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Ahmadou Kourouma

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Message par Fancioulle Dim 11 Déc - 15:08

Ahmadou Kourouma
(1927-2003)

Ahmadou Kourouma Ahmado10

Né en 1927, à Boundiali, au nord de la Côte d'Ivoire, Ahmadou Kourouma était un écrivain d’origine malinké, une ethnie présente dans plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest. Son nom signifie « guerrier » en langue malinké. Élevé par un oncle, il suit une scolarité à Bamako au Mali.
De 1950 à 1954, (pendant la colonisation française), il est envoyé comme tirailleur sénégalais en Indochine, à titre disciplinaire. Avant de rejoindre la métropole pour suivre des études de mathématiques et d'actuariat (Institut de science financière et d'assurances) à Lyon en France.
En 1960, lors de l’indépendance de la Côte d'Ivoire, il revient vivre dans son pays natal mais est très vite inquiété par le régime du président Félix Houphouët-Boigny. Il connaît la prison avant de partir en exil dans différents pays, en Algérie (1964-1969), Cameroun (1974-1984) et Togo (1984-1994) avant de revenir vivre en Côte d'Ivoire.
En 1968, son premier roman, Les Soleils des indépendances, porte un regard très critique sur les gouvernants de l’après-décolonisation.
En 1972, il tente de faire représenter sur scène Tougnantigui ou le Diseur de vérité.
En 1988, son deuxième roman, Monnè, outrages et défis, retrace un siècle d’histoire coloniale.
En 1998, son troisième roman, En attendant le vote des bêtes sauvages, raconte l’histoire d’un chasseur de la « tribu des hommes nus » qui devient dictateur. À travers ce roman, qui obtient le Prix du Livre Inter, on reconnaît facilement le parcours du chef d'État togolais Gnassingbé Eyadema et diverses personnalités politiques africaines contemporaines.
En 2000, son quatrième roman, Allah n'est pas obligé, raconte l’histoire d’un enfant orphelin qui, parti rejoindre sa tante au Liberia, devient enfant soldat. Ce livre obtient le Prix Renaudot et le Prix Goncourt des lycéens.
Lorsqu’en septembre 2002, la guerre civile éclate en Côte d'Ivoire, il prend position contre l’ivoirité, « une absurdité qui nous a menés au désordre » et pour le retour de la paix dans son pays.
Au moment de sa mort, il travaillait à la rédaction d’un nouveau livre Quand on refuse, on dit non, une suite d’Allah n'est pas obligé : le jeune héros, enfant soldat démobilisé, retourne en Côte d’Ivoire à Daloa, et vit le conflit ivoirien. Ce roman est publié à titre posthume en 2004.
Kourouma était marié et père de 4 enfants. Onze ans après sa mort, en novembre 2014, sa dépouille a été transférée de Lyon en Côte d'Ivoire.
(source : wikipedia)

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Théâtre :
Tougnantigui ou le Diseur de vérité, 1972.
Allah n'est pas obligé, 2004.

Romans
Les Soleils des indépendances, 1968. Page 1
Monnè, outrages et défis, 1990.
En attendant le vote des bêtes sauvages, 1994. Page 1
Allah n'est pas obligé, 2000. Page 1
Quand on refuse on dit non, 2004. Page 2

MAJ le 12/06/2021
Fancioulle
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Message par Fancioulle Dim 11 Déc - 15:13

Ahmadou Kourouma 0001010

En attendant le vote des bêtes sauvages (1994).

Comme dans tout roman d'Ahmadou Kourouma, le lecteur européen doit se déchausser avant d'entrer.
Puis se dévêtir, se dépouiller de tout bagage. Il y a de toute manière toujours une voix pour le lui rappeler...

Il existe deux sortes de cécité sur cette terre. Il y a d'abord ceux qui irrémédiablement ont perdu la vue et qui parviennent avec une canne blanche à éviter les obstacles. Ce sont les aveugles de la vue. Et ceux qui ne croient pas, n'utilisent pas la voyance, les sacrifices. Ce sont les aveugles de la vie. Ils entrent de front dans tous les obstacles, tous les malheurs qui empêchent leur destin de se réaliser pleinement. Qu'Allah nous préserve de demeurer, de continuer perpétuellement à vivre parmi les aveugles de la vie !

Après plusieurs semonces, le lecteur mal élevé qui refuse se verra éconduit.
Et prendre la porte, dans un roman, ça s'appelle être condamné à ne pas comprendre. Le rationaliste qui cherchera à esquiver les voies magiques frayées dans cette logorrhée rituelle se voit rabroué sans ménagement : naïf ! enfant !

