendhal. Il y a même un essai (sur la peinture représentant saint Jérôme et saint Georges). Quête du Graal, labyrinthe, puzzle, on y découvre de multiples perspectives borgésiennes ; je comprends mieux la fascination cartomancienne des "réussites" ou "patiences", cet entrelacement de possibles aux variations infinies.

« C’est dans les cours une vieille et sage tradition que le fou, le jongleur, le poète aient pour fonction de renverser et tourner en dérision les valeurs sur lesquelles le souverain édifie son pouvoir, qu’ils lui démontrent que toute ligne droite dissimule un envers tordu, tout produit fini un chambardement de pièces qui ne concordent pas, tout discours suivi un bla-bla-bla. »

Le narrateur/ auteur intervient aussi (« Moi aussi je veux raconter la mienne »), nous parlant de la création littéraire :

« Le moment est peut-être arrivé d’admettre que le tarot numéro un est le seul à représenter honnêtement ce que j’ai réussi à être : un prestidigitateur ou illusionniste qui dispose sur son étalage de foire un certain nombre de figures et qui, les déplaçant, les réunissant, les échangeant, obtient un certain nombre d’effets. »

Et bien sûr dans sa note :

« Si je me décide à publier la Taverne des destins croisés, c’est avant tout pour m’en libérer. Aujourd’hui encore, alors que le livre est en épreuves, je continue de le retoucher, de le démonter, de le récrire. C’est seulement lorsque ce volume aura été fabriqué que j’en serai sorti une fois pour toutes ; du moins je l’espère. »


Pour approfondir l’aspect production littéraire à partir du matériau médiéval : https://crm.revues.org/2683

Ce livre a été publié juste après Les villes invisibles, un ouvrage extraordinaire que je recommande encore plus vivement.


mots-clés : #universdulivre
par Tristram
le Lun 5 Juin - 15:22
 
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Sujet: Italo Calvino
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Rabih Alameddine

Les vies de papier
Pris Femina étranger 2016

Tag universdulivre sur Des Choses à lire - Page 3 Captur42

Aaliya est une vieille femme. Seule dans la vieillesse comme elle fut seule dans la vie, elle qui fut répudiée à moins de 20 ans. Elle a toute sa vie tenu une librairie, et maintenant elle se réfugie dans son appartement-cafarnaum, rempli de livres jusqu'au plafond. Toujours seule, se défendant de ses trois voisines , les "trois sorcières", elle déambule dans une Beyrouth défigurée par les guerres enchaînées. Et elle traduit, ouvrage après ouvrage, pour elle, sans attendre un public, pour le seul plaisir des mots, des phrases et des idées.

Beau sujet que cette femme inutile qui a trouvé le sens de sa vie dans les livres et dans les mots. L'écriture est assez chaotique, de digressions en détours temporels, et on attend vraiment les dernières pages pour voir où nous emmène Rabih Alameddine. Il y a de beaux passages sur la littérature et ce qu’elle apporte aux hommes (et aux femmes), sur la traduction, et le sort des femmes libanaises : les mariage arrangés introduisant des années de soumission à l'homme. Le parti pris d'insérer des citations et allusions  à toutes sortes de livres affectionnés par Aaliyaally est parfois habile, parfois plus pachydermique, évoquant un devoir de baccalauréat qui cherche à briller par   sa culture. Cela donne un résultat assez mitigé, avec de bons moments et mais aussi pas mal de moments où l'on se laisse porter par une vague un peu incertaine.

mots-clés : #creationartistique #universdulivre
par topocl
le Ven 30 Déc - 20:27
 
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Italo Calvino

Si par une nuit  d'hiver un voyageur

Tag universdulivre sur Des Choses à lire - Page 3 41dtyh10

Chapitres 1 à 7

C’est confondant d'intelligence, éblouissant de malice, émerveillant de sensibilité. Le premier chapitre, en particulier, est LE chapitre que j'emmènerais sur une île déserte.
Cela parle du livre, de l'amour des livres, des lecteurs, c'est-à-dire de moi, de nous, en somme. Dans une espèce de livre à tiroirs, de jeux de piste, de parcours ludique au pays des livres. Calvino confronte deux lecteurs : le lecteur-personnage de  son livre, et le lecteur-lecteur de son livre, qu’il apostrophe tous deux avec un « tu »complice, les fait se regarder alternativement dans un miroir, et à travers une vitre. Il leur propose en pâture des amorces de romans réjouissantes, où l'absurde le dispute au loufoque, et où manque systématiquement la fin qu'on va chercher dans un autre livre non moins inachevé. C'est totalement brillant et réjouissant.

«Ton appartement, c'est le lieu où tu lis : il peut nous dire la place que les livres tiennent dans ta vie, s’ils sont une défense que tu opposes au monde extérieur, un rêve où tu t'absorbes, comme une drogue ; ou au contraire autant de ponts que tu jettes vers l'extérieur, vers un monde qui t’intéresse au point que tu veuilles en multiplier et en élargir grâce aux livres les dimensions.»


Chapitres 5 à 10

Italo Calvino n'est pas du genre à se contenter de suivre un chemin tout tracé. Il veut en faire plus, et  poursuit sa réflexion sur le livre, l'écriture, aborde la traduction et le plagiat,  nous entraîne dans une réflexion sur la fiction, le faux, la mystification et la manipulation. Et évidemment nous mystifie et nous manipule. Il y a tout un jeu sur le roman d'espionnage, un chassé-croisé complexe avec le lecteur et cela devient beaucoup plus dense et touffu, moins lumineux, en bref assez confus et cela est devenu pour moi une espèce de galimatias oppressant et ennuyeux..

Chapitre 11 et 12

On retrouve le Calvino du début, clair, lumineux, malicieux, intelligent, c'est à nouveau totalement drôle et vrai, tout un chœur de lecteur s’adresse à nous, chacun a sa façon de lire et d’aimer lire , et nous découvrons que nous sommes la somme de tous ces lecteurs, c’est un enchantement. Car, le saviez-vous, chaque lecteur a sa façon de lire, et pour chaque lecteur, un même livre est différent.

Rarement livre a éveillé en moi des réactions aussi contrastées. Je ne saurais en aucun cas le condamner, car de nombreux lecteurs avant moi ont été totalement enthousiastes, et aussi, car je trouve qu'il y a énormément de choses excellentes là-dedans.

(commentaire rapatrié)



mots-clés : #humour #nouvelle #universdulivre
par topocl
le Sam 17 Déc - 9:13
 
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