Le récit prend la forme d'un donsomana, qui est une geste purificatoire, dite par un sora - ce sera Bingo - et accompagnée par un répondeur cordoua, Tiécoura. Le donsomana, divisé en six veillées, doit opérer une purification de Koyaga, ancien dictateur de la République du Golfe. Ce dernier a perdu l'aérolithe et le Coran qui l'auréolaient d'un pouvoir magique sans égal ; d'où le donsomana, préalable nécessaire pour les retrouver, et, par là-même, pour reconquérir le pouvoir.

Bingo. Tiécoura. Deux voix principales auxquelles se mêlent plusieurs autres.
Tout s'entremêle et se confond si bien que le propos n'est jamais clair, car on n'est jamais tout à fait sûr de savoir qui parle.
Koyaga est tour à tour encensé, mythifié puis conspué et condamné.
Car "Tout n'est pas négatif, totalement négatif, même dans un autoritarisme émasculateur. Même dans l'anus de l'hyène, on trouve des taches blanches. Conclut le cordoua."
Une archéologie du texte fera apparaître que Kourouma a mélangé dans son portrait de Koyaga biographie officielle, lumineuse, et biographie non officielle, interlope, d'Eyadéma, dictateur du Togo.
D'où les ambivalences. Mais cela n'explique pas grand chose.

Autre génie de Kourouma : ouvrir des brèches dans le temps.
Par des entrelacs et entrelacements narratifs permanents, le passé ancestral et le présent le plus sordide se jouxtent.
Si bien que tout est embaumé d'une impression de sacralité ; Koyaga, plus qu'un homme, devient acteur de l'Histoire, héros en mouvement.
Héros dans un monde où le sorcier féticheur et le blanc colonisateur sont voisins.
Le lecteur est perdu dans cette "vaste et multiple Afrique" où l'irréel et le réel n'ont pas de frontière connue.
Bien sûr, on pourra reconnaître de véritables dictateurs dans ce roman : Koyaga est l'alter ego d'Eyadéma, le personnage de Tiékoromi, président de la République de la Côte des Ebènes au totem caïman renvoie au président ivoirien Houphouët-Boigny (comme dans les Soleils des Indépendances), l'empereur Bassouma au totem hyène évoque l'empereur Bokassa et l'Homme au totem léopard rappelle Mobutu Sese Soko (président du Zaïre).
Arrivé au seuil du pouvoir, Koyaga décide à la suite d'un songe d'entreprendre un voyage initiatique. Il apprendra auprès de Tiécoromi, de Bassouma, de Bokassa et de l'Homme au totem léopard l'art de la dictature. C'est lors de la quatrième veillée que ce voyage est retracé. Avec, comme toujours, beaucoup d'humour, mais un humour en demi-teinte, comme assourdi ou effacé.

Voici donc les quatre mises en garde de Tiécoromi (entendez le rire sourd de Kourouma) - j'abrège beaucoup :
1/ "la première méchante bête qui menace le sommet de l'Etat et en tête d'un parti unique s'appelle la facheuse inclination en début de carrière à séparer la caisse de l'Etat de sa caisse personnelle. Les besoins personnels d'un chef d'Etat et président d'un parti unique servent toujours son pays et se confondent directement ou indirectement avec les intérêts de sa République et de son peuple."
2/ "la seconde méchante grosse bête qui menaçait un chef d'Etat novice - et même tout homme politique en début de carrière -, était d'instituer une distinction entre vérité et mensonge. La vérité n'est très souvent qu'une seconde manière de redire un mensonge. Un président de la République et président fondateur de parti unique - et Koyaga forcément sera le président fondateur d'un parti unique - ne s'alourdissait pas, ne s'embarrassait pas du respect d'un tel distinguo."
3/ "la troisième méchante grosse bête qui menace au sommet de l'Etat et à la tête d'un parti unique consiste, pour le président, à prendre les hommes et les femmes qui le côtoient, qu'il rencontre, avec lesquels il s'entretient, comme culturellement ceux-ci se présentent. Un chef d'Etat prend les hommes comme ils existent dans la réalité. Il doit connaître - comme le charmeur connaît les parties du corps des serpents - les sentiments et les moyens par lesquels il faut enjôler les humains."
4/ "il vous a alors expliqué ce qu'il appelait la quatrième bête sauvage qui menace le chef d'un parti unique : le mauvais choix. Dans la guerre froide qui régissait l'univers, le choix d'un camp était essentiel, un acte risqué, aussi risqué que prendre une femme pour épouse, etc."


On traverse les espaces (par ce voyage et celui de Maclédio, son bras droit, parti jadis en quête de son "homme de destin") et les temps.
L'action de quelques hommes traverse les âges et les frontières de l'Afrique : ce n'est rien moins qu'une saga.
D'ailleurs, cette impression diffuse d'intemporalité, de sacralité, n'est pas non plus étrangère à l'usage presque rituel des proverbes.
Des proverbes très colorés ; qui sentent la profonde sagesse d'une culture, agrégée au fil des siècles, qui charrient la puissance du verbe. Et dont l'humour est féroce.
"Tiécoura ! Le proverbe est le cheval de la parole ; quand la parole se perd, c'est grâce au proverbe qu'on la retrouve."
Passée la déception de ne pas retrouver le langage des Soleils des indépendances, j'ai retrouvé, subtilement distillée entre les six veillées, la langue colorée de Kourouma. Sa finesse et sa complexité.




mots-clés : #humour #regimeautoritaire
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Message par Tristram Mar 11 Avr - 16:02

Les soleils des Indépendances

Ahmadou Kourouma Ahmado10

Dans ce premier roman, Kourouma raconte l’histoire de Fama, dernier prince malinké d’Horodougou (quelque part entre le nord de la Côte-d’Ivoire, la Guinée et le Mali). Au début du livre, pieux musulman, Fama mendie fièrement d'obsèques en obsèques dans la capitale. L’ouvrage commence (et s’achève) par l’évocation d’un homme « fini » (mort, en français d’Afrique). Dans cette partie de l’Afrique, les enterrements sont souvent la seule occasion de grandes réunions avec ripailles et palabres, et ils tiennent une place importante dans cet ouvrage, avec une omniprésence des vautours attirés par les sacrifices sanglants.

« Pourquoi les Malinkés fêtent-ils les funérailles du quarantième jour d'un enterré ? Parce que quarante jours exactement après la sépulture les morts reçoivent l’arrivant mais ne lui cèdent une place et des bras hospitaliers que s'ils sont tous ivres de sang. Donc rien ne peut-être plus bénéfique pour le partant que de tuer, de beaucoup tuer à l'occasion du quarantième jour. Avant les soleils de Indépendances et les soleils des colonisations, le quarantième jour d'un grand Malinké faisait déferler des marigots de sang. Mais maintenant avec le parti unique, l'indépendance, le manque, les famines et les épidémies, aux funérailles des plus grands enterrés on tue au mieux un bouc. Et quelle sorte de bouc ? Très souvent un bouc famélique gouttant moins de sang qu'une carpe. Et quelle qualité de sang ? Du sang aussi pauvre que les menstrues d'une vieille fille sèche. C'était pour ces raisons que Balla [le féticheur] aimait affirmer que tous les morts des soleils des Indépendances vivaient au serré dans l'au-delà pour avoir été tous mal accueillis par leurs devanciers. »

Fama reste en grande partie à charge de sa femme Salimata, qui lui reproche par ailleurs de ne pas la féconder. Ereintée par son travail d’épouse musulmane, elle vend sa cuisine dans la rue (on reconnaît Abidjan, avec la lagune séparant les pauvres quartiers indigènes et le plateau des toubabs – les riches Blancs). Salimata est cependant très généreuse, offrant de la nourriture aux innombrables mendiants (qui l’agressent en retour), et payant avec le reste les maraboutages devant faire d’elle une mère. Ce personnage, ainsi que d’autres, dépeint sans concession la condition féminine lamentable dans cette région d’Afrique, que l’islamisme aggrave.

A l’occasion des funérailles de son cousin, qui avait usurpé sa place de dernier descendant d'une longue lignée de chefs de tribu guerrière, Fama retourne à son village natal dans le nord semi-désertique. Prégnance des croyances dans un mixte syncrétique (griot, islam et féticheur), misère omniprésente, aridité de l’harmattan et puanteurs diverses. Le passé traditionnel disparu avec son statut de chef, Fama déchu est comme tous victime des malheurs africains : sécheresse et autres désastres, mais surtout colonialisme (qu’il a combattu en politique sans en tirer récompense ou profit) et, peut-être pire encore, les Indépendances, avec le parti unique dominé par d’anciens inférieurs dictatoriaux.

« Et le matin d'harmattan comme toute mère commençait d'accoucher très péniblement l'énorme soleil d'harmattan. Vraiment péniblement, et cela à cause des fétiches de Balla. Le féticheur jurait que le soleil ne brillait pas sur le village tant que ses fétiches restaient exposés. Comme le matin il se réveillait tard, il les sortait tous pour leur tuer le coq rouge. Donc pendant un lourd moment le soleil gêné s’empêtrait et s'embrouillait dans un fatras de brouillard, de fumée et de nuages. Les fétiches de Balla rengainés, entrés et enfermés, le soleil réussissait à se libérer, alors qu'il était au sommet du manguier du cimetière. D'un coup il éclatait. Et après le soleil éclatant et libéré, comme les poussins après la mère poule suivaient tous les enfants de l'harmattan : les tourbillons, les lointains feux de brousse, le ciel profond et bleu, le vol des charognards, la soif, évidemment la chaleur ; tous, tous les enfants de l'harmattan. »

« Les soleils des Indépendances s'étaient annoncés comme un orage lointain et dès les premiers vents Fama s'était débarrassé de tout : négoces, amitiés, femmes pour user les nuits, les jours, l'argent et la colère à injurier la France, le père, la mère de la France. Il avait à venger cinquante ans de domination et une spoliation. Cette période d'agitation a été appelée les soleils de la politique. Comme une nuée de sauterelles les Indépendances tombèrent sur l'Afrique à la suite des soleils de la politique. Fama avait comme le petit rat du marigot creusé le trou pour le serpent avaleur de rats, ses efforts étaient devenus la cause de sa perte car comme la feuille avec laquelle on a fini de se torcher, les Indépendances une fois acquises, Fama fut oublié et jeté aux mouches. »

« Mais alors, qu'apportèrent les Indépendances à Fama ? Rien que la carte d’identité nationale et celle du parti unique. Elles sont les morceaux du pauvre dans le partage et ont la sécheresse et la dureté de la chair du taureau. Il peut tirer dessus avec les canines d'un molosse affamé, rien à en tirer, rien à sucer, c'est du nerf, ça ne se mâche pas. Alors comme il ne peut pas repartir à la terre parce que trop âgé (le sol du Horodougou est dur et ne se laisse tourner que par des bras solides et des reins souples), il ne lui reste qu'à attendre la poignée de riz de la providence d'Allah en priant le Bienfaiteur miséricordieux, parce que tant qu'Allah résidera dans le firmament, même tous conjurés, tous les fils d'esclaves, le parti unique, le chef unique, jamais ils ne réussiront à faire crever Fama de faim. »

Mais Fama retourne à la capitale, où il sera arrêté comme opposant au régime dans un summum d’arbitraire (accusé d’un rêve), puis emprisonné et déporté dans des conditions extrêmes, qui semblent avoir peu à envier aux autres dictatures de la planète. L’auteur a semble-t-il souffert lui-même cette situation.

« Comment s’appelait ce camp ? Il ne possédait pas de nom, puisque les geôliers eux-mêmes ne le savaient pas. Et c’était bien ainsi. Les choses qui ne peuvent pas être dites ne méritent pas de noms et ce camp ne saura jamais être dit. »

Aussi absurdement libéré qu'arrêté, le piètre (et jusque là assez antipathique) Fama prend une dimension plus humaine et digne en souhaitant le bonheur de la stérile Salimata qu’il plaint et comprend enfin, et en renonçant aux promesses du régime despotique pour retourner mourir dans son village (il y parvient en traversant d’une façon assez extraordinaire la frontière qui coupe son chemin, sommet du tragico-dérisoire de son destin. Le tracé arbitraire des limites des états des Indépendances, qui ne tiennent pas compte des territoires des différentes ethnies, est encore souligné à cette occasion).

L’oralité est au centre de la vie quotidienne africaine comme au cœur du style de Kourouma. Plus troublant, une sorte de réalisme magique (cf. le défunt qui regagne son village pour s’y faire enterrer) rappelle aussi les littératures caraïbes et sud-américaines.

Pour ceux qui voudraient aller plus loin, l'avant-texte, avec une partie des manuscrit et tapuscrit.



mots-clés : #independance #traditions

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Message par animal Mer 13 Sep - 21:56

Ahmadou Kourouma Les-so10

Les soleils des indépendances

Je ne vais pas vous refaire le résumé en détail, Fama, en exil en quelque sorte à la capitale avec sa femme Salimata se traîne de palabre en palabre et de prière en prière sans le sous et tournant à vide. Pendant ce temps sa femme Salimata gagne le peu de croûte du ménage en allant vendre de la bouillie aux ouvriers des chantiers de l'autre côté du fleuve. Plus douloureux que cette dèche économique le couple n'arrive pas à avoir d'enfants...

Le début du livre nous fait passer des pas de Fama à ceux de Salimata dans une veine assez naturaliste. La langue oralisante fournie en proverbes et mantras du quotidien (injures incluses) renforce cette aspect quand on y pense, ce qui est loin d'être immédiat parce que ça dépayse beaucoup, des repères manques et c'est tant mieux. Palabres et griots ça ne s'apprivoise pas comme ça, pas plus que le féticheur d'ailleurs.

Il est bien bonhomme ce Fama à attendre que son dû lui tombe tout cuit dans le bec pendant que trime sa pauvre femme. Et cette superstition, pfiouuuu... et il faudrait mettre tout ça sur le dos des indépendances.

Mouais mouais. Mais on le suit ce bougre de Fama, certes il n'est pas forcément sympathique et il a des idées pas toujours reluisantes, mais on le suit quand il retourne dans son village à la mort de son cousin. Et l'air de rien on a quitté ce matérialisme naturaliste pour une vision plus existentielle. Finalement il subit Fama, et il a de la peine, et les solutions manquent.

C'est que peut-être sa société à exploser entre colonisation et indépendance. Une société imparfaite peut-être mais composite et avec des liens sociaux et culturels complexes. C'est ça qu'on découvre avec nostalgie et tristesse et côté lecteur une rare opportunité d'entrevoir très autre chose. Non ce n'est pas juste rigolo, les bizarreries (et chacun les siennes se dit-on) ont un sens et sont souvent un espace de cohabitation.

Tout ça ne semble plus pouvoir fonctionner et notre pauvre Fama finalement il pense à quoi, à sa femme, au gamin qu'ils n'ont pas, à son village, à son "pays" au sens non politique du terme, peut-être à des mots à des "palabres" qui ont plus de sens que des dogmes étrangers au bon sens (et ne parlons pas des manières...).

J'ai beaucoup apprécié cette lecture dépaysante mais surtout très fine et terriblement humaniste. Et balader son lecteur avec autant d'intelligence, en sachant jouer avec lui, ça demande de la science et du talent.

Très belle lecture, et très enrichissante.

(J'ai marqué des pages pour des extraits plus tard).

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Message par Bédoulène Jeu 14 Sep - 7:09



Ahmadou Kourouma Ahmado10
Les soleils des Indépendances

Ce récit est l’histoire de Fama Doumbouya, Malinké, dernier descendant de la dynastie, Prince de l’Horodougou.
Après les années de colonisation de cette région sous le joug Français (la Côte d’ivoire dans sa mitoyenneté avec la Guinée) où s’oppose 2 républiques nommées République du Nikinai et celle de la Côte des Ebènes, Fama qui a participé à la révolution évinçant les Français, espérait se voir offrir dans la Capitale de la Côte des Ebènes, un poste honorable quant à son statut de Prince de l’Horodougou, mais il se retrouve ruiné, sans honneur, sans descendance.
Le décès du cousin Lucina qui avait été préféré par les Toubabs comme Chef de l’Horodougou, décède et Fama rentre au pays dans son village natal de Bogobala pour les cérémonies de deuil, lui qui se retrouve donc dernier et unique héritier légitime de la dynastie.
Fama contrairement à l’avis du griot Diamourou et du féticheur Balla, l’un représentant des lois Musulmanes, l’autre des rites Africains,l décide de repartir vivre sur la Capitale où reste Salimata sa femme dite stérile (mais en fait les preuves nous disent que c’est lui Fama qui est stérile) accompagné de la jeune femme du défunt Lucina.
Les Malinkés après s’être tourné vers Allah et sans réponse satisfaisante à leur prière, s’adresse ensuite au féticheur. Salimata use quotidiennement de cette possibilité pour qu’un enfant lui soit accordé, mais aucun de ces pouvoirs ne lui accorde cette joie, à son grand désespoir et celui de Fama.
Les prémices d’une nouvelle insurrection conduisent le gouvernement de la république de la Côte des Ebènes et son Pouvoir unique à arrêter, expulser certains ministres et ceux qui leur sont liés, quelque en soit le lien, c’est ainsi qu’un rêve funeste de Fama le conduit en prison. Celui-ci déjà affaibli par ces années de « bâtardise de la république », ses déboires personnels, familiaux n’aspire plus qu’à subir le sort qui l’attend. Or pour gagner la confiance des autres pays au niveau International, parce que l’économie le réclame, le Président de la république offre sa clémence à tous les prisonniers.
Fama relâché, n’a qu’une hâte retourner dans son village, dans l’Horodougou pour y mourir en chef de dynastie., mais la frontière entre les 2 républiques est fermée pour mésentente. Ce n’est pas cela qui empêchera Fama de traverser ; ignorant les sommations des soldats du poste frontière, et clamant haut son statut de Prince de l’horodougou, héritier de la dynastie des Doumbayou, Fama passe les barbelés et saute dans le fleuve où séjournent les caïmans sacrés. Aucun d’eux pensa Fama n’oserai s’attaquer au dernier descendant des Doumbouya.



Encore une belle rencontre avec l’écriture Africaine. C’est avec une certaine ironie que l’auteur nous conte l’histoire de ce Prince déchu coincé entre la religion Islamique et les mythes et rites hérités des Ancêtres ; les acquis du passé et leur interférence dans le présent. De fait les prédictions des féticheurs sont aussi difficiles à interpréter que celles de Nostradamus.
La colonisation avec son joug, mais aussi la reconnaissance par les Malinkés d’un bon négoce durant cette période, la révolution et l’indépendance sont relatés lorsque Fama fait l’exégèse de sa dynastie pour appréhender sa destinée.
Si les 2 républiques sont imaginaires, elles représentent bien toutefois la particularité de pays réels. (République de Guinée et République de Côte d’Ivoire) Le Horodougou (ou Horodugu existe sous ce nom)
La politique est reconnaissable par sa qualité de « parti unique » et certains personnages réels se cachent sous l’identité du président et des ministres.
Le rite de l’excision relatée par l’un des personnages ne pouvait être absent, par souci d’authenticité , et sert pour ce récit à le dénoncer, ainsi que ces conséquences sur la vie des femmes.


Extrait :

C'était là, au moment où le soleil commençait à alourdir les paupières, que la natte s'écarta, quelque chose piétina ses hanches, quelque chose heurta la plaie et elle entendit et connut la douleur s'enfoncer et la brûler et ses yeux se voulèrent de culeurs qui voltigèrent et tournèrent en vert, en jaune et en rouge, et elle poussa un cri de douleur et elle perdit connaissance dans le rouge du sang. Elle avait été violée. Par qui ? Un génie, avait-on dit après.

Il inculpa Fama de participation à un complot tendant à assassiner le président et à renverser la république de la Côte des Ebènes. Quand fama se leva pour partir, le juge lui demanda pourquoi il n'avait pas couru au réveil raconter son rêve à une personnalité importante du régime, le président ou le secrétaire général du parti unique. Fama ne répondit pas.

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Message par animal Jeu 14 Sep - 21:30

Extrait :
Comme un brusque tourbillon d’harmattan, la colère de Fama s'éloigna. On parcourait les brousses que Fama avait sillonnées de cavalcades, et son cœur se réchauffait des matins de son enfance. De partout surgissaient des bruits, des odeurs et des ombres oubliés, même un soleil familier sortit et remplit la brousse. Son enfance ! son enfance ! Dans tout il la surprenait, la suivait là-bas très loin à l'horizon sur le coursier blanc, il l'écoutait passer et repasser à travers les arbres, la sentait, la goûtait. Les exploits de ses aïeux le transportèrent mais brusquement son cœur se mit à battre et il s'attrista, sa joie était coupée par la résurrection des peurs de sa dernière nuit, par la pitié pour la descendance des Doumbouya, la pitié pour sa propre destinée et de son intérieur bouillonnant montèrent des chants mélancoliques et plusieurs fois il répéta cette mélodie de noces malinké.

On n'apprécie pas les avantages d'un père, d'un père,
Sauf quand on trouve la maison vide du père,
On ne voit pas une mère, une mère,
Plus excellente que l'or;
Sauf quand on retrouve la case maternelle vide de la mère.
Alors l'on marche, marche à pas comptés
Dans la nuit du cœur et dans l'ombre des yeux
Et l'on sort pour verser d'abondantes et brûlantes larmes.

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Message par Tristram Ven 14 Mai - 20:35

Allah n’est pas obligé

Ahmadou Kourouma Allah_10

« Je décide le titre définitif et complet de mon blablabla est Allah n’est pas obligé d’être juste dans toutes ses choses ici-bas. Voilà. Je commence à conter mes salades. »
Après cet incipit, Birahima, un jeune garçon de Togobala (Guinée ; mais la précision géographique a peu d’importance, c’est l’ensemble de l’Afrique occidentale qui peut convenir comme théâtre de ces tribulations) commence à raconter sa vie dans un français laborieux (et savoureux), s’aidant de dictionnaires et d’un lexique de français d'Afrique ; Kourouma donne entre parenthèses la définition des mots peu courants, et c’est peut-être parce que ce texte fut écrit à la demande d’anciens enfants-soldats d’Afrique de l’Est.
« Ces dictionnaires me servent à chercher les gros mots, à vérifier les gros mots et surtout à les expliquer. Il faut expliquer parce que mon blablabla est à lire par toute sorte de gens : des toubabs (toubab signifie blanc) colons, des noirs indigènes sauvages d’Afrique et des francophones de tout gabarit (gabarit signifie genre). Le Larousse et le Petit Robert me permettent de chercher, de vérifier et d’expliquer les gros mots du français de France aux noirs nègres indigènes d’Afrique. L’Inventaire des particularités lexicales du français d’Afrique explique les gros mots africains aux toubabs français de France. Le dictionnaire Harrap’s explique les gros mots pidgin à tout francophone qui ne comprend rien de rien au pidgin. »

« (Au village, quand quelque chose n’a pas d’importance, on dit qu’il ne vaut pas le pet d’une vieille grand-mère. Je l’ai expliqué une fois déjà, je l’explique encore.) »
Birahima est élevé par sa mère infirme puis, devenu orphelin, surtout par la rue : « j’étais un enfant sans peur ni reproche ».
Le principal leitmotiv dans l'aire musulmane, c’est bien sûr que tout dépend d’Allah, qu’il faut célébrer avec fatalisme – mais l’antienne varierait peu sous d’autres cieux monothéistes.
« Les sacrifices, c’est pas forcé que toujours Allah et les mânes des ancêtres les acceptent. Allah fait ce qu’il veut ; il n’est pas obligé d’accéder (accéder signifie donner son accord) à toutes les prières des pauvres humains. Les mânes font ce qu’ils veulent ; ils ne sont pas obligés d’accéder à toutes les chiaderies des prieurs. »
Parti rejoindre sa tante au Liberia avec Yacouba, féticheur et « multiplicateur de billets de banque », il devient enfant-soldat, small-soldier, dans le camp du colonel Papa le bon, une sorte de prêtre inféodé à Taylor, « avec la soutane, les galons, les grigris en dessous, le kalach et la canne pontificale » (nombreux sont les personnages religieux, d'obédience « œcuménique », souvent féminins, qui encadrent les factions).
« La sœur Hadja Gabrielle Aminata était tiers musulmane, tiers catholique et tiers fétichiste. »
Tableau bien documenté de l’horreur délirante de « la guerre tribale » (civile), d’abord au Liberia puis en Sierra Leone, sans concession pour les dirigeants de la sous-région et « leurs troupes d’interposition qui ne s’interposent pas », la diaspora libanaise, les associations de chasseurs traditionnels, et la communauté internationale.
« Comparé à Taylor, Compaoré le dictateur du Burkina, Houphouët-Boigny le dictateur de Côte-d’Ivoire et Kadhafi le dictateur de Libye sont des gens bien, des gens apparemment bien. Pourquoi apportent-ils des aides importantes à un fieffé menteur, à un fieffé voleur, à un bandit de grand chemin comme Taylor pour que Taylor devienne le chef d’un État ? Pourquoi ? Pourquoi ? De deux choses l’une : ou ils sont malhonnêtes comme Taylor, ou c’est ce qu’on appelle la grande politique dans l’Afrique des dictatures barbares et liberticides des pères des nations. (Liberticide, qui tue la liberté d’après mon Larousse.) »

« (la Conférence nationale, c’est la grande foire politique qu’on a organisée dans tous les pays africains vers 1994, au cours de laquelle chacun a raconté ce qui lui passait par la tête). »
Témoignage précis sur le système :
« La première fois que j’ai pris du hasch, j’ai dégueulé comme un chien malade. Puis c’est venu petit à petit et, rapidement, ça m’a donné la force d’un grand. Faforo (bangala du père) ! »

« Le camp était limité par des crânes humains hissés sur des pieux comme tous les casernements de la guerre tribale. »
Épisodes terribles, comme celui de la méthode « Pas de bras, pas d’élections » :
« On procéda aux "manches courtes" et aux "manches longues". Les "manches courtes", c’est quand on ampute les avant-bras du patient au coude ; les « manches longues", c’est lorsqu’on ampute les deux bras au poignet. Les amputations furent générales, sans exception et sans pitié. Quand une femme se présentait avec son enfant au dos, la femme était amputée et son bébé aussi, quel que soit l’âge du nourrisson. Autant amputer les citoyens bébés car ce sont de futurs électeurs. »
Dans ce récit teinté d’oralité et d’autres caractéristiques de la narration africaine, Birahima fait souvent l’oraison funèbre d’enfants-soldats tués, occasion de raconter leur histoire et la façon dont ils furent recrutés.
Partout recommencés, les grigris, les kalach, la corruption, l’anarchie, des « rebelles » aux coupeurs de route et « autres fretins de petits bandits », comme les « sobels » : « C’est-à-dire des soldats dans la journée et des rebelles (bandits pillards) dans la nuit », jusqu’à la sauvagerie extrême.
« Dans les guerres tribales, un peu de chair humaine est nécessaire. Ça rend le cœur dur et dur et ça protège contre les balles. »

« J’ai voulu devenir un petit lycaon de la révolution. C’étaient les enfants-soldats chargés des tâches inhumaines. Des tâches aussi dures que de mettre une abeille dans les yeux d’un patient, dit un proverbe des nègres noirs indigènes et sauvages. […]
"Eh bè, les lycaons, c’est les chiens sauvages qui chassent en bandes. Ça bouffe tout ; père, mère, tout et tout. Quand ça a fini de se partager une victime, chaque lycaon se retire pour se nettoyer. Celui qui revient avec du sang sur le pelage, seulement une goutte de sang, est considéré comme blessé et est aussitôt bouffé sur place par les autres. Voilà ce que c’est. C’est pigé ? Ça n’a pas pitié." »
Yacouba et Birahima, le grigriman et l’enfant-soldat, sont ballotés d'une péripétie à l'autre ; mais chaque flambée de violence est une aubaine pour eux, un regain de prospérité dans un monde en ruine.
« En ce temps-là, les Africains noirs indigènes sauvages étaient encore cons. Ils ne comprenaient rien à rien : ils donnaient à manger et à loger à tous les étrangers qui arrivaient au village. »
Finalement j’ai trouvé peu de romanciers africains qui m’aient convaincu ; mais Ahmadou Kourouma sait transmettre une bonne partie de l’esprit caractéristique de l’Afrique occidentale, notamment celui de la Côte d’Ivoire.
J’ai beau avoir vécu dans les parages et connaître les évènements, j’ai été frappé par le rendu des faits : c’est un livre d’une grande puissance. Heureusement qu’il a été écrit par un Noir, un Africain, parce que d’une autre couleur, d’une autre origine, il aurait été vilipendé, surtout à notre époque de chasse gardée de la parole.
Me reste à lire la suite et fin de ce récit, Quand on refuse on dit non, chronique du retour de Birahima en Côte d’Ivoire.

\Mots-clés : #aventure #enfance #guerre #historique #independance #politique #racisme #Religion #temoignage #traditions #violence #xixesiecle

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Message par Bédoulène Ven 14 Mai - 22:43

merci Tristram, je tenterai certainement la lecture, ayant apprécié le Soleil des indépendances

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Message par Tristram Ven 14 Mai - 23:01

Je le recommande vivement, c'est fort comme exposé des horreurs de la guerre par un enfant ! Et le ton m'a paru très juste.

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Message par animal Sam 15 Mai - 9:28

la prochaine lecture probablement.

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Message par Tristram Sam 15 Mai - 12:28

Bien, mais j'aimerais savoir si vous aurez la même opinion que moi !?

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Message par Tatie Sam 15 Mai - 20:41

Allah n’est pas obligé
Un livre qui m'avait marquée aussi et j'avais pris la mesure d'horreurs peu évoquées par chez nous. L'auteur a beaucoup de talent.
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Message par Tristram Sam 15 Mai - 20:46

Oui, c'est une belle ouverture historique sur l'Afrique Occidentale, et son oeuvre a effectivement une attachante valeur littéraire.

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Message par animal Ven 4 Juin - 11:44

Allah n’est pas obligé

Pas facile d'aborder le moment de parler de ce livre. Il se lit très bien. C'est dynamique, ne manque pas d'humour. Un peu répétitif mais le panorama des pays et des années a aussi d'effrayant cette répétition des situations. Et c'est ça aussi qui est compliqué c'est que ce qui est dit est dans les faits, répétitifs, horrible de violence. Tant individuelle que politique et baignée dans un courant surréaliste qui rappelle les papiers de marabouts qu'on trouve parfois sur les pare-brises et les boites aux lettres. Projeter des images très concrètes derrières les mots du livre c'est très compliqué et facilement hors de portée (pour quelqu'un comme moi en tout cas). Perturbant aussi que ça n'ait l'air de presque rien finalement, cette "banalité" rendue palpable elle aussi.

"Facile" mais très déstabilisant.

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Message par Jack-Hubert Bukowski Ven 4 Juin - 11:58

Je sais que j'arrive en coup de vent, mais c'est possible de retracer un peu la généalogie littéraire du courant du postcolonialisme :

https://fr.wikipedia.org/wiki/Postcolonialisme
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Message par Tristram Ven 4 Juin - 12:30

@Animal, tu as donc ressenti une plus grande impression d'étrangeté et de déstabilisation que moi, qui connaissais déjà les faits (il n'y a pas beaucoup d'invention dans ce livre je crois), et le contexte. Je ne sais pas finalement si ça rend mon avis plus objectif...

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Message par animal Ven 4 Juin - 12:36

connaître les pays et l'histoire change facilement la lecture j'imagine, pour une lecture plus vivante encore. en fait je crois que je trouve extrêmement violent que ça arrive "si simple" en mots. et tu peux ajouter qu'on se trouve/sente à des années lumières de méconnaissance et plus dans notre hexagone. je pense qu'il n'y a aucune invention dans le livre et c'est "flippant" (pour prendre un mot bien tiède).

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Message par Tristram Ven 4 Juin - 12:57

Oui, c'est ça, la banalité du "mal" (je n'aime pas du tout cette appellation, mais elle se comprend), et ça reste choquant, même si on peut penser que c'est "incroyable". C'est une réalité si évidente là-bas, quasi du quotidien, qu'elle ne suscite apparemment qu'une sorte de résignation, ou de silence. C'est un summum de "barbarie" (encore un mot qui...) pour nous, qui sommes prêts à hurler pour appeler la CPI à cause d'un bobo au genou... Il y a quand même une relativité dans les égratignures, et sans vouloir établir de douteuses comparaisons, je me demande si les traumatismes psychologiques occasionnés ont la même profondeur chez nous.
En tout cas, tu es d'accord pour en recommander la lecture ?

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Message par animal Ven 4 Juin - 14:22

Tout à fait d'accord pour en recommander la lecture. Ce n'est pas du superflu.

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Message par bix_229 Ven 4 Juin - 15:34

En effet.
Ses qualités principales : lucidité, courage, style, humour.
D'autres auteurs africains ont aussi témoigné, mais plutot anglophones pour ce que je connais.
Et peu traduits en français.



Dernière édition par bix_229 le Ven 4 Juin - 15:34, édité 1 fois (Raison : a)
